Je suis un papa poule. Personne ne peut donc imaginez ce que je pouvais ressentir là, en sachant mon fils malade d'une pneumonie qui peut être fatale pour un bébé de cet âge. Si, ceux qui pouvaient comprendre n'étaient autre que les parents qui ont également vécu ça. Si seulement j'avais été dans la capacité de lui arracher ce soucis... J'avais besoin de savoir mon fils bien, en bonne santé, tout comme devait l'être Seth, Jade et Ambre. Mes enfants... je ne voulais pas qu'on s'en prenne à mes enfants, ni même à ceux que j'aime. Je pensais avoir assez donné en un an et estimais donc qu'il était grand temps que les soucis quotidiens cessent. Que serait le prochain malheur sur la liste ? Il y avait de quoi péter sérieusement un câble, non ? J'aurais aimé que tout ceci s'arrête, car sincèrement, j'avais l'impression d'être malchanceux à souhait ces derniers temps.

J'avais grand besoin d'une cigarette. Le stress ne cessant d'augmenter afin de toucher un point culminant, je me devais de trouver une solution pour me calmer. Et, même si l'on n'entend uniquement parler des points négatifs de la cigarette, il n'en reste pas moins qu'elle possède quelques atouts. Sinon, pourquoi y aurait-il autant de fumeurs sur cette terre ? Et le premier point positif que j'ai pu trouver à ce petit rouleau de tabac, c'est qu'il permet de se calmer. On se retrouve avec soit même, cinq minutes, pensif. Cela nous permet de réfléchir davantage. Enfin, c'est ainsi que je le vis personnellement. Je m'arrêterais là pour les atouts des cigarettes, je n'ai pas vraiment l'esprit à ça.

En effet, Maria vient de me piquer la clope des doigts. Et, alors que j'ai cru qu'elle allait la jeter – je commençais déjà ma riposte par un froncement de sourcils –, elle la porta à ses lèvres pour tirer dessus. Mes yeux s'écarquillèrent. Mon Dieu, elle devait vraiment être dans le même état que moi, si ce n'est pire. Un homme ne connaitra jamais l'étendu de l'instinct maternel. Quoi qu'il en soit, j'avais oublié l'aspect sexy de fumer. Maria est très désirable lorsqu'elle fume une cigarette. « On verra pour les critiques plus tard. » Je récupérais la cigarette et la portais de nouveau à mes lèvres. Puis je sortais le paquet de clopes, que j'ouvrais pour le lui tendre. « Je te laisse uniquement en prendre une et c'est exceptionnel. Je suis bien placé pour comprendre que tu en ais envie. Mais ça sera la seule. » En effet, je n'avais pas envie que la brunette fume de nouveau alors qu'elle avait réussi à arrêter. Après, bien évidemment, elle faisait ce qu'elle voulait. Elle reste majeure et vaccinée. Et de ce fait, je n'ai pas réellement mon mot à dire là-dessus.

Je passais ma main sur le genoux de la brunette. « Je sais que tu es morte de peur. Si Aaron tient de moi au niveau de la santé, il tiendra aussi de moi pour le mental. Et crois moi, il va se battre pour survivre. C'est un O'Malley après tout, et O'Berkeley aussi. » Petit sourire en coin.

« Who says you can't be the best ? Would you tell me who said that ? »

Voilà donc plus d'un an que la brunette n'avait pas touché à une cigarette. Enfin non, à vrai dire, une fois sur un parking elle avait bien failli s'en griller une mais sa raison avait finalement repris le dessus et elle n'avait pas fumé. Mais aujourd'hui les choses étaient bien différentes. Aaron avait une pneumonie infantile, risquait de mourir, et eux ils étaient à attendre, impuissants face à la situation se déroulant devant leurs yeux. Qu'une telle chose se produise aurait été totalement inconcevable il a encore quelques jours, mais maintenant, c'était – pour Maria – comme s'ils devaient de nouveau prouver leur capacité à gérer des situations de crises pour alors montrer leur force. Mais comment parler de force lorsqu'il s'agit d'un enfant né il y a moins de trois mois qui souffre d'une pneumonie et qui peut en mourir ?

