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Meurtre en salle de théâtre ?

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MessageSujet: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyLun 26 Nov - 17:13


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- L’exercice d’aujourd’hui consistera à vous mettre face aux critiques diverses. Être comédien, ce n’est pas seulement recevoir des roses, bien au contraire. Il faut savoir passer au-dessus des jugements, même les plus sévères. Pour cela, on va contrôler votre sang froid. Le but est tout simplement d’encaisser.

Un exercice que l’on m’avait moi-même fait subir dans l’école des arts de la scène où l’on m’avait formé. Un bloc de deux heures assez sadiques de la part de mon professeur, mais qui s’était révélé très instructif. On ne prépare certainement pas assez les artistes à recevoir de mauvaises critiques, se contentant de les plonger dans un univers où, lorsque l’on réussit, tout est beau. Totalement faux, soit dit en passant. Il arrive donc bien souvent qu’un comédien, comme un chanteur, un musicien où tout autre artiste, se voit frustré par les premières critiques négatives qui viennent à sa rencontre, au point de le déstabiliser et de le faire douter de lui. Cela fait parti du jeu. Et je souhaitais aujourd’hui imposer à mes élèves cet exercice que beaucoup jugerait d’abominable, mais qui restait pourtant nécessaire.

- Comme vous n’êtes encore que des artistes en herbe, on ne va pas vraiment pouvoir critiquer vos exploits ou bien vos fautes sur scène. C’est pourquoi vous allez devoir encaisser des paroles blessantes de la part de vos propres camarades. Touchez là où ça fait mal. La personne qui sera devant l’estrade, elle, devra garder son sang froid, la tête haute, ne pas répondre et se dire que ce ne sont que des critiques. Critiques fondées ou pas. Je veux connaître votre capacité à encaisser les coups.

Je marchais devant les étudiants installés dans les chaises rouges du théâtre de l’université. Et déjà je fixais quelques uns d’entre eux, sous leur regard presque craintif de se voir monter sur scène pour se faire lapider.

- Vous allez me dire que cet exercice est sadique, qu’il n’a pas lieu d’être. J’ai réagi de la même façon que vous lorsque je me trouvais à votre place. Mais cela va se révéler utile, car un comédien susceptible et frustré n’est un bon artiste.

Je posais un instant mes yeux sur ma montre avant de plonger ma main dans la poche de mon pantalon de costume.

- Bon, on va commencer. Ramirez, viens me rejoindre.

Le jeune homme se leva sous les regards de ses camarades, et hésita avant de venir me rejoindre devant l’estrade. Finalement il prit un air assuré et croisa les bras contre son torse.

- Les jeunes, à vous. Que pensez-vous de votre camarade ?

J’allais m’asseoir sur l’un des sièges à mon tour, et observais l’étudiant qui encaissait, malgré lui, les remarques parfois blessantes de ses camarades. Au bout de seulement cinq minutes, il quitta la salle de théâtre avant de m’adresser un bras d’honneur, visiblement très énervé par cet exercice. Je levais les yeux au plafond avant de secouer négativement la tête.

- Exercice non réussi par notre ami Ramirez.

Plusieurs étudiants passèrent après lui. Certains réussirent à encaisser sans problème, gardant même un sourire arrogant et fier qui me plu. D’autres, au contraire, retournèrent se rasseoir, énervés, vexés et tristes. De cette façon, certains avaient hâte de se retrouver face à leurs camarades pour leur montrer qu’ils ne leur faisaient pas peur, tandis que d’autres s’étaient déjà échappés discrètement par la porte au fond de la salle, pour ne pas avoir à subir cet exercice spécial.

Puis vint le moment où mes yeux se posèrent sur Kilian, qui jusqu’ici, n’avait pas dit grand-chose. Depuis quelques temps, il s’était comme renfermé sur lui-même, et je n’étais pas aveugle. Cependant, la discussion restait parfois difficile lorsqu’il décidait de s’entêter à garder le silence, en m’accordant une belle expression quasi-assassine.

- Kilian. A toi.

Même si mon rôle de père me poussait à refuser de le voir s’en prendre plein la figure par ses camarades, je restais son professeur ici et malheureusement, il ne devait pas être exclu d’un exercice sous prétexte que je l’aime. Je l’observais donc se déplacer face aux autres étudiants qui commencèrent gentiment par exprimer certains traits de son caractère, comme le fait qu’il soit arrogant, têtu ou encore trop sarcastique. Puis au fil du temps, les paroles blessantes se firent un peu plus entendre.

