« Tu peux toujours compter là-dessus. » Comment ça ? Ah ! Elle semblait amusée à l'idée de me voir porter une nuisette. Qu'elle profite de cette pensée, car jamais au grand jamais elle ne me verra déguisé en fille. Beaucoup d'hommes s'amusent, lors de soirées ou journées déguisées à s'habiller en femme. Personnellement, ça ne m'a jamais traversé l'esprit de faire de même. Je tiens certainement trop à ma virilité. Peut-être parce qu'on m'a déjà dit que j'étais féminin parfois dans mon comportement, dans la mesure où j'étais romantique, doux et sensible. Finalement, je misais beaucoup sur l'apparence pour faire comprendre que j'étais un mec pur et dur, hétérosexuel, et tout ce qu'il y a de plus masculin. Oh je n'ai absolument rien contre les gays, je les adore, mais je n'en suis pas un. Ce que je déteste vraiment, ce sont les folles qui sautent sur tout ce qui bouge. Je n'irais jamais lever la main sur eux pour cette raison, mais, comme les demoiselles avec l'esprit salope qui écartent les cuisses à tout va, je ne les fréquente pas, tout bonnement car elles me répugnent.

Je l'observais dans les yeux, avec ce petit sourire enfantin et involontairement charmeur qui m'était propre. Je caressais sa joue du bout de doigts, les laissant finalement glisser sur les traits de son visage, comme j'avais parfois l'habitude de faire. Ainsi, mon index débuta avec délicatesse son voyage sur l'arête de son nez, avant de passer sur sa lèvre supérieure, pour enfin descendre jusqu'à sa bouche et son menton. « Merci, d'être venu. », m'avouait-t-elle, ce qui m'amusa tout en me faisant sourire, touché par ses paroles. « Merci de ne pas m'avoir mis à la porte. », répondis-je avec un certain sérieux, tout de même mêlé à une petite pointe d'humour peu perceptible. J'approchais mon visage du sien et déposais mes lèvres sur les siennes dans un bref mais doux et délicieux baiser qui dura quelques secondes. « Bonne nuit. » Ma voix était basse et donc plus grave, plus rauque et cassé, ceci étant dû à la fatigue. Je me calais doucement contre elle et mon visage trouva refuge contre sa tête. Je ne pris pas longtemps du tout à m'endormir. Le manque de sommeil aidant, la présence de Maria m'acheva. Je pouvais dormir avec une tranquillité plus visible, mais pas totale. Assez pour que je tombe dans les bras de Morphée en cinq minutes à peine.

Je me suis réveillé à plusieurs reprises cette nuit, mais retombais bien rapidement dans mon sommeil. Je ne pouvais pas vraiment expliquer cela, pourtant, ça m'arrivait assez souvent. Oui, un sommeil découpé. Je pouvais me réveiller toutes les unes ou deux heures, pour cinq minutes. Je ne pouvais rien y faire. Ainsi, je constatais bien rapidement, quand j'ouvrais de nouveau les yeux, que j'étais désormais seul dans le lit. Pourtant, il faisait encore nuit. Fronçant les sourcils, et me tirant rapidement de mon sommeil, je me demandais où était passée Maria. Tournant la tête vers le radio réveil qui inscrivait en chiffres rouges 04:27, ça me surpris davantage. Peut-être était-elle malade ? Et, même si j'étais encore fatigué, j'étais incapable de ne pas prêter attention à l'absence de la brunette. Ainsi, je me levais, enfilais mon jean et ma chemise, pour finalement sortir de la chambre, un peu à l'aveuglette. Finalement, je la découvris sur une chaise, à l'entrée de la maison. « Chérie ? », l'interpellais-je doucement, pour ne pas réveiller ses parents. Elle tourna la tête vers moi. Pour ma part, je passais mes mains, en formant des poings, contre mes yeux pour les frotter comme un enfant. « Aïe... ! » Et bim, l'œil au beurre noir, je l'avais complètement zappé. Crétin... Le résultat devait être beau tiens...

« Qu'est-ce que tu fais déjà debout ? Il est encore tôt. », lui lançais-je alors que je m'étais approché d'elle. Passant derrière elle, je déposais un tendre baiser sur sa joue puis passais mes bras autour de ses épaules, doucement, afin de lui faire un petit câlin. Oui... pour ma part, je dormais un peu sur place, mais j'étais encore fatigué.

