Elle n'avait ni faim, ni soif, ni rien du tout à vrai dire. Elle avait juste affreusement mal à la tête et ne pensait qu'à la meilleure façon de l'évincer une bonne fois pour toute. Enfin, cette fois, elle avait au moins la raison de ce fichu mal de crâne ; l'alcool à surdose la veille au soir. Sa tasse de café face à elle, Maria n'avait pas la moindre envie d'y toucher en toute franchise, mais elle en avait besoin pour émerger un tant soit peu. Tout comme pour ce pain au chocolat qu'il lui tendait présentement, elle n'en avait pas la moindre envie et pourtant, cette non-envie ne l'empêcha guère de le prendre de la main d'Edward et de mordre dedans. Après tout, elle devait bien se nourrir elle aussi, sinon bonjour l'état dans lequel elle se retrouverait en fin de journée. Heureusement qu'ils ne travaillaient pas aujourd'hui franchement. Ils allaient pouvoir flâner sur le canapé devant la télévision tout en se maudissant d'avoir agit comme ils l'avaient fait la veille. Mais bon, ce ne serait peut-être pas si mal comme programme tout compte fait.

« Désolée pour...ta chemise. »

C'était soit ça, soit elle se retrouvait nue chez elle. Enfin non, elle aurait très bien pu aller dans la salle de bain pour prendre un peignoir, mais sur le moment elle n'y avait même pas songé, voilà la vérité, trop ailleurs pour penser à une telle chose. Soupirant, la brunette se passa une main maladroite au niveau de la nuque, elle avait mal au cou, certainement dû à trop de sport la vei....stop ! Ne surtout pas penser à ce qu'il s'était produit la nuit dernière tout de suite, ce n'était pas comme si ils étaient réellement pressés d'en discuter, n'est-ce pas ? En tout les cas, Maria ne l'était vraiment pas.

« Tu as de la confiture dans le frigo si tu veux avec les pains au chocol...non oublie, on met pas de confiture dans les pains au chocolat. »

Et elle explosa de rire toute seule, bonjour les nerfs qui lâchent...elle était fatiguée, stressée, elle en venait à avoir envie de pleurer comme de rire à chaudes larmes. Enfin, dans tout les cas elle finirait en larmes à première vue, si ceci n'était pas franchement pitoyable...

A croire qu'elle n'était absolument plus en mesure de se contrôler, Maria posa son front contre la table en faisant cependant attention à ne rien renverser. Riant elle se rendit compte de l'ironie de la situation ; elle venait de se taper son meilleur ami et au lieu de s'apitoyer sur son sort elle riait comme une gamine devant un film animé. Puis, le rire laissa place aux larmes. Relevant doucement la tête, elle regarda Edward droit dans les yeux en lui laissant alors le plaisir – ou non – de constater sa perdition totale du moment.

« Dis-moi qu'on a pas fait ça....je t'en prie dis moi que ce n'est pas vrai Ed'... »

Posant ses deux paumes de mains contre son front, elle ferma les yeux pour finalement essuyer rageusement ses larmes, comme si c'était le moment de pleurer...quelle conne faisait-elle présentement franchement. Le moment n'était guère à l'apitoiement, elle devait impérativement se reprendre et simplement...accuser le coup. Tout comme Edward d'ailleurs.

