Sujet: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Sam 5 Juil - 0:10
31 Janvier 2022, peu avant minuit. New York. La journée avait été longue, très longue. J'avais passé la plupart de mon temps assis sur une chaise, entouré par d'autres gradés. Nous nous étions regardés en chien de faïence, prêts à mordre si cela s'avérait nécessaire. Les enjeux étaient importants, et personne ne savait réellement comment aborder le problème. Chacun voulait être précis, méticuleux, et éviter les pertes inutiles. Mais voilà, la vérité, c'était que l'on courrait au désastre. Avec les informations que nous avions en notre possession, et avec la configuration qui était actuellement la nôtre, rien ne pouvait aller bien. Plus la journée avait avancé, plus les camps s'étaient dessinés. Ceux qui voulaient agir par peur de voir la situation empirer, contre ceux qui préféraient attendre dans l'espoir d'acquérir de nouvelles informations. J'ai soupiré en sortant du taxi, la tête lourde et les yeux fatigués. La journée s'était certes achevée, mais celle de demain serait tout aussi compliquée. J'avais introduit la clé dans la serrure de l'appartement, poussé la porte, et juré en me prenant les pieds dans une paire de chaussures à talon. Eden, évidemment. J'avais enlevé ma veste, que j'avais machinalement posé sur le porte-manteau. J'avais fait deux autres pas dans le couloir, shootant à nouveau dans une chaussure. J'avais juré une seconde fois, fait un pas supplémentaire, puis m'étais ravisé. Eden ne laissait jamais ses talons dans l'entrée. Et si jamais elle avait dérogé à ses propres règles, elle aurait au moins fait ça proprement. Mon mal de tête s'évanouit, alors que je restais immobile dans le couloir, aux aguets. Quelque chose ne tournait pas rond ; j'en étais certain.
1er Février 2022, aux alentours de trois heures du matin. New York. Comment en étions-nous arrivés là, déjà ? Ah oui. Après avoir senti que quelque chose n'allait pas, j'avais continué d'avancer à pas de loup. Je m'étais rendu dans le salon, où j'avais caché une arme à feu. Je m'en étais emparé, et aussitôt le doigt posé sur la gâchette, je m'étais senti plus léger. J'étais un bon tireur. Un très, très bon tireur. Je visais juste, et j'étais rapide. Il n'y avait aucune raison pour que la situation tourne mal. Plus confiant, j'avais ouvert les portes de l'appartement une à une, vérifiant que tout allait bien. J'avais senti mon cœur s'emballer en voyant que la chambre des jumeaux était vide, et en désordre. Les draps étaient au sol, les jouets éparpillés, et une énorme peluche avait été éventrée. La peur s'était insinuée dans tout mon être. Si jamais il était arrivé malheur à ma famille, je ne m'en remettrai pas. Je n'aurais plus qu'à retourner l'arme contre moi. Poser le canon sur la tempe, et appuyer. La dernière pièce qu'il me restait à vérifier était ma chambre, et avant même de franchir la porte, je sus que le spectacle auquel j'allais avoir droit me ferait froid dans le dos. J'avais doucement poussé la porte, et le murmure que j'entendis me glaça le sang. « Matthias... » Eden avait parlé à demi-voix, comme éteinte. Comme si je venais de faire la plus grosse connerie de ma vie. Comme si tous ses espoirs s'étaient envolés. Je n'avais pas eu le temps de réagir que j'avais senti le canon d'une arme se poser sur ma tempe. Ça sentait les problèmes. La lumière s'était allumée, et l'horreur s'était affichée sous mes yeux. Eden était prostrée dans un coin de la pièce, recroquevillée sur elle-même. Un homme la tenait en joug, et son complice m'avait à sa merci. Mauvaise configuration. L'enfer avait commencé à partir de ce moment là, et s'était poursuivi une bonne partie de la nuit. « Quel intérêt ? Elle ne représente rien pour vous ! » M'exclamais-je, abattant ma dernière carte. Je priais pour que cet argument soit le bon – je n'en avais de toute façon plus aucun en réserve. « Alors que moi... » Je suggérais, mais n'allait pas plus loin. J'attendais que ma petite phrase fasse son effet dans leur petit cerveau étriqué. Les deux Russes se regardèrent pendant quelques secondes, pesant visiblement le pour et le contre. Mon regard se posa sur Eden, toujours agenouillée, et qui ne pouvait empêcher les larmes de dévaler le long de ses joues rendues plus pâles que d'ordinaire à cause de la peur. J'avais envie de la prendre dans mes bras et de la serrer le plus fort possible pour calmer sa crainte. J'avais envie de lui dire que tout allait bien se passer, que bientôt tout cela ne serait plus qu'un horrible cauchemar. J'avais envie de lui dire que notre famille en ressortirait plus unie. Je pensais à toutes ces choses que nous avions prévu de faire, et à toutes ces choses que j'avais rêvé de faire sans jamais lui en parler. Acheter un appartement en Italie. Déménager pour aller vivre en Australie. Se marier. Avoir un troisième enfant. Tout ça ne serait qu'un rêve, un leurre, un doux souvenir. « D'accord. » Le mot claqua dans l'air, froid et sec. J'ai soupiré de soulagement, tandis qu'Eden hoquetait de surprise et secouait la tête pour montrer son refus. Elle m'implora du regard, mais je ne fléchis pas un seul instant. « Laissez-la partir. » Les deux Russes, à nouveau, semblèrent peser le pour et le contre. Celui qui la tenait en joug fit un mouvement de son arme, lui indiquant qu'elle était libre de sortir. Elle essuya ses larmes, secoua la tête, et resta immobile. Mon cœur loupa un battement, puis j'ai tapé du pied pour lui faire entendre raison. « Lève-toi et sors. » Ordonnais-je, les mains toujours nouées derrière la nuque. « Pour une fois, tu vas m'écouter. Tu as une chance de sortir saine et sauve d'ici, alors tu vas le faire. Tu vas le faire, et maintenant. On a deux enfants, Eden. Ils ont besoin de toi. Ils auront besoin de toi plus que jamais après cette nuit. Alors sors. Sors et va les retrouver. Sors, profite, et vis pour deux. » Tout était dit. Elle obtempéra, se leva, et marcha vers la sortie. Elle prit le temps de s'arrêter à ma hauteur, mais aucun mot ne franchit la barrière de ses lèvres. « Je suis désolé. » Murmurais-je alors qu'une unique larme glissait le long de ma joue. Désolé de t'abandonner, désolé de ne pas avoir pu faire mieux que ça, désolé pour toutes les erreurs que j'ai pu faire. Elle balaya mes mots d'un revers de main, posa ses lèvres sur les miennes, puis me fit comprendre d'un regard que tout ce que je pouvais ressentir, elle le ressentait aussi. Pressée par le Russe la tenait précédemment en joug, elle détourna le regard et s'éclipsa dans le couloir. Au moins, elle allait s'en sortir. Elle allait vivre, elle allait être avec nos deux fils, et c'était tout ce qui comptait pour moi. Je partirais en paix.
Mais rien de tout cela ne se passa comme prévu. Une fraction de seconde plus tard, alors que le Russe en fasse de moi souriait de toutes ses dents tant il jubilait, un énorme fracas le fit sursauter. Un instant plus tard, la pression sur mon crâne diminua, puis disparut complètement. Un éclair de lucidité me souffla que mon bourreau était sans doute mort. L'air choqué du Russe qui se trouvait en face de moi me fit comprendre que leur plan ne se déroulait pas comme prévu. J'eus une montée d'adrénaline – j'oubliais tout. Le temps, les personnes présentes, les bruits. Il me fallut une seconde pour lui faire un croche-pied. Une autre pour me pencher et ramasser l'arme qui était à mes pieds. Une dernière pour lui coller une balle dans le thorax. Une dernière pour me retourner, prêt à aller retrouver Eden. Eden, qui était étendue sur le sol, les mains posées sur sa gorge, et qui cherchait désespérément à respirer alors que le sang coulait à flot. J'ai accouru à ses côtés, me suis laissé tomber, avant de chercher à lui venir en aide. Mes deux mains se posèrent sur son cou. Il fallait que je fasse pression sur la plaie, le plus fort possible. C'était sa seule chance. Ses mains à nouveau libre, une s'enroula autour de mon bras, et l'autre, dans un effort qui lui coûtait, se posa sur ma joue. « Reste avec moi, reste avec moi, reste avec moi... » Je répétais ces mots telle une litanie sans fin. Mais je sentais son pouls s'affaiblir, et je voyais ses yeux s'alourdir. « Eden ! Reste avec moi, tu m'entends ? Tu peux pas me laisser, tu peux pas m'abandonner. T'as pas le droit ! » M'exclamais-je, désespéré. La légère pression que sa main effectua fut une invitation pour ce qu'elle considérait être un dernier baiser. Je me suis exécuté, sans penser à la signification que tout cela pouvait avoir. Au loin, le son des ambulances se fit entendre. Dernier espoir. « Accroche-toi, par pitié. On a deux enfants ensemble, tu ne peux pas les abandonner. Et puis qu'est-ce que je vais faire sans toi, hein ? J'suis paumé quand t'es pas là. Il faut que tu sois forte. Tiens bon Eden. Je t'en supplie, tiens bon. »
5 Février 2022, onze heures du matin. New York. « … femme d'affaire pointilleuse, déterminée et talentueuse, elle était avant toute une mère dévouée et une femme aimante... » C'en était trop. Je n'en pouvais plus d'écouter ce ramassis de conneries. Qui était ce vieillard pour parler d'une femme – la mienne, en l'occurrence – comme ça ? Comment pouvait-il dresser un portrait d'Eden Hastings-Matveïv alors qu'il ne l'avait jamais rencontrée, et qu'il ne la connaissait que par le biais de la presse ? Mon pied droit battait la mesure au sol, signe d'impatience et d'agacement. Il fallait que le prêtre arrête. Maintenant. Une violente douleur à l'abdomen me fit légèrement grimacer, mais je n'en avais rien à foutre. Le soir où tout avait basculé, j'avais pris une balle perdue, qui était passée à deux doigts de mon aorte. J'ai posé une main sur mon ventre, avant de me lever brusquement, sans me soucier du bruit que je faisais. Les parents d'Eden se retournèrent vers moi avec un air indigné, mais je n'en avais strictement rien à foutre. À mes côtés, Thaïs effleura mes doigts pour me calmer, mais c'était peine perdue. La tête haute, snobant l'ensemble des personnes présentes pour les funérailles d'Eden, je suis sorti de l'église par une porte dérobée pour éviter les photographes. J'ai dénoué ma cravate avec empressement, tant j'avais l'impression d'étouffer. J'étais seul, profondément seul, et la vie sans Eden me paraissait insurmontable.
2 Janvier 2025, minuit précise. Rio de Janeiro. La fête battait son plein, mais j'avais gardé un œil attentif à mon portable. Hors de question de manque l'heure fatidique – je vivrais cela comme un échec personnel. Minuit sonna enfin, et mon regard balaya la pièce rapidement, puis s'arrêta sur Léo-Alisson. J'ai fait quelques enjambées dans sa direction, avant de me stopper une fois à sa hauteur. « Bon anniversaire ! » M'exclamais-je en faisant tinter nos deux coupes de champagne. Je n'eus aucun scrupule à me faire une place parmi tous ces inconnus. Léo était la seule personne que je connaissais ici ; les Brésiliens et autres étrangers qui nous entouraient n'étaient que des compagnons de soirée, rencontrés par ci par là, mais nous nous en accommodions parfaitement. C'était aussi fait pour ça, les vacances ; prendre du bon temps, voir de nouvelles têtes, découvrir de nouveaux lieux. Cette année, après un hiver glacial à Paris, nous avions décidé de mettre le cap sur le Brésil. Le nouvel an la veille, l'anniversaire de ma meilleure amie le lendemain : les débuts d'année étaient toujours rythmés. Je lui fis un franc sourire, avant de passer une main dans ses cheveux. « Dis-moi, serait-ce une nuance de gris que j'aperçois par ici ? » Demandais-je, taquin. C'était notre jeu préféré, depuis des années maintenant. Dès que nous prenions officiellement un an, nous allions chercher – au sens propre du terme – des cheveux blancs à l'autre. Je lui offris un large sourire, avant de poser mes lèvres sur sa joue. « J'ai un cadeau pour toi, mais je l'ai laissé à la maison. Je te le donne quand on rentre. » Déclarais-je, presque impatient d'y être. Je passais une bonne soirée, mais j'avais aussi très envie de voir la réaction de ma meilleure amie lorsqu'elle ouvrirait le paquet. Mes doigts s'emparèrent de la main de Léo pour la faire tourner sur elle-même. C'était sa soirée, je voulais qu'elle s'amuse. Qu'elle danse jusqu'au bout de la nuit, qu'elle profite jusqu'à en tomber de fatigue. Je lui ai souri une dernière fois, avant de me diriger vers le bar pour commander un shoot.
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Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Lun 14 Juil - 1:26
Just give me your hand so I can pull you back over
Léo-Alisson&Matthias
Mon interlocuteur est déjà partit dans un long intermède dont il semble la seule personne visée. Car moi j'ai bien la tête ailleurs malgré mon regard qui se veut attentif. La musique endiablée éveille chacun de mes sens et les cocktails s'additionnent au creux de ma main sans que je ne puisse refuser une seule goutte. Étant polyglotte, je communique aisément avec les différentes personnes présentes à cette fête mais toute mon attention n'est portée que sur Matthias. Il s'est éloigné pendant une minute et pourtant je ressens le manque de sa présence aussi vivement que la brûlure du feu de joie qui illumine le ciel un peu plus loin, sur l'une des plages de Rio. A travers la grande baie vitrée qui me fait face, j'observe la ribambelle de riverains et autres fêtards, s'adonner à toutes sortes de danse. D'autres un peu plus loin éclatent de rire. Certains même foncent vers la mer, tentant tant bien que mal de se dévêtir le plus rapidement possible avant de toucher l'eau salé de leur pied. Je reporte mon attention sur l'homme qui me fait face et ses nombreux acolytes qui nous ont rejoint au fur et à mesure que la discussion s'allongeait dans le temps. Mais au moment même où je prenais la décision de m'esquiver discrètement - du moins le mot discret chez moi n'était pas vraiment approprié en vue de ma renommée - Matthias prit l'initiative de me voler à cette petite foule. Très bien, comme s'il avait lu dans mes pensées. Ma coupe de champagne émet un son cristallin contre la sienne pendant que je prend une gorgée du liquide dorée à sa suite. Un sourire s'épanouit sur mes lèvres. Nous avons enchaîné deux soirées mouvementées car après tout, c'est son idée ce voyage. C'est sa surprise, son cadeau d'anniversaire. Sa manière de me montrer chaque jour qu'il sera toujours à mes côtés pour toutes sortes de frasques et autres idées saugrenues. Cette fois-ci tout vient de lui et j'en étais très fière. Mais bien évidemment, les meilleures idées viennent avec les plus beaux sarcasmes et les remarques sur notre âge qui avancent se succèdent avec brio chaque année passé aux côtés de l'un et de l'autre. Je repousse sa main de ma chevelure blonde comme si j'étais outrée par ses propos. Que neni, j'étais bien la première à me ficher du poids des années sur lui. Alors là tu rêves ! Même à 80 ans je resterais toujours aussi sexy et désirable ! Tu verras ... Que j'ajoute devant son air peu crédule face à mes propos. Mais était-ce nécessaire de préciser que moi-même avait de légers doutes quant à ces remarques sorties de nul part ? Mais merci. Faut dire que tu n'as pas fait les choses à moitié. Un anniversaire à Rio aux côtés de mon meilleur ami de toujours. Je ne pouvais pas rêver mieux. C'était le genre de futur idyllique que j'avais imaginé pour nous deux lorsque nous étions que des gamins et aujourd'hui il prenait vie. Un victoire éphémère sur un destin qui s'était souvent joué de nous mais au moins, il me rendait heureuse. C'était tout ce qui comptait. Ses lèvres effleurent ma joue pendant que ses mots se frayent un chemin vers mon oreille. Ma curiosité est de suite piquée au vif. C'est quoi ?! Toi, tout nu, emballé dans du ruban rouge ? Dis moi que c'est ça ! Parce que Matthias qui pourrait se tourner ainsi en ridicule ça me ferait forcément éclater de rire et que je tuerais pour le voir faire un truc pareil. Mais évidemment je ne pensais pas que ce serait ça qui m'attendait à en croire sa mine renfrogné. Il s'éloigne alors pour aller vers le bar et soudain je sens une main enlacer ma taille. Je me retourne et plonge mon regard dans celui sombre et impénétrable d'un brésilien que j'avais rencontré ce matin même. Je vide ma coupe et avant même de pouvoir en placer une, il se met à danser contre moi. Ok, très bien, la soirée promettait ...
Mav steuplais, fais pas ça... Mavis est devant moi, dans cette immense villa que j'ai acheté au moment même où j'avais appris ma grossesse. Mais les complications s'accumulent. Je tente désespérément de donner un sens à ma vie quand tout semble sur le point de changer. Et même de s'écrouler. Car pour moi, tomber enceinte à vingt et un ans est un suicide social et lorsqu'on savait que le monde entier suivait mes actualités, on pouvait dire que c'était encore plus grave me concernant. Les médias allaient s'en donner à coeur joie, les femmes jacteraient comme jamais à mon passage tout simplement pour le plaisir de voir que je n'étais pas aussi parfaite que je semblais l'être à une époque. Révolue maintenant que j'étais enceinte et même pas d'un homme riche, clinquant et puant le fric et le pouvoir à plein nez. Mavis il était désirable, beau comme jamais mais il n'était personne. Et c'était sûrement l'erreur ultime. Notre liaison avait été mise au grand jour dès son début. Au début on faisait rêver. On était beau, de deux mondes différents, c'était digne d'un conte pour enfant. Mais le conte pour enfant avait été plongé dans une réalité vils et consternante et nos chers partisans s'étaient peu à peu retournés contre nous. Mes parents n'avaient pas apprécié la nouvelle. Ma carrière de mannequin semblait révolue. Mes parents ne m'adressaient plus la parole. Une accumulation qui semblait avoir eu raison de mon couple. Tout allait mal, on se hurlait dessus constamment mais seulement lorsque l'on arrivait à se voir. Entre le Burlesque, les cours et mon indescriptible manie de faire comme si je n'attendais pas d'enfant, Mavis ne supportait plus la situation. Mais là, il faisait sa valise, devant moi. Il voulait habiter ailleurs, prendre de la distance, s'éloigner. Je le supplie, je m'approche, je tente de le prendre dans mes bras. Il se laisse faire mais on a tout brisé depuis longtemps. C'est sûrement la seule solution afin d'arranger les choses.
Mais rien ne s'arrange vraiment. Pas quand on a vingt et un ans et qu'on attends un enfant. Le sang coule sur le carrelage de la salle de bain et moi je suis écroulée par terre. Inerte, les yeux dans le vague. La scène est glauque. Je viens de perdre l'enfant parce que j'ai pas réussit à tenir. Que je n'ai pas suivit les indications des médecins. Je me suis surmenée, je manquais cruellement de sommeil et j'ai fait une chute. Une malheureuse chute. Cette même journée suffira pour que je perde notre enfant et Mavis à la fois. Je suis au bord du gouffre. Je ne bouge pas de chez moi pendant des jours, des semaines. Je ne me rappelle pas très bien. Ma carrière est en stand-by, mes études totalement en suspens. Je ne sais plus ce que je veux. Tout ce que je sais c'est que je n'ai plus personne. Que je me suis enfermée dans mon couple et qu'il n'y a plus rien qui vaille la peine de se battre.
Je danse, je rejette ma tête en arrière pour éclater de rire. La scène tourne au ralentit, ma robe se gonfle à chaque fois que l'homme me fait tourner sur moi même. Une robe qui vient de ma dernière collection présentée à la fashion week de Milan et Paris. Mon travail n'est plus que ma seule attache, la seule chose qui me fait encore tenir debout. Ça et Matthias...
Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Mar 29 Juil - 0:00
Past ► Lorsque mon portable avait sonné et que j'avais vu qu'il s'agissait de Mavis, j'avais eu un instant d'hésitation avant de décrocher. Dire que j'avais une dent contre cet Alpha qui m'était, au fond, parfaitement inconnu, aurait été mentir. De même, il aurait été inexact de s'avancer et d'affirmer que je l'appréciais. Disons plutôt que je le tolérais, sans lui montrer une once quelconque de sympathie. Il était le petit ami de Léo, et le futur père de son enfant. Il était dans le décor, le choix de ma meilleure amie, et je devais m'en accommoder. Point barre. Je n'étais pas dupe – je me doutais évidemment que l'Alpha pensait au moins autant de bien de moi que j'en pensais de lui. Parfois, je me disais que Léo devait être bien embarrassée avec deux énergumènes dans notre genre, à toujours être tiraillée entre deux feux. Mais nous faisions semblant, pour elle. Et alors que ces pensées me traversaient l'esprit, je compris que ce coup de fil était tout, sauf anodin. Pourquoi est-ce que Mavis aurait pris la peine de m'appeler ? Il ne me demandait pas mon avis, nous ne sortions pas entre nous, et nous ne nous immiscions jamais dans les vies de l'autre. Son nom affiché sur l'écran de mon smartphone était donc un mauvais signe – pour ne pas dire très mauvais signe. Mon cœur manqua un battement, puis un deuxième, alors que je finissais par décrocher. La voix basse mais alarmée de l'Alpha commença à m'exposer les faits rapidement, mais j'avais décroché dès l'instant où Léo et hôpital s'étaient retrouvés dans la même phrase. « J'arrive. » Je l'avais coupé froidement, ignorant la moitié des informations qu'il avait pu me donner au cours de cet entretien. Je n'avais plus été capable de réfléchir, sentant la panique gronder au fond de mon être, prête à me dévorer doucement.très doucement.
« Ma Léo... » Murmurais-je après l'avoir observée une seconde depuis l'embrasure de la porte de chambre, avant de finalement combler l'espace qui nous séparait. Je n'ai prêté aucune attention à l'Alpha, qui restait en retrait et m'observait du coin de l’œil. Mes lèvres se posèrent avec tendresse sur sa joue, tandis que je m'asseyais à ses côtés. « Que s'est-il passé ? » Demandais-je à voix basse, m'emparant d'une de ses mains pour la serrer. Il était évident que la Iota n'était pas au meilleur de sa forme ; son air triste, ses yeux vides et ses cernes immenses ne trompaient personne. « Parle-moi. » Ordonnais-je, non sans douceur. Exprime-toi, libère-toi de ta souffrance et de tes démons. J'étais là pour partager son chagrin et ses peines, là pour la délivrer de ses fardeaux. La voir dans un tel état me brisait, littéralement.
Present ► « J'espère bien qu'à quatre-vingt-ans, je me serai débarrassé de toi et que je vivrai une seconde jeunesse. » Répliquais-je, moqueur. L'important c'était d'y croire, n'est-ce pas ? Je passe un bras autour de son cou, me penchant légèrement pour mieux l'entendre. La musique était forte, et la foule dense. Avoir une conversation – aussi peu sérieuse soit-elle – dans ce genre d'environnement n'était guère aisé. « C’est important pour moi, Léo. » Affirmais-je, posant mes lèvres sur sa joue. Elle était ma meilleure amie, depuis toujours. Elle avait toujours été là, dans les bons comme les mauvais moments. Elle m'avait soutenu, accompagné, aidé. Nous étions là l'un pour l'autre, peu importe la raison. Prêt à nous jeter corps et âmes dans une bataille pour éviter à l'autre de prendre les coups. J'ai ensuite ajouté que j'avais son cadeau, mais que je l'avais laissé à l'hôtel. Sa réponse ne se fit pas attendre, et ma réaction fut celle attendue. J'ai éclaté de rire à l'entente de son idée saugrenue, secouant la tête négativement. « Loupé. » J'aimais beaucoup Léo, mais de là à me tourner en ridicule à ce point... Non, tout de même pas. « Je t'épargnerais le ruban-rouge, si jamais tu devais me voir nu un jour. » N'était-ce pas là une attitude de grand prince ? Droit au but, sans fioriture. Pas de perte de temps inutile. Je la fis tournoyer sur elle-même pendant quelques secondes, souriant sincèrement. J’étais heureux d'être là, avec elle. Juste heureux, comme je ne l'avais pas été depuis une éternité.
J'étais accoudé au bar, les lèvres pincées et les yeux plissés d'agacement. J'observais tout du petit spectacle qui se déroulait sous mes yeux, et je ruminais intérieurement. Ce brésilien aux faux airs d'un joueur de football bien connu me donnait des envies de meurtre. Je le voyais faire tournoyer Léo, se rapprocher d'aller, danser contre elle. Premier pas d'une tentative de séduction, c'était clair comme de l'eau de roche. Je voyais Léo qui se laissait tenter, souriant et riant à des mots que le brésilien venait de lui murmurer à l'oreille. Mon impatience se faisait de plus en plus évidente, et vider d'un trait mon verre pour me calmer ne provoqua pas la réaction que j'avais espéré. Au contraire. Mon sang ne fit qu'un tour lorsque je vis les mains baladeuses de cet inconnu se perdre sous les coutures de la robe de Léo. Et puis quoi encore ? Il ne voulait pas les clés de ma chambre d'hôtel ? J'ai déposé avec fracas mon verre sur le comptoir, avant de fendre la foule pour rejoindre ma meilleure amie. « Je te l'emprunte quelques minutes. » Dis-je en attrapant le bras de mon amie pour une discussion qui, je l'espérais, la remettrait en place. J'avais toujours été franc avec elle. Honnête. Je lui avais dit les choses comme je les pensais, sans me soucier de ce qu'elle pouvait bien penser. « T'es qui pour... » Commença l'homme, agacé d'être interrompu par une tierce personne. Un homme, qui plus est. « Cherche pas. » Sifflais-je, le regard noir, tout en raffermissant ma prise sur Léo. Cette dernière me regardait d'ailleurs d'un air incrédule, mais ne répliquait rien. Sans doute avait-elle perçu qu'il ne fallait mieux pas se mettre en travers de mon chemin à cet instant précis. Le brésilien lâcha finalement sa prise, non sans pester après moi. Qu'importe, il n’était pour moi qu'un profiteur. « Allons marcher quelques instants. » Dis-je en entraînant Léo à ma suite. Nous quittâmes momentanément le bar, à la recherche d'un lieu plus calme, et donc plus propice à la discussion. Pendant ce temps, le silence régnait en maître. Je cherchais la meilleure façon pour aborder le problème, mais je n'en trouvais pas. Ce que je m'apprêtais à dire n'était pas facile, mais je me dévouais pour le faire. Pour son bien. « Écoute, je t'ai toujours dit quel était le fond de ma pensée, et je ne compte pas me censurer ce soir. » Je soupirais, déjà rassuré d'avoir sous-entendu que cette conversation serait tout, sauf agréable. « Je ne te juge pas, mais permets moi de te dire que ce dont j'ai été témoin ce soir, ça ne m'a pas plu. » Ajoutais-je, alors que je revoyais clairement les mains de ce brésilien de pacotille devenir toujours un peu plus baladeuses. « Écoute Léo, je n'ai pas de leçon à te donner, mais... Je pense que tu devrais te calmer. » Déclarais-je, faisant quelques pas sur la plage pour m'éloigner des regards curieux qui nous scrutaient encore. « Tu te laisses embarquer dans des plans louches, tu rentres aux aurores... Ça pourrait être dangereux, et puis tu mérites mieux que ça. Ce n'est pas en sortant cinq soirs par semaine et en enchaînant les conquêtes que tu vas trouver le prince charmant, et fonder une famille. » Déclarais-je calmement, tout en sachant pertinemment que je lâchais une bombe. J'espérais que ces mots lui serviraient d’électrochoc, et qu'elle comprendrait où je voulais en venir. J'espérais que ça la fasse réagir, et une petite voix intérieure me disait que je n'allais pas être déçu.
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Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Lun 4 Aoû - 23:33
Just give me your hand so I can pull you back over
Léo-Alisson&Matthias
Je me sentais abrutie de tout. Ma vie n'était qu'un sombre chaos dans lequel je ne cessais de m'enfoncer. Nager pour tenter de sortir la tête hors de l'eau ? L'idée m'était totalement inconcevable dorénavant. Alors je coulais, plus profondément encore que je n'aurais pu imaginer et cette fois-ci, il n'y avait plus personne pour me retenir et me sauver. J'avais toujours eu une horde de gens aimants et affectueux autour de moi qui m'avaient aidé dans toutes les situations inextricables dans lesquelles je n'avais de cesse de m'enfouir, tête la première, comme une jeune débutante fraichement sortie des bancs des écoles de petits bourges. Mais cette fois-ci, j'avais tout foutu en l'air. Avec mes parents ou encore mes amis les plus proches comme Harper ou encore Adrian. Parce que lorsque j'étais tombée enceinte je mettais raccrochée à mon couple et n'avais eu de cesse que de tenter de sembler transparente et inexistante. Et bien bravo, j'avais réussit. Mais j'avais aussi perdu leur confiance en les tenant à l'écart comme s'ils ne représentaient rien à mes yeux. Je les avais blessé, trahit. C'était ma faute et j'aurais dû assumer mais je n'en faisais rien. Je nageais en eaux troubles et la température ne cessait de dégringoler à une vitesse si vertigineuse que je semblais tétanisée à chaque geste que j'essayais de faire dans un sens ou dans l'autre. Mais mon couple n'allait pas mieux et mon enfant avait disparu aussi vite qu'il avait jaillit des profondeurs de notre amour qui semblait envolé à présent. C'était moi. Je devais avoir un problème. Quelque chose qui clochait et dont je n'arrivais à résoudre l'énigme. Finalement j'aurais dû écouter mes parents. Ne pas m'enfuir dans une vie où gérer mon indépendance serait le point clé de ma réussite. J'aurais dû comprendre que je n'étais pas le genre de femme qui, une fois sortie de leur monde bourgeois et si prisé, pouvait s'en sortir seule. J'aurais dû restée avec mes amis de l'époque, tous des fils et filles de bonne famille, aux joies euphoriques rythmées par les soirées endiablées que l'on ouvrait pour une nuit. Mes paroles racées auraient été toujours autant respectées et chacun de mes gestes, d'une incroyablement élégance, aurait été promu au rang de divin. Tout avait bien changé et cette chambre d'hôpital me le faisait comprendre. J'avais touché le fond et je ne voyais aucune issu possible s'ouvrir devant moi. Même le regard, autrefois si rassurant de Mavis, semblait froid et d'un vide frigorifiant aujourd'hui. Pour dire, même avec la perte de notre enfant, nos contacts se comptaient sur les doigts d'une main et il semblait si éloigné de moi que c'était à peine si je comprenais qu'il aurait préféré être partout ailleurs qu'ici même avec moi. Mais l'alpha était quelqu'un de bien et aurais tout fait dans les normes plutôt que de paraître pour le plus grand des salauds. Sauf qu'aujourd'hui je n'avais qu'une envie, c'est qu'il joue à ce parfait connard. Et puis après un temps semblant des plus interminables, la porte de la chambre s'ouvre à la volée devant le visage déconfit de Mathias. La seule personne que je n'ai pas tenté d'annexé de ma vie décadente et dépravée. A sa vue, mon regard se brouille de suite et je ne peux soutenir son regard. En plus je me sens affreuse. Mes paupières sont lourdes et mes cernes doivent me donner l'apparence d'un spectre abominable. Mes cheveux flamboyants de dorures presque féériques autrefois paraissent terne, sans vie et à la limite du filasse. Je n'ai plus rien à voir avec la diva des podiums et le fantasme de bons nombre d'hommes. Je suis en pleine course avec le diable vers une descente aux enfers. Et le pire, c'est que ça me laisse impassible. Il s'approche alors de mon lit et embrasse ma joue mais ce contact me laisse tremblante de terreur car son ton condescendant montre bien que j'ai touché le fond. Moi je ne vis pas de drame. Et quand c'est le cas, je m'en relève toujours en faisant mine d'oublier, en laissant mon esprit vagabonder en laissant le souvenir douloureux de côté. Car c'est comme ça que les princesses elles font. Elles zappent, tellement peu conscientes de l'importance et valeur des choses qui les entourent. Sa main étreint ensuite la mienne lorsqu'il s'installe à mes côtés mais ce qui me marque le plus est la chaleur de sa paume contre la mienne. C'est dingue, il est si brûlant. Ou peut-être est-ce moi qui suis gelée et qui ait perdu toute chaleur corporel au moment où j'ai vu cette vie s'envoler de mon corps en même temps que la mienne ... Je relève enfin mon regard. Vers Matthias d'abord, puis vers Mavis qui n'a pas bougé mais se sent évidemment de trop. Tu peux nous laisser Mav ... is ? Je ne me sens même plus bien placée pour lui donner encore des surnoms. Il s'exécute sans un mot et jusqu'au moment où il file à travers la pièce, je n'échange aucun mot avec mon meilleur ami. Ce n'est que lorsque la porte se referme derrière lui que j'ai la force de dévisager ensuite Matthias de nouveau. J'esquisse un sourire d'un faiblesse considérable. Je me fais pitié, c'en ait presque affligeant. Je l'ai perdu. Vœux exaucé finalement. Dis-je d'une voix frêle et qui tente de sembler ironique. Il y avait quelques semaines j'annonçais ma grossesse à Matthias. Et il avait suffit de ce laps de temps pour effacer les doutes que j'avais émis face lui. Je crois que j'ai merdé. Sur toute la ligne. C'est de ma faute. Si je l'ai perdu et si j'ai perdu Mavis. J'ai tout foiré. C'en ai sûrement trop. C'est la première fois que je parle enfin de ce que je ressens et les larmes glissent sur mes joues comme l'évidence d'une réalité trop dur à assumer dorénavant ...
Je fais mine d'essayer de le frapper quand bien même il rechigne à l'idée d'être un jour à mes côtés assez longtemps pour me voir enfin mûrir. Mais quel goujat celui-là ! Un peu plus et je pourrais montrer les crocs... Ou lui tirer la langue. Au choix. A dépendre évidemment du taux d'alcool que j'avais ingurgité durant la soirée. Je te manquerais bien trop et puis ... Qui est-ce qui viendrait jouer à la fashion police à tes côtés si ce n'est moi ? Que je lui lance en le lorgnant de toute sa corpulence en émettant des doutes sur ses goûts vestimentaires. Peu probable qu'il en ait quelque chose à foutre de la mode et pourtant j'apprécie honteusement l'idée qu'il aurait bien besoin d'une coaching pro. La diablesse se mêle à la douce et idyllique meilleure amie pendant que je trempe mes lèvres dans le verre que je tiens à la main, regard belliqueux toujours tourné vers mon ami, je ne peux que changer d'expression lorsqu'il met fin à mes doux fantasmes exprimés à haute voix sans aucune once de gêne apparente. Tant pis. Va falloir que je me trouve une autre proie pour m'offrir ce genre de spectacle... Mais c'est qu'elle en deviendrait presque détestable la Woobleforth ! Mais je ne démonte pas et lui lance un de mes sourires les plus charismatiques quand bien même j'éludais l'idée tout simplement. Imaginer Matthias nu ? Mieux valait ne rien penser du tout au risque de faire presque de l'inceste au sein de mes pensées les plus malsaines. Parce que lui, c'était comme un frère que je mettais toujours dit. Ou du moins un frère qui me ferait toujours légèrement fantasmer... Et puis il s'éloigne pour aller chercher à boire. Me saouler ? Avec grand plaisir. Mais pour l'heure, je m'habitue à l'attitude séductrice de mon nouveau partenaire qui tente désespérément de me faire succomber à son charme typique du lieu magique dans lequel nous nous trouvons. Je me laisse prendre au jeu. Les effluves de son parfum sont entêtantes et le rythme cadencé vient parfaire totalement en harmonie nos deux corps qui se rencontrent pour se séparer aussitôt à chaque fois. J'ai toujours été très bonne danseuse et malgré que le Burlesque m'ait échappé, je tentais toujours de prouver mes talents de multiple façons. Une de ses mains s'aventurent le long de ma chute de rein et je ferme les yeux, appréciant, le bruissement des vagues un peu plus loin, s'écrasant sur le sable en un tourbillon de lumières, réfléchies par les énormes néons qui projettent leurs filets lumineux tout autour d'eux. Mais soudain, je sens une présence analogue à une mer en furie tentant de décrocher les rochers immobiles sur son passage. La tempête qui se prépare ? C'est Matthias, d'un calme olympien comme toujours malgré des éclairs dans ses yeux clairs, qu'il lance dorénavant sur moi et mon partenaire. Je fronce les sourcils. Je ne comprends pas. Je pense qu'il plaisante, qu'il s'est emporté à cause de quelqu'un au bar. Mais non. Son attention est désespérément focalisée sur ma silhouette rapprochée de celle de ce parfait inconnu. Quelques paroles supplémentaires et une poigne autoritaire sur mon bras, m'informe qu'il n'est définitivement plus l'heure des festivités. Mais qu'est-ce qu'il lui prend ? Je m'éloigne à ses côtés. Il me ramène sur terre en deux secondes. Il suffit que mon regard se fasse poignardé par le sien avec autant de véhémence qu'un animal allant à l'abatoire. Il se met à marcher, et consternée, je le suis alors, la mine incrédule, comme une enfant qui est sur le point de se faire prendre un sermon sans savoir réellement de quoi il s'agit. Et les paroles fusent alors. Elles me font l'effet d'une bombe. Elles sont insultantes, réprobatrices, bouillantes de propos inaudibles. Elles débordent de sa bouche comme des centaines d'attaques et je m'arrête aussitôt pour lui faire face. Il a touché la corde sensible, celle qui semblait enterré à des milliers de mètres sous mes pieds. Ma main se dresse vers son visage mais au dernier moment je me retiens et serre le poing. Cette simple gifle que je me suis retenue de lui mettre m'énerve encore plus. Parce que jamais je n'aurais pensé avoir un jour l'envie d'en arriver là avec lui montrant à quel point il avait pu me toucher d'une manière aussi indélicate que surprenante. Mais c'est quoi ton problème Matthias ?! J'ai presque retenu ma respiration à ce moment précis parce que j'ai l'impression de me retrouver dans une autre dimension. Depuis quand nous deux on se dispute ?! Depuis quand est-il si attentif à mes besoins de cette manière ? Et surtout aussi froid envers moi ? C'est surtout ça qui me choque le plus. Comme s'il essayait de prouver quelque chose que je n'étais pas en proie de deviner. Tu n'es pas mon père alors tu n'as rien à dire sur ce que je peux faire de ma vie ! Je suis adulte à ce que je sache. Je tentais de maîtriser les trémolos dans ma voix qui reflétait une colère stratosphériques qui pointait son visage. Garder mon sang-froid était toujours l'une de mes prédispositions. Mais à présent, il s'avérait que je pouvais partir au quart de tour. Depuis mon histoire avec Mavis j'étais même devenue bien plus espiègle, blessante avec les gens que je ne connaissais pas. A la limite d'être fichée comme une garce. Berkeley n'en manquait pas, une de plus ne lui ferait sûrement pas de mal et pourtant ... Ce changement d'attitude reflétait aussi une tournure dans ma vie qui n'avait pas été sans fracas. Mais ça il le savait alors à quoi jouait-il ce soir ? Et puis ... Je ... Comment tu peux me parler de fonder une famille Matthias ? Alors parce que monsieur est père, il croit que c'est ce que je veux ?! Ben figure toi que c'est pas près d'arriver pour moi. Jamais. Alors tes leçons tu te les gardes ! Je lui crachais une vérité toute préparée mais qui semblait la plus logique pour moi. Je le pensais, de tout mon être. Mais ce qui m'affligeais le plus c'était son indélicatesse et son manque de tact ce soir. Pourquoi était-il si énervé ? Ses paroles, ils auraient pu me les dire. N'importe quand. De lui, je pouvais tout entendre. Mais pas de cette manière, pas avec ce regard et ce ton désemparé. Comme si je n'étais même plus assez bien pour lui. Que je le décevais. Venant de lui c'était le pire car il était depuis ces dernières années, la personne la plus importante à mes yeux.
Je ne sais pas combien de temps j'avais mis avant de pousser la porte de l'hôpital. La Mustang que je ne lâchais plus et que mes parents m'avaient offert à mon seizième anniversaire semblait pourtant, poussé à sa vitesse maximum. Je fonçais dans les rues de la ville, grillait les stops, me fichais éperdument des néons brûlants des poteaux qui illuminaient mon visage et éblouissait ma vue sans scrupule. Je ne réfléchissais pas. Mon coeur battait à tout rompre, mes yeux, fixés sur l'heure ne cessait de compter les minutes qui me séparait dorénavant de l'appel que j'avais reçu de l'hôpital. Il était arrivé quelque chose de grave cette nuit et mon cerveau avait bien du mal à analyser la situation tant elle semblait terrifiante. Concentre toi sur la route Léo. Les pneus crissent sur le goudron d'un noir de jais pendant que je laisse la voiture s'isoler sur un coin du parking pour foncer à travers l'habitacle immaculé de blanc de l'hôpital. Mon regard jette des coups d'oeil effarés et hagards partout dans la salle d'attente lorsqu'au loin j'aperçois Matthias au fond d'un couloir, face à une porte close, les yeux rivés à travers le petit hublot qui lui permet de voir à travers cette impasse. Je me jette à travers la masse de blessés pour tenter de l'approcher rapidement. Son corps est inerte, ses yeux rouges. Sa gorge se serre et se contracte tout comme la mienne. Un drame est arrivé et il faut absolument que je ne le retienne avant qu'il ne s'effondre pour ne plus jamais se réveiller. Tout sauf ça. A peine à ses côtés, mon regard ne s'empêche de regarder ce qui absorbait toute son attention. Des hommes en blouses bleu qui se reculent d'un corps immaculé de sang. Le visage d'Eden m'apparaît comme une vision d'horreur si inconcevable que je deviens livide. Ma main s'écrase sur ma bouche pour contenir un cri de stupeur et je me tourne vers Matthias qui observe la femme de sa vie l'abandonner pour toujours. Je ressens toute sa souffrance au moment même où je me jette dans ses bras et entoure chaque parcelle de son corps comme pour éviter qu'il ne se consume entièrement. La scène tourne au ralentit, le sang tambourine à mes oreilles mais je n'ose me détacher de Matthias. Je suis désolée Matthias. Tellement désolée... Je tente de retenir les soubresauts de ma voix qui cache l'envie inaudible de déverser ma colère face au destin, en noyant mon visage de larmes brûlantes d'indignation. Mais je tente de rester forte parce que Matthias, il va avoir besoin de moi. Plus que jamais...
Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Mar 12 Aoû - 22:00
Past ► Assis aux côtés de Léo, ma main tenant délicatement la sienne, je lui demande de m'expliquer ce qu'il vient de se passer dans un murmure. J'ai occulté tout ce qui se trouvait à proximité pour me focaliser sur le plus important : ma meilleure amie. J'oubliais tout, jusqu'à la présence de son petit-ami. Indifférent à ce que lui pouvait ressentir. Indifférent à ce qu'il pourrait penser en me voyant aux côtés de Léo, à la place où lui aurait dû être. J'étais trop bouleversé pour la Iota pour comprendre que quelque chose ne tournait pas rond entre eux. Je me suis retourné vers l'Alpha lorsque Léo lui demanda de sortir, pour nous laisser seul. Il s'exécuta, et j'ai hoché la tête en guise de remerciement. Mavis s'éloigna, et referma la porte derrière lui. Une fraction de seconde plus tard, j'ai reporté mon attention sur Léo. « Je suis désolé. » Soufflais-je, alors qu'elle confirmait ce que Mavis m'avait dit au téléphone. Elle avait perdu l'enfant. Aussitôt, la conversation que nous avions eu il y a quelques semaines me revint en mémoire. Léo était venue pour m'annoncer la nouvelle, et me faire part de ses doutes. Elle m'avait plus ou moins fait comprendre qu'elle ne désirait pas cet enfant, qu'elle ne se sentait pas prête à être mère, qu'elle avait peur de tout foirer. Elle n'aurait pas la chance d'affirmer ou d'infirmer ces différentes théories. « Dis pas ça. » Murmurais-je en secouant la tête, bien décidé à la déculpabiliser. « Ça arrive, ce genre de chose. C'est triste, c'est dommage, mais c'est comme ça. Il n'y a rien que l'on puisse faire. Il n'y a rien que tu aurais pu faire. » Rectifiais-je en remettant en place l'une de ses mèches de cheveux. « Aylesbury est intelligent, il le sait. Il ne t'en tiendra pas rigueur. Tout n'est pas perdu. » Ajoutais-je. Bizarrement, je me montrais optimiste. Moi qui voyais toujours tout en noir, je voulais désormais ardemment que Léo reprenne confiance en elle. « Allez, arrête de pleurer. » Arrête, parce que je ne supporte pas ça. Il n'y avait rien de pire, pour moi, que de voir les femmes de ma vie pleurer. « La vie est injuste, malheureusement. Elle t'a blessée toi. Elle a pris les jambes de ma sœur. Elle m'a arraché mon petit frère. » Je parlais rarement de ce dernier élément, mais Léo n'était pas sans l'ignorer. Mais aujourd'hui, pour elle, j'étais prêt à faire une exception à la règle. « Il faut vivre avec. C'est difficile. Ça fait mal, mais ce n'est pas impossible. » Finis-je par murmurer. Je me suis allongé aux côtés de Léo, posant ma tête à côté de la sienne sur l'oreiller. Ma main gauche caressa distraitement son dos, tandis que je reprenais la parole. « Tu vas devoir être forte, Léo. » Parce que les prochaines heures, les prochains jours, les prochaines semaines vont être difficiles, voire invivables. Mais ça, je ne préférais pas le mentionner à haute voix. « Et je serai là pour toi. Quand tu veux. Quand tu en auras besoin. Je serai là. » Répétais-je, alors que je l'étreignais délicatement.
Present ► « Je trouverais un autre mannequin. » Dis-je en haussant les épaules, comme si elle était parfaitement remplaçable. Sauf qu'elle ne l'était pas, évidemment. On ne remplaçait pas l'amie de toute une vie. « Ce n'est pas ce qui manque. » Bon ça, par contre, c'était vrai. Eden avait dirigé l'entreprise de mannequinat de sa mère. Elle la dirigeait déjà lorsque j'étais entré à son service, et je mentirais si je disais qu'à mes débuts, je n'avais pas profité de mon statut pour grappiller quelques numéros. Après ma rupture avec Alaina, je n'avais pas eu le cœur à me caser, et ces filles frivoles étaient tombées à point nommé. « D'ailleurs, tu n'as pas une ou deux amies à me présenter ? » La questionnais-je, faussement innocent. J'affichais un petit sourire narquois aux lèvres, tandis que Léo levait les yeux au ciel. J'étais fier de moi, et de mes conneries. « Ce n'est pas ce qu'il manque ici. » Répondis-je, d'humeur un peu moins enjouée, alors qu'elle me disait qu'elle devrait se trouver quelqu'un pour exhausser ses fantasmes les plus étranges. Il suffisait de jeter un coup d’œil rapide pour voir que la plupart de la gent masculine n'était pas indifférente aux courbes et au charme de Léo. Chacun semblait prêt à saisir sa chance, dès qu'elle s'éloignerait de moi. Ce qu'elle fit, en se dirigeant sur la piste de danse alors que je m'approchais du bar.
Après mes odieuses accusations, la réaction de Léo-Alisson ne se fit pas attendre. Elle s'arrêta brusquement, et ses yeux se transformèrent en deux petits billes rondes assassines. J'ai dégluti, regrettant déjà d'avoir eu l'audace de lui dire le fond de ma pensée. Mais c'était trop tard ; le mal était fait. Ainsi, lorsqu'elle leva une main pour me gifler, je ne fis aucun geste pour l'arrêter. Je ne pris même pas la peine de tenter d'esquiver la menace. Ce n'était qu'un juste retour des choses – j'avais ce que je méritais, voilà tout. Cependant, et contrairement à ce que j'avais imaginé, la main de Léo ne s'abattit jamais sur ma joue. Elle resta en l'air pendant quelques secondes, avant de redescendre mollement sur son flanc. C'était pire que tout. « Je ne pense pas être celui qui a un problème dans cette histoire. » Répondis-je en baissant les yeux. Après tout, puisque j'avais décidé d'être courageux et de lui dire le fond de ma pensée, autant aller jusqu'au bout. Après tout, ça ne pouvait pas être pire, n'est-ce pas ? Nous avions déjà touché le fond, non ? « T'es peut-être une adulte mais tu ne te comportes pas comme tel ! » M'exclamais-je, me retournant pour lui faire face. J'avais déjà haussé le ton en présence de ma meilleure amie, mais ça n'avait jamais été dirigé contre elle. J'avais toujours été conciliant, amical, doux. Hors de question de la brusquer, la vie avait été suffisamment difficile avec elle pour que je n'en rajoute une couche. « Pourquoi pas ? » Demandais-je, alors qu'elle semblait ulcérée que j'ose mentionner l'idée qu'elle puisse fonder, à son tour, une famille. Mais ma légèreté disparut à l'instant précis où Léo critiquait mon propre statut familial. « Laisse mes fils en dehors de cette histoire. » Sifflais-je, les yeux plissés et les lèvres pincées. Il y a des choses sur lesquelles je suis intransigeant – Gabriel et Nathaniel figurent en tête de liste. Quiconque touchera à un cheveu de mes fils le payera. Cher, très cher. C'est une règle d'or, et je ne suis pas prêt à y déroger. « Je déconne pas Léo. » Précisais-je, toujours aussi sèchement. Comme si elle pouvait en douter. Elle avait été là, toutes ces années. Elle savait que les jumeaux étaient les personnes auxquelles je tenais le plus au monde. Je pourrais devenir dingue, rien qu'à l'idée qu'il puisse leur arriver quelque chose. Je tuerais de mes propres mains si cela s'avérait être nécessaire. « Tu peux dire ce que tu veux, j'y crois pas. » Dis-je, balayant ses propos d'un revers de main. Je l'avais déjà vue avec mes fils – elle ne jouait pas un jeu. Avec Gabriel et Nathaniel, elle se laissait aller, se laissait attendrir – revivait, d'une certaine façon. J'adorais ma meilleure amie, et je la connaissais par cœur. Elle avait beau être et paraître forte, je savais néanmoins qu'elle cachait des blessures profondes et douloureuses. « T'es juste paniquée à l'idée de t'attacher à nouveau à quelqu'un, sous prétexte que ça n'a pas fonctionné avec Aylesbury dix ans plus tôt. » Je ne comptais pas lâcher le morceau. Trop longtemps, je m'étais retenu de lui exprimer le fond de ma pensée. Trop longtemps, je l'avais regardée faire les mauvais choix en acquiesçant et en la ramassant à la petite cuillère lorsque cela s'avérait nécessaire. Trop longtemps, je m'étais mordu les doigts de ne pas avoir eu le courage de me confronter à ma meilleure amie, par peur de la perdre. « Réveille-toi Léo, le temps a passé. Tu as payé suffisamment cher tes erreurs du passé, il serait temps que tu te pardonnes.Tu ne peux pas te morfondre jusqu'à la fin de tes jours. » Commençais-je, prêt à lui ouvrir les yeux sur des faits qui dataient. Je souffrirais peut-être de mon audace, mais tant pis. J'espérais que ça lui serait utile. Que ça l'aiderait. « Je ne peux pas te laisser te morfondre jusqu'à la fin de tes jours. » Corrigeais-je, la tête baissée. J'esquissais à nouveau quelques pas sur le sable, fixant l'étendue d'eau qui s'offrait à mes yeux. C'était une nuit magnifique. Lune pleine, ciel étoilé, une légère brise pour nous rafraîchir. Dommage que l'ambiance soit aussi électrique. « Gabriel et Nathaniel te considèrent comme une mère. Tu ne peux pas continuer de t’autodétruire. Ils ont besoin de stabilité, et ils ont besoin de toi. » Soufflais-je, m'approchant à nouveau d'elle. Mes mains se posèrent sur ses joues, et mon front se colla au sien. Elle voulait s'échapper de cette étreinte ? Impossible. Elle devrait attendre que je finisse de lui exposer mon point de vue. « Ressaisis-toi, Léo. Pour eux. Pour toi. Pour moi. Pour nous. » Les mots venaient mourir sur mes lèvres, dans une dernière supplication. Elle ne pouvait pas abandonner la partie, pas maintenant. « Moi aussi, j'ai besoin de toi. » Soufflais-je, mes lèvres à quelques millimètres des siennes. Mon regard ne lâchait pas le sien, et pour la première fois de ma vie, je réalisais que mon amitié avec Léo était fragile. Fragile, parce que je m'étais laissé entraîner sur une pente glissante. Dangereuse. Délicate. Et incertaine.
Past ► J'étais assis au fond du couloir, les yeux rivés sur mes mains tâchées d'un sang qui n'était pas le mien. Face à moi, une salle où s'affairaient plusieurs médecins urgentistes. La patiente ? Eden. Les stores vénitiens n'avaient pas été baissés, ce qui me permettait d'avoir une vue imprenable sur ce qui était en train de se passer. Mais ça n'avait aucun intérêt. Je connaissais déjà le verdict. Les pas précipités que j'entendis ne me firent pas tourner les yeux. Tout le monde courait tout le temps, aux urgences. Le temps était précieux, et une seconde pouvait faire toute la différence. J'ai à peine sursauté lorsque j'ai senti deux bras s'enrouler autour de mon cou, et vu de longs cheveux blonds se répandre sur mon épaule. Ma main droite se posa sur mon abdomen, exerçant une légère pression. La balle perdue que j'avais pris commençait à me faire mal. L'adrénaline avait quitté mon corps, et donc, conséquence logique, la douleur se réveillait. J'ai posé ma tête sur l'avant bras de Léo, me laissant finalement aller à une étreinte qui était la bienvenue. Nous sommes restés ainsi pendant quelques secondes, jusqu'à ce que Léo me murmure qu'elle était désolée. J'ai hoché la tête, incapable d'ouvrir la bouche pour la remercier. À nouveau, je me suis perdu dans la contemplation des lieux. J'étais vide de l'intérieur. Seul. Mort. « Elle est décédée à 3h28. » Finis-je par dire, fixant le mur d'un air absent. Mon ton était dénué de toute émotion, purement clinique. J'exposais les faits sans laisser mes sentiments prendre le dessus. « Je ne sais même pas pourquoi ils s'acharnent sur elle, ni même pourquoi je les ai laissés faire. » Avouais-je, toujours sans regarder Léo. « Qui t'a prévenue ? » Demandais-je, posant finalement mes yeux clairs sur le visage inquiet et malheureux de ma meilleure amie. Alors qu'elle esquisse un geste pour s'écarter, je sens mon rythme cardiaque qui s'accélère. « T'en vas pas. » La suppliais-je en posant mes paumes dans ses mains, avant de les serrer. « Me laisse pas, par pitié. » Ma main droite lâche la sienne, et je prends appui sur le mur pour me redresser. Mon abdomen me fait mal, mais ce n'est rien comparé à ce que je ressens. Mais les yeux écarquillés de Léo me font immédiatement taire. Sa main droite pointe quelque chose d'inconnu, et je baisse les yeux pour voir ce qu'il en est. J'ai beau porter un tee-shirt noir, celui-ci ne masque pas les contours d'une tache. Une tache de sang, qui s'agrandit au fur et à mesure que le temps passe. Léo baisse les yeux sur son avant-bras, et regarde le mur. Les deux endroits où j'ai laissé des empreintes, où ma blessure physique est désormais exposée. Elle me regarde, incrédule, tandis que j'esquisse un pas en arrière. Le sang d'Eden sur mes mains était sec. Pas le mien. Erreur de débutant. « Je... » Mais la porte de la salle où les médecins s'affairent s'ouvre, et le silence revient aussitôt. Un médecin en blouse bleue nuit en sort, et retire son masque. « Monsieur Dupont de Calendre ? » Le murmure est à peine audible, mais j'ai l'impression que le médecin vient d'hurler. Et malgré mes certitudes, malgré mon pessimisme, malgré moi, je me retrouve pendu à ses lèvres. Et s'ils avaient réussi à la sauver ? Et si un miracle s'était produit ? Et si je m'étais trompé ? Le médecin secoua négativement la tête, et balaya aussitôt mes espoirs les plus fous. Je me suis mordu la lèvre inférieure avec force, jusqu'à ce que je sente le goût métallique du sang sur ma bouche, alors que les mots du médecin me parvenaient aux oreilles par intermittence. « Désolé... ce qu'on a pu... beaucoup de sang... blessure profonde... annoncer... sa famille et ses proches... » Mais j'étais déconnecté. Depuis bien longtemps. Ma tête tournait, et j'avais l'impression de tanguer. C'était terminé. Terminé. Une fois de plus, la vie avait été injuste avec moi. Une fois de plus, je subissais de plein fouet la douleur de la perte d'un des êtres aimés. Veuf. Voilà ce que j'étais. À même pas trente-deux ans.
Invité
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Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Ven 12 Sep - 0:42
Just give me your hand so I can pull you back over
Léo-Alisson&Matthias
Une seconde s'écoule. Puis une énième. Et elle s'échappe du temps comme des gouttes d'eau accumulées au bord d'un robinet mal fermé. Ces secondes que je perd représente tout ce que je perd en ce laps de temps. Elle représente les malheurs et les doutes qui s'abattent sans me laisser de répit depuis quelques temps. Aurais-je pu vouloir plus que je ne l'aurais pas obtenu. J'avais toujours tout eu tout sans aucun problème. Aujourd'hui il était logique que la roue tourne, ce que beaucoup d'envieux attendaient avec une véhémente impatience. Je les haïssais ces gens qui demandaient le malheur de ceux qui avaient plus qu'eux car dorénavant il était bien possible que je reporte la faute sur tout et tout le monde et qu'ils en fassent par la même occasion les frais. Matthias me tenait la main, rassurait les moindres replis de mon âme piégé par les méandres dans lesquels elle s'était fait absorbée sans aucune pitié. Je tente d'immerger, de plonger mon regard dans le sien, de tomber sur la bouée qui m'aiderais à surmonter tout ça. Je lutte pour m'accrocher à la lueur qui émerge de lui, qui le transforme en l'homme sur lequel je pourrais compter toute ma vie. Je tente de me rassurer et de comprendre qu'il sera là lui, et que c'est le plus important. J'y lis l'amour enivrant qu'il me porte tout comme l'inquiétude qui émane de chacun des traits tendus de son visage à présent. Je n'aime pas lui faire ressentir ce genre de sensations car il les a trop souvent connues pour que je lui fasse subir de nouvelles tortures pourtant bien moins notables. Mais je suis d'un égoïsme rare. Egoïsme volontaire mais qui fait partit de toutes générations choyés et élevés au rang de princes dès la naissance. A quoi bon résister à ce genre d'éducation, c'est peine perdu et même les plus abrutis qui s'évertuaient à contrer toutes les décisions de leurs parents s'en rendaient compte à un moment donné de leur misérable vie de rebellions inutiles. Il s'installe ensuite à mes côtés pendant que ses paroles passent sur mon visage comme une légère brise fraiche après un incendie ravageur. Ça fait du bien mais ça ne répare pas les dégâts. Mais on ferme les yeux tout de même parce que c'est une lueur d'espoir. Un vrai moment de bien-être à travers la fumée noir et épaisse qui était venue obstruée toutes vos pensées euphoriques. Moi je souffre mais je lui en fais part maladroitement. Lui ne l'est pas. Il sait toujours trouver les mots justes. Comment fait-il d'ailleurs ? C'est bien une énigme. Il apaise pourtant mes maux comme personne et son corps, reposant dorénavant contre le mien, est l'enclume qui me retient coûte que coûte contre mon incroyable envie de me laisser tomber dans le trou béant qui s'est ouvert dans ma poitrine. L'homme que j'aime n'est plus qu'un songe tout comme la famille que l'on aurait pu un jour avoir ensemble. Je n'ai plus de famille, je n'ai plus d'amis ni de carrière. Je n'ai plus que Matthias. Seulement lui et ça devrait me suffire. Merci Matt. Je sais pas ce que je ferais si je te perdais aussi... Que je lui murmure en engouffrant ma tête au creux de son pectoral pendant que je tente d'apaiser les battement de mon coeur au bercement apaisant de sa respiration. La chaleur de son corps m'englobe et avec elle, je tente de faire le vide. Mais ça allait prendre du temps. Beaucoup de temps.
Courroucée et indignée par ses remarques je ne peux qu'ouvrir une bouche en forme de o. Moi ? Devenir bonne comédienne avec l'âge ? Toujours pas. Mais s'il pouvait tomber pour une fois dans le piège ça aurait été gentil. Pour l'heure il n'avait clairement pas l'air de croire à ma consternation et je ne peux qu'éclater de rire à ses remarques. Sérieux ou non, démoniaque ou adorable, les gens pouvaient se poser nombre de questions sur l'ancien iota mais pour ma part, je n'avais aucun doute sur ce qu'il pensait réellement et n'étais en aucune mesure, apte à me sentir encore un temps soit peu surprise par ce qu'il avait derrière la tête. Divine protectrice de nos échanges sarcastiques, c'est avec dédain que je le toise de haut en bas, lorgnant avec véhémence sa puérilité qui ressortait clairement ce soir. Oh je vois monsieur est dans la finesse ce soir. Très classe de ta part. Je suis irremplaçable. Ce n'était pas une question. Et si tu t'essaies à l'humour, oublie de suite, ce n'est clairement pas ta voie. Briseuse des délires du jeune homme qui voulait me remplacer comme un vulgaire mouchoir ? Oui peut-être. Il était clair que j'installais de nouveau mon appartenance à sa vie et que je n'allais pas y bouger d'aussitôt alors qu'il le veuille ou non, j'allais rester à ses côtés pour un temps indéterminé malgré ses nombreuses et futures récriminations. Lui n'est pas comme moi. Il n'est pas mauvais comédien. Au contraire, il pourrait vraiment faire gober nombre de bobards incroyables si seulement il n'était d'une franchise inébranlable lorsqu'on le poussait à bout. Mais j'avais au moins le mérite de le connaître par coeur et d'apprécier l'idée que ses paroles n'étaient pas le reflet de son âme qui me dictait tout autre chose à travers ses prunelles d'un acier envoûtant.
Mes tirades sont d'une violence rare mais d'une honnêteté indéniable. Il ne pourra rien faire à ce que je ressens à ce moment précis. Et ce qui m'habite à présent c'est la haine et le mépris. Incroyable con. Tu pouvais pas fermer ta bouche ? Voila ce que je pense à ce moment précis, alors que l'endroit semblait si paradisiaque et que je me noyais dans une joie indétrônable qu'il alimentait de sa présence, chaque seconde plus ressentie. Ha ouais ? Parce que c'est clair que toi t'es un modèle niveau maturité j'oubliais ! Non non non, tout tournait mal, ses paroles avaient un impact inespéré et la colère invitait chacun de mes mouvements à le repousser à présent quand bien même je l'avais toujours voulu proche de moi. Trop même. Depuis que j'avais perdu l'enfant et que les traumatismes avaient partagés et détruis nos vies, l'on s'était raccroché l'un à l'autre. Trop, beaucoup trop même. C'en était malsain cette relation. Les gens qui nous entouraient ne comprenaient pas, je voyais leur regard posé sur nous comme s'ils voyaient quelque chose que je n'arrivais à saisir. Mais ils ne pouvaient pas comprendre ce qui nous liait. Ils ne pouvaient pas imaginer tout ce que nous avions traversé. Pourquoi il était important pour nous de rester comme liés étroitement l'un à l'autre comme un mur de défense contre toutes attaques extérieures. Et voila que je lui balançais en pleine tronche ses enfants. La réponse ne se fit pas attendre. Les traits de son visage se durcissent à tel point que je pris légèrement peur. Je reculais même d'un pas devant cette transformation. Matthias n'avait plus que ses enfants pour se rattacher au souvenir de la femme qu'il avait aimé comme personne. Je savais pertinemment à quel point ils comptaient à ses yeux mais il m'avait blessé et poussé dans mes plus bas retranchements. C'était un système d'auto-défense que j'avais brandit face à lui sans aucune réflexion au préalable. Maintenant j'allais en payer les conséquences mais je m'en fichais éperdument. Mon regard soutient le sien malgré que je sens son air menaçant épié chacune de mes prochaines paroles. Il est imposant Matthias, vraiment et même malgré ma taille, je me sens de nouveau toute petite sous son regard. Je déteste encore plus ça. Et tu vas faire quoi hein ?! A l'époque je me serais tue. J'aurais fermé ma jolie bouche pour éviter d'envenimer les choses. Aujourd'hui, je me serais enfoncée jusqu'à finir comme une loque s'il n'avait pas été là. Alors maintenant que j'avais remonté la pente, le fait que la base de toute ma vie me faisait défaut, m'insupportais à un point que je ne faisais plus attention à rien. S'auto-détruire de nouveau ? La confiance en soit semblait retrouver face à mon imposante remontée dans la vie. Mais ce n'était peut-être qu'une façade. Et puis son ton change. Son discours n'a aucun sens pour moi au début. Pourquoi il me dit tout ça ? Pourquoi réagit-il de la sorte ? Pourquoi maintenant, sur cette plage, alors que tout semblait si parfait autour de nous ? Les étoiles dans mes yeux qui s'émerveillaient dès l'approche du bel homme se sont éteintes bruyamment. Le sang cogne à mes tempes. J'aimerais plaquer mes mains sur mes deux oreilles et lui hurler de se taire. Arrête Matthias, tais toi ! Tu sais, c'est marrant et tu vas peut-être encore me prendre pour ces foutus gosses de riche égoïstes mais on est pas tous comme toi ! On se relève pas forcément tous de la même façon ok ?! Alors c'est mon choix, ça ne te regarde pas et t'y pourras jamais rien. Le ton grimpe rapidement encore et encore. Les gens doivent nous prendre pour de vrais hystériques à présent mais je m'en fous à présent je ne suis plus à ça près et un scandale qui éclate c'est une manière supplémentaire de faire parler de moi et de me relancer dans la presse. Mon souffle se coupe, se relance, puis se coupe de nouveau. Comme si j'essayais de dire des centaines de choses mais qu'à chaque fois je me rattrapais. Mais qu'est-ce que ça peut te foutre à la fin ?! Que je hurle pour finir bien qu'il continue à se rapprocher et m'attrape d'un coup pour venir m'emprisonner de sa poigne de fer. Non pas ça. C'est insoutenable. Je serre les dents, je me comprime. Compressée ainsi sur moi-même j'aimerais qu'il me laisse dorénavant tranquille. Je suis très bien ainsi, je ne veux pas changer et surtout, je ne veux plus jamais tomber amoureuse d'un illustre inconnu. C'est foutu, finit. Il me parle. Encore et encore. Son ton s'est calmé mais mon souffle est trop saccadé pour que je ne l'imite. C'est quoi toute cette excitation qui prend contenance dans mon corps ? Toute cette adrénaline qui est montée d'un coup et qui n'arrive pas à retomber ? J'essaie de réfléchir, de me demander pourquoi je suis tant en colère. C'est à cause de sa manière crue de me dire les choses ? Ou peut-être est-ce une peur incroyable qui me tenaille l'estomac à ce moment précis ... Car il est clair je suis mortifiée. Pétée de trouille même à en juger par le nœud qui tenaille mon bas ventre à présent. Je frémis, me calme d'un coup et me concentre sur son regard plongé dans le mien, sur ses lèvres à quelques millimètres des miennes. Là c'est une sueur glaciale qui parcourt d'un coup mon échine. C'est lui ? C'est lui qui me fait ça ? Je suis perdue. Plus rien ne tourne rond dans ma tête. Mais je ... Je ne suis pas leur mère et ... Tu parles beaucoup Matthias mais t'es tu seulement demandée une seule fois ce qu'il en était de toi ? Tu ne peux continuer à vivre ainsi. Tu ne cherches personne parce que t'as jamais appris à te reconstruire. Voila maintenant que je retourne la situation contre lui pour contrer tout ce qui me vient en tête à présent. Je me sens immonde de lui dire ça mais maintenant qu'on se sort nos quatre vérités, allons-y gaiement ! Ce qu'ils ont vraiment besoin, c'est pas d'un père qui se raccroche à sa meilleure amie de cette manière. C'est d'une personne qu'il aimera de nouveau et avec qui il pourra fonder une véritable famille. Je grimace. Suis-je seulement en train de lui conseiller qu'on arrête clairement ce mélange des rôles qu'on opère depuis nos peines respectives ? Parce que ses enfants ils en seront perdus plus tard. Et que nous aussi au fur et à mesure de tout confondre. En faites j'ai tellement peur de ce que je ressens à présent contre lui qu'il m'ait bien dur de reculer de son étreinte. Putain ce que c'est dur. J'aurais pu déraper mais je ne l'ai pas fait. Je ne peux pas lui faire ça. Je grimace, les yeux fermés en tentant de reculer mais c'est soit sa force, soit mon manque évident de motivation qui détruit mon geste et je reste plantée face à son regard qui me perturbe et auprès de ses lèvres. Plus que jamais attrayantes ce soir-là...
Il ne bouge pas, il est impassible, son regard est vide, mort, détruit. C'est une épave qui est dorénavant présente devant moi. Je hais le destin, ces vies entrecroisées qui se détruisent au fur et à mesure. Je hais cette vie qui s'acharne sur mon meilleur ami sans lui laisser de répit. Je hurle silencieusement au désespoir et je tente de faire garder pied un Matthias qui a sombré, il me semble, bien plus loin que je ne pourrais jamais le suivre. Tant pis, je le ferais tout de même. Et puis finalement il se tourne face à moi. Son regard s'évertue à empoigner le mien mais il n'y transparait aucune émotion. Juste cet air fantôme pénétrant qui me fait mal à un point inimaginable. La personne qui garde Nate et Gabriel... Je suis évasive. En faites sa question m'a prise de court. Mais qu'est-ce qu'on s'en fout ! Mais visiblement, il semblait demander plus principe que pour entendre la réponse. Il s'en fout, il est en train de perdre la femme qu'il aime et plus rien n'a d'importance. Seul le soutient que je pourrais lui apporter en a et il sera indétrônable, je m'en fais le serment au moment même où il me supplie, plongé au coeur de mes bras. Je me mords la lèvre inférieur pour me retenir de ne pas pleurer devant cette peine immense qui semble si démesurée qu'elle ne pourra jamais guérir. Jamais je ne te laisserais. Jamais Matthias. C'est la plus grande certitude de ma vie. De toute une vie. Il y a des gens qui font des promesses qu'ils ne peuvent tenir. Volontairement ou non. Moi si j'étais bien persuadée d'une chose dans le cours de ma vie c'était de ne pouvoir le laisser un jour. Nous étions liés depuis l'enfance et si je le laissais maintenant, j'allais le perdre à jamais. Et puis il s'écarte et mon regard s'abat soudainement sur son tee-shirt, tâché d'un liquide que je ne reconnais pas immédiatement. Puis ma vue se brouille lorsque j'aperçois le sang qui rougeoie sur mon tee-shirt blanc, ses mains et les murs sur lesquels il a tenté désespérément de se retenir. Mes yeux s'écarquillent, l'incompréhension me gagne, la terreur aussi. Plus vive que jamais auparavant, elle englobe mon être à tel point que j'en ai le souffle coupé. Là, je suis prête à tourner de l'heure. La phobie maladive de le perdre lui, encore plus que tous les autres auparavant. Mais avant même que je ne puisse dire quoi que ce soit, les médecins arrivent face à nous et dévoile leur funeste nouvelle. Je pensais Matthias au fond du gouffre mais sa mine est encore plus horrifiée à présent. Mais moi je me fous éperdument des paroles des hommes en blouse à présent. Je vous en supplie, il est blessé, j'ai besoin d'aide ! La peur tétanise mon être et je retiens Matthias, blanc comme un linge. Il se meurt. De chagrin, de désarrois. Mais il se vide aussi de son sang et je ne le laisserais pas. Matthias, tu m'entends ? Tu t'accroches, me laisse pas tomber, je t'interdis de me laisser tomber ! Mais il ne m'écoute pas. Du moins j'en ai pas l'impression. Son regard est absent, loin à présent et c'est lorsque je sens son poids s'écrouler, que je comprends que les médecins sont en train d'essayer de lui sauver la vie car il la perd lui aussi dans ce couloir. Mais jamais ma main ne lâche la sienne.
Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Dim 28 Sep - 15:15
Past ► « Léo ? » Ma voix résonne dans l'entrée, alors que je fais claquer la porte sans aucune discrétion. Machinalement, je verrouille la serrure derrière mon passage, laissant les clés sur la porte. Aucune voix ne me répond. Il n'y a aucun signe de vie dans cet appartement, mais je suis pourtant un peu près sur d'y trouver mon amie. Le problème ? Je n'ai aucune idée de comment je vais la trouver. Est-ce un bon jour pour elle ? Un de ces jours lumineux, où elle sourit et tente de reprendre goût à la vie ? Ou est-ce un de ces jours sombres, où rien ni personne ne lui faire ressentir la moindre émotion ? J'esquisse quelques pas dans le couloir, et je débouche finalement dans le salon. Personne. Seulement, vu la vision apocalyptique à laquelle j'ai droit, je devine que le salon a été colonisé récemment. Un verre à moitié plein traîne sur la table basse, un plaid informe gît sur le sol, et une boîte de gâteaux est posée sur l'accoudoir. Je soupire légèrement, passant une main dans mes cheveux. Je n'ai pas croisé Léo que déjà, je me sens démuni face à la situation. S'il y a un tel capharnaüm dans le salon, ça ne laisse rien de présager de bon. Léo doit être dans une mauvaise passe. J'abandonne ma veste sur le canapé, avant de me diriger directement vers sa chambre. « Léo ? » Je réitère mon appel, mais une fois de plus, aucune réponse ne me parvient. Je pose une oreille attentive sur la porte de la salle de bain, vérifiant qu'elle n'est pas sous la douche. Après m'être assuré que l'eau ne coulait pas, je n'hésite plus et me dirige vers sa chambre. Pour la deuxième fois de la journée, j'ouvre la porte à la volée, et je fais irruption dans la pièce sans aucune discrétion. Allongée sur son lit, ses longues mèches blondes éparpillées sur son oreiller, Léo-Alisson me regarde d'un air désapprobateur. Elle ne va quand même pas oser me faire une leçon de morale, n'est-ce pas ? « Oui, je sais, c'est pas bien. J'aurais dû frapper, attendre que tu me répondes, et seulement entrer. » Déclarais-je en levant les yeux au ciel, désamorçant ses potentielles critiques à mon égard. Si elle pense pouvoir me vexer, c'est mal barré. Je suis plutôt du genre tenace. Encore plus depuis notre discussion à l'hôpital, juste après le drame. Depuis sa fausse-couche, je ne l'ai pas lâchée d'une semelle. Passant minimum deux fois par jour – le matin et le soir – pour m'assurer que tout allait bien, et qu'elle n'avait besoin de rien. Je ne l'ai jamais laissée tomber, et j'avais désormais la certitude que je ne la laisserais jamais tomber. Même lorsqu'elle s'est débattue de toutes ses forces, même lorsqu'elle a été odieuse, même lorsqu'elle a cherché à me mettre plus bas que terre. « Salut beauté fatale. » Dis-je en me penchant au dessus d'elle, embrassant tendrement son front. Je passe par dessus son corps pour aller m'étaler de l'autre côté du lit, sans aucune gêne. « Alors, comment ça va aujourd'hui ? » Question devenue presque rituelle. Mais cruellement nécessaire.
Present ► « Irremplaçable, c'est un bien grand mot. » Dis-je en haussant les épaules, jouant la carte du peu convaincu par ses propos. Sauf que depuis le temps qu'elle me fréquentait, Léo-Alisson savait pertinemment que j'étais en train de mentir. Bien sur qu'elle était irremplaçable – au moins à mes yeux. C'était ma meilleure amie, depuis toujours. C'était la personne qui était toujours là, et qui avait toujours été là. C'était d'ailleurs la seule et vraie amie que j'avais. Celle sur qui je pouvais compter, peu importe l'instant ou le problème. L'appeler à trois heures du matin pour aller enterrer un cadavre, la réveiller à six juste parce que j'ai besoin de savoir si elle ira chercher les jumeaux à l'école, lui balancer un seau d'eau alors qu'elle sort de la salle de bain où elle vient de passer une heure à se préparer. Oui, Léo était ce genre d'amie. Irremplaçable. « Arrête ! Je sais que t'adooooores quand je te fais des blagues. » Répliquais-je, exagérant volontairement sur le verbe. « Et d'ailleurs si j'arrêtais de t'en faire, t'en serais la première affectée et malheureuse. » Affirmais-je, large sourire aux lèvres, avant qu'elle ne se détourne pour aller se déhancher.
« Ce n'est pas ce que j'ai dit, mais je te signale que j'ai des responsabilités auxquelles je ne peux pas faillir ! » M'exclamais-je, répondant avec acidité à sa remarque. Il était évident que je faisais implicitement référence aux jumeaux. Je ne pouvais pas baisser les bras les jours où j'étais démotivé, parce qu'ils étaient là. Je ne pouvais pas me permettre d'aller draguer la première personne venue et la ramener à la maison, parce qu'ils étaient là. Avoir des enfants change la vie, les habitudes, même notre façon de penser. Et si Léo avait mal pris ma réflexion, c'est bien parce qu'il devait y avoir un fond de vérité. « Ce que je vais faire ? » Répétais-je, avant de me détourner de l'ancienne Iota. « Rien. C'est à toi de faire quelque chose, pas à moi. » Maintenant que je lui avais tout dit – ou presque – et qu'elle avait toutes les cartes en main, c'était à elle de réagir. À elle d'accepter cette main que je lui avais tendue. À elle de s'accrocher, et de se sortir la tête de l'eau. Complètement, et définitivement. « Tu peux pas toujours tout justifier par ton statut de gosse de riche. Ça n'a aucun rapport ! » Comme si le fait qu'elle soit né avec une petite cuillère en argent dans la bouche allait changer quelque chose. Face aux aléas de la vie, qu'on vienne d'un bidonville ou qu'on ait vécu dans le XVIème, ça ne change pas grand chose. On prend les drames de plein fouet, on subit la peine avec violence et douleur. « T'es gonflée de me balancer ça à la gueule ! » M'exclamais-je, en colère. Comment ça, ça ne me regardait pas ? Elle allait voir. « S'il y a bien quelqu'un que ça concerne, c'est moi ! Qui était là quand ta relation avec Mavis a pris l'eau ? Qui est là dans les moments joyeux comme dans les moments difficiles ? Qui appelles-tu quand tu as besoin d'aide, de conseil, ou de passer une soirée tranquille ? Hein ? » Ces questions étaient purement rhétoriques, puisque j'en connaissais la réponse : « toi ». Je faisais parti du paysage, et tout le monde semblait en avoir pris l'habitude. Nos familles, nos amis. Léo était rarement dissociée de Matthias, et inversement. Mais ça nous convenait, et c'était l'essentiel. On se fichait complètement des rumeurs, des racontars, et de ce que les gens pouvaient penser. On vivait pour nous, point barre. Et cette pensée me fit un électrochoc. Je me suis rapidement rapproché de Léo, prêt et déterminé à lui faire entendre raison. Il n'était plus question de s'engueuler – je n'avais pas le cœur à la mettre plus bas que terre. C'était épuisant, et ça faisait mal. « Et tu ne le seras jamais, et je ne te demanderai jamais de l'être. » Murmurais-je en secouant la tête, voulant absolument lui faire comprendre ce que je voulais lui dire. « Cependant, tu es la figure féminine de mon entourage qui s'en rapproche le plus. » Les jumeaux avaient toujours été très entourés, protégés, chouchoutés, aimés jusqu'à la déraison. La perte de leur mère n'avait fait que renforcer cet acquis Ma mère, Thaïs, Elmas : elles avaient toutes les trois fait front. Se relayant pour m'épauler, me soutenir, m'aider dans ma tache de père veuf. Toutes les trois, transies de tendresse et d'amour pour les jumeaux, et qui avaient tenté et espéré compenser l'absence affective d'une mère. Mais aucune n'avait pris autant de place que Léo. Elle qui avait été là jour et nuit, tant pour eux que pour moi. Elle qui avait été tellement présente dans leur vie qu'elle en était venue à envahir le placard qui se trouvait dans la chambre d'amis, et qui avait laissé une brosse à dents dans la salle de bain. « Tu comprends pas. » Dis-je en secouant la tête, refusant d'écouter ses paroles. Ce discours aurait pu résonner en moi d'une façon bien différente, il y a quelques temps de cela. Mais aujourd'hui, ça n'avait plus aucun sens. Aujourd'hui, je comprenais que Léo se fourvoyait complètement. « Je n'ai jamais cherché personne parce que celle qu'il me fallait, elle était juste là. En face de moi. » Et elle l'est toujours, actuellement. Il n'y a pas de hasard. « Et si depuis le début, cette personne, c'était toi ? » L'air interdit de Léo me fit comprendre qu'il s'agissait, pour elle, d'un véritable choc. Elle n'avait sans doute jamais imaginé pouvoir entendre un truc pareil – ça tombait bien, je n'avais jamais pensé pouvoir le dire un jour. Il n'y a pas de hasard. « Pourquoi, depuis toutes ces années, nos vies s'entrecroisent-elles ? Pourquoi avons-nous toujours été si liés, et plus que jamais dans la peine et la détresse ? » D'abord elle, et son histoire avec Mavis. Et puis ça avait été mon tour. Notre incapacité à reconstruire une relation avec quelqu'un. Notre incapacité à rester loin l'un de l'autre pendant une longue période. Il n'y a pas de hasard, je persiste et signe. « Pourquoi ? » Répétais-je, plus perdu que jamais, alors que mon regard s'accrochait désespérément au sien. J'espérais qu'elle aurait une réponse à me fournir, mais je devinais, à la vue de ses traits abasourdis, qu'elle n'en menait pas large non plus. Tenté par la blonde, j'ai rapproché mon visage du sien, effleurant ses lèvres du bout des miennes sans pour autant jamais l'embrasser. Mon cœur cognait dans le fond de ma poitrine, alors que la tension culminait à son point le plus haut. « Qu'est-ce que tu m'as fait au juste, hein ? » Demandais-je, ma joue contre la sienne, alors les doigts de ma main droite parcourant avec une avidité inconnue la peau dénudée de son épaule. La bretelle de sa robe tremblait sous mes assauts répétés, mais ne quittait jamais le lieu qu'elle se devait d'occuper. Je frôlais l'interdit du bout des doigts, non sans une certaine passion. Je découvrais ce que j'avais toujours vu, sans pour autant jamais y prêter attention. C'était comme si je venais d'ouvrir les yeux. Pour la première fois depuis quelques années. Je savais déjà qu'il me serait impossible de les refermer. C'était trop tard. Occulter n'était plus une option envisageable – j'étais déjà allé trop loin. Peu importe l'issue de cette conversation, de cette soirée, de ces vacances, je devrais vivre avec.
Past ► J'aurais pu rester assis là pendant des heures. Des heures à contempler les murs blancs et aseptisés d'un couloir d'hôpital. Des murs qui finissent par vous emprisonner, vous étouffer, et qui sont souvent le théâtre de drames et de catastrophes. Mais ma meilleure amie vient interrompre mes songes peu réjouissants – pendant une courte seconde seulement. Indifférent à tout ce qu'il m'entoure, je lui pose des questions qui n'ont pas franchement de sens, vu la gravité de la situation. Mais je me raccroche désespérément à des choses normales, banales, inintéressantes. Je suis sous le choc de ce qu'il s'est passé ce soir, mais trop hébété pour m'en rendre compte. « Thaïs. » Murmurais-je, divulguant à Léo le nom de la personne qui a eu l'honneur de lui annoncer la terrible nouvelle. Ça tombait sous le sens. On avait dû l'appeler, pour s'assurer que de son côté, il n'y avait eu aucun dommage. Et forcément, ma jumelle avait prévenu l'ancienne Iota. Elle me connaissait, et savait que j'allais avoir besoin de soutien. Choisir Léo avait été logique, et évident. « Il faut que j'appelle Elmas. » Soufflais-je, la réalité me frappant de plein fouet. Parce que si pour ma part, j'avais encore la chance d'avoir ma jumelle et mon jumeau pour me soutenir, Elmas, elle, n'avait plus personne. Elle venait de perdre sa moitié, et quelqu'un se devait de lui dire. Il était hors de question qu'elle l'apprenne autrement que par la bouche d'une personne qui lui était proche. Après m'être assuré que Léo ne va pas me laisser à nouveau seul de ce couloir horrible, le médecin sort pour nous annoncer la triste nouvelle. Non pas que ce soit une grande surprise – je le savais déjà. Je l'avais dit. Je leur avais dit, mais ils n'en avaient pas tenu compte. Ils avaient préféré essayer, et essayer encore, jusqu'à finalement s'acharner. Et c'est la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Je vois Léo qui s'agite, mais je ne comprends pas ce qu'elle raconte. Je vois deux autres médecins qui viennent rejoindre le premier, mais je ne comprends pas pourquoi. « Il faut que j'appelle Elmas. » Répétais-je, ignorant le bourdonnement qui naissait et augmentait dans les tréfonds de mon âme. Ma tête devient lourde, mais je n'y prête pas attention. « Je dois lui dire. Elle doit savoir. » Mais je ne sus jamais si les personnes présentes avaient entendu cette dernière requête. Je me souviens clairement de l'avoir pensée, mais je crois que, déjà à cette instant, mon corps n'avait plus été capable de l'exprimer. Et après ça, ce fut le trou noir.
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Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Mar 7 Oct - 19:40
Just give me your hand so I can pull you back over
Léo-Alisson&Matthias
Prostrée devant la télé, j'avais passé mon après-midi à zapper. Le réveil avait été dur, atrocement douloureux. Il avait suffit que je me lève en sursaut, que je jaillisse de sous mes couettes pour m'apercevoir que ce que je vivais n'était pas un rêve et que le trou béant qui creusait ma poitrine était justifié. Chaque jour une douleur lancinante terrassait ma poitrine et venait faire somnoler chaque envie d'avancer. Alors je restais terrée chez moi. J'aurais dû revendre la villa. Mais je n'en avais pas le courage. C'était la maison que j'avais acheté lorsque j'avais perdu mon enfant et il m'était apparu évidement que je devais vivre en dehors de l'université, en famille, auprès de Mavis lorsque j'étais tombée enceinte. Mais aujourd'hui tout était bien différent. Il était partit, passait de temps en temps pour prendre de mes nouvelles mais c'était encore pire que s'il ne passait plus du tout. Sa condescendance me ramenait chaque jour un peu à sa perte. Tout me revenait à présent que j'ouvrais les immenses armoires pour avoir la preuve que ce que je vivais était bien réel. Ses affaires n'étaient plus là, l'odeur dans son cou, je ne la sentirais plus jamais. Je ne sourirais pas devant les magnifiques chemises dont je lui faisais cadeau chaque semaine parce qu'elles ne s'entassaient plus dans l'immense mobilier en bois de style victorien. Non. Mavis était partit et avait embarqué avec lui tout ce qui aurait pu me rappeler son souvenir et celui de la vie que j'avais imaginé pendant bien longtemps ensemble, quoi qu'il arrive. Mais à croire que je mettais totalement trompée. J'avais voulu croire toute ma vie aux contes de fée, avait exprimé plus d'une fois mon envie de rencontrer le prince charmant. Ce n'était pas trop demandé, c'était même concevable et après une longue quête auprès de la gente masculine je l'avais rencontré et non sans difficulté, nous avions finit par former une couple des plus heureux. Mais aujourd'hui, alors que j'avais toujours imaginé que les épreuves que nous avions traversées n'étaient qu'un moyen de tester notre amour, je me disais qu'en faites c'était pour me montrer que je fonçais droit dans un mur. Mais je l'avais aimé comme aucun homme avant lui. Je n'imaginais pas une seule autre personne à mes côtés parce qu'il était depuis toujours l'homme avec qui j'aurais voulu finir chaque nuit et chaque jour. A ses côtés, je me sentais délivrée de tous soucis, bercée par son regard, adulée par ses gestes d'une extrême douceur. Chaque nuit son étreinte me manquait et je redevenais une gamine apeurée. Repliée sur moi-même sous la couette du lit colossale qui trônait au milieu de la chambre parentale, je me sentais affreusement seule, bafouée par de fausses idées que je mettais mises en tête. Quel conne. Alors je mettais redressée et mettais enfouie dans le seul vêtement qu'il me restait de lui. L'enfilant au-dessus de mon corps presque totalement dénudé, j'avais erré dans l'immense demeure bien trop grande pour moi seule. J'avais virée les domestiques et avait laissé Mavis à la porte hier soir lorsqu'il avait voulu prendre des nouvelles. Le regarder aurait été bien trop dur à assumer. La destruction était grande mais c'était la première fois que je comprenais enfin ce mot. Enveloppée dans une couverture d'une chaleur réconfortante, j'avais zappé les chaînes de la télé pour finir par me redresser et retrouver ma chambre. Mais c'était sans compter l'arrivée de Matthias. Il m'appelait et sa voix résonnait en écho à travers les immenses murs de la demeure. Je ne répondais pas. J'étais pitoyable mais quelque chose en moi savait que pour l'instant, j'étais en deuil et que ça passerait. Il fallait juste savoir quand... Je le vois apparaître après un temps incertain à travers l'embrasure de la porte et je lui adresse un sourire amusé. Un grand changement par rapport aux premiers jours. Il s'inquiétait trop pour moi, était sans cesse sur mon dos et se faisait une promesse, passer deux fois par jours. Il s'obnubilait l'esprit par ma souffrance mais on avait tous vécu une rupture difficile et la perte d'un enfant. Peut-être pas ce dernier point ... Toujours est-il que son amitié était prisée et pourtant c'en était encore plus dur parce que ça me rappelait sans cesse que j'avais besoin de lui plus qu'aucun autre jour. Parce que Léo-Alisson s'était brisée en mille morceaux. Je n'ai même pas besoin de maugréer contre lui, il parle pour moi. Je lève alors les yeux au ciel pendant qu'il s'approche pour embrasser mon front et prendre place à mes côtés. Je vais bien. Comme hier. Et les autres jours aussi. Est-ce que je vais réussir à lui faire croire ça ? Autant essayer. Tu sais Matthias, tu n'as pas besoin de venir tous les jours tu sais. Je suis une grande fille, les chagrins d'amour ça arrive à tout le monde. Vraiment ? Parce qu'on aurait dit que la princesse Woobleforth s'en remettait beaucoup moins bien. Mais j'avais accumulé les peines comme jamais dans ma vie. Je me tourne vers lui et l'observe longuement. J'avais peur qu'il pense que j'allais me perdre complètement. Et pourtant je ne pouvais pas totalement le contredire. Dis moi plutôt comment toi tu vas ?
La tension à son comble, c'était l'une des rares fois où Matthias et moi se disputions. Le ton était monté en un instant des plus rapides et les ressentiments s'étaient accumulés encore plus rapidement tout comme lui apparemment. Il en avait gros sur le coeur et moi, j'avais l'impression que cela allait me permettre de pouvoir lui dire ce que je pensais. Imaginer même qu'il pourrait enfin refaire sa vie, peut-être. Je me sentais à une place dans sa vie qui m'effrayait bien plus que tout ce que j'avais vécu jusqu'à présent. L'attachement me ruinait quand bien même j'en avais besoin pour vivre. Arrêtes de me hurler dessus Matthias, je sais déjà tout ça ! Mais ça ne menait à rien. Il avait raison de toute manière. J'étais la plus égoïste entre nous deux parce que je revivais mes plus jeunes années sans me soucier de savoir si ça allait causer du tord autour de moi. Parce qu'au final, je le dénigrais peut-être mais j'avais de réelles responsabilités et c'était les mêmes que celles de Matthias. Ses enfants m'avaient aidé à surmonter les pires passes et surtout, je les aimais à un point excessif par rapport à ce qu'il représentait dans ma vie. Mais l'amour que je leur portais n'avait pas de limite. Néanmoins, je n'étais pas un exemple. J'étais souvent rentrée en titubant chez le De Calendre lorsqu'il m'avait proposé de venir habité avec lui. J'avais fait des crises, m'étais battue avec les gosses comme si j'avais leur âge, Matthias nous retrouvant souvent dans des situations inextricables à devoir gronder ses enfants mais aussi ma manière de les laisser tout faire et de m'en amuser. J'étais une troisième gamine dans sa vie, encore plus irresponsable et irréfléchie qu'avant. Mais je voulais profiter parce que j'avais peur de souffrir de nouveau. Alors la stabilité me faisait une peur bleue. Il n'y avait que Matthias qui avait le droit d'être l'encre qui imposerait à ma vie de tenir le coup. Parce qu'en réalité, la stabilité était déprimante lorsqu'on avait plus personne avec qui la vivre. Et toi tu justifies le fait de te renfermer parce que tu es père de famille mais pourtant ce n'est pas le rapport alors vient pas me faire la morale alors que t'es pas mieux ! On se cachait toujours derrières de fausses idées et arguments bidons qu'on tentaient absolument de se faire croire soit-même. La réalité c'était qu'on était tous les deux effrayer par la perspective de s'ouvrir aux autres une nouvelle fois. Et ça c'était le plus incroyable que personne n'ose se le dire hormis en se hurlant dessus ... Je l'entends me poser toutes ces questions ahurissantes pour finir par me foudroyer du regard. Je ne réponds pas mais la question est clair et on le sait tous deux. C'est lui. Lui qui est là dès que c'est possible, qui l'a toujours été et qui le sera toujours. Et puis j'avais retourné la situation et avait pointer du doigt ce qui me contrariais et m'effrayais le plus. J'étais terrifiée par la perspective de ne plus jamais pouvoir vivre autrement qu'avec lui, fondant une famille qui n'en était pas une. Combler le manque qu'on ressentait l'un et l'autre par notre amitié. C'était dur de voir à quel point on en venait à tout mélanger. C'était grisant et absolument pas ce que je lui souhaitais parce que je ne voulais pas qu'il devienne encore plus dépendant de moi. J'aurais aimé qu'il retombe amoureux, qu'il refasse sa vie, qu'il soit de nouveau heureux avec quelqu'un. Cette simple pensée plia mon coeur en deux et la sensation fut d'une rudesse étonnante. Je ne concevais pas l'idée qu'il soit avec quelqu'un d'autre que moi parce que c'est ce que l'on avait connu ces dernières années. C'était terrible de vouloir quelque chose pour son meilleur ami mais de tout faire pour ne pas l'envisager. Il s'était rapproché à ce moment précis et ses paroles contre mon visage semblaient tenter de percer toutes les barrières que j'avais tenté d'ériger entre nous. Pourtant il n'y en avait jamais une. Mais je soulevais un sujet houleux et plus je l'entendais s'exposer entre nous plus je me disais qu'en faites le problème était tout autre. Bien plus profond, bien plus enfouie derrière toutes mes fausses idées. Mais tu sais aussi que je ne suis pas à la hauteur. Mais il reprenait. Ses paroles m'avaient touché, je me sentais minuscule face à son corps à quelques centimètres du mien. Son emprise avait quelque chose de fatal. Qu'il s'éloigne et je ne l'aurais pas supporté. Tout ce qu'il me disait résonnait dans ma tête et je ferma les yeux. Je ne pouvais assumer son regard. Quelque chose était en train de naître, de changer, une idée conçue dans ma tête depuis toujours mais qui n'avait jamais éclos. Je tente de disperser les multiple frissons qui me gagnent mais ils me submergent à présent. Je me laisse imprégner de chacun de ses mots. Moi qui pensait ne jamais pouvoir être effrayer à ses côtés, je me sentais encore plus dépaysé. Qu'est-ce qu'il voulait dire par là ? Avais-je bien compris ? S'il savait à quel point à ce moment précis je ressentais chacune de ses paroles mais que j'en avais une peur titanesque ... Ses doigts s'égarent sur mon épaule et la caresse du bout de ses phalanges d'une manière dont il ne l'avait jamais fait auparavant. Je relève alors mon visage vers lui et alors que j'allais parler, rétorquer quelque chose d'inaudible, dire n'importe quoi pour lui répondre et sauver les apparences ... Je l'embrassais. J'aurais pensé que le geste aurait semblé étrange, que j'aurais eu l'impression d'embrasser un frère. Ce n'était pas ce que je ressentais à présent. En l'espace de deux secondes à m'accaparer ce que je n'avais jamais eu, je sentis tout d'un coup la passion émerger de mon corps. Un feu ardent consumait chaque fibre de mon corps et j'aurais aimé continuer à savourer cette sensation pendant encore des heures. Mais je me reculais. Brusquement même. En faisant trois pas en arrière, me séparant à regret de son étreinte. Je ... Je suis désolée j'ai ... Péter un plomb ? Mal interpréter tes paroles ? Compris quelque chose que j'aurais voulu aimé entendre sans jamais me l'avouer ? Je ne veux pas perdre ce qu'on a Matthias. Ni les enfants. Aucun de vous trois. Etait-ce une manière comme une autre de lui montrer qu'en perdant dans mes sentiments j'avais peur de prendre le risque qu'on se renie malgré toutes ces années ? Aucune idée. Mais il avait raison. Peut-être que toutes les épreuves qu'on avait vécu n'étaient pas le fruit du hasard. Peut-être qu'en faites, Matthias avait toujours été l'homme qu'il me fallait. Tapis dans l'ombre, nos vies avaient évolué sans jamais se séparer. Et dorénavant, il m'était inconcevable de le voir encore comme mon meilleur ami car ce baiser que je lui avais volé avait été clairement le moment fatidique où je mettais aperçue que je ne le voyais déjà plus ainsi ...
Je courrais après les jumeaux dans l'immense parc où j'étais censée retrouvé Matthias. Mais à défaut de l'apercevoir le premier, j'avais sauté vers les deux garnements qui courraient déjà vers moi tous sourire. J'embrassais chacune de leurs deux frimousses et les observais longuement. Vous avez pas rétrécie vous ? Déjà je sentais qu'ils allaient me sauter dessus. Le parc baigné de lumières représentait l'endroit parfait pour passer du temps avec ses enfants. Ne pouvant connaître se bonheur, je le vivais auprès des deux nouveaux hommes de la famille De Calendre. Leur demeure à quelque pas de là j'avais prévu de m'occuper du diner pour toute la famille. Enfin, Léo-Alisson s'essayait à la cuisine et ils seraient mes testeurs attitrés ! Un sourire s'étendait alors sur mes lèvres au moment même où j'apercevais la gravure de mode qui se joignait à notre petite groupe. Un bras enlaçant ses épaules, je déposais un baiser sur son visage où apparaissait une barbe de trois jours. J'observais son visage avant de m'exprimer finalement. Comment vas-tu beau gosse ? Les rayons du soleil parsemaient sa crinière dorée d'une myriade d'étoiles qui éblouissait mon regard d'un vert passionnant. De loin on aurait vraiment pu y voir une petite famille heureuse. Si seulement ...
Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias Ven 31 Oct - 19:23
once upon a time; Mon sourire s'élargit alors que je remarque que Léo semble être de meilleure humeur. Aujourd'hui, je la trouve certes avachie dans son lit, mais avec le sourire aux lèvres. Elle n'est pas en larmes, n'est visiblement pas sous l'emprise des calmants, et n'a apparemment pas envie de m'étrangler pour avoir osé l'importuner. Il y avait du progrès, et rien que ça, ça me faisait plaisir. Je m'avance vers elle pour la saluer convenablement, avant de m'avachir à mon tour à ses côtés. « Euh hier, c'était pas trop ça je te rappelle. » Répliquais-je en secouant la tête, pas franchement convaincu. Mais aujourd'hui, je voulais bien croire qu'elle allait bien. Elle était différent de d'habitude. Elle souriait. N'avait pas les yeux rouges ou gonflés. « Je sais. » Répondis-je simplement en haussant les épaules. Mais venir la voir, m'assurer qu'elle n'était pas au bord du suicide et qu'elle n'avait besoin de rien me semblait être le minimum syndical. Léo était ma meilleure amie, et la laisser tomber dans ces moments terribles n'était même pas envisageable. Même si elle me repoussait de toutes ses forces. Je trouverais un autre moyen, mais je n'abandonnerais pas. « Est-ce que c'est une manière habile de me dire que je prends trop de place, et que je ferais bien d'aller voir ailleurs si tu y es ? » Demandais-je, envahi par le doute. C'était une requête que je pourrais parfaitement comprendre ; j'avais bien conscience de m'incruster dans son quotidien. Je me doutais aussi qu'elle aurait sans doute préférer rester seule – ce qui, à mon humble avis, était une mauvaise idée. Elle consent finalement à se tourner vers moi, et nous nous observons pendant quelques instants, avant que je ne brise le silence. « Je m'inquiète pour toi. » Soufflais-je. En voyant qu'elle allait s'empresser de me répondre, j'ai levé une main pour lui indiquer de ne pas le faire. J'avais encore à dire. « Je sais ce que tu vas me dire : tu ne devrais pas. Sauf que voilà, t'es ma meilleure amie et tu ne vas pas bien. C'est plus fort que moi, tu comprends ? » Demandais-je, mon regard agrippé au sien. Ces aveux prononcés, la conversation reprit et se porta sur ma propre personne. Guère intéressant, en somme. « Ça va. J'ai un peu de mal à me faire au départ de Thaïs, mais ça va. » Ma jumelle, qui avait décidé de s'exiler à Los Angeles. Son diplôme en poche, des rêves plein la tête, et des étoiles brillant au fond de ses yeux, Thaïs faisait un premier pas vers sa vie future. Faite de stress et de paillettes, j'en étais persuadé. Elle ne serait pas qu'une énième fille à tenter sa chance. Elle y parviendrait. Parce que ma jumelle, elle réussit tout ce qu'elle entreprend. Tout ce qu'elle touche se transforme en or.
right now; « Alors prends tes responsabilités, et bats-toi ! » M'exclamais-je, déterminé à la faire réagir. Je n'étais pas tendre avec elle, mais c'était uniquement pour son bien. Combien de fois m'avait-elle répété, après la mort d'Eden, que j'étais encore jeune, que ma vie n'était pas finie, et que mon futur serait aussi brillant que je voudrais bien qu'il le soit ? Des centaines de fois, probablement. Elle avait été là pour me donner d'excellents conseils dans les pires moments, mais ne semblaient pas capable de se les appliquer à elle-même. Trop longtemps, j'avais fermé les yeux. Je l'avais excusée, arguant que ça finirait par passer. Que tôt ou tard, un élément déclencheur lui ferait arrêter ses conneries. « Ça a un rapport ! T'en connais beaucoup des gens qui veulent d'un veuf avec deux enfants en bas âge ? » Demandais-je en ricanant, peu convaincu. Franchement, ce n'est pas un point positif pour démarrer une vie amoureuse stable et équilibrée – chose que je parvenais à comprendre sans difficulté. Et puis... Pourquoi me parlait-elle de refaire ma vie ? Je n'en avais jamais manifesté l'envie. J'avais toujours eu plus important à faire. J'avais eu quelques aventures sans réelle importance, et ça m'avait suffit. Jusqu'à maintenant, tout du moins. « Je viens tout juste de le comprendre, mais c'est évident. » Lâchais-je, moi-même surpris par ces conclusions qui s'imposaient d'elles-mêmes. J'avais l'impression d'ouvrir les yeux sur un fait qui m'était à la fois étranger et familier. Familier parce qu'il s'agissait de Léo, ma meilleure amie, que je connaissais depuis toujours. Étranger parce que pour la première fois, j'envisageais l'ancienne Iota comme autre chose qu'une amie. « Tu l'as été jusqu'à maintenant. » Soulignais-je, sur un ton nettement plus calme et posé. Depuis que sa vie avait été bouleversée, des années plus tôt, elle avait eu besoin d'être rassurée. Et malgré toutes les bonnes choses qu'elle pouvait faire, malgré tout ce qu'elle pouvait prodiguer et offrir, elle manquait encore d'assurance. Je me demandais si cela s'arrêterait un jour. Si elle finirait par réaliser, tôt ou tard, qu'elle était une bonne personne. Qu'elle prenait, la plupart du temps, les bonnes décisions. « Et je suis là. Je ne vais pas te laisser tomber. » Murmurais-je, entrelaçant les doigts de ma main droite avec les siens. Je ne l'avais jamais abandonnée, et ça ne commencerait pas demain. Vu les mots qui s'échappaient de ma bouche, je devinais que la situation allait se compliquer. Seulement, ce ne serait pas notre premier coup dur. Nous avions survécu aux autres, n'est-ce pas ? Nous survivrions à celui-là. Désormais lancé, je ne m'interrompais plus. Je mettais enfin des mots sur ce que j'avais pu ressentir, notamment au cours des derniers mois. Elle, moi, nous. Nos rapports souvent (trop) amicaux, rarement conflictuels, emprunts d'une tension indicible et pourtant palpable. Et cette conversation, à la fois étrange et révélatrice, nous rapprocha physiquement. Le contact était familier, et pourtant aux antipodes de ceux que nous avions déjà pu partager. Mes doigts effleuraient la peau offerte de son épaule, son parfum venait me chatouiller les narines, et ses lèvres consentirent enfin à se poser sur les miennes. L'échange fut bref mais intense, et semblait vouloir sceller tout ce qui avait été dit auparavant. « T'excuses pas. » Dis-je avec fermeté en secouant la tête. Et puis quoi encore ? Elle allait me demander d'oublier ? Même pas en rêve. « On a déjà perdu ça, Léo. » Déclarais-je, conscient que mes paroles étaient lourdes de sens. Je ne parlais évidemment pas de sa relation avec les jumeaux – elle était authentique, intacte, et forte. Je n'en doutais pas une seule seconde. « Ce qu'on avait, c'était une illusion. Un mensonge. Pas au début, mais ça l'est devenu. » Avec le temps. Parce que nos relations avaient évolué et étaient devenues différentes ; ce soir en était la preuve. « Je ne peux pas dire que je t'aime, parce que j'en sais rien. Seulement... Seulement, je sais que je ressens quelque chose pour toi. Quelque chose de différent, quelque chose qui n'a rien à voir avec notre amitié. » Ça faisait d'ailleurs bien longtemps que j'avais cessé de la regarder comme tel. J'avais commencé à admirer ses courbes féminines, à contempler ses sourires, à dessiner le contour de ses lèvres du regard, à défaut de pouvoir y déposer les miennes. « Laisse-nous une chance Léo. Ne dépose pas les armes avant de t'être battue. » Soufflais-je en m'emparant à nouveau de ses mains. Le temps avait passé. Nos blessures et nos malheurs étaient derrière nous. Et ce moment là, cette chance que l'on avait, c'était la seule de relever la tête et de passer définitivement à autre chose. « A notre tour d'être heureux. »
once upon a time; L'été s'était achevé depuis un bon mois maintenant, mais comme souvent depuis quelques années, la douceur des rayons du soleil inondait la ville de Paris. Profitant des derniers beaux jours que consentait à nous offrir l'été indien, j'avais décidé d'emmener Gabriel et Nathaniel au petit parc le plus proche. Les jumeaux, qui allaient bientôt avoir cinq ans, appréciaient toujours ces moments de franche camaraderie, où rigolade et bonne humeur étaient nos règles principales. Assis sur un banc à l'ombre, je les surveillais du coin de l’œil, veillant à ne jamais les perdre de vue. Non pas que je sois particulièrement inquiet – le XVIème arrondissement était plutôt calme et paisible, mais on n'était jamais trop prudent. Eden avait chèrement payé notre négligence, et par extension, ses fils et moi-même avions aussi goûté à l'amère facture. Malheureusement pour nous, la médiatisation de cette affaire avait éveillé l'intérêt de bien des gens, plus ou moins connus. Il n'était donc pas rare que je me fasse aborder en ville, ou paparazzer lorsque j'étais en compagnie des jumeaux. Je ne souhaitais pas que ces intrusions, éphémères mais souvent peu agréables, viennent troubler le développement de Gabriel ou Nate. Mes sourcils se froncèrent légèrement en les voyant soudainement se relever et courir dans une direction plus lointaine. J'ai aussitôt bondi, prêt à agir si besoin. Mais la vue d'une longue chevelure blonde me rassura, et les battements de mon cœur ralentirent. Tout allait bien ; aucun danger à l'horizon, bien au contraire. Marchant lentement vers Léo, dont Nate refusait visiblement de lâcher le cou, j'ai souri devant ce spectacle attendrissant. Attrapant Gabriel au passage, qui me tendait ses petits bras, j'ai été embrasser ma meilleure amie. « Toujours bien, quand je suis avec mes fils, et en vacances par dessus le marché. » Et c'était bien vrai. Moi, qui avais toujours été très carriériste au point d'en rompre à plusieurs reprises, je ne trouvais plus de pleine satisfaction que lorsque j'étais avec mes progénitures. Le monde à l'envers. « Et toi ? » Demandais-je.
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Sujet: Re: Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias
Just give me your hand so I can pull you back over. ; Léo&Matthias