« C'est nous qui devrions avoir cette pneumonie. Pas lui. »

S'exclama, en rage tout en s'emparant d'une cigarette alors que son compagnon lui tendait son paquet, ouvert, lui laissant alors l'opportunité d'en prendre une à son aise. Ce n'était pas intelligent de sa part, Maria en avait bien conscience, mais présentement la brunette se fichait pas mal de savoir ce qui était bien ou mal, tout ce qui l'important étant son fils. Puis, Edward passant sa main libre sur l'un des genoux de la brunette, cette dernière le regarda alors qu'il lui expliquait qu'Aaron – s'il tenait de lui – se battrait jusqu'au bout. Et fort heureusement d'ailleurs, Maria le croyait sur parole. Ou plutôt, elle voulait le croire.

« J'espère tant que tu dises vrai. »

Avoua t-elle pour ensuite allumer sa cigarette qu'elle venait de placer entre ses lèvres Heureusement qu'Edward avait du feu sur lui. Ce n'était pas tout le cas, elle se souvenait en effet du temps où elle fumait encore et où ils venaient de se rencontrer. Sans cesse le jeune homme lui demandait si elle avait du feu. Et oui, elle avait toujours son briquet dans sa poche arrière de jeans. Une fâcheuse habitude qu'elle avait fini par perdre en arrêtant de fumer.

« Jamais je ne me le pardonnerais s'il venait à.. »

Oui, elle envisageait déjà le pire, c'était tout Maria ça en même temps. Jamais, ou en tous les cas très rarement elle voyait les choses de façons positives. A vrai dire, avec toutes les horreurs qu'elle avait connu dans sa vie, elle n'avait plus franchement la force de voir le « bon côté » des choses. Certes, depuis sa mise en couple avec Edward, elle avait également traversé de magnifiques choses, mais elle ne réussissait pas à changer sa façon de voir les choses malgré tout.

« Merci...pour la cigarette. »

Elle ne savait plus quoi dire. On l'aura tous compris.

« C'est nous qui devrions avoir cette pneumonie. Pas lui. » J'eus l'impression d'entendre ma mère. Je devais avouer que c'était plus que troublant. Ma tête se tourna donc vers la brunette, alors que je arquais un sourcil. Non, ce n'était pas ses paroles qui m'avait surpris – je pensais exactement la même chose –, mais cette formule là, j'avais entendu ma mère l'exprimer tellement de fois à mon père... A côté de cela, il était tout à faire normal que des parents pensent ça lorsque leur enfant est touché par quelque chose aux issues possiblement dramatiques. On donnerait tout pour échanger les rôles, quand notre enfant est malade. Notre chair, notre sang. Il est évident que s'infliger cette maladie à sa place n'est pas possible, sinon, j'aurais été le premier à être présent pour prendre la place d'Aaron. Mon fils. Il allait se battre, je le savais. Et puis, j'avais prévu tellement de choses à faire avec lui.

Je lui tendais le paquet de cigarettes. Elle n'hésita pas une seule seconde pour en prendre une. En temps normal, j'aurais totalement été contre le fait qu'elle s'accorde une clope, mais aujourd'hui, c'était différent. Tout était différent. Et l'un comme l'autre allions fermer les yeux sur ce petit écart de conduite. Pour ce qui est de ma consommation à moi, j'avais énormément réduit, si bien que je m'accordais une cigarette uniquement quand j'en avais besoin. Maria s'était faite une raison là-dessus et devait désormais trouver inutile de me faire une scène à chaque fois qu'elle me voyait m'en griller une. De toute façon, elle sait très bien que j'ai énormément ralenti ma consommation. C'était un petit plaisir que j'avais bien envie de m'accorder de temps à autre.

