ON VEUT L'AMOUR A REFAIRE

ft. Lucy E. Wakefield

« C’est une manière de m’inviter chez vous M. Clark ? » Oh oui, c’en était une, et pas des moindres. Nick ne rêvait que d’une chose actuellement, lui montrer ce qu’était sa vie depuis qu’il avait emménagé en Californie, en janvier dernier. Bien des choses avaient changées, mais les fondamentaux restaient les mêmes ; ses habitudes de pur British tel que manger des gâteaux sec en buvant son thé à quatre heures ou encore zapper les chaînes de télévision dans l’espoir de tomber sur autre chose que sur des talk-show qu’il avait en horreur. Lui et la télévision britannique, ça n’avait jamais été vraiment ça, mais étrangement, les chaînes américaines lui paraissaient ‘meilleures’ bien qu’il soit aussi bien avec un bon roman. « Seulement si vous le désirez, miss Wakefield. » Lui répondit-il, un sourire en coin, amusé de la situation. Ils avaient toujours aimé jouer des rôles, comme maintenant.

Lorsqu’elle lui répondit : « Aussi longtemps qu’il le faudra. » Nick ne put se retenir de rire. « Et que penses-tu que ton banquier dira, lui ? » Elle avait l’air décidée à se débrouiller, mais le criminologue n’était pas idiot. « Quant à ton cardiologue, s’il n’était déjà pas d’accord à l’idée que tu voyages, j’imagine qu’il ne supportera même pas la seule idée que tu restes ici. » Nick n’était pas ignorant non plus, il savait pertinemment que le médecin qui avait pris en charge la jeune femme de trente-deux ans avait besoin de la suivre régulièrement et ce, pour le bien-être de Lucy. Alors comment comptait-elle faire exactement ? Faire des allers retours à tout va ? Non, c’était impossible. Financièrement et moralement, Lucy ne tiendrait définitivement pas le choc. « Je sais combien tu aimes Londres, Lucy. » Une manière adroite de lui faire comprendre qu’il avait lui-même compris qu’elle ne resterait pas – du moins, c’est ce qu’il croyait. La jeune femme avait toujours été une amoureuse entière de la ville de Big Ben et quelque chose lui disait que ce n’était certainement pas ces trois dernières années qui avaient changé quoique ce soit à cela. Il la connaissait suffisamment pour en être sûr. « Je ferai n’importe quoi pour te convaincre que ce pays n’est pas aussi mal qu’on pouvait le penser dans le passé, mais je ne veux pas te forcer à faire quelque chose que tu ne souhaites pas, Lucy. Je te connais. » Et même si ça lui faisait du mal de l’admettre, il refusait d’obliger la trentenaire à faire quoique ce soit, même s’il en allait de ses sentiments à lui vis-à-vis d’elle. Il l’aimait, et l’avait toujours aimé. Mais cet amour ne se résumait pas à obliger Lucy à faire quelque chose pour lui. Non, ça, ça n’arriverai simplement jamais.

Elle était seule détentrice de son avenir – même du leur, à vrai dire – entre ses mains actuellement.    

I WAS BORN TO TELL YOU I LOVE YOU

ft. Lucy E. Wakefield

« Je n’ai que faire de mon banquier Clark. Je peux très bien travailler. » Le fait qu’elle utilise uniquement son nom de famille fit clairement comprendre à Nick qu’il venait de la heurter. Elle était comme ça Lucy, une femme qui refusait de voir la gente féminine comme incapable de se débrouiller par leurs propres moyens. Non pas que Nick ait déjà considéré les femmes comme idiotes et incapables de se servir de leur cerveau – ça, il le pensait autant des hommes que des femmes pour être tout à fait honnête. Mais Lucy, elle, elle représentait ce qu’il pouvait y avoir de plus fort chez un petit bout de femme. Elle ne reculait devant rien, que ce soit le travail, l’adversité ou la dureté d’un monde parfois encore trop machiste qui la couvrait de noms qu’elle ne méritait aucunement. Et oui, voilà qui était Lucy, voilà aussi pourquoi Nick était tombé amoureux d’elle et pas d’une autre. Elle avait su marquer la différence, lui prouver qu’elle était aussi brillante que lui. Lui usait de ses connaissances, elle de son fort caractère.