L'air frais était on ne peut agréable présentement. Elle ne portait qu'un long tee-shirt d'homme sur elle, mais cela lui convenait tout à fait, il faisait bon selon elle, aucune crainte à avoir quant au fait possible de tomber malade donc. Le soleil était encore bien loin de se lever, mais qu'importe, elle se sentait bien présentement, bien qu'elle manque quelque peu de sommeil malgré tout. Soupirant, Maria porta sa tasse café fumante à ses lèvres et savoura simplement le simple fait de pouvoir boire de cette boisson chaude. La veille, ça mère lui avait formellement interdit, d'où le fait qu'elle ose en profiter en ce moment, elle était sûre que sa mère ne se lèverait pas maintenant. Observant face à elle, la brunette figea sans réellement le vouloir son regard sur le reflet de la lune quasi pleine dans l'eau de la piscine. La piscine...il s'en était passé des choses cet été dans cette fameuse piscine, mais il n'était nullement nécessaire de se remémorer les faits. C'est alors, perdue dans ses pensées, la brunette fut brutalement ramenée à la réalité en entendant la voix de son compagnon l'interpeller avec douceur. Tournant la tête, elle le vit, le visage fatigué qui se rapprochait d'elle, cela lui étira un petit sourire, il était mignon lorsqu'il se réveillait car on aurait véritablement dit un petit enfant qu'on venait de réveiller pour x raison.

« Je n'arrivais plus à dormir. »

Lui expliqua t-elle simplement alors qu'il venait de lui demander la raison pour laquelle elle se trouvait en ce moment ici et non pas à ses côtés, dans la chambre en train de dormir. Sachant qu'ils allaient reprendre la route d'ici quelques heures pour rentrer en Californie, la brunette souhaitait aussi pouvoir profiter de cette vue qui, finalement, lui manquait quelque peu de temps en temps. Non pas qu'elle veuille revenir vivre dans le Nevada, alors ça certainement pas, seulement revenir ici lui faisait plus de bien qu'elle ne l'aurait pensé il y a quelques mois encore.

« Quand j'étais petite, la nuit il m'arrivait de me réveiller en pleine nuit après avoir fait un cauchemar, ou quelque chose dans ce genre. Et je ne voulais surtout pas fermer les yeux à nouveau pensant que j'allais encore faire ce même cauchemar, alors je me levais, je traversais la maison sur la pointe des pieds pour ne réveiller personne, et je venais ici, ou juste au bord de la piscine, et je réfléchissais. Enfin, à cette époque, je rêvais plutôt que je ne réfléchissais à vrai dire. Il m'arrivait parfois de n'avoir dormi que quatre heures, mais ça ne me dérangeait pas plus que cela, j'avais passé un excellent moment, seule ici...preuve qu'il ne m'en fallait pas énormément à l'époque pour me sentir bien. »

L'embrassant sur la joue, la brunette déposa sa tasse café à terre avec délicatesse évitant de cette manière à renverser la fameuse tasse.

« Assis-toi. »

Elle se leva, le laissant de cette façon venir prendre place dans le rocking-chair pour ensuite venir s'asseoir sur ses genoux et reprendre sa tasse de café en main. Là, c'était parfait.

« Je n'arrivais plus à dormir. », me répondit-elle alors que je lui demandais la raison pour laquelle elle était debout à cette heure-ci. J'étais bien placé pour savoir que lorsque l'on se réveille tôt, il n'est pas très amusant de regarder le plafond pendant des heures, en attendant bien sagement que le jour se lève pour faire une quelconque activité, sans avoir l'air d'un fou furieux en pleine rue. C'était une des raisons pour lesquelles, avant, j'étais déjà debout à six heure du matin, dans San Francisco, en train de faire mon footing quotidien. Je commençais doucement à m'y remettre, faisant de bien moins grandes distances. Le fait de courir me manquait énormément, mais c'était difficile ces temps-ci dans la mesure où lorsque je faisais un trop gros effort, mes jambes avaient tendance à me lâcher. Je détestais ça, et c'était la raison pour laquelle je faisais de mon mieux pour habituer mon nouveau cœur à une forte activité sportive. C'était une question de mentale à mes yeux, rien de plus. J'ai tendance à croire que le corps peut faire mille et une chose à condition que le cerveau soit d'accord. Et ça, ça s'appelle « se surpasser ». Cela exaspérait parfois Maria mais que voulez-vous ? J'ai toujours aimé le sport depuis que je suis gamin, ce n'était pas à trente six ans que j'allais changer. J'en faisais moins aujourd'hui parce que je n'avais pas le choix. Ce n'était pas l'envie qui me manquait, mais plutôt les capacités physiques. Dans peu de temps, tout cela sera résolu.