« Jamais je ne me le pardonnerais s'il venait à.. » J'observais la brunette alors qu'elle venait de tirer sur la clope. Je fis de même, et soufflais la fumée en une longue volute grisâtre. « Allez, viens par ici. », lui lançais-je en passant mes bras autour d'elle. Nous nous déplaçâmes un peu, de sorte à ce que je me retrouve derrière Maria et elle, entre mes cuisses. Mes bras s'étaient donc refermés autour d'elle, même si parfois, ma main se libérait pour porter la cigarette jusqu'à mes lèvres. Ma tête contre celle de la jeune maman, j'essayais de me montrer le plus tendre possible, et de contenir au maximum mes émotions ainsi que de canaliser mon stress et mes angoisses.

« Tu vas compter jusqu'à trois et tu reprends le dessus. À trois, notre fils ira mieux et sera hors de danger. À trois, tu arrêteras de trembler comme ça, d'accord ? » Oui, quand on a des enfants, on a tendance à trouver des petites solutions psychologiques afin de remédier aux petits chagrins. À voir maintenant si cela pouvait également marcher avec les adultes. Ce qui pouvait être en soit comique, c'est que je tente de la calmer, alors que mes mains tremblaient. « Prendre une grande inspiration, et expire tout doucement. »

« Who says you can't be the best ? Would you tell me who said that ? »

L'angoisse était maitresse de la brunette présentement, celle-ci ne pouvant s'empêcher de se dire que s'il devait arriver le pire à son fils, elle ne s'en remettrait pas. Ce qui était sans doute vrai. Comment pourrait-elle se remettre de la perte d'un de ses enfants si cela venait à se produire ? Honnêtement, il n'y avait absolument aucune chance pour que Maria avance de nouveau. Enfin, tout ceci n'avait pas encore lieu d'être, alors elle devait éviter de penser de cette manière sinon, elle allait finir par devenir complètement folle. Rien que le fait de savoir Aaron dans une sorte de couveuse avec, autour de lui, des tonnes de médecins prêts à lui faire passer toute une batterie d'examens, cela la rendait malade. Cependant, Maria préférait encore cela si les choses venaient à s'arranger au plus vite, dans le cas contraire...personne ne saurait à l'avance quelle serait la réaction des parents du petit Aaron.

Du coup, elle fumait. Chose qu'elle n'avait plus souhaité faire depuis plus d'un an maintenant. Mais aujourd'hui, plus rien ne comptait, même sa santé. Tout ce que souhaitait Maria, c'était que son fils aille bien, ce qui ne semblait définitivement pas être le cas. Et après, on s'étonnait qu'elle soit en train de fumer une cigarette ? Elle profitait aussi d'un massage de la part de son compagnon qui lui intimait de se calmer. Et en effet, Maria en avait bien besoin, cependant, elle ne s'en sentait pas véritablement capable présentement. Elle suivait ses conseils, mais rien à faire, elle mettait plus de ferveur à fumer sa cigarette qu'à tenter de se détendre. Il semblait n' avoir rien à faire pour aujourd'hui. Tant pis.

« La seule chose que je veux, c'est qu'il aille bien. Tout comme Ambre. Je ne veux pas qu'on touche à nos enfants Ed, nous d'accord, et pas eux, pas eux alors qu'ils sont incapables de se défendre face aux monstruosités de la vie. »

Les larmes se remirent à couler. Malgré tout ce qu'il essayait de faire, Edward n'était pas parvenu à rassurer sa femme. Comment aurait-il pu en même temps, lui-même n'étant pas du tout calme, mais alors vraiment pas. Terminant sa cigarette, la brunette saisit de ses deux mains celle encore libre d'Edward, et ferma les yeux en plaçant la main contre ses lèvres. Elle aurait tellement aimé que tout ceci n'arrive pas.