« Tu réagirais comment si je te demandais la durée de tes engagements ici ? » La question était légitime, mais étrangement, elle ne laissa guère le temps à l’homme de répondre qu’elle revînt sur ses paroles. « Non Nick, je peux rester, je te dois bien ça. » Ne comprenait-elle donc pas qu’il se refusait à la maintenir ici telle une captive ? Le fait qu’elle lui dise qu’elle lui « devait bien ça » prouvait bien au criminologue qu’elle se forçait quelque part, ce qu’il pouvait tout à fait concevoir, elle la folle amoureuse de l’Angleterre. « Ne fais pas ça par obligation. Surtout si c’est pour me le reprocher. » Peut-être se montrait-il actuellement un peu trop dur envers elle, malheureusement ce sujet devait être abordé dès à présent pour éviter tout malentendu qui finirait sur une dispute monumentale. S’ils pouvaient éviter cela, autant qu’ils le fassent.

Que se passerait-il ensuite ? Accepterait-elle de se reconstruire une vie ici, loin de sa famille, loin de sa patrie, tout ça parce que lui avait décidé de faire ainsi ? Nick se refusait à être désigné comme responsable des actions de la belle si celle-ci venait à le regretter plus tard ce qui, la connaissant, serait très certainement le cas. Nick avait toujours aimé son pays comme il était peu croyable d’y penser, mais Lucy…c’était bien pire encore ! Alors pourrait-elle réellement considérer une autre terre que la sienne et ce, pour un homme – même s’il s’agissait de Nick ? Rien n’était moins sûr. Qui plus est, l’homme ne supporterait pas de voir la femme qu’il aimait malheureuse. « Ma vie n’est plus la même, c’est vrai, mais je n’ai pas changé. Maintenant, je sais aussi que de ton côté également trois ans ont passé, et tu as certainement des envies, des rêves dont le seul cadre envisageable serait Londres, ce que je peux tout à fait comprendre. Mais étonnamment, je me sens bien ici, même si – je l’admets – le mal du pays me gagne de temps à autre, comme tous ceux qui ont quitté Oxford pour venir ici. Pour le moment, je suis incapable de dire quand je rentrerai à Londres, si même je compte seulement y rentrer. Quand je suis parti Lucy, rien ne me retenait plus là-bas. Ici, j’ai ce que tu as là-bas. Des proches, des gens en qui j’ai étonnamment confiance. Mais toi, tu as ta famille. La mienne n’existe plus depuis longtemps, et tu le sais aussi bien que moi. » Il faisait ici référence au décès de sa mère lorsqu’il était encore étudiant à l’université et à un père qu’il avait rayé de sa vie depuis fort longtemps déjà. « Je n’aurai jamais cru qu’on puisse avoir cette discussion aussi vite, mais serais-tu réellement capable de les laisser derrière toi pour moi ? » Il ne lui demandait pas, mais bon dieu…il en rêvait. Égoïstement, certes.

I WAS BORN TO TELL YOU I LOVE YOU

ft. Lucy E. Wakefield

« Je… je ne sais pas Nick, j’aimerais te répondre oui tout de suite mais ce n’est pas si simple. » Bien-sûr que non, ça n’était pas simple, Nick était bien placé pour le savoir puisqu’il lui avait posé la question. Mais il avait eu besoin de lui demander pour qu’elle comprenne que toute cette situation était des plus compliquées actuellement et qu’ils devraient s’adapter avec le temps. Quitte à prendre des décisions douloureuses. De toute façon, pour Lucy, toute décision serait extrêmement difficile, Nick en était parfaitement conscient. En effet, si elle décidait de regagner Londres, elle disait adieu à Nick, mais si elle décidait de rester, Lucy acceptait de rester éloignée de ses parents et de son petit frère.