- Infirme.

Ca, c’était bas.

- Orphelin.

Je gardais mes yeux rivés sur le visage de mon fils, essayant moi-même de faire abstraction de ce qui pouvait être dit.

- Bâtard.

Ce mot n’avait rien à voir avec une simple insulte et l’élève qui venait de l’employer savait parfaitement que ce mot, rempli de sens, allait blesser le breton. Bâtard pour désigner une personne conçue hors mariage et n'ayant aucune relation avec son géniteur. Un clin d’œil direct à la relation qu’entretenait Kilian avec moi.
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyLun 26 Nov - 18:41

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Cours de théâtre. Une fois devant la salle, je roulais à l'intérieur puis laissais mon fauteuil à l'entrée pour attraper la canne que j'utilisais pour marcher depuis quelques temps. Les séances de rééducation faisaient merveille, tout autant que les exercices que je m'imposais en dehors, sur conseil du kiné qui me suivait. Mon sac sur l'épaule, j'avançais à petits pas vers les fauteuils en veillant bien à ce que personne ne me bouscule. Je n'étais peut-être pas sur le point d'utiliser des patins à roulettes, c'est certain, mais je faisais de réels progrès. Il faut bien qu'il y ait quelque chose de positif depuis ces derniers mois. Je croise le regard de mon père qui s'installe, je lui adresse un simple hochement de tête. En cours, j'évite de trop faire jouer la carte père/fils par respect pour les autres. J'avais fait des pieds et des mains pour ne pas qu'on croit que j'étais un privilégié, alors autant faire en sorte que cela continue. Je m’assois à côté d'une fille qui portait un chapeau de sorcière qui couvre sa monstrueuse choucroute blonde, un t-shirt avec une tête de citrouille et des godasses rose fluo. Au risque de passer une fois encore pour l'irascible de service, je me permets un soupir consterné. Je suis loin d'être du genre à être un critique de mode affirmé, mais il y a des limites. Cette fille, c'est la plus bizarre de la promo. Toujours en retard sur les évènements de l'année. Pour peu qu'elle se pointe en Père Noël au mois de mars, il n'y a pas des kilomètres. C'est terminé, Halloween, ma pauvre. Soit elle est très originale, soit elle se trimballe un Q.I. de cucurbitacée. Vous avez déjà essayé d'entretenir une conversation avec une courge ? Là, c'est pareil. Je ferme les yeux en m'entendant penser. Pourquoi est-ce que j'ai ce besoin viscéral de me brouiller avec tout le monde ces derniers temps. Je me mordille la lèvre inférieure en essayant de faire abstraction de tout ceci, me concentrant sur l'exercice que Logan introduit pour ce cours. Depuis quelques temps, je me fais de plus en plus discret. Pourtant volontaire et motivé en temps normal, je trouve mon compte dans un mutisme quasi total. Ma longue absence - proportionnelle à l'incarcération de Salaun senior - s'est ressentie sur mes résultats, tant et si bien que je suis des cours de tutorat avec une fille que je ne peux pas encadrer et qui ressemble trop à mon ex pour que je puisse garder mon calme en sa présence. Merde, ma voisine me parle. "Eh, Kilian... ça te dirait de passer me voir dans ma chambre, ce soir ? J'ai attrapé une grenouille hier, près de la mare qui borde la résidence. Elle a plein de pustules jaunes, c'est trop drôle." Qu'est-ce que je fous ici ? Voilà la question qui me traverse l'esprit. D'ordinaire, j'suis avec les types populaires de la classe, dans une posture bien plus affirmée et conquérante. Là, je me retrouve coincé à côté de la bizarroïde de l'année qui me parle de batraciens. Au secours, vite, au secours... "J'suis pris, ce soir. Une conférence sur... sur l'évolution de l'étude du carbone en Nouvelle-Zélande." Le premier truc qui me traverse l'esprit et dont je me suis moqué avant de venir. Il y a des affiches partout dans les couloirs de Berkeley, à se demander ce que les gens peuvent bien trouver de passionnant à gratter des cailloux de couleur sombre. Et en parler pendant trois heures. Mais passons. La fille se renfrogne et je pousse un léger soupir de soulagement.