Finalement, alors que je calais ma tête au-dessus de la sienne, elle m'expliqua que lorsqu'elle était petite, il lui arrivait de venir ici quand elle n'arrivait pas à dormir la nuit. Les souvenirs d'enfance que voulez-vous. Tout ceci lui manque, c'est normal. J'eus un petit pincement au cœur. En effet, son petit moment de nostalgie me remémorais à mon tour mon enfance en Irlande. Malheureusement, je ne pouvais pas m'y réfugier sans dépenser une fortune pour prendre l'avion, et être à des heures et des heures de vol. Pourtant, j'aurais adoré pouvoir retourner là-bas, finir ma vie sur mes terres natales. Malheureusement, ce n'était plus possible. Mes enfants étaient habitués aux États-Unis et de toute façon, Sarah n'aurait jamais été d'accord pour qu'on les emmène là-bas, et encore moins qu'elle soit loin d'eux. De plus, Maria était désormais ma compagne. Je ne pouvais pas lui demander de m'accompagner en Irlande. Toute sa vie était ici. Pourtant, ça restait un de mes rêves. Mais ce dernier ne sera jamais accompli. Parfois je m'en voulais d'avoir accepté de venir jusqu'ici avec Sarah. D'un autre côté, cela aurait signifié ne jamais connaître la brunette. Ça, je ne pouvais pas le permettre. Tout était compliqué. Si je n'avais eu aucune attache, ni aucune obligation, j'aurais sauté dans le premier avion pour rejoindre mon passé, toute le reste de ma vie.

« Assis-toi. » Elle me sortit de mes pensées. Je l'observais se lever de la chaise pour que j'y prenne place. Je ne me fis pas vraiment prier, alors que Maria prenait place sur mes genoux. Je passais ma main sur sa cuisse. Ah saleté de mal du pays. J'évite de trop y penser. Mais c'est dans ce genre de moment où le sujet prend possession de tout mon esprit. Je déteste ça et pourtant... pourtant je ne peux rien y faire. Un lavage de cerveau peut-être ? Ou bien être victime d'amnésie pour tout mon passé avant mon arrivée à San Francisco ? Ce n'était pas possible. Je restais un instant silencieux, me contentant de déposais mes lèvres sur son épaule, plus précisément sur mon T-shirt qui était désormais imprégné de l'odeur de la jeune femme. « Je comprendrais que tu es envie de rester quelques temps chez tes parents tu sais. Si j'avais cette chance, je pense que j'en profiterai... » Après tout, ça lui ferait peut-être le plus grand bien, non ? Si c'était le cas, je retournerais tout seul à San Francisco. Pour sa part, elle prendra quelques vacances bien méritées. Je ne pouvais pas lui en vouloir pour ça. D'ailleurs, ça ne pourrait que me faire plaisir de la savoir heureuse.

