Les images apparaissaient dans mon esprit, et les souvenirs refaisaient surface. Son regard apeuré, lorsqu'il venait se réfugier dans ma chambre après avoir été battu. Son sourire enfantin lorsqu'il était heureux d'avoir embrassé une fille pour la première fois. Sa grimace de surprise lorsque je l'avais giflé. Pour la première fois également. La scène semblait s'être reproduite, mais presque 15 ans plus tard. Les enfants étaient devenus des grands. Les baskets roses des talons aiguilles, et la chemise à carreau attachée jusqu'au cou, un t-shirt mettant en valeur des muscles saillants. Les "main dans la main" étaient devenus des caresses plus osées. Les bisous volés, des baisers fiévreux et passionnés. Que nous était-il donc arrivé ? Le destin avait-il assez de force pour garder deux âmes unies de cette manière là ? La vie nous avait séparé, et voilà qu'elle nous unissait à nouveau. Et il semblait que ce soit pour de bon. Mais non. Ce n'était qu'une introduction. Qu'une simple illusion. J'étais encore censée être fiancée. J'étais encore sous les ordres du diabolique Joe Shark. Et rien n'y faisais. Je devrais partie, dans la minute qui suivrait la fin de notre étreinte. J'en étais consciente, et c'était pourquoi, je voulu profiter de chaque instant qui s'offrait à moi. De chaque caresse. Comme s'il s'agissait de la dernière.

Nos deux corps semblaient danser en harmonie, dans un rythme enflammé. Mes mains exploraient chaque portion de sa peau. Je tentais de couvrir un maximum de surface, comme pour l'obliger à faire partie de moi. A s'unir à moi. A ne plus jamais me quitter. Mon coeur s'éveilla, s'unit à mon âme, mon corps implosait. C'était dans ces moments là, qu'il réussissait à m'offrir, que je comprenais que faire l'amour, était réellement faire l'amour. Nos hanches se frôlaient, s'embrassaient. Je perdais pied. Pour de bon. J'étais déjà loin. Très loin. Tous mes muscles se contractèrent, pour laisser place à des spasmes. Des tremblements. Et pour, enfin, se détendre complètement. Alors, mon esprit était entièrement brouillé. Ma vue, aussi. Mes cris l'avaient poussé à jouir au même moment. Et je sentis alors une vague de bonheur m'envahir. C'était une de nos meilleures fois. Sans aucun doutes. Je souris d'un air béa.

Et cet instant, un des meilleurs également, où nous restions là. Sans bouger, durant de longues minutes. Lui encore au dessus de moi, sa tête contre ma poitrine, essouflé, revenant petit à petit. Et moi, tout aussi haletante, commençant tout juste à redescendre de mon nuage. Mes mains passèrent dans ses cheveux bouclés, et je caressais son crâne, comme l'aurais fais une mère à son enfant. Un de ces gestes d'une tendresse surprenante, qui étaient rares, mais intenses. Et il se retira de moi avec précaution. C'était pour cela aussi, que je l'aimais. Même dans les moments les plus torrides, il prenait soin de moi. Même à moitié conscient, il prendrait soin de moi. Je ne le remercierai jamais assez pour. Il avait certainement été le seul, dans ma vie, à s'être autant soucié de mon état, après ma mère. Ni mon père, ni ma tante, ni personne, n'avait jamais fait autant attention à moi. Il s'allongea à côté de moi. Nos corps collés. Toujours un contacte. Même le plus infime. Sinon, c'était la catastrophe pour chacune de nos âmes. J'ouvris les yeux. Ou plutôt, retrouvai la vue. Le regard fixant le plafond, je sentis une fatigue intense m'envahir. Comme la redescente, après un moment emplit d'un plaisir non illusoire. Je tournai la tête vers lui, et l'observai. Lui aussi fixait le plafond. Il était beau. Si beau. Son regard dégageait quelque chose de nouveau, qui me fit cependant plus mal qu'autre chose. Il était heureux. Il espérait. Il avait cette lueur, qu'il avait avant lorsqu'il savait déjà que nous allions y passer la nuit. Mais je savais que je devrais partir dans la minute qui suivait. Et j'avais intérêt à ne pas me laisser abattre par sa gueule d'ange, si je voulais qu'elle reste intacte. Je pris cependant le temps de poser ma tête sur son torse, les yeux fermés, et de soupirer de bonheur. Je souris à nouveau, me collai encore un peu plus à lui. M'engouffrai sous son bras. Je levai alors la tête pour que mes lèvres atteignent son oreille, et soufflai :

« Je vois que tu t'es bien amélioré, depuis l'temps. »

Mes yeux étaient rieurs, mais pleins de jalousie à la fois. Je n'avais pas oublié qu'il avait couché avec Léonie, et que c'était la raison de ma visite. Mais à quoi bon remettre cela sur le tapis, à un si bon moment ? J'avais eu ce que je voulais non ? Marquer à nouveau mon territoire. Et puis bien sûr qu'il ne s'était amélioré en rien. Il avait toujours été aussi bon. Et j'en étais à chaque fois, ravie.
Je n'entrelaçai pas mes doigts aux siens. C'était un geste d'amoureux.