Exercice du jour : se mettre devant tout le monde et encaisser toutes les vacheries qu'on pourra nous envoyer. J'arque un sourcil. Dans d'autres circonstances, j'aurais trouvé l'exercice particulièrement amusant. J'aurais même été le premier à me précipiter sur scène pour orner mes lèvres d'un sourire sarcastique au possible et d'un air profondément calme pour laisser glisser les moindres insultes sur moi comme de l'eau sur un rocher. J'étais un bloc de répartie à l'état pur, mais j'étais tout aussi capable d'attendre sagement que mon interlocuteur soit à bout d'arguments pour espérer me tirer une petite réaction. Être acteur, c'est bien. Être un chieur, ça peut s'avérer tout aussi utile. En prime, je préfère les gens méchants. Sans être hypocondriaque, j'ai carrément une phobie des gens gentils : plus on me passe de la pommade dans le dos, plus je flippe. Mais en ce moment, c'est précisément ce qu'il ne faut pas faire avec moi. Me pousser à bout. Rien qu'hier, j'ai balancé un rouleau de scotch à la figure d'une secrétaire qui m'a fait remarquer que je ne pouvais pas me permettre davantage d'absentéisme comme au début de l'année. Et avant-hier, c'est un sportif qui s'est retrouvé à l'infirmerie avec un pied écrasé par la roue de mon fauteuil, pour m'avoir provoqué en lançant à voix haute que j'étais prêt à tout pour pouvoir emprunter les ascenseurs plutôt que les escaliers. Et ce ne sont que deux exemples sur la petite dizaine d'incidents dont je suis plus ou moins à l'origine cette semaine. Je ne vous parle même pas du mois. Dans une quinzaine de jours, on pourra me demander si je ne souhaite pas passer dans la confrérie des Gammas, à ce rythme.
Par principe, je choisis donc de rester muet pendant que les autres étudiants s'en donnent à coeur joie. Élève soliveau parmi les plus motivés de la classe, je prête d'ailleurs une oreille très peu attentive à ce qui se dit. Pour m'occuper, je dessine une scène du Petit Prince qui me revient en tête, celle avec un baobab. Ne me demandez pas d'où ça me vient, j'ai tendance à avoir une imagination complètement truquée en ce moment. Puis soudain, au moment où je relève la tête en me demandant si le cours va bientôt s'achever, mon regard bleu azur croise celui de mon paternel. Non, tais-toi, Papa. Ne dis rien. Chut. Non... Trop tard. Dans un soupir résigné, je comprends que mon tour est arrivé. Mauvaise idée, vieux. T'aurais pas dû faire ça. Aidé de ma canne, je m'avance vers la scène à mon rythme. Autour de moi, des sourires semblables à ceux d'un aigrefin patenté se dessinent, ils vont s'en donner à coeur joie. Je n'ai pas peur d'eux, j'ai plutôt peur de la réaction que je pourrais avoir. De l'homme trop passionné qui ne peut réfréner ses pulsions comme c'est le cas en ce moment. Je m'assois sur la chaise qui se trouve sur scène puis relève la tête. Que la fête commence. Allez-y, les gars, c'est Salaun père qui régale.
Les remarques commencent à voler. Ca commence petit avec un "prétentieux" qui sonne à mes oreilles avec une exaspération particulière. Voilà quelque chose que je n'ai jamais été. Ca ou arrogant, d'ailleurs. Quoique... bon, d'accord, une ou deux fois. Têtu ? Ok, je valide. Sarcastique ? Le sarcasme, c'est carrément une religion chez moi, j'vais pas m'excuser de l'être. Puis rapidement, la montée en puissance se fait sentir. Infirme. Mon regard commence à s'étrécir comme celui d'un chat qui s'apprête à bondir sur une misérable souris. Orphelin. Ma main se referme et se serre. La carnation de mon visage prend une teinte rosée puis pratiquement rouge vif. Les veines sur mon front commencent tout doucement à se dessiner, signe que la colère était imminente. Lorsque je m'emportais, j'avais tendance à exploser comme un volcan. Pas une petite colère froide et contrôlée, non... ça, je le laisse aux gens qui veulent sauver les apparences. Ma première prof de peinture a libéré un artiste profondément passionné, tant et si bien que lorsque je m'emporte, j'en ferais trembler les murs de Berkeley. Je sens mes ongles percer ma chair au fur et à mesure que d'autres insultes fusent. Calme, calme, calme... C'est qu'un exercice. Puis sans prévenir, un mot franchit les lèvres d'un type qui ne peut pas m'encadrer. Un type qui me connait malheureusement mieux que je ne le souhaiterai.