« Est-ce qu’on pourrait pas, oublier ça pour aujourd’hui ? » C’était sa manière à elle de lui demander le temps nécessaire à la méditation et à la réflexion quant à son avenir avec ou sans lui, ce qu’il acceptait tout à fait, sans en rajouter. Il hoche positivement la tête, la comprenant une fois de plus. Ils avaient tous les deux besoin de se détendre un peu, tout ce surmenage n’étant bon en rien pour la jeune trentenaire. « Y a-t-il quelque chose que tu souhaites faire en particulier ? San Francisco n’a pas le charme de Londres mais la ville vaut le coup d’œil quand même. » Il cherchait clairement à la mettre à l’aise, ne voulant pas quitter sa compagnie tout de suite – il ne se sentait pas encore prêt pour la voir regagner son hôtel, ne sachant pas quand il allait la revoir. « Ou peut-être que tu veux te reposer un peu ? » Vu son état de santé, la brunette avait certainement besoin de beaucoup de repos. Après tout, sa greffe était encore toute récente, ainsi Lucy avait très certainement besoin de calme et non pas de tant de remue-ménage. « Je pourrais te faire un véritable thé… » Proposa-t-il sans trop savoir quoi dire de plus. Peut-être parlait-il trop aussi, c’était fort probable même.  

OFF I GO  NOW

ft. Lucy E. Wakefield

L’instant était complexe. Autant Nick avait cette envie presque oppressante de prendre soin de la jeune femme, autant il désirait lui laisser sa liberté de femme forte et consciente de ce qu’elle faisait. Il avait envie de lui tenir la main alors qu’ils se baladeraient pendant des heures tout comme il désirait d’une vivacité sans pareille la tenir dans ses bras pour la protéger du reste de cet affreux monde dans lequel ils vivaient. Tiraillé entre ces deux possibilités, Lucy le ramena bien vite à la raison, lui exposant son choix. « Emmène-moi voir des maisons victoriennes, on aura un peu l’impression d’être chez nous sans y être. » Il ne put s’empêcher de sourire sans trop savoir si c’était l’ère victorienne ou le « chez nous » qui lui faisait actuellement le plus d’effet. Lucy avait toujours fait en sorte de bien choisir ses mots lorsqu’elle parlait à autrui, ainsi ce terme n’avait pas été utilisé sans but. Voilà pourquoi Nick sourit d’autant plus, proposant son bras – en parfait gentleman qu’il était – contre lequel la jeune femme pouvait adjoindre le sien si elle le souhaitait. « Si madame veut bien se donner la peine… » Ajouta-t-il alors qu’il laissa un billet de vingt dollars sur la table où reposaient leurs tasses encore à moitié pleines.

Une fois sortis du café, Nick jeta un coup d’œil à la brunette qui souriait à présent. Il sourit également. « Madame veut des maisons victoriennes. Victoriennes seront les maisons que je vous emmène voir. Direction Alamo Square. » Il la guida vers le parking du centre-commercial où était garée sa Jaguar. Oups. Il avait comme pour ainsi dire… oublié ce petit détail. Le fait qu’il ait troqué son ancienne voiture pour une dite ‘dernière cri’ allait certainement surprendre la brunette. « Ne sois pas…surprise en voyant ma voiture, d’accord ? » Ce n’était qu’un conseil parmi tant d’autres après tout, elle en ferait ce que bon lui semblerait, bien évidemment. Après tout, il ne s’agissait que d’une voiture, qu’importait la marque de celle-ci. Certes, il aurait pu la prendre en noir…mais la rouge lui avait tellement tapé dans l’œil qu’il n’avait su résister à sa vue ! Lorsqu’il aperçut son véhicule, Nick ne put s’empêcher d’observer la brunette question de traduire sa réaction au mieux. En espérant qu’elle ne le dise pas « posh » après ça. Et ce, même si l’image que laissait transparaître sa Jaguar pouvait laisser à croire que l’homme de trente-six ans prenait de grands airs. Il s’était simplement dit que…quitte à vivre aux Etats-Unis, autant trouver un véhicule qui passait bien. Et la Jaguar était à un prix remisé au moment où il en avait fait l’acquisition alors…pourquoi s’en priver au juste ?