Revenir à Las Vegas lui donnait toujours ce même vague à l'âme, comme un rituel, Maria se sentait toujours quelque peu étrange lorsqu'elle voyait cette fameuse indication sur la route qui montrait en direction de la ville où elle était née et où elle avait également passé toute sa jeunesse jusqu'à couper le cordon avec ses parents. Peut-être l'avait-elle coupé un peu trop vite ce cordon d'ailleurs. Qu'en savait-elle au fond ? Tout ce dont elle était capable de témoigner la concernant elle et son passé était bien le fait qu'avoir quitté la ville du péché lui avait fait autant de mal que de bien. Elle s'était affirmée entant que femme sûre d'elle, cependant l'amour maternel lui manquait parfois, pour ne pas dire bien souvent. D'où peut-être ses déboires lors de ses années de médecine qu'elle a fini par arrêter après s'être rendue compte qu'elle dérapait complètement. Pendant longtemps Maria avait associé ses fameux déboires au fait d'avoir été éloignée de ses parents trop rapidement. Seulement, tout en songeant au fait qu'elle ait souhaité partir, elle ne savait plus réellement si s'en était alors la véritable raison. Qu'importe, quoiqu'elle ait pu faire dans son passé, il l'avait amené jusqu'à là, dans les bras d'un homme formidable, qu'elle aimait par dessus tout, avec qui elle se sentait également en sécurité. Oh, bien-sûr elle avait vécu bien des drames dans le passé, mais au final, peut-être que cela payait à l'heure actuelle, après tout Maria était heureuse dorénavant, alors oui, toutes ces horreurs qu'elle avait enduré avaient finalement payé. Oui, enfin.

« C'est vrai que j'aimerai bien, mais l'université ne va pas tourner toute seule. J'ai été déjà assez stupide de partir comme ça, en la laissant aux mains des surveillants...en te laissant toi. »

Détournant un tout petit peu la tête pour l'apercevoir, Maria cru voir dans le regard de l'homme qu'elle aimait comme une pointe certaine de mélancolie. La fin de sa phrase n'était pas anodine, et si il l'avait dite c'est parce qu'il souhaitait sans aucun doute dériver sur un point bien précis. Et ce point était sans doute une île, et plus précisément l'Irlande. L'embrassant dans le cou, elle se cala bien confortablement contre Edward et inspira un grand coup profitant alors de l'air frais du petit matin arrivant progressivement.

« Qu'est-ce que tu dirais de passer Noël à Dublin ? »

Bien que sa question puisse paraître insensée, Maria y songeait à vrai dire déjà depuis un moment maintenant. Ayant bien conscience que son homme soit en manque de son pays, et ne sachant en aucun cas si Edward comptait y aller ou non, la brunette avait pensé qu'au vu du fait qu'ils partiraient vers fin Novembre en France, et bien ils pourraient très bien prendre un vol le 24 Décembre en direction de Dublin.

Je pouvais clairement comprendre que Maria veuille passer quelques jours ici, à Las Vegas. Cela lui permettrait de prendre un peu de vacances, de souffler en s'éloignant du travail et des problèmes à côté pour quelques temps. Elle pourrait profiter un peu plus de ses parents et retrouver l'univers où elle avait grandi. Pour ma part, effectivement, si j'avais cette chance, je n'hésiterais pas une seule seconde. Je prendrais mes affaires, sauteraient dans le premier avion et irais prendre un grand bol d'air frais dans le pays du trèfle à quatre feuilles. Donc, même si elle me manquerait énormément et que je la harcèlerais au téléphone pour avoir de ses nouvelles plusieurs fois par jour, je sais que ça lui ferait du bien. Comment lutter contre ça ? Elle en avait besoin quelque part et cela se voyait. « C'est vrai que j'aimerai bien, mais l'université ne va pas tourner toute seule. J'ai été déjà assez stupide de partir comme ça, en la laissant aux mains des surveillants... en te laissant toi. » J'eus un très vague sourire, tellement fin qu'elle ne put même pas le voir. Je sentis ses lèvres dans son cou, ce qui me fit fermer un peu les yeux tant c'était agréable. Je n'avais pas envie qu'elle se prive de quelques jours ici de peur que l'université ne puisse pas survivre sans elle. L'établissement pouvait se passer de sa présence quelques jours tout de même. Je pouvais y veiller personnellement et puis... il y avait aussi un directeur pour ça. Non sincèrement, si elle avait ce besoin de se ressourcer ici, il fallait qu'elle le fasse, qu'elle me revienne heureuse, souriante, pétillante. Son bonheur passait avant le mien. Je souhaitais qu'elle se porte le mieux possible. Et puis, mine de rien, ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas été toute seule, c'est à dire sans que je ne sois dans les parages. Et même si je ne doutais pas du fait que j'allais lui manquer, ça lui permettrait de retrouver un semblant d'intimité total.