Bâtard. Le mot est lâché. Je n'ai jamais, JAMAIS toléré cette insulte. D'ailleurs, j'en employais des tonnes, mais pas une seule fois on ne m'entendrait prononcer ce mot. Pas même à l'encontre du bébé que Hutchinson portait et que mon père lui avait fait. J'avais encore du mal à l'accepter, mais je n'insulterai ni cet enfant, ni ses parents. Mais qu'on me traite de bâtard, c'est hors de question. Mes pensées m'envoient directement une image brutale. Une cour de récréation à Paris. J'ai six ans. Un gamin du genre costaud me bouscule et me lance cette insulte au visage sous le regard outré de l'institutrice qui nous sépare au moment où je m'étais rué sur lui afin de le réduire en bouillie. Je pense à ma mère et aussitôt, je fixe cet étudiant. Retour dans le présent. "Cocu." lâchais-je sur un ton tremblant, laconique... une voix rageuse sur le point d'exploser. Le type en question comprend immédiatement où je veux en venir. Il y a cinq mois, il se faisait larguer par sa copine. Pourquoi ? Parce que je me la suis envoyée à la sortie des cours, un soir où ce crétin préférait jouer à la console avec ses beaufs de potes. Et j'avais fait en sorte qu'il le sache. Elle aussi m'avait appuyée. Le type se lève de son siège en essayant de se montrer menaçant, c'est sans compter sur le regard que je lui adresse. "Et quoi, tu vas faire quoi ?! Cogner sur un handicapé ? Ca t'suffit plus de faire mumuse sur ta console, tocard ? Quand t'es pas foutu de garder ta gonzesse, t'écrases et t'évites la provoc' ! - Tu peux parler ! Qui c'est qui s'est fait jeter comme une merde y a un mois ou deux, hein ? Dommage, elle était pourtant prometteuse au plumard, ton Italienne... J'en sais quelque chose." ajoute-t-il avec un sourire goguenard. J'vais le buter. Je vais l'écharper sur place. Tant mieux s'il y a des témoins, ça dissuadera les suivants de tenter le diable. Sans réfléchir une seule seconde, j'attrape ma canne et la balance sur lui avec une vigueur de forcené. Pas de bol pour lui, j'ai toujours été un as du javelot : la canne lui arrive en plein visage et retombe sur ceux à côté. Deux ou trois cris de surprise, un gémissement de douleur... mais je me retrouve sans rien pour m'aider à marcher. Les autres ne bougent pas, ils me regardent. J'ai le souffle court, le visage rouge pivoine, le poing serré et quelques gouttes de sang glissent sur ma peau : j'ai tellement enfoncé mes ongles dans ma paume qu'ils ont percé la chair. Soudain, je réalise que je viens de me donner en spectacle... tu parles d'un show. J'ai raté l'exercice mais sur le moment, je m'en moque. Je viens de me défouler et une autre remarque suffirait à me relancer. Comme je ne peux pas bouger de ma chaise sans me ramasser après quatre pas, je reste assis en attendant que la situation se tasse. Je n'ose croiser le regard de mon père qui ne m'a déjà vu dans un état pareil qu'une seule fois : sur ce ring, lorsqu'on s'était expliqués. Et encore. Ce jour-là, j'avais été presque soft. Je croise les bras sur mon torse, au prof' de ramener le calme dans son cours. Et hors de question que je présente des excuses, malgré le coquard et le nez légèrement sanglant de l'idiot avec qui je viens de me prendre la tête.
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyLun 26 Nov - 20:26


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Le mot ‘‘bâtard’’ n’aurait jamais dû sortir de ses lèvres. Même si l’exercice consistait à lancer des paroles vexantes à la rencontre de l’étudiant démarqué, je n’appréciais pas que l’on entre dans les détails d’une vie privée. L’atelier ne devait s’armer que de traits de caractères que l’on accepte plus ou moins. Peut-être d’autres qualificatifs, mais pas aussi poussés. Déjà que le mot ‘‘orphelin’’ m’avait clairement blessé en m’envoyant comme une claque dans la figure l’image de Sasha, souriante mais le teint trop pâle, le crâne dénué de cheveux et des cernes imposantes sous les yeux. ‘‘Bâtard’’ était cependant de trop. Le jeune homme allait trop loin, mais je ne fus pourtant pas vraiment surpris. Cet étudiant là n’appréciait pas mon fils. Il n’y avait qu’à les entendre s’envoyer des pics à longueur de temps durant mes cours, si bien que je m’étais déjà vu dans l’obligation de les exclure tous les deux pour qu’ils se calment et arrêtent d’empêcher le bon déroulement de mes heures.