Ce n'est pas aux parents d'enterrer leurs enfants, mais bel et bien aux enfants d'enterrer leurs parents. Quand on donne la vie, c'est pour une longue durée. Il est donc contre nature qu'un être vivant ne meurt pas de vieillesse. Voilà la raison pour laquelle je suis présentement dans l'incapacité d'envisager le fait que la pneumonie de mon fils peut entraîner son décès. La simple phrase « Aaron va peut-être mourir » sonne terriblement faux dans ma tête. C'est comme si au final, je n'étais que le spectateur d'un mauvais téléfilm américain, ou bien uniquement face à un horrible cauchemar dont mon envie primaire est celle de me réveiller. Mais pas une seule seconde j'ai pu penser un instant que cela pouvait s'avérer vrai. Aaron va se battre. Je le verrai grandir, et c'est moi qui partirais en premier dans cette famille que nous avions fondé avec Maria quelques mois plus tôt. J'avais pour projet de le voir au moins fêter son dixième anniversaire. Après, ça sera à la brunette de prendre le relais, de l'élever comme nous le souhaitons tous les deux, de le protéger, de le conseiller dans les choix qu'il fera tout au long de sa vie. Je me plais à croire qu'il aura une très belle vie devant lui, avec plein de réussite et de bonheur. Quel parent ne souhaite pas cela pour son enfant ? On veut toujours le meilleur pour sa progéniture. Ça expliquait pourquoi nous étions si mal, Maria et moi, face à ce qu'il arrivait à notre fils.

Maria a besoin de s'exprimer. C'est pourquoi je la laisse faire. Pour ma part, je reste silencieux. Mes yeux bleus fixent un point juste en face de moi. Je m'oblige à ne pas laisser couler une seule et unique larme. Je dois être fort. C'est à la brunette de s'appuyer sur moi, et non pas le contraire. « Je sais mon cœur... je sais... » Je serre un peu plus mon étreinte autour d'elle. Je tire une dernière fois sur ma cigarette, l'écrase contre le sol, et lance le mégot dans la poubelle la plus proche avec succès. Puis je reviens passer mes bras puissants autour d'elle, si fragile. Mon côté protecteur prend le dessus. « Aller viens, on rentre se mettre au chaud. » Quelques heures plus tard, nous étions toujours présents dans l'hôpital.

Je me trouve là, dans un siège ma foi confortable et spacieux. En chaussettes, mes pieds sont posés dessus. Maria se trouve recroquevillée contre moi. Un de mes bras enroule son corps, comme si je tentais ainsi de la protéger. J'ai demandé à Sarah d'aller chercher Ambre à l'école en même temps que Seth et Jade. Elle a accepté. Le soleil commence à se coucher. Présentement, nous attendons que le médecin revienne pour nous expliquer l'état de santé de notre fils. Nous nous trouvons dans la salle d'attente et comme plusieurs personnes nous attendons. C'est à la limite du lugubre là... toutes les mines inquiètes et angoissées se ressemblent. Et alors que j'intime à Maria de dormir un peu pour que le temps passe plus vite, pour ma part, je reste à l'affût. J'observe chaque visage avec silence. C'est long. Je n'ai qu'une envie : rentrer à la maison avec ma femme et mon fils.

« Who says you can't be the best ? Would you tell me who said that ? »

Elle n'aurait su dire depuis combien de temps ils étaient dans cet hôpital. Elle ne voulait même pas le savoir. A vrai dire, tout ce qu'elle souhaitait connaître, c'était l'état de santé de son petit garçon âgée de quelques mois qui était apparemment atteint d'une pneumonie. Mais qu'avait-elle fait pour qu'une telle horreur leur tombe sur le coin du nez, comme ça ? Honnêtement, si elle avait fait la moindre chose de mal, Maria préférait devoir la payer plutôt que ça ne soit son propre enfant qui doive le faire pour elle. Mais c'était quoi ça exactement ? Depuis quand les enfants doivent payer pour les fautes de leurs parents – si faut il y a d'ailleurs ? Tout ceci était tellement injuste, Maria ne se le pardonnerait jamais, car malheureusement à ses yeux, le pire allait se produire, elle ne pouvait pas ne pas y songer, au vu de l'endroit dans lequel ils se trouvaient présentement. Tout ceci était si terrifiant, et il l'était d'autant plus pour Edward qui haïssait les hôpitaux comme un aveugle pouvait haïr le fait de ne pas voir.