Elle ne me laissa même pas le temps de répondre qu'elle reprenait déjà la parole. « Qu'est-ce que tu dirais de passer Noël à Dublin ? » J'écarquillais les yeux en entendant sa question. D'un coup, ma tête tourna vers elle pour l'observer. « T'es sérieuse ? » Oui, Noël. J'y pensais depuis un petit bout de temps déjà et je ne trouvais pas de solution. Après tout, Maria et moi venons de deux mondes totalement différents. Chacun de nous allait vouloir passer les fêtes avec sa propre famille. Le pire dans tout ça, c'est qu'il n'était pas possible de réunir tout le peuple O'Malley et le peuple O'Berkeley. Ça coûterait une fortune. Donc, soit je me sacrifiais, et je passais les fêtes avec la famille de la brunette. Soit c'était elle qui se sacrifiait. Soit, dernière solution, on passait ce moment chacun de notre côté, ce qui était assez... inenvisageable... J'étais sur le point de me préparer psychologiquement à me passer de mes enfants, de mes parents, de mes frères et sœurs, de mes neveux, nièces, cousins, filleuls, tantes, oncles et tous le réseau irlandais en somme, pour Noël. Ça me faisait mal et pourtant, passer les fêtes en Irlande signifiait que c'est Maria qui souffrirait un peu... Il n'y avait que nous de toute façon pour se mettre en couple avec une personne qui vient de l'autre bout de la Terre... « Tu... tu veux bien ? Vraiment ? » Mes yeux pétillaient comme ceux d'un enfant sur le point d'ouvrir ses cadeaux. Oh oui... j'avais vraiment envie de pouvoir passer Noël là-bas. Je ne sais pas si elle savait à quel point j'y tenais. Mais contrairement à Las Vegas, l'Irlande est beaucoup plus lointaine et on ne peut pas y aller comme ça, sur un coup de tête. « Merci mon cœur... ça me fait plaisir... », lui avouais-je avec sincérité, alors que je passais mes bras autours d'elle pour la serrer doucement contre moi. On inversera l'année prochaine, nous passerons Noël ici. Après tout, c'était normal.

Je caressais machinalement son bras nu, alors que je reprenais la parole. « Et... tu peux rester quelques jours ici. Tu n'as qu'à dire qu'un de tes proches est souffrant, ou bien que tu dois prendre un congé pour telle ou telle raison. L'université ne sera pas détruite ou bien ne connaîtra pas une troisième guerre mondiale sous prétexte que tu n'es pas là pour quelques jours. » Je la regardais un instant dans les yeux et lui adressais un petit sourire en coin, un tantinet charmeur. « Tant que ça peut te faire du bien c'est le principal pour moi. »

Maria savait combien Edward était proche de ses parents ainsi que de ses frères et sœurs. Qui était-elle pour le priver d'une fête de fin d'année avec ses proches franchement ? Maria savait qu'il avait déjà un sérieux mal du pays, et elle s'en inquiétait suffisamment pour en plus penser à fêter Noël ici, aux États-Unis. Si c'était pour voir son compagnon malheureux durant cette période, alors là, certainement pas, elle refusait clairement de le voir mal. Edward était bien trop important pour Maria pour qu'elle ose penser un seul instant à ne pas lui faire plaisir, comme en passant les fêtes de fin d'année avec ses beaux-parents. Après tout, voir l'Irlande sous la neige, ça devait être magnifique, alors pourquoi ne pas avoir la chance de participer à un si beau spectacle ? Évidemment, les parents de la directrice allaient sans doute peu apprécier le fait de ne pas avoir leur fille aînée autour de la table cette année. Mais connaissant sa mère, Maria savait qu'elle ferait en sorte de rassurer tout le monde et qu'elle serait sans aucun doute la première à comprendre son choix. Ce ne serait pas contre eux, ce serait simplement pour faire plaisir à l'homme qu'elle aimait qui en avait suffisamment vécu cette année. Il avait bien le droit de retrouver les siens aussi.