J’avais vu le visage de Kilian se décomposer au fil des mots plus blessants que ceux du début. Il cherchait à encaisser même si sa peau commençait à virer au rouge, et que ses poings se refermaient avec violence. Je détestais voir mon fils dans cet état, et si je n’avais écouté que le père qui était en moi, je lui aurais ordonné de venir se rasseoir uniquement pour envoyer un autre étudiant à l’abattoir. Et lorsque le jeune homme eu prononcé ce mot, me rappelant le comportement que j’avais eu envers mon fils lorsqu’il n’avait que sept ans, je compris que Kilian ne se laisserait pas faire. Il avait bien trop de fierté pour ne pas accepter de riposter. Je pris un moment avant de reprendre moi-même contenance. Quelques élèves faisaient la navette entre mon fils et moi. Car même si plusieurs personnes ici, comme dans le reste de l’université, étaient conscientes de notre histoire familiale, d’autres l’ignoraient. De cette façon, une partie des élèves ne semblèrent pas comprendre pourquoi ce mot avait été prononcé, pourquoi Kilian semblait s’être métamorphosé en volcan prêt à se réveiller, et pourquoi, pour ma part, je tâchais de garder mon calme même si mes yeux lançaient des éclairs.

Puis la joute verbale fusa.

- Cocu.

Dans mon énervement camouflé, je fus on ne peut plus fier de la répartie de mon fils, bien que ça soit contraire à l’exercice. Et si mon rôle de professeur se devait d’être exaspéré, intérieurement, j’étais heureux qu’il lui envoie ce simple mot en plein visage. Vas-y fiston, fais lui fermer sa grande gueule ! A une vitesse déconcertante, l’étudiant visé se leva de son siège, comme s’il eut souhaité s’en prendre à Kilian. Je me tenais donc prêt à intervenir. Si j’imaginais très bien Kilian se défendre lui-même, je ne ressentais pas l’envie de le voir se faire rouer de coups par une personne plus valide que lui, et ainsi mettre un terme au travail qu’il effectuait tous les jours afin de retrouver l’usage totale de ses jambes.

Mon regard se perdit sur mon fils qui venait de reprendre la parole, assénant son rival de mots blessants. Pourtant, cela ne lui ferma pas le clapet, bien au contraire. Il vint même à parler de l’ex-petite-amie de Kilian – que je ne connaissais pas vraiment mais dont il m’avait tout de même parlé à plusieurs reprises – en lui expliquant qu’il n’avait pas de chance de s’être fait ainsi largué par une déesse du sexe, avant de préciser qu’il était capable de la juger dans ce domaine pour l’avoir ‘‘essayée’’. Mauvaise idée, gamin. Kilian n’allait pas le laisser s’en sortir aussi facilement. Il faut savoir une chose avec mon fils : il est définitivement impossible d’avoir le dernier mot en sa présence. Par ‘‘dernier mot’’, je n’entends pas forcément une parole, mais un geste aussi.

Et ce qui dû arriver se produisit. Mon fils lança la canne, qui l’aidait à se déplacer, avec force et précision dans le visage de son adversaire, au point de le faire gémir de douleur. Même si intérieurement, je pensais « C’est bien mon fils, il l’a mérité ! », je ne devais pas me montrer aussi subjectif. Kilian tentait déjà tant bien que mal de montrer qu’il n’était pas privilégié en ayant son père pour professeur, ce n’était pas pour que je ruine tous ses efforts. Je me levais donc, alors que les voix commençaient à s’élever, notamment sur le ton de la surprise générale.

- Ca suffit !, lâchais-je en me levant de mon siège.

Face à mon ton sévère et intimidant, les étudiants finirent par tous se taire, à l’exception de celui qui continuait de gémir. Du sang coulait de son nez alors qu’une marque commençait déjà à se former autour de son œil. Je récupérais la canne avant de la pointer vers la fille qui se trouvait précédemment à côté de mon fils – dans un look toujours on ne peut plus étrange. Comme effrayée de se prendre aussi un coup de canne dans la figure, elle sursauta en écarquillant les yeux.

- Emmène-le à l’infirmerie s’il te plaît, avant qu’il ne tâche toute la moquette.