« Désolée pour... ta chemise. » J'ai presque envie de lui dire « Tant mieux, il manquerait plus que tu sois nue ». Mais ce n'est pas le moment de ressasser ce qu'il s'est passé la nuit dernière. Je me contentais de l'observer, alors qu'elle mordait dans ce pain au chocolat. Je lui adressais un fin sourire en coin, tout en lui répondant un bref « Ce n'est pas grave. », puis je m'attaquais de nouveau à mon petit déjeuner. Le plus impressionnant, c'est que j'enchaînais ces petits délices en quelques minutes, les mangeant en quelques bouchées seulement. Bon Dieu c'est trop bon ! Je me donne moi-même l'impression de ne pas avoir mangé pendant des semaines. Ça doit être amusant à voir. « Tu as de la confiture dans le frigo si tu veux avec les pains au chocol... non oublie, on met pas de confiture dans les pains au chocolat. » Je me sens comme obligé d'arrêter de manger alors qu'elle se met à éclater de rire. Et merde, c'est plus sérieux que ce que je pensais en fait. Je reconnaissais bien là le côté nerveux de Maria. Je tournais la tête vers elle afin de l'observer, la bouche pleine, j'avalais difficilement, tout en continuant de la regarder avec des yeux d'enfants surpris. Ce que je redoutais et ce que j'attendais arriva : elle arrêta bien net de rire pour fondre en larme. Je la connaissais donc si bien que ça ? J'en avais l'appétit coupé et ce n'était pas à cause des six pains au chocolat que je venais de manger en vitesse record, mais bien parce qu'elle pleurait. J'arborais une mine inquiète, culpabilisais légèrement. « Dis-moi qu'on a pas fait ça... je t'en prie dis moi que ce n'est pas vrai Ed'... » La voir dans cet état me fit prendre conscience des conséquences que cela engendraient, une grande liste se forma dans mon esprit. Tout ça pour une partie de jambes en l'air, tout ça pour un acte naturel de reproduction, tout ça pour... pour un « emboîtement » qui, soyons honnêtes, ne dure pas des heures et des heures. « D'accord, ce n'est pas vrai. » Comment dire ? Je trouve moi-même que j'ai une tête à claque ce matin et si j'étais Maria, je me serais déjà mis un coup de poing en pleine figure. Finalement je poursuivais, sans lui laisser le temps de répondre. « Mais tu sais aussi bien que moi que tu n'as pas besoin de mes paroles pour savoir ce qu'il s'est réellement passé. » Je me rappelle d'une multitude d'images de ces ébats, néanmoins, tout n'est pas clair. D'un coup mon visage affiche une expression apeurée, je tourne la tête vers la jeune femme et lui demande, inquiet : « Rassure moi, dis moi que je n'ai pas abusé de toi et que tu étais aussi consentante que moi à ce moment. » Manquerait plus que j'ai abusé d'elle. Je ne le pense pas, mais mieux vaut en être sûr.

L'entendant lui dire que rien n'était arrivé, elle soupira, comme si c'était le moment de faire de l'humour...et puis, il en vînt à lui dire que malgré tout ce qu'il pourrait dire, elle savait pertinemment ce qui s'était passé. Malheureusement, pensa t-elle. Puis, la question à laquelle Maria ne s'attendait guère. Voilà que maintenant il en venait jusqu'à lui demander s'il ne l'avait pas violé. Mais bien-sûr que non il ne l'avait pas violé ! Elle avait été complètement d'accord pour faire ce qu'ils avaient fait, peut-être un peu trop d'accord d'ailleurs. Et c'était sans aucun doute cela le problème.

« J'étais consentante. »

Mais pourquoi ne l'avait-elle pas arrêté à temps ? Merde, après tout elle avait bu beaucoup moins que lui hier soir et elle était bien plus lucide que lui, alors pourquoi n'avait-elle rien fait pour les arrêter nom de dieu ?! Avait-elle perdue la tête ou quoi ? Il fallait croire en effet.

« Je suis désolée... »

Elle s'en voulait et franchement, elle avait de quoi, non ? Edward avait lancé un jeu totalement stupide et elle, comme une adolescente en manque de conneries, elle avait simplement dit oui pour aller au bout des choses. Et quelles choses... Fermant les yeux en soupirant, elle se rendit compte de sa bêtise, mais quel âge avait-elle pour agir comme elle l'avait fait ? En plus, Maria était en couple depuis peu et la voilà se retrouvant dans des ébats on ne peut plus privés avec son meilleur ami après une soirée un peu trop arrosée à deux. Bravo la responsabilité dans tout cela décidément. Rouvrant ensuite les yeux, elle but une bonne gorgée de son café n'osant finalement même plus croiser le regard de son meilleur ami pourtant installé autour de la même table qu'elle en ce moment.