« Madame O'Berkeley ? Monsieur O'Malley ? »

Se redressant en moins de deux, la brunette se retrouva debout, les bras croisés contre son corps, n'attendant qu'une chose, qu'on leur apporte une bonne nouvelle. Si seulement...les bonnes nouvelles semblaient se faire drôlement rares cette année, malheureusement. Le médecin semblait...totalement neutre ! Mais pourquoi avait-il ce visage ne laissant absolument rien paraître de ce qu'il pouvait ressentir ? C'était tellement troublant que cela donna des frissons à la brunette qui voulait savoir ce qu'il se passait réellement.

« Alors ?!! »

Lui demanda t-elle de façon un peu menaçante, il est vrai, mais ce qui était totalement involontaire de sa part. Il fallait qu'il parle, qu'il leur dise ce qu'il en était après des heures sans qu'ils n'aient eu aucune nouvelle si ce n'était les regards compatissant de quelques infirmières au courant de ce qui leur arrivait, ou plus exactement ce qui arrivait à leur petit Aaron.

« Nous lui avons fait passer une radiographie des poumons. C'était bien ce que pensions au début. »

On lui enfonçait un couteau dans le cœur, et c'était comme si on le tournait encore et encore pour la torturer progressivement, comme pour faire durer le plaisir. C'était affreux. Elle voulait simplement savoir son fils en bonne santé !! Était-ce tellement demander ?

« Nous allons le mettre sous traitement, et nous verrons demain matin. »
« Est-ce que...est-ce que vous engagez le pronostic vital ? »
« Il est encore trop tôt, mais tout dépendra de son état demain matin, c'est vrai. »

Le temps passe. On attend. On a le temps d'imaginer plein de scénarios. Et, bien évidemment, ces derniers sont tous centrés sur Aaron. Une partie où tout finirait bien. Une autre où les choses tourneraient encore plus mal, laissant au passage une famille détruite par le chagrin. Je continue d'observer les gens. Mon visage doit ressembler à celui d'un enfant malheureux. Ça expliquerait le regard compatissant des infirmières quand je croise leur regard. Ma main caresse instinctivement la cuisse de la brunette – sans arrière pensée, soyons d'accord –. C'est difficile, mais je prends sur moi. Je déteste les hôpitaux, mais je tente de ne pas trop y penser. De toute façon, je ne compte pas sortir de cet endroit sans avoir mon fils dans les bras, hors de danger. Il en est hors de question.

Puis le médecin arrive enfin jusqu'à nous. Maria ne tarde pas à se redresser et à se tenir sur ses deux jambes. Pour ma part, je me montre un peu plus réticent. L'expression sur le visage de l'homme ne semble pas être des plus joyeuses. Nous ne sommes pas dans un film. S'il y avait une bonne nouvelle, il nous aurait déjà parlé avec le plus grand des sourires, et ne chercherait donc pas à faire perdurer le suspens. J'en conclus donc que soit ils sont dans l'ignorance, soit l'issue sera dramatique. Je me redresse doucement à mon tour, et me tient à côté de la brunette. Je cherche sa main. Nos doigts s'entrelacent. Je soupire, attendant que le médecin s'exprime.

Comme tout à l'heure, je laisse Maria converser avec lui. Je me contente d'écouter, silencieusement. Mon cœur se serre puis se déchire. Ils sont dans l'ignorance. Nous nous devons d'attendre – dans cet état de stress et d'angoisse – jusqu'à demain matin, grand minimum. Je ne tiendrais jamais jusque là. J'ai besoin de voir mon fils, de le savoir en bonne santé. Je lâche la main de la brunette et m'assois sur le siège. Les jambes légèrement écartées, mes coudes sur mes cuisses, je prends ma tête à l'intérieur de mes mains. C'en est trop. Toute l'émotion canalisée durant la journée se trouve être trop importante. Je ne peux retenir les larmes noyer mes yeux.