Il sourit et me punit d'une claque sur les fesses. J'en lâchai un rire moqueur.

« C’est pour ça que tu m’reviens toujours, tu veux dire … »

Je souris à sa remarque. Peut-être oui. Mais pour bien d'autres choses également. Si seul le sexe avait été la cause de son manque, alors la vie ne tournerait plus rond. Pourtant je ne lui en dis rien, et répondis sur un ton amusé :

« Hum..Certainement, ouais. »

Mais non. C'était le destin. Un signe. Comme si ma volonté avait été poussée par les mains du destin en lui-même. Peut-être en étais-je consciente. Peut-être pas. Dans tous les cas, je ne m'attardai pas plus sur le sujet, et profitai des dernières secondes qui s'offraient à moi. Mon corps était désormais totalement détendu, et mon souffle s'était calmé. J'avais remarqué une sorte de fragilité chez lui, qui n'existait pas avant. Peut-être un manque de sport ? Ou peut-être simplement une illusion. Le plaisir restait le même. Il était même encore meilleur. Il m'embrassa, ce qui me surprit presque. Je lui rendis cependant, mais presque froidement. Malgré le feu d'artifice qui venait d'exploser en moi. Ses lèvres m'avaient déjà manqué. Mais son baiser était dangereux. Imprévu. Et bien trop volontaire. Je restai presque figée quelques instants, réfléchissant. Je pars ? Je pars pas ? Maintenant ? Dans deux secondes ? Ses paroles me donnèrent la réponse.

« Chui content que tu sois là. Aux Etats-Unis, j'veux dire … » dit-il. Je fermai les yeux, tentant de lutter contre l'envie de lui répondre : « Oh moi aussi, si tu savais. » et je profitai du moment pour m'extirper de notre étreinte, et bondir du lit. Je fis mine d'être très pressée, et enfilai directement mes vêtements, en quelques gestes, sautillant un peu partout dans la chambre. J'articulai :

« Ok, j'dois y aller. » Zut. C'était quoi son nom déjà ? Ah oui. « Marc m'attend toujours, il va se douter de quelque chose. »

Je dis ces mots en m'asseyant sur le rebord du lit, pour enfiler mes talons. Pour ne pas céder à la tentation de me recoller contre lui, je me levai directement ensuite, attrapai mon petit sac, et me dirigeai vers la porte.
Je m'arrêtai, main sur la poignet. Alors, je fis demi-tour et m'approcha de lui, pour lui voler un dernier baiser, et souffler :

« Merci...»

Il devait absolument croire qu'il n'avait s'agit que d'une partie de jambes en l'air, sans aucun engagement. Comme toujours d'ailleurs. Mais je savais tout au fond de moi, qu'il s'agissait de bien plus. Je me redressai et me dirigeai à nouveau vers la porte.

Spoiler:

J'ignorai toutes ses phrases, faisant mine de ne pas en prendre compte. Et je dû me retenir pour ne pas sourire. Il savait comment me ramener dans son lit. Et il l'avait toujours su. Mais les choses étaient différentes désormais, et bien plus compliquées. Il l'avait appelé François, et c'était énervé à son nom. Ce n'était pas vraiment de ma faute, ce nom français était le premier qui m'était sorti de la bouche lorsqu'il m'avait poussé à le dévoiler. Marc ou Jean-Martin, dans tous les cas, il restait un mensonge censé être vrai et réaliste. Alors je fis comme toutes les fiancées auraient fait à ma place, même si je trouvais que ça sonnait horriblement faux dans ma bouche. Je lui lançai un regard noir et m'exclamai, sur la défensive :

« Tu ne le connais pas, ne parle pas de lui comme ça, espèce de fumier ! »

Et voilà, la dispute verbale recommençait, alors que nous venions de passer un des plus beaux moments de notre vie. C'était comme cela, et ça l'avait toujours été. Amour, violence, amour, coups, amour, et insultes. C'était la partition qui correspondait à notre vie. Et ça semblait nous aller parfaitement. Même si le mot "amour" n'était peut-être pas encore réellement apparu. Et puis il n'apparaîtrait jamais. Je savais que lui aussi me voyait comme une sexe-best-friend et rien d'autre. Jamais il n'avait eu de sentiments pour personnes, et je ne serais certainement pas la première. J'en étais consciente, et voilà pourquoi je n'allais pas plus loin, et tentai, à chaque fois qui revenait, de bannir le mot amour.