Sans un mot, elle hocha la tête et se leva pour se diriger vers le blessé. Et c’est tous les deux qu’ils se dirigèrent vers la sortie, même si le jeune homme ne semblait pas vraiment apprécier d’être accompagné par cette étudiante qu’il jugeait bizarre. Le théâtre fut de nouveau plongé dans le silence le plus complet, l’espace de quelques secondes. Mon regard croisa finalement celui de Kilian et j’en profitais pour lui lancer la canne, à l’horizontale, de façon à ce que sa main la récupère en vol. Main d’ailleurs légèrement ensanglantée. Je gardais un visage sévère, en abandonnant bien vite l’idée d’obliger mon fils à lui faire des excuses. Ce type ne les méritait pas, et de cette façon, mon diablotin de gamin refuserait de les lui faire.

- Vous pouvez aller en pause. Vous avez un quart d’heure.

Ce fut bien l’une des premières fois que les étudiants quittèrent ma salle dans un silence quasi-religieux. Tous savaient très bien que Kilian et moi allions avoir une discussion, davantage de père à fils que de professeur à élève. Je restais debout, face à lui, les bras croisés contre mon torse imposant.

- Je suis d’accord, il l’a mérité. Mais c’est quoi ton problème en ce moment Kilian ?
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyMar 27 Nov - 5:08