Le médecin repart, sous prétexte qu'il doit administrer quelques soins à Aaron. Et probablement cela fut une excuse pour nous laisser tous les deux. Je serre les dents, d'énervement et de rage. Je passe la paume de mes mains contre mes yeux et mes joues pour balayer les quelques larmes. « Je suis désolé... si tu savais comme je m'en veux putain... » Oui, je m'en voulais d'être l'origine de ses problèmes de santé, comme je m'en voulais d'avoir éteint ce satané portable. Si seulement j'avais davantage pensé au fait qu'il puisse arriver quelque chose à Aaron... peut-être aurions nous pu l'emmener à l'hôpital à temps.

« Who says you can't be the best ? Would you tell me who said that ? »

Ils allaient le garder. Ils voulaient garder Aaron pour la nuit – et même peut-être pour plus. Tout cela dans le but de savoir si le bébé pouvait tenir face à cette pneumonie qui le faisait tellement souffrir. D'ailleurs, lorsqu'elle se remémorait les pleurs de son fils ce midi lorsqu'ils étaient rentrés après avoir passé une agréable matinée en amoureux avec Edward, la brunette avait tout simplement envie de pleurer une nouvelle fois, seulement elle ne le fit pas pour la simple et bonne raison que ce fut son compagnon qui craqua le premier, cette fois-ci. Jusqu'à maintenant Edward avait tout fait pour maintenir le cap, pour soutenir la mère qu'était Maria, pour faire comme si finalement tout n'était pas si grave, mais maintenant c'était de trop pour l'Irlandais qui avait fini par laisser les larmes couler le long de ses joues, trop atteint par ce qui se passait. C'était leur fils tout de même ! Et il se mettait enfin à pleurer, il laissait enfin sa peine s'exprimer, et dieu savait qu'elle avait besoin de l'être – exprimée – depuis la mort d'Alan et tout ce qui avait suivit cet horrible accident. A vrai dire, le fait de voir pleurer Edward alarma aussitôt la brunette, qui se trouvait tout aussi dévastée qu'Edward face à la situation. Ainsi, elle se dirigea aussitôt vers son compagnon, pour le soutenir comme il l'avait fait quelques heures plus tôt, lorsqu'ils étaient arrivés à l'hôpital.

« Tu n'y es pour rien. Pour rien du tout. »

Elle se mit à la hauteur de son compagnon, prit son visage entre ses mains, et d'un air sûr d'elle lui dit :

« Edward, ce n'est pas ta faute, d'accord ? Notre fils est malade, mais tu n'y es absolument pour rien. Mon dieu non, et encore, je préfèrerai que ce soit de notre faute. Mais ça ne l'est pas. »

Cela dit, Maria agrippa l'une des mains d'Edward, et le fit se lever. Elle l'emmena hors des lieux, pour parler, car ils en avaient besoin. Ils avaient besoin d'en parler, même si la situation était la pire qu'ils aient connu jusqu'alors. Ils n'avaient vraiment pas besoin de tout ce qui se passait, mais malheureusement ils n'avaient pas franchement le choix sur les évènements.
Une fois qu'ils furent dans un endroit plus calme, Maria prit son compagnon dans ses bras, comme si elle avait en face d'elle d'un enfant, et qu'il avait simplement besoin d'être réconforté, consolé. Il était épuisé, mentalement comme physiquement par ses dernières heures passées dans l'hôpital. D'ailleurs, Maria n'était pas idiote et savait qu'il avait besoin de quitter l'hôpital, même le temps de quelques minutes.

« On va sortir, d'accord ? Ça nous fera du bien. »

Elle le tira par la main et l'emmena en dehors, dans le parc de l'hôpital. Le General Hospital de San Francisco était un hôpital très agréable, bien-sûr mais cela n'empêchait en rien qu'Edward – et finalement Maria aussi – se sente extrêmement mal dans les locaux. En même temps, rares étaient les personnes qui se sentaient vraiment bien dans un hôpital. A la rigueur, les médecins et tout le personnel médical, mais ça devait s'arrêter là.