FEEL THE FOLLOW

ft. Lucy E. Wakefield

« Quoi ? Ce n’est pas ta voiture ? Nick ! C’est… Mais, c’est tellement pas toi. »  Au vu de la réaction de la Britannique de souche, Nick se passa la main dans les cheveux qui se rebellaient déjà à cause du vent, se grattant nerveusement l’arrière du crâne. Une légère grimace accompagna à la perfection la gestuelle de l’homme. « Heureusement que je t’avais dit de ne pas être trop surprise, hm. » Bien-sûr qu’il avait conscience que ce petit bijou ne lui ressemblait pas du tout au premier abord, mais avait-elle seulement admiré le véhicule ?! Lorsqu’il avait trouvé l’annonce sur Internet, il n’en avait tout d’abord pas cru ses yeux. Il avait d’abord pensé à une supercherie. Mais il n’en fut rien puisque deux jours plus tard il avait rencontré l’heureux futur ex-propriétaire de la Jaguar qui…attention, venait tout droit de Manchester, où il avait vécu pendant plusieurs années pour le travail. « Jette un œil à l’intérieur avant de me jeter la pierre. » La brunette ne tarderait pas à remarquer la position du volant qui restait en adéquation parfaite avec leur nationalité. « Elle appartenait à un ancien habitant de Manchester qui a décidé de s’en séparer juste au moment où je suis arrivé ici. Toi qui voulais tant que je change de, je cite : « bagnole », voilà qui est fait. Tu n’es pas contente ? » Non pas qu’il essayait de la faire culpabiliser de quoique ce soit. Juste, il aurait apprécié qu’elle ne critique pas son choix de véhicule aussi rapidement. Ce genre de véhicule demandait du temps et un minimum d’observation avant de recevoir le moindre jugement – et ça, le criminologue l’avait appris juste après son acquisition et le regard que les étudiants et certains collègues pouvaient lui lancer. « Et puis…pour ma défense, on y est drôlement bien installé, tu vas voir. » Il sortit les clefs de sa poche de veste, et enclencha le déverrouillage automatique des portes pour laisser à la jeune trentenaire la possibilité d’entrer dans la voiture, pour qu’elle puisse constater d’elle-même les dires du criminologue.

Bon d’accord, cette voiture ne ressemblait pas à Nick, lui d’ordinaire si discret – son métier le forçant à l’être par nature. Mais ce n’était tout de même pas le fait de l’avoir qui faisait de lui un autre homme, si ? Non. Il restait persuadé que non. « Ça ne fait pas de moi quelqu’un de différent pour autant, tu sais. » En effet, la voiture avait changé, mais l’homme était resté le même avec ses habitudes et caractéristiques typiquement britanniques, et cela ne risquait guère de changer, surtout lorsqu’on voyait avec qui il passait le plus clair de son temps jusqu’alors : Noah Clives, presque plus British que lui d’ailleurs, le médecin adoptant sans mal chaque jour le costume trois pièces. « Mon appartement est très…ressemblant à l’ancien cependant, si ça peut...te rassurer. » Là-dessus, Nick avait tout fait pour rester le plus proche de ce qu’il connaissait, se refusant à vivre dans un appartement comme ceux que l’on pouvait voir dans ces fichus magasins de décoration d’intérieur. Ils étaient tellement…sans vie !