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Assis sur la chaise au milieu de la scène, j'observe les étudiants s'agiter d'un oeil torve et détaché. Allez-y, occupez vous de ce crétin sans nom, il a bien besoin qu'on restaure son ego froissé à coups de canne dans le visage. Celui-ci m'observe d'ailleurs un bref instant avant de détourner le regard, conscient que si j'avais eu mes jambes, j'aurais bondi de scène pour me ruer sur lui sans l'ombre d'un remords, quitte à me faire expulser pour avoir agressé un de mes... disons, collègues. Pas camarades, n'exagérons rien. Je garde mes bras croisés dans une position de déni et de revendication à la fois, mon père semble comprendre que je ne décrocherai pas un seul mot pour m'excuser de ce qui vient de se produire. Même si j'aurais sûrement pété un plomb à un moment donné, je ne peux pas tolérer de me faire traiter de bâtard, c'est viscéral. Mes pensées se tournent vers ma mère qui, sans aucun doute, n'aurait pas aimé me voir dans un tel état. Tant pis. Les choses ont changé, en treize ans, il me semble mort et enterré ce petit garçon adorable et espiègle. Il a cédé sa place à un jeune adulte taciturne, impulsif et d'un naturel grognon sur un fond de sarcasme permanent. Pas un pessimiste, non, mais rien d'aussi joyeux qu'avant. C'est peut-être une sorte de dépression, j'en sais rien. Pour l'heure, mon attention se porte sur l'extra-terrestre de la promo qui est chargée d'évacuer l'autre idiot vers l'infirmerie. Un sourire quasi machiavélique effleure à peine le coin de ma bouche : exit les fantasmes de l'infirmière sexy qui panse les plaies d'un guerrier malmené, la nana en charge du service est une vraie matrone au sex-appeal aussi développé que celui d'un cachalot. Sale journée pour ce type qui aurait mieux fait de ne pas me pousser à bout en profitant de cet exercice pour une vendetta personnelle. A la prochaine petite-amie qu'il se trouve, je mettrais un point d'honneur à le faire cocu de nouveau. Avec un peu de chance, la future bafouée lui explosera sa console de jeu par dépit. Je les regarde partir non sans une lueur mauvaise dans le fond des pupilles, avant de finalement reporter à nouveau mon attention sur Salaun senior qui ramène le calme dans son cours. Un silence pesant s'installe, brisé ensuite par les échos des pas d'étudiants qui marchent vite vers la sortie pour une pause d'un quart d'heure. Je reste assis sur la chaise, conscient que de toute évidence, cette pause ne me concerne pas. Et pourtant, je n'aurais pas dit non.
Logan me regarde, le visage neutre mais le regard somme toute assez égaré. Le prof est déçu, le père est fier et inquiet à la fois. J'imagine qu'il doit être complètement décontenancé malgré les apparences. Je regarde la canne qu'il m'a relancé tout à l'heure en haussant les épaules. Bien sûr qu'il l'a mérité. Et s'il en rajoute une couche en dehors des cours, c'est l'oeil tout entier qu'il va perdre. "J'ai pas d'problème, j'suis juste un peu fatigué, c'est tout." lâchai-je sur une voix morne et mécontente. "Puis t'as pas demandé à Ramirez s'il avait un problème aussi, tout à l'heure." C'est un argument un peu faible, mais j'ai rien de mieux sous la main pour essayer de détourner la conversation. J'ai pas UN problème, j'ai l'impression de crouler dessous. Ce kidnapping que j'ai du mal à effacer de ma mémoire, le handicap qui en a suivi, le blocage qui m'empêche de peindre depuis lors, Vraona qui me largue, l'annonce du bébé... ça commence à faire beaucoup. Trop. Beaucoup trop. J'ai l'impression de tout encaisser sans pouvoir me décharger de tous ces sentiments comme j'ai toujours eu l'habitude de le faire. Je ne peux plus peindre pour me défouler, et ça me ronge de l'intérieur. Je jette un regard à mon père. J'ai l'impression de perdre les pédales, de ne plus contrôler cette rage qui m'habite et qui me conduit à être de plus en plus sec voire violent avec mon entourage. Pire que des pincettes, il en faut davantage pour me parler sans se faire envoyer bouler. Pourquoi avoir ce réflexe de lui mentir ? Ou plutôt de minimiser les faits ? J'en sais rien, sans doute la honte. Ca et la fatigue de toujours devoir demander de l'aide aux autres, qu'elle soit morale ou physique. J'ai un caractère indépendant qui est piétiné par le handicap, et ça me bouffe constamment. Je déglutis et prend appui sur ma canne pour me relever de la chaise. Il faut que je fume. Sur le chemin vers ma place dans le public, je me mets à maugréer. "Tu t'attendais peut-être à ce que j'attende sagement qu'on m'en envoie plein la tête sans réagir ? J'te croyais bien placé pour savoir que c'est pas tout à fait le moment. Tant pis si j'ai pas l'air professionnel. Je songerai à ma carrière d'acteur quand je pourrais me déplacer normalement." Une fois à ma place, je fouille les poches de mon manteau. Rien. Pas une clope. Décidément... Je reste finalement assis, décidé à ne pas remonter sur scène même si j'ai échoué à cet exercice. "J'sais bien que tu fais aucun favoritisme, et d'ailleurs je n'en veux pas. Mais c'est juste que pour l'instant, je n'arrive plus à encaisser, c'est tout. J'estime avoir suffisamment fait le tampon ces derniers temps pour ne plus pouvoir m'abstenir de réagir quand on m'insulte." Là, c'est dirigé en partie contre lui. J'avais piqué une petite colère lors du dîner où Hutchinson et lui m'avaient annoncé que j'allais avoir un petit frère ou une petite soeur. Et avant ça, j'avais passé tout le dîner à les voir roucouler comme deux jeunes amants épris l'un de l'autre comme jamais. Ca m'avait rendu malade, je n'avais d'ailleurs pratiquement pas touché à mon assiette ce soir-là. Et je n'avais pratiquement pas décroché un mot non plus. J'étais confus, en colère, triste. Jaloux, aussi. J'avais toujours imaginé que je trouverai la femme de ma vie avant que mon père ne se retrouve quelqu'un à son tour, ne me demandez pas pourquoi. Une sorte de course contre la montre pour ne pas avoir à penser à Maman si jamais j'étais moi-même en couple. J'aurais mieux accepté. Mais c'est tombé à l'eau. Vraona n'est plus là et mon père est en train de fonder une famille avec une femme que j'essaie à tout prix d'accepter malgré de grosses difficultés. "J'suis désolé d'avoir mis le dawa dans ton cours, c'était pas du tout intentionnel." m'excusai-je en détournant le regard, griffonnant sur ma feuille en me disant qu'il allait peut-être lâcher l'affaire. En prime, je voyais du coin de l'oeil quelques étudiantes flâner à l'entrée de la salle en laissant traîner leurs oreilles. Les gossips de la promo, toujours à l'affût d'un potin.
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyMar 27 Nov - 12:49


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- J'ai pas d'problème, j'suis juste un peu fatigué, c'est tout.

J’eus l’impression de revenir de nombreuses années en arrière où, à tout juste six ans, Kilian m’avait déjà prononcé cette phrase alors qu’il était rentré de l’école un peu trop silencieux. A l’époque, la raison était différente : un des camarades de classe de mon fils s’amusait à lui mener la vie dure en le bousculant, en lui volant ses goûters et en le chambrant devant les autres élèves. J’avais tout d’abord fait en sorte de rencontrer le père de cet enfant pour le lui en toucher deux mots. Et malgré les menaces de son paternel, le gamin avait continué à malmener Kilian durant les jours qui suivirent, si bien que je fus contraint d’attraper le gosse entre quatre yeux et de lui flanquer la peur de sa vie en lui expliquant qu’à chaque fois qu’il martyriserait mon fils, une araignée géante viendrait dans sa chambre et qu’elles le mangeraient pendant son sommeil. Plus jamais il n’a recommencé. Il me semble même qu’il a dû aller voir un psychologue durant quelques temps. Oui, j’avais fait preuve de sadisme, mais on ne touche pas à mon enfant.