« Regarde-moi... »

Elle prit de son nouveau le visage de son homme entre ses mains, et l'embrassa pour lui remonter un minimum le moral. Ou pour remonter le sien, elle n'en savait présentement plus grand-chose. Tout ce que Maria savait encore, c'est qu'elle avait peur de perdre son fils, Edward aussi, et ils avaient besoin de se consoler.

Je m'en voulais de craquer maintenant, alors qu'il fallait que je soutienne Maria. J'avais réussi à le faire depuis notre arrivée à l'hôpital, même avant, quand nous avions découvert Aaron en mauvais état, à la maison. Et c'est maintenant que je laissais ma peine s'exprimer ? Je m'en voulais oui. Ce n'était pas le moment de craquer. La jeune maman avait besoin de moi, de me voir fort pour lire un peu d'espoir dans mes yeux. Et pourtant je reste un être humain. Une maladie vient de toucher mon fils, mon bébé. Dans le fond, ça paraissait normal que je sois touché par la situation. Mais j'aurais préféré laisser exprimer ma peine plus tard, quand Maria se serait éclipsée un instant. Je déteste pleurer devant elle, elle le sait très bien. C'est mon petit côté macho qui semble ressortir. Je veux prendre soin des miens, je veux me montrer fort... ''seulement'' ça.

Maria ne tarda pas à venir vers moi, afin d'échanger les rôles et donc de chercher à me réconforter. Oui, dans le fond, j'en avais peut-être besoin. Elle prit mon visage entre ses mains. Et alors que je fuyais son regard, je me retrouvais dans l'obligation de rencontrer ses yeux magnifiques. Bien évidemment, elle tenta de m'expliquer que ce n'était pas ma faute, même si je n'avais pas le même point de vue qu'elle et que je me tenais comme en partie responsable de ce qu'il pouvait arriver à notre fils, au niveau de sa santé. Puis, quelques minutes plus tard, je me retrouvais à l'extérieur des locaux de l'hôpital, plus précisément dans les jardins de ce dernier.

Pleurer signifiait tellement de choses. Outre le fait que ça me fasse passer pour un grand émotif, chose que je détestais, laisser les larmes couler le long de mes joues faisaient clairement comprendre à Maria mon inquiétude et mes angoisses. Depuis tout à l'heure, je tentais de lui expliquer que Aaron allait s'en sortir, qu'il se battrait de mieux qu'il le pouvait pour mener plus tard une belle vie. Pleurer, c'était lui faire comprendre que je n'avais pas vraiment crû mes propres paroles, que je lui avais menti pour essayer de la rassurer. Maintenant, la jeune maman allait vraiment angoisser à l'idée de perdre son fils... notre fils. Et ça, je ne me le pardonnerais jamais. J'avais envie qu'elle garde de l'espoir, que je lui fasse croire que tout était déjà décidé : que Aaron vivrait. Je venais de tout foutre en l'air. Ce fut la raison pour laquelle, lorsque je me retrouvais dehors avec la brunette, je n'allais pas mieux du tout.

Elle prit de nouveau mon visage entre ses mains. « Regarde moi... » Puis elle vint déposer ses lèvres sur les miennes. Nous partageâmes un baiser. Enfin je passais mes bras autour d'elle, en calant mon visage contre son cou. Je reniflais. Quelques secondes plus tard, je m'écartais légèrement d'elle pour lui tourner le dos. Mes mains glissèrent contre mes yeux pour y chasser les larmes. Je pris une grande bouffée d'air frais pour reprendre un rythme cardiaque décent, puis me redressais. Je tournais les talons. « Désolé pour le petit moment de faiblesse. Ça ira mieux maintenant. » Quand l'enfant veut jouer l'homme...