« C'est le moins que je puisse faire, après tout ce qui s'est passé cette année, je pense que tu as largement le droit de voir tes parents ainsi que tes frères et sœurs. Et puis...on sera en Europe de toute manière à ce moment-là. Je nous vois mal ne pas nous rendre chez tes parents alors qu'on sera à quoi ? Allez, une heure et demie en avion de chez toi. Autant que l'on passe Noël là-bas. Par contre, je risque de rentrer avant toi pour passer le nouvel an avec mes parents. »

Maria savait que bien souvent, Ève et Dimitri préféraient passer le nouvel an en amoureux alors ils laissaient leur fils chez ses grands-parents et filaient en amoureux pour profiter d'un moment en couple. Résultat, Maria, ses parents et Noah restaient ensemble. Seulement là, si elle n'y allait pas, ils allaient se retrouver seuls avec le petit et elle savait parfaitement qu'ils allaient très mal le vivre.

« Je ne veux pas les laisser seul le soir du nouvel an. Ça leur ferait trop de mal, et je culpabiliserai, je me connais. »

Bien qu'elle ait coupé le cordon avec ses parents, la brunette ne cherchait pas non plus à rendre ses parents malheureux, ah non, certainement pas. Nathan lui en voudrait, et Lisa...oh Lisa elle, elle le vivrait mal mais elle préférerait protéger sa fille, et donc elle ferait comme si tout allait bien alors que ça ne serait vraiment pas le cas.

« Mais pour Noël, je te promets qu'on le passera à Dublin. »

En effet, cette année n'avait pas été de tout repos. L'année 2010. Année de l'amour et de la peur également. J'avais bien failli y laisser la vie. J'en ai conçu une nouvelle. J'ai retrouvé l'amour auprès d'une femme que je peux considérer comme mon âme-sœur, nous sommes meilleurs amis et amants. J'habitais dans un tout nouvel endroit. San Francisco... Toute ma vie avait basculé en un an. Tout avait changé. J'étais loin de chez moi. Je n'étais plus marié à Sarah. J'avais retrouvé l'amour en une autre personne, ce que je pensais impossible. J'avais enfin pris une décision pour ma santé. J'avais un nouveau cœur. Beaucoup d'émotions. Beaucoup de changements. Espérons que les prochaines années seront plus calmes. Je voulais désormais devenir cet homme pantouflard, amoureux et serein. Ce qui est sûr, c'est que l'année 2010, j'allais m'en souvenir jusqu'à la fin de mes jours.

Elle m'expliqua par la suite qu'elle rentrerait plus tôt que moi afin de fêter le Nouvel An avec ses parents. Ah ? « Je ne veux pas les laisser seul le soir du nouvel an. Ça leur ferait trop de mal, et je culpabiliserai, je me connais. » Je caressais son bras avec délicatesse. Pouvais-je me joindre à elle ? J'aurais le temps de faire la fête comme il se doit avec mes amis et ma famille. Ainsi, je pouvais tout aussi bien prendre l'avion avec la brunette pour que nous passions cette dernière fête de l'année en Amérique du Nord avec sa famille. « Je pourrais me joindre à vous ? Enfin... sauf si vous voulez faire ça entre vous. Sinon, je t'embrasserais avec plaisir sous du gui. » Je lui adressais un tendre sourire avant d'approcher doucement mon visage du sien, jusqu'à ce que mes lèvres se posent sur les siennes pour partager avec elle un baiser.

Je pensais un instant aux Noëls en Irlande. De quoi faire rêver n'importe qui, petits et grands. Je gardais mes bras autour de la brunette. « Tu vas adorer Noël en Irlande. Normalement, là-bas, ça commence le douze décembre. On appelle cette période le « Little Christmas » Le vingt-quatre décembre, la tradition veut que les irlandais se retrouvent dans des pubs, pour boire une pinte de Guiness. On regarde un match de hurling. Ils passent plein de musiques pour la fête. On parle, on mange, on s'amuse. Tu as la messe de Noël pour les croyants. Et surtout, il ne faut pas oublier le verre de Whisky pour le Père Noël et des carottes pour les rennes. » Je laissais un léger rire s'échapper de mes lèvres en voyant la tête que Maria affichait. Bon d'accord, il fallait avouer que l'image de bons buveurs que l'on peut donner aux irlandais n'est pas totalement fausse. Mais que voulez-vous ? Les traditions, ce sont les traditions ! « Tu pourras goûter les Mince Pies et le Plum Pudding de ma mère. C'est extra. Mh... la tradition veut aussi que le jour de Noël, le plus jeune allume une bougie à la fenêtre en l'honneur de Marie et de Joseph. », petit sourire. La brunette savait que je n'étais pas vraiment croyant contrairement à mes parents. Il n'empêche que c'est comme faire une crèche. On la fait, sans trop y croire. « Et, le vingt-six décembre, il y a le Stephen's Day. C'est un jour férié en Irlande, pour prolonger les plaisir de Noël. On assiste à des courses de chevaux, on pari, on boit, il y a aussi des spectacles dans les rues. » Bon Dieu, c'est vrai que l'on boit beaucoup... Ah mais nous, irlandais, nous avons un foie très résistant ! Que de vices de toutes façons. Les traditions font tomber les plus jeunes dans l'alcool, les jeux d'argent et j'en passe. Oh, pas à l'excès bien sûr ! C'est ce qui fait le charme de notre pays. Maria devait se dire que notre enfant risquait de finir comme tout bon irlandais. Ahah ! Elle pouvait compter là-dessus, ça sera un O'Malley, elle ne pourrait pas lutter contre ça.