Sur cette première et dernière insulte de la journée, je filai rapidement en dehors de la chambre. Marchant d'un pas déterminé dans le couloir, j'entendais un bruit de talons se mêler aux miens. Quelqu'un devait être dans le couloir après le virage. J'avançai tout de même, étant certes consciente du fait que Benedikt m'avait suivi en caleçon. Tant pis pour lui, il se taperait la honte. Je tournai, quand.....*PAAM*

Je lâchai un léger cri de surprise, et me prit le nez entre les mains, presque assommée. Certes, un coup dans le nez est supportable, mais un deuxième même pas deux heures plus tard, c'était trop. J'ouvris grand les yeux, lorsqu'une voix désagréablement familière raisonna dans le couloir :

« Oh comme c'est mignon tu es allé marquer ton territoire » ironisa Léonie.

Je relevai la tête, le regard noir. Qu'est-ce qu'elle foutait là ? Mon sang ne fit qu'un tour. Elle avait eu la même attention que moi. Coucher encore une fois avec Benedikt. Et sous mon nez en plus ! Je m'emplis de rage rien qu'à sa vue, et sautai sur elle, lui tirant les cheveux et l'obligeant à se plier au niveau de ma hanche. J'en profitai pour lui donner un bon coup de genou dans le ventre. Comme elle m'avait fait dans les toilettes. Vive la revanche. Et je hurlai tout en même temps :

« Tu comptais t'envoyer encore en l'air avec lui, hein ? C***** ! »

Tiens, mon nez saignait.

Spoiler:

Benedikt s'était approché et tentait d'en placer une ou deux. Mais ni elle, ni moi, n'y prêtaient réellement attention. Et puis l'important à cet instant, était de mettre Léonie en pièces, pas de faire plaisir à la gueule d'ange. Elle gémit de douleur, et je n'en fus que plus ravie. Un sourire vicieux se détacha de mes lèvres.

J'ai assez vu sa misérable petite queue... Lâche moi sale ублюдок (=connasse)

Et en plus elle ne savait pas mentir. Pitoyable. Et j'étais parfaitement bien placée, pour savoir que la taille de notre cher prince charmant était tout à fait favorable au plaisir de ces dames. Alors non seulement elle couchait avec lui, mais en plus elle n'était consciente de rien ? C'était le comble du comble, et je pris cette insulte comme si elle m'était destinée. Bizarre n'est-ce pas ? Par contre, l'insulte qui suivit, qui elle, m'était vraiment destinée, ne me fit que rire. Et j'ajoutai :

« Oh ma belle, un peu d'imagination voyons ! Trouve quelque chose de plus féroce ! »

Alors que je disais ces mots, je sentis une horrible douleur naître au creux de mon genoux. Qu....Elle était en train de me mordre ! Et bon dieu que ça faisait mal ! Je hurlai de douleur, avant de dégager ma jambe d'un mouvement furtif. Mais tout en même temps, je dû m'obliger à la lâcher. Un point pour elle, ça n'allait pas durer.
Elle attaqua encore une fois, et m'attrapa à la taille d'une manière tellement violente et rapide, que je n'eus pas le temps de riposter. Elle me plaqua contre le mur. Mais où étaient donc passé mon talent pour le combat ??! Visiblement, un homme était plus facile à battre qu'une femme. Qu'une française du moins. Et puis là, ce n'était pas vraiment la technique qui comptait, mais surtout la vengeance et le dégât que les sentiments étaient capables de provoquer. Je savais ce que je valais, et il était hors de question que je sois déçue de ma performance. Voilà pourquoi, lorsque je croisai le regard de Benedikt qui attrapa Léonie pour l'éloigner, mes yeux dégagèrent une lueur de complicité. Ça allait péter. Comme dans l'ancien temps. Et mon plaisir fut, que cette fois-ci, la cible n'était pas un membre de gang ou un gros gars baraqué, mais bel et bien une des filles avec qui il avait couché. J'avais Benedikt de mon côté, et c'était jouissif.

Occupe toi de ton c** c******

Ah. Et bien non finalement. Les yeux écarquillés par la surprise, je vis Benedikt se plier en deux après avoir reçu le coup inattendu de Léonie. Quelle garce ! Alors elle pouvait me frapper moi, mais pas Benedikt. Et ma rage ne fit que s'emplifier. Je lâchai une inspiration de surprise, avant de profiter du moment pour sauter sur le dos de Léonie, et tenter de lui arracher la tête avec mes ongles. Je hurlai :

« Espèce de sale *)$ù^§è"@# ! Ne touche pas à mon Beni ! »


Je me balançai alors en arrière, et l'entraînai ainsi dans ma chute. J'avais été aimable, elle avait été amortie par mon corps. Fière de ma seconde victoire, je me relevai alors, et, toute essoufflée, relevai une mèche folle de mon visage d'un geste furtif, avant de cracher :

« T'as des explications à me donner ma belle ! » 

Je réajustai ma robe à moitié déchirée, tentant de couvrir un maximum de surface de ma peau.