- Tu avais six ans la dernière fois que tu m’as dit ça. Et à l’époque, j’ai bien eu raison d’insister.

Puis il m’explique que je n’ai pas demandé à Ramirez si lui avait un problème lorsqu’il a quitté la salle après m’avoir adressé un bras d’honneur. Mes yeux se plissèrent en observant Kilian. Très amusant. Qu’il fasse un peu preuve de bonne foi, au lieu de lancer des arguments stupides qui ne tiennent pas la route, à tout bout de champ.

- Ce n’est pas mon fils à c’que je sache.

Kilian se leva afin de rejoindre sa place, apparemment dans le but de trouver une cigarette dans ses affaires. Mais il n’en trouva pas. Je lui en aurais bien dépanné une si je n’avais pas ressenti le besoin d’avoir quelques explications de sa part. Et c’est au bout de quelques temps qu’il commença à s’ouvrir un peu. Oui, j’étais bien placé pour savoir que ces derniers temps, il n’allait pas bien. Mais que voulait-il ? Que je le dispense de cet exercice alors qu’il faisait son possible pour qu’on oublie la relation père-fils qui nous reliait lorsque nous nous trouvions en cours ? Les gens ont toujours détesté le favoritisme, et je le comprenais. Kilian me demandait d’agir avec lui comme je réagissais avec tout le monde. Il ne pouvait donc pas me reprocher maintenant d’être objectif lorsque nous nous trouvions dans cette salle.

- J'sais bien que tu fais aucun favoritisme, et d'ailleurs je n'en veux pas. Mais c'est juste que pour l'instant, je n'arrive plus à encaisser, c'est tout. J'estime avoir suffisamment fait le tampon ces derniers temps pour ne plus pouvoir m'abstenir de réagir quand on m'insulte.

Là, je compris très aisément qu’il faisait référence au dîner que nous avions eu avec Cheyenne et ses jumeaux. Nous avions ainsi annoncé le bébé et à partir de là, Kilian n’avait pas réussi à se réjouir pour nous. Déjà qu’il semblait sans cesse sur le point de mordre Hutchinson, le fait qu’elle soit enceinte n’avait rien arrangé. A peine rentrés, l’anglaise m’avait expliqué son malaise face à mon aîné, ce que je pouvais comprendre. Et déjà, cette histoire me rendait malade. Comment allais-je pouvoir fonder cette famille si mon fils et ma nouvelle compagne ne sont pas fichus de rester dans la même pièce parce que Kilian montre un peu trop qu’il déteste notre couple ? Une situation difficile à vivre car au final, je ne pouvais me confier à personne. Il ne savait même pas la relation que j’entretenais avec Aidan et Caitlin, les petits de Cheyenne. J’avais l’impression de renaître de mes cendres et pourtant, je m’obligeais à garder le silence pour ne pas rendre mon fils encore plus triste qu’il ne l’était déjà.

- C’est donc ça…

Je passais ma main contre ma nuque, nerveusement. J’avais l’impression de me retrouver dans une impasse. Est-ce qu’un jour Kilian arrivera à accepter que mon deuil a été bien assez long pour que je puisse avoir le droit à une seconde chance d’être heureux ? Je le trouvais un poil égoïste et pourtant, le fait qu’il s’agisse de mon fils me faisait culpabiliser. J’avais pris du temps à m’ouvrir à Cheyenne, refusant tout d’abord de me mettre officiellement avec elle pour deux raisons : je ne me sentais pas prêt à passer à autre chose ; et je savais que ça ne plairait pas à Kilian. Pourtant, avec le temps, j’avais compris que si je n’agissais pas maintenant, Hutchinson me filerait entre les mains. Je ne pouvais pas la faire attendre cent sept ans alors que je désirais finir mes jours avec elle.

- Tu m’avais pourtant dit que je méritais d’être heureux. Alors pourquoi tu refuses d’être content pour moi ?

Je fixais mon fils avec une certaine incompréhension.

- Je ne te demande pas de l’appeler Maman, de faire comme si elle allait remplacer la