Cette nuit avait été une grave erreur, une très grave erreur dans la forme. Mais dans le fond, la brunette commençait déjà à se demander si cette nuit n'avait pas une sorte de signification cachée. Tordue la fille, n'est-ce pas ?! Après tout, ils en avaient eu envie de cette foutue nuit, non ? Mais pourquoi ? D'accord ils avaient beaucoup bu, mais tout de même ils étaient assez grands pour pouvoir contrôler leurs pulsions sexuelles...enfin en théorie, et seulement en théorie d'ailleurs.

Se levant brutalement, elle oublia café et pain au chocolat et commença à déambuler dans sa cuisine comme une imbécile perdue dans ses scrupules, dans un sens elle avait raison de l'être ; perdue dans ses scrupules....

« Je suis tellement désolée Edward. »

Ne le regardant toujours pas, elle entendit malgré tout le bruit d'une chaise qu'on recule...il se levait, pourquoi faire ? Pitié, faîtes que ce ne soit pas pour partir maintenant, elle avait besoin de lui là, et non pas qu'il parte après leur connerie.

« J'étais consentante. » Dieu merci ! Ces quelques mots me firent l'effet d'un soulagement monstre, comme si tout un poids venais de tomber de mes épaules... pour finalement s'écraser sur mes pieds. Ça ne retirait pas le problème principal qui était que nous avions tout deux passé la nuit ensemble. D'une, nous étions les meilleurs amis qu'il n'y a jamais eu. De deux, Maria était en couple et venait de tromper Maxence. Ces deux réalités me mirent très mal à l'aise. Mais un problème à la fois s'il vous plaît, sinon, nous ne nous y retrouverons plus. « Je suis désolée... » Elle n'avait pas à l'être. Si quelqu'un devait bien présenter des excuses à l'autre, c'était bel et bien moi. J'étais l'homme, celui qui la protégeait, j'aurais dû garder le contrôle et faire en sorte que ça ne se produise pas. J'avais merdé, et ça, en beauté. Je tournais un instant la tête vers Maria, elle n'osait pas croiser mon regard, ce que je pouvais comprendre quelque part. C'était assez gênant comme situation, avouons le. Mes yeux bleus suivaient chacun de ses gestes. Elle se leva et fit les cent pas dans la cuisine. « Je suis tellement désolée Edward. » Je ne pouvais définitivement pas la laisser dans cet état. Je me levais donc de ma chaise, arrivais derrière elle et glissais mes bras autour de son corps, mais dans un geste fraternel qui me rappela la période avant notre erreur. Je voulais que tout redevienne comme avant, qu'il n'y ait plus de gêne entre nous. Et pour ça, je comptais bien en discuter avec elle. Je me mis en face, afin de la regarder dans les yeux. « Tu n'as pas à être désolée, on était deux. Mais je t'accorde que c'était une grave erreur. Je... Non pas que c'était déplaisant, au contraire, mais... soyons réalistes, c'est bizarre, je te considère comme ma sœur. » J'avais dit cela avec un petit sourire accompagné d'une légère grimace attendrissante qui m'était propre. Je ne voulais pas la vexer en disant cela. Comment faire comprendre avec tact à une femme que malgré son corps de rêve et une partie de jambes en l'air sensationnelle, on trouve cela tout de même étrange du faire que c'est plus une relation fraternelle qu'amoureuse qui nous unit ? Je tentais de trouvais une hypothèse plausible pour expliquer nos « égarement ». « On a peut-être fait ça pour être sûrs que c'est bien seulement une grande amitié qui nous unit ? Enfin, nous restons deux adultes hétérosexuels et ce n'est pas impossible qu'on ai eu besoin d'une confirmation afin d'être sûrs qu'on ne pourra jamais être amants. » C'était en quelque sorte une belle preuve d'amitié d'être aussi gêné par ce qu'il venait de se passer, non ? Ça prouvait que nous étions fait pour nous considérer comme frère et sœur, et pas autrement. Il valait peut-être mieux que cette erreur arrive maintenant que plus tard car il était fort probable que ça devait arriver. Je préfère croire que nous étions obligés de passer par là à un moment ou à un autre. « Ou bien... on était complètement saouls. Tu sais, dans ces moments là, on ne pensait plus à nos problèmes, c'était un peu comme un rêve. Pas de problèmes de couple, pas de problèmes d'adoption, pas de problèmes cardiaques. On a oublié ça le temps d'une soirée. Le temps d'une soirée on était ailleurs, loin de la réalité. Si on a couché ensemble, c'est peut-être parce qu'on savait que c'était inconscient et que ça relevait seulement du bon temps, loin de notre vraie vie. On a mit ça dans le lot du petit rêve sans aucun problème. Et quand on sait que l'on rêve, autant en profiter, non ? C'était une façon de se laisser aller, poussés par l'alcool. » Oui, je partais dans de grands débats philosophiques mais je préférais apporter mes points de vue. Pour moi, c'était clair, cette nuit avait peut-être révélé un désir que nous avions caché, mais il n'en reste pas moins que je préférais notre relation fraternelle. Je connaissais trop bien Maria, j'étais trop bien avec elle ainsi je ne pouvais même pas imaginer être en couple avec elle et tout faire foirer. De toute façon, je ne ressentais pas de sentiments amoureux. Je l'aimais, oui, mais à ma manière, comme on aime sa petite sœur. « Tu veux bien redevenir officiellement ma petite sœur ? » Lui lançais-je en haussant un sourcil, comme si j'appréhendais sa réaction. Je gardais cette expression attendrissante sur le visage. Bon Dieu, j'ai vraiment la tête d'un gosse. Petite sœur entre guillemet, car elle était plus âgée que moi. Mais pour moi, le statut de petite sœur, elle l'a parce que j'aime la protéger, la prendre sous mon aile.

Edward était le genre d'hommes à tenir de grands discours, mais jamais pour rien contrairement à pas mal de types que Maria trouvait sérieusement chiant et lourd même. Mais Edward lui, il était tout simplement génial car lorsqu'il tenait le même genre de discours comme celui qu'il avait en ce moment, Maria avait réellement l'impression d'avoir à faire, non pas à son ami mais bel et bien au professeur qu'il pouvait être. Et ça avait toujours eu le don de la faire énormément sourire.

Et puis, il avait raison, ce qu'ils avaient fait, ils en avaient peut-être eu tout simplement besoin pour comprendre que rien n'irait jamais finalement plus loin entre eux, ce qui était sans doute le mieux pour l'un comme pour l'autre.

« Et puis, ça me donnerait l'air bien, de tomber amoureuse de mon meilleur ami. »

Et elle se mit à rire au vu de la stupidité de la situation, tout semblait irréel. Bon, peut-être l'était-ce quelque peu, mais en même temps, il y avait bien pire comme situation, non ? Bien évidemment, si. C'est alors que l'homme lui demanda avec son petit sourire affreusement sexy si elle voulait bien redevenir sa petite sœur. Petite sœur, il était marrant lui, elle avait huit ans de plus que lui tout de même, ce n'était pas rien. Et puis, il n'était pas faux qu'au vu du comportement fraternel qu'Edward avait envers elle, c'était plutôt lui le grand frère et donc elle la petite sœur qu'il se devait de protéger des autres.

« Avec plaisir. »

Se blottissant contre l'homme, Maria vînt enfouir délicatement son visage dans son cou tout en fermant les yeux. Cette situation semblait beaucoup simple finalement. De toute façon, il était quasiment impossible qu'un jour ils terminent ensemble. Ils n'étaient pas dans Valentine's Day non plus, il ne fallait pas rêver. Ils étaient bien ensemble, mais comme un frère et une sœur, point.

« Même si je suis plus vieille que toi. »

Et la revoilà, la véritable Maria O'Berkeley, celle qui cherche tout le temps à avoir le dernier mot sur tout, en toutes circonstances. Il était préférable de la voir ainsi plutôt qu'en train de se morfondre toute seule dans son coin. Se décollant après quelques instants de son meilleur ami, Maria lui adressa – enfin – un sourire. Il était temps, vraiment.

Il était préférable d'oublier ce qu'il s'était passé cette nuit, cette solution serait sans aucun doute la meilleure pour tout le monde, pour elle, pour lui, pour Maxence aussi. En parlant de Maxence, comment allait-elle bien pouvoir lui dire ce qu'elle avait fait ? Allait-elle lui dire d'ailleurs ? Elle n'en avait pas la moindre idée. En général, elle n'était guère le genre de femmes à mentir aux gens qu'elle aime, mais là...ça risquait de foutre en l'air son couple. Le plan était dangereux et le résultat était risqué aussi.

« Bon, termine de manger, moi je vais prendre une douche. »

Laissant Edward seul dans la cuisine, Maria se rendit dans sa chambre et s'arrêta, se figea telle une statue de voir la chambre et surtout le lit. Mon dieu, elle avait couché avec Edward...rien que la vue de son lit lui faisait remonter les plus torrides souvenirs, des souvenirs qu'elle ferait mieux d'oublier, mais ça malheureusement ce n'était pas gagné, pas du tout même. Prenant sur elle, malgré tout, elle alla chercher des vêtements pour ensuite filer dans la salle de bain. Une fois dans la pièce, elle ferma simplement la porte derrière elle ne voyant guère l'intérêt de la fermer à clef tout en sachant qu'Edward n'y viendrait pas tant qu'elle y serait.

Une fois sous la douche, laissant couler l'eau contre son corps, Maria soupira. Toute la nuit dernière lui revenait brutalement à l'esprit et cela lui faisait mal, mal car elle avait aimé ce qu'elle avait fait. Et c'est en comprenant réellement cela qu'elle se mit une nouvelle fois à pleurer...pleurer car elle s'en voulait, pleurer pour ce qu'elle avait fait. Tout simplement.

« Et puis, ça me donnerait l'air bien, de tomber amoureuse de mon meilleur ami. » J'esquissais un large sourire en entendant sa remarque. Et, comme je suis d'un naturel chieur et faussement vantard, je ne pus m'empêcher de lui répondre avec un regard volontairement et exagérément arrogant : « Oh tu ne serais pas la première à tomber amoureuse de moi, il y en a tellement... Ah les femmes... ! » Puis j'affichais une mine désespérée, avant de rire de bon cœur. Bien évidemment, je ne pensais pas une seule seconde mes paroles. Finalement elle vint se blottir dans mes bras et cala sa tête dans le creux de mon cou. Je la laissais faire, me contenant de la serrer doucement contre moi. Elle accepta de redevenir officiellement ma petite sœur ce qui m'amusa tout autant que ça me fit plaisir. J'avais besoin de retrouver cette relation avec Maria, cette complicité, cet amour fraternel. J'en avais besoin, plus que quiconque. Et dans cet instant de grande tendresse, la jeune femme ne put s'empêcher de rajouter un « Même si je suis plus vieille que toi. » qui me fit rire. C'était bien elle ça, à toujours vouloir avoir le dernier mot. J'étais également comme ça, mais je ne rivalisais pas avec elle sur ce terrain, car elle était aussi têtue que moi, voir plus même. Je reculais légèrement la tête et la vit sourire. Ce simple étirement des lèvres me réchauffa le cœur. Je ne mettais pas rendu compte que j'avais besoin de voir son visage un minimum joyeux. « Bon, termine de manger, moi je vais prendre une douche. » Je tournais la tête vers la table de la cuisine. J'avais déjà mangé des tonnes de pains au chocolat et elle me disait de terminer de manger. Ais-je tant cette image de morfal ? « Oh je t'en prie, j'ai déjà assez mangé, je fais attention à ma ligne ! » Lui lançais-je, un peu sceptique. S'il y en avait bien un qui s'en fichait totalement, c'était moi. L'odeur des pains au chocolat caressait mes narines. Torture ! « Bon d'accord, je vais finir de manger, mais seulement parce que ces pains au chocolat me font de l'œil... »

Alors que je continuais de me goinfrer, je ne pouvais m'empêcher de me sortir Maxence de la tête. J'avais osé l'engueuler lorsqu'il m'avait fait comprendre qu'il me prenait pour un obstacle, il pensait ne pas être assez bien pour Maria et craignait que je ne lui prenne sa place. C'était bien la peine de lui faire la morale en tentant de lui expliquer que jamais il ne se passerait quelque chose entre elle et moi. Je culpabilisais là-dessus, bien plus que je n'étais gêné par la situation. Tout était clair dans mon esprit. Je considérais la jeune femme comme ma propre sœur, c'était une erreur et ça avait beaucoup moins de signification que si nous avions couché ensemble en étant sobres. Non, je m'inquiétais plus pour Maxence. Devait-elle le lui dire ? Il est clair qu'un couple qui ne partage pas ses secrets ne peut aller bien loin. D'un autre côté, si elle venait à lui raconter, il est clair que ça pourrait sérieusement compromettre leur avenir ensemble. Je m'en voulais terriblement. J'appréciais beaucoup mon collègue de philosophie, j'avais fait en sorte que leur couple marche et je venais comme de le réduire à néant. Quel idiot je suis. J'avalais ma tasse de café et me traînais jusqu'au canapé et allumais la télévision. Zappant, je reposais la télécommande, tout en regardant un épisode de Tom Sawyer. Mes enfants en étaient tout simplement fans et j'aimais regarder avec eux des épisodes le matin, en famille. Néanmoins, ça ne me changeait pas vraiment les idées. Pauvre Maxence...

Mais qu'est-ce qui m'a prit ? Pourquoi ais-je fait ça avec Edward ? Autant de questions qui la perturbaient au plus haut point mais qui ne semblaient pas vouloir la lâcher un seul instant. Mais comment avait-elle pu prendre du plaisir en couchant avec celui qu'elle voyait comme son frère ? C'était totalement insensé et pourtant, ce petit goût d'interdit lui donnait le frisson... Certes, il n'était pas si étonnant que cela arrive un jour, mais si ça avait pu arriver avant qu'elle se mette avec Maxence, cela aurait été tout de même bien plus simple, elle aurait pu gérer la chose, ses sentiments, ses idées, enfin tout quoi. Seulement là, elle ne contrôlait plus rien et ça l'effrayait comme peu de choses pouvaient le faire en temps normal. Allait-elle être en mesure de remonter à la surface après une telle histoire ? Maria n'en savait rien du tout, et c'était sans doute bien cela le pire.

Une fois en dehors de la douche, Maria décida de se reprendre, elle ne devait pas se montrer faible, ce n'était vraiment pas le bon moment pour ça. Qui plus est, sa migraine commençait doucement à s'apaiser, c'était toujours cela de gagné. Malheureusement, cela n'arrangerait pas tout.

Se regardant dans la grande glace dans la salle de bain, Maria remarqua une marque rouge qu'elle avait au niveau de l'épaule. Oh mon dieu, il ne manquait plus que cela tiens, voilà que maintenant elle gardait sur elle la marque de la nuit passée avec Edward. Mais quelle idée aussi de la mordre aussi ? Raah Edward ! Soupirant, elle passa une main sur son épaule pour ensuite jeter son regard sur la chemise de l'homme posée à même le sol.

* Prends sur toi un petit peu Maria ! *
Secouant la tête comme pour se remettre les neurones en place, Maria ramassa la fameuse chemise et remarqua qu'au niveau du col il y avait une petite trace de rouge à lèvres. Bravo Maria, autant pouvait-elle culpabiliser Edward par rapport à ce qu'elle avait à l'épaule qu'il pourrait aisément le faire quant à cette foutue trace. Pas la peine d'essayer de la récupérer à l'eau, le résultat serait pire que tout. La posant sur le meuble de la pièce, elle préféra la laisser là pour l'instant.

Passant finalement ses vêtements et s'attachant les cheveux encore mouillés, Maria poussa un énième soupir pour finalement quitter la salle de bain dans le but de rejoindre son meilleur ami qui devait certainement être encore dans la cuisine ou bien à la rigueur, dans le salon devant la télévision. Oui, Maria connaissait suffisamment Edward pour savoir qu'il aimait glander devant la télévision, c'était son côté enfantin qu'elle aimait tant chez lui.

« Qu'est-ce que tu regardes ? »

Souriant à l'homme, elle le vit lui rendant ce sourire. Il n'était sans doute pas nécessaire de revenir sur les évènements de la nuit passée, excepté qu'ils pouvaient en garder un bon souvenir. Après tout, ils ne pouvaient pas dire qu'ils n'avaient pas aimé ce qu'ils avaient fait, seulement cela devait rester un bon souvenir entre eux mais rien de plus.

Venant prendre place sur le canapé aux côtés de l'homme, elle vînt directement se coller à lui, ce comportement était tout à fait normal pour eux depuis qu'ils se connaissaient. Sentant le bras d'Edward venir prendre place dans son dos, elle plaça ses jambes en les pliant sur le canapé et posa l'une de ses mains sur le torse dénudé de l'homme. Finalement, les choses n'étaient peut-être pas si compliquées que cela, c'était peut-être elle aussi qui se faisait une montagne d'un tout petit rien.

Au fil des minutes, j'arrive un peu à me changer les idées. Finalement Tom Sawyer est un bon moyen de se décontracter qui plus est. Je suis confortablement installé, affalé sur le canapé, les jambes écartées comme tout homme qui se respecte, la télécommande finalement de nouveau dans la main, pour jouer avec, et un regard vide de toutes réflexions. Je sens une douleur minime dans mon dos, je n'ai pas envie d'aller voir ce que c'est, car je suis déjà conscient que Maria m'a griffé la veille pendant nos ébats. A croire que ça a été plutôt violent. Je décide volontaire de ne pas m'y attarder. Je suis un homme, mon naturel veut que je ne me prenne pas la tête. Pourquoi chercher midi à quatorze heure lorsque l'on peut choisir la simplicité dans de tels moments ? Un pénis dans un vagin, d'accord, il n'y a pas mort d'homme non plus, donc tout va bien. Oui, une simplicité monstre. Je préfère me cacher des conséquences que ça pourrait avoir sur Maxence, du moins, pour le moment. Si je commence à me poser trop de questions, je vais me taper un mal de crâne encore plus impressionnant. Attendons donc déjà que nos gueules de bois passent. « Qu'est-ce que tu regardes ? » Je tournais la tête vers Maria et lui adressais un beau sourire en coin. Je la laissais venir s'installer confortablement sur le canapé. Nous avions nos petites habitudes, elle avait celle de me rejoindre lorsque je flânais devant la télévision. Je glissais mon bras autour d'elle, tandis que je gardais dans l'autre main la télécommande. « Tom Sawyer. J'avais un peu plus de cinq ans quand ça a commencé à passer à la télévision. A chaque fois que je rentrais de l'école avec ma petite sœur, on se battait avec nos aînés pour pouvoir voir chaque nouvel épisode. » J'affichais un sourire amusé en y repensant. « Les autres s'estimaient trop vieux pour regarder ce genre de dessin animé. Donc ma mère leur répondait que s'ils étaient trop vieux, ils n'avaient pas à être aussi capricieux que nous. Du coup, on avait toujours le droit à la télécommande à cette heure là. » Je tournais de nouveau la tête vers Maria, toujours aussi amusé. Le bonheur d'être, avec ma petite sœur, les plus jeunes de la famille. On pouvait faire un peu plus de choses, mais en contre-partie, on était sur-protégés malgré nous. Finalement avec ma sœur, nous nous amusions à jouer comme si nous vivions de grandes aventures, on faisait les quatre-cent coups comme Tom Sawyer. Il était comme notre idole. On en faisait voir de toutes les couleurs aux parents mais finalement, on nous pardonnait toujours.

Machinalement, je jouais avec une mèche de cheveux de Maria, tout en scrutant l'écran de la télévision. Ça me rappelait tant de souvenirs. C'est qu'on prend un réel coup de vieux, comme on dit. J'esquisse un beau sourire. Je connais les épisodes par cœur, sur le bout des doigts. Finalement je tourne la tête vers la jeune femme et la regarde quelques instants. « Au fait, je voulais te demander. Tu pars en vacances cet été ? » Je ne lui laissais pas vraiment le temps de répondre que je poursuivais. « Parce que je compte partir en Irlande une semaine ou deux, histoire de revoir mes parents et tout mes frères et sœurs. Si tu as envie de voir d'où je viens et de connaître ma famille tu peux m'accompagner. Oh bien sûr, si tu n'en as pas envie, je ne le prendrais pas mal. C'est une proposition comme une autre. » En effet, j'aurais aimé que ma petite sœur et Maria se rencontrent. De plus, ma mère aurait adoré la connaître dans la mesure où je passe mon temps à lui parler d'elle. Sarah risquait d'y passer une journée ou deux, pour finalement aller dans la résidence de sa famille, comme nous n'habitions pas très loin l'un de chez l'autre en Irlande.

Partir en Irlande, en voilà une chose à laquelle Maria n'avait jamais pensé. Mais maintenant qu'il en parlait, elle se disait que ce ne serait pas une mauvaise idée elle qui voulait partir quelques temps pendant leurs congés d'été. Après tout, elle avait bien le droit de prendre du bon temps ailleurs qu'aux États-Unis, non ? Au diable les responsabilités, les vacances étaient faites pour prendre du temps pour soi, pour découvrir de nouveaux horizons, se faire plaisir tout simplement et c'est ce qu'elle comptait faire. Esquissant un beau sourire à Edward, elle prit quelques secondes de réflexion totalement inutiles, sa décision étant à vrai dire déjà prise. Elle partirait cet été avec Edward en Irlande. Elle ne préférait même pas songer à l'avis de Maxence à ce sujet, pour le moment elle préférait tout bonnement ne pas penser lui, elle aurait tout le loisir de le faire plus tard.

« Une semaine ou deux ? »

Elle le vit simplement hocher la tête.

« Avec plaisir. »

Après tout, elle n'avait jamais eu le plaisir de visiter l'Irlande et pourtant, elle savait déjà que ce pays allait énormément lui plaire, sans trop savoir pour quelles raisons d'ailleurs. Tout ce qu'elle savait de ce pays à vrai dire, c'est qu'il se situait en Europe, que ses paysages étaient magnifiques et que ses habitants étaient d'une nature très accueillante. En fait, elle semblait connaître le stricte nécessaire pour partir à la rencontre des terres irlandaises.

« Mais alors tu viendras avec moi à Vegas. Je dois aller voir mes parents cet été, et puis ma sœur voudrait me voir aussi. »

Cela faisait près d'un an qu'elle ne l'avait pas vu. Ah, Ève...une grande histoire d'amour mais parfois aussi de haine entre les deux sœurs. Lorsqu'elle était gosse, Maria ne supportait pas que l'attention se porte sur quelqu'un d'autre que sur sa petite personne, alors évidemment cela faisait des envieuses, comme sa sœur. Aujourd'hui, la cadette vivait à New York, mais comme chaque été, elle viendrait à Las Vegas durant un petit mois, certainement durant celui d'août pour se retrouver tranquillement dans le cocon familial. Un petit plaisir purement des O'Berkeley à vrai dire...

« Je suis persuadée que ma mère serait ravie de te rencontrer. Par contre, fais attention à toi mister séduction, ma sœur est un pur canon. Ne t'avise pas de tenter quoique ce soit avec elle...mon beau-frère ne risquerait pas d'apprécier. »

Riant de bon cœur, elle repensa à la fois où Matthew avait eu une approche un peu trop subtile envers Ève. Dimitri, le mari de cette dernière n'avait pas vu d'un très bon œil le comportement du professeur et les choses ne s'étaient pas très bien...déroulées si on veut.