« Bien-sûr que tu pourras venir, mes parents seront ravis de te voir. Tu dois certainement te dire qu'avec la réaction de mon père hier soir, il y a peu de risques qu'il veuille de toi au nouvel an, mais détrompe-toi je compte bien faire en sorte que vous ayez une discussion avant qu'on prenne la route. Il n'est pas méchant...il...il a juste souhaité me protéger. »

C'est alors qu'Edward se mit à lui parler de ce qui se passerait certainement durant Noël chez ses parents. Ça semblait formidable, bien qu'un petit détail venait de faire tilt à la brunette. L'église. Ils allaient certainement aller à l'église. Sauf que...Maria était juive, alors l'église, et bien ce n'était pas pour elle, de toute façon, elle ne pratiquait pas, alors elle n'irait certainement pas dans une synagogue pour Noël. Déjà, Noël ne se fêtait pas chez Maria, à vrai dire étant juifs les O'Berkeley fêtent Hanoukka, la fameuse fête des lumières. Un moment très importants dans n'importe quelle famille juive, une semaine durant laquelle on s'échange des cadeaux, chaque jour pendant sept jours donc.

« Est-ce que...enfin, ma question va te paraître totalement inappropriée seulement...tu es catholique, n'est-ce pas ? Parce que étant juive, Ed, si vous allez à l'église tu comprendras que je ne m'y rende pas avec vous... »

A bien y réfléchir, s'ils allaient à Dublin pour Noël, ce serait la première fois que Maria n'allumerait pas le chandelier à huit branches de ses parents. Ce serait la première fois...waouh, ça ça tenait vraiment du changement ! Et le fait est qu'en s'en rendant compte, la brunette se sentait toute drôle. Enfin, ce n'était pas si grave, ce n'était qu'un Noël après tout, elle en aurait plein d'autres à fêter dans les années à venir, avec leur enfant, Ambre, Seth et Jade...et tout le monde, enfin ça ce serait dans le meilleure des cas, évidemment.

« Je leur dirai tout à l'heure. Mais par contre, si tu veux bien, je préférais le faire seule. »

Elle ne se voyait pas annoncer à ses parents qu'elle ne serait pas à leurs côtés pour Noël avec Edward tout en sachant qu'elle faisait ça pour lui. Nathan l'assassinerait certainement sur place. Ou pas...enfin, Maria ne savait pas réellement comment elle allait pouvoir gérer la réaction de son père lorsqu'elle leur dirait qu'elle ne serait pas présente pour Hanoukka. Elle risquait d'en prendre pour son matricule connaissant son père.

Nous n'avons quasiment jamais abordé le sujet de la religion. Je savais uniquement que Maria était juive. Elle, elle me savait catholique de famille, bien que, malgré baptême et communion, je ne crois pas en Dieu. Une religion avec tant de... de faits étranges. Sincèrement, si Marie et Joseph étaient mariés, comment se fait-il qu'elle était encore vierge ? Et puis, j'imagine tellement le pauvre homme qui voit sa femme enceinte, alors qu'il n'a jamais pu lui faire l'amour. Il lui demande « Mais de qui es-tu enceinte ? » et elle répond : « De Dieu ! ». Non mais vraiment... j'aurais vraiment eu l'impression à sa place, qu'elle me prenait pour un con. Enfin, à moins que ça ne soit vrai, Joseph était naïf et totalement cocu. Bref... je me suis toujours posé ce genre de questions quand on m'a obligé à faire du catéchisme. On ne te demande pas ton avis, on te l'impose. Pour ma part, mes enfants n'en font pas, ce que me reproche parfois mes parents. Si plus tard, ils souhaitent pratiquer, pourquoi pas ? S'ils veulent avoir une autre religion, c'est leur choix. Là-dessus, je laisse le champs libre. Sarah est de mon avis, donc tant mieux.

« Est-ce que... enfin, ma question va te paraître totalement inappropriée seulement... tu es catholique, n'est-ce pas ? Parce que étant juive, Ed, si vous allez à l'église tu comprendras que je ne m'y rende pas avec vous... » Ainsi, je ne m'étais pas attendu à ce qu'elle me dise cela. Mais effectivement, c'était un point que nous viendrons à aborder assez souvent comme lors du mariage. Devrait-on faire un mariage religieux ? Car oui, demander à Maria de m'épouser faisait toujours parti de mes projets. J'attendais juste que le bon moment arrive. Je penchais davantage pour lui faire cette demande à Paris. Après tout, c'est la ville des amoureux, non ? Mais j'avais peur que ça fasse trop cliché. Je voulais que tout soit parfait, romantique. D'un autre côté, ça me donnait l'impression d'être un idiot fini. Bref... « Bien sûr que je comprends. Je ne vais jamais à l'église de toute façon. Donc je resterais avec toi. » Les messes, très peu pour moi. Quand j'étais petit, j'avais l'impression qu'une heure, c'était une éternité. Vers midi, je crevais royalement la dalle et la seule chose qu'on pouvait te donner à manger, c'était « le corps du Christ ». Un goût de carton. Mouais... J'aurais préféré que le corps de Jésus soit des lasagnes... Quoi qu'il en soit, je ne jugeais pas ceux qui pouvaient y croire. Qu'importe la religion. C'est un choix. L'homme a ce besoin de croire en une force supérieure pour expliquer l'inexplicable. Et je suis persuadé que, lorsque la science aura atteint son sommeil, quand elle pourra tout expliquer de manière logique, les religions n'existeront plus, à moins bien sûr, qu'une d'elles existe. Mais ça, bien sûr, ce sont les paroles d'un non croyant, ou plutôt d'un homme qui a une certaine dent contre celui que l'on appelle couramment « Dieu ». Après, les gens peuvent pratiquer catholicisme, orthodoxie, protestantisme, sunnisme, chiisme, vajrayãna, theravada, mahayana, religions chinoises, africaines, hindouisme, judaïsme et j'en passe, ça ne fait pas d'eux, à mes yeux bien sûr, des salops ou bien des braves gars. Le plus amusant dans toute cette histoire, c'est que, étant archéologue à mi-temps, mes recherches sont basées sur les civilisations antiques, anciennes. La religion y a une grande place. Je trouve ça fascinant, bien que je reste neutre sur mes choix personnels à ce sujet.

Mon regard se déposa sur le visage de la jeune femme. Quelque chose la tracassait. « Je leur dirai tout à l'heure. Mais par contre, si tu veux bien, je préférais le faire seule. » Je me sentis assez mal à l'aise. Je sentais que quelque part, ça ennuyait la brunette de ne pas fêter Noël avec sa famille, alors que j'étais tout bonnement en train de me réjouir, quelques minutes plus tôt. Je n'avais pas envie qu'elle se force pour me faire plaisir, si c'est pour passer de mauvaises fêtes de fin d'année. De plus, son père allait vraiment vouloir me tuer si elle lui apprenait dans quelques heures qu'à cause de moi, elle ne serait pas là pour Noël. C'était vraiment embêtant. J'avais cette impression que Nathan O'Berkeley allait me haïr jusqu'à la fin de ses jours... « Tu sais Maria... si tu préfères passer les fêtes avec tes parents... je peux comprendre. On restera ici si tu veux. Après tout, ce n'est qu'une tradition comme une autre Noël. J'irais en Irlande pour une autre occasion. » Oui, dans un couple, il faut savoir faire des concessions. C'est le mot d'ordre pour que ça marche.