Ou alors, il va faire le mort

Certes, Noah était toujours présent dans sa vie contrairement à ce que tous avaient pu croire il y a quelques semaines encore, mais Kirby ne tenait pas à garder Aengus loin d'elle et Noah ne lui en voudrait certainement pas si elle emmenait la jeune femme ne serrait-ce qu'une seule et unique fois à l'un de ces cours, histoire de pouvoir passer un peu de temps en compagnie de la blondinette et sortir cette dernière de son quotidien actuel. « Je t'accorderais une séance, sois-en certaine. » Et maintenant, arrête de me contredire. L'étudiante en médecine avait son compagnon à disposition vingt-quatre sur vingt-quatre si elle le désirait, et même s'il se voit très possessif à peine le voilà de retour à la maison, elle n'osait imaginer sa réaction dés lors qu'il apprendra cette nouvelle. Le papa poule en pleine puissance, qui couvrira Kirby et son enfant comme une maman canne protégerait ses œufs. Autrement dit, bonne chance pour sortir seule sans que le futur père ne soit en permanence sur son dos. Ce caractère sur protecteur est bien souvent une malédiction, plus qu'une qualité. Mais son Noah, elle l'aime tel qu'il est et elle y tient comme à la prunelle de ses yeux. Étonnée de la longue tirade de la Gamma, Kirby avale malgré tout la moindre de ses paroles, affichant un maigre sourire en coin. Que ferait-elle sans sa Aengus, après tout ? Même si elles avaient eu leurs lots de disputes, elles restaient inséparables et se confier à elle était bien plus facile que de se confier à son demi-frère ou à son petit-ami. « C'est peut-être dans mes gênes. Peut-être que moi aussi, je finirais par les délaisser et me contenter d'entendre leur voix uniquement au téléphone, même si ça peut sembler improbable. Noah compte beaucoup trop à mes yeux pour que je puisse laisser ma carrière passer avant... lui. » Elle avait hésité sur les mots à employer pour conclure sa phrase. Notre famille, ce terme était resté coincé au fin fond de sa gorge, l'idée de savoir que c'est ce qu'ils formaient depuis l'arrivée du jeune Amoun. Une famille qui, une fois encore, allait s'agrandir d'ici quelques mois. L'index d'Aengus se pressant contre son flanc la fit se cambrer, elle qui était si chatouilleuse au moindre contact physique sur ses hanches. Un rire finit par s'échapper d'entre mes lèvres. Aengus avait toujours eu le don pour rendre une situation quelconque moins gênante qu'elle ne l'est. Mais quelque chose la préoccupait à l'heure actuelle, et en rien de temps, le morceau fut craché. Dans sa tête, Kirby se maudissait presque, mais elle ne voulait en rien tenir la Gamme de sa vie, cette dernière le lui avait déjà assez reproché il y a quelque temps, et elle ne ferait plus deux fois la même erreur avec son amie. La Iota ne pouvait que voir le mal-être dans le regard de la blondinette, cette même lueur d'incompréhension qu'elle avait eue en apercevant sa matriarche dans ce fameux parc, alors qu'elle y était venue pour passer un peu de temps en compagnie de son frère. Lequel a immédiatement cru à une blague de très mauvais goût, ce qui ne fut en rien le cas. Poussant un soupir, la Iota se laissa tomber en arrière sur le lit, le regard rivé sur le plafond. « Je ne l'ai pas reconnu tout de suite... Enfin, j'veux dire... je savais que je l'avais déjà vu quelque part, mais ça fait des années qu'elle a disparu, alors c'était difficile d'y croire. Le pire, c'était que James était présent, alors pour être bizarre... Et oui, on a parlé, ou tout du moins, on a tenté de s'expliquer. Je ne l'ai pas revu depuis, mais j'ai trop de choses à gérer en ce moment et j'ai besoin de temps pour me remettre les idées en place. » Le retour de Noah, la venue d'Amoun, les récents problèmes d'Aengus, tout cela n'était qu'une petite partie de l'immense iceberg. Oui, elle se préoccupait plus de ses amis ou encore sa nouvelle famille plutôt que d'une mère qui s'est fait passer pour morte.

Kirby dans les mois à venir, en mode vorace...
"Non non    Noah n'a pas fait de gâteaux"

Aengus fronça les sourcils en entendant les propos de la Iota. Le téléphone, la famille, les craintes. Il nous arrivait à tous de nous planter à un moment ou un autre. Chercher à être parfaite ne servait à rien, hormis à mieux se planter. D’ailleurs, Aengus ne se fit pas prier pour le faire savoir à Kirby.

« Je sais que tu veux le bien de tes proches et tout ça. Mais crois moi, tu ne pourras jamais être parfaite, même une parfaite maman, ca n’existe pas et puis ça sert à rien. Parfois, le mieux c’est déjà de prendre soin de soi pour mieux prendre soin des autres. Et c’est encore plus valable pour toi maintenant ! »

Le regard pivota sur la blonde étalée sur son lit. Bourrique !  Après tant de nouvelle, Kirby avait le droit d’être un peu fatiguée. Pourtant, Aengus n’en restait pas là. Liées par leur couleur de cheveux, les deux amies avaient assez ruminé ! Il était vrai qu’Aengus tenait Kirby informé des dernières nouvelles de sa vie. Elle restait l’unique être vivant sur la planète à qui elle avait parlé de son accident de voiture et du départ de Tony. C’était ainsi qu’elle l’avait appelé. Plus précisément, l’annonce avait été plus enrobée dans le propos, précisant qu’un jour, elle viendrait chez elle dans un état pitoyable parce que le départ de Tony avec cet accident serait trop lourd. Par ce biais, Aengus avait pu informer quelqu’un du décès de Tony sans avoir à prononcer les mots les plus douloureux. A l’époque, Kirby supportait aussi le décès de Noah.

« Tu sais quoi ? Elle était absente pendant des années alors c’est pas un mois ou deux de plus qui vont vraiment la tuer ! Aller ! Assez de déprimer ! On va fêter la nouvelle du bébé à coup de jus de pomme ! »

Admirons avec quelle dextérité la blonde maniait la politique de l'autruche! La tête dans le sable, des plumes dans le cul et le popotin qui bouge de droite à gauche pour mieux attirer les prédateurs. Aengus bondissait pour chercher ses chaussures. Il était temps de sortir non ? De toute façon, à trop parler, les problèmes ne feraient que s’aggraver ! Aengus réagissait toujours pareil. Dès qu’un problème frappait à la porte, elle choisissait de sortir et de faire la fête pour oublier, n’importe quelle fête !