Je retrouvais Maëlle –enfin – et j’en étais très heureux. Je savais que le temps serait long avant qu’elle oublie cet événement qu’elle avait vécu comme une trahison. Je la comprenais. Je comprenais son point de vue. Mais je persistais à penser que j’avais eu raison de faire ce que j’avais fait. Certes, j’aurais pu le faire de façon plus délicate. Ou alors me débrouiller pour qu’elle en parle d’elle-même à James. Mais ce qui était fait était fait et on ne pouvait pas revenir en arrière. Je préférais me contenter de ce que j’avais obtenu en venant ici. Elle acceptait de revenir vers moi et c’était un véritable soulagement.
Maëlle était un pilier de ma vie. Je ne savais pas comment j’aurais pu me relever en l’ayant perdu. Elle était tout pour moi. J’étais prêt à tout pour elle, même à donner ma vie. La perdre n’aurait pas été surmontable. Alors qu’elle accepte de rester dans la même pièce que moi, de se confier à moi comme elle l’avait déjà fait si souvent, cela me réjouissait. Et je m’en voulais d’être parti en Grèce dès juillet. J’en avais eu besoin. En fait, après l’agression, j’avais eu besoin d’une période de vide. Certes, je n’avais rien vécu de dramatique. Mais après avoir passé trois jours dans un hôpital, j’avais voulu m’enfuir. Je n’aurais sans doute pas dû. Ma meilleure amie avait besoin de moi. Mais comment aurais-je pu le savoir après tout ce qui s’était passé.
Mon discours sur le fait d’être parent venait en parti du fait que cela me désolait depuis toujours que Maëlle pense ne pas pouvoir être une bonne mère. Je savais qu’elle serait très bien dans ce rôle. Mais je ne comptais pas m’immiscer dans la décision qu’elle prendrait pour cet enfant en particulier. J’en avais suffisamment fait.
« Est-ce qu’il sait toujours te rendre heureuse ? » J’avais de sérieux doute sur cette question. Après tout, qu’est-ce qui aurait justifié que ma meilleure amie se réfugie chez son père alors qu’elle avait un petit ami ? Pourquoi était-elle venue pleurer chez moi, s’enfuyant de chez eux en fin d’année scolaire dernière ? James n’avait pas les mêmes préoccupations que les étudiants que nous étions Maëlle et moi. C’était sans doute à cause de cela qu’il avait toujours nourri une certaine jalousie à mon égard. Et aussi le fait que je connaissais ma meilleure amie par cœur. Elle était comme une sœur que je connaissais depuis toujours.
Mon avis personnel était qu’il fallait que ce soit Maëlle qui apprenne à James qu’elle était finalement toujours enceinte. Il valait mieux pour eux deux que cela se passe de cette manière. Sinon, ils courraient droit à la dispute. Et je savais que James pouvait être très blessant quand il s’y mettait.
Mais si elle n’arrivait pas à le joindre… Il choisissait bien son moment pour disparaitre lui… Mais je ne pouvais pas lui lancer la pierre vu mon absence de tout l’été. Simplement, j’aurais pensé qu’il aurait été présent pour elle, et même ravi que j’aie débarrassé le plancher. Mais ce n’était visiblement pas le cas.
Maëlle m’expliqua ensuite son plan. Laisser le bébé à son père. Et continuer ses études.
« D’accord. C’est une très bonne idée. Il sera heureux ici, cet enfant. Entouré de tout le monde. Il aura une enfance merveilleuse. »
Je pensais vraiment ce que je disais. C’était probablement la meilleure solution. Même si je n’avais pas réfléchi à d’autres options, je me rendais bien compte que cette idée rendrait tout le monde heureux. Et Maëlle pourrait finir ses études tranquillement sans avoir le souci d’un enfant à élever.
« C’est bien que tu reviennes à San Francisco pour finir tes études. Tu pourras enfin être ce que tu as toujours rêvé d’être. Et tu pourrais trouver le bonheur comme cela. »
Mais je me demandais de plus en plus si ce bonheur se trouverait avec James. Je ne me permettrais jamais de soulever la question. C’était l’homme que la texane s’était choisi et je lui faisais confiance, comme je l’avais dit, mais il semblait qu’il était plus ou moins aux abonnés absents. Et je m’inquiétais des répercussions que son abandon aurait sur Maëlle. Mais je préférais ne pas en parler.
J’étais heureux d’avoir retrouvé ma meilleure amie. Et je me promis de ne pas la trahir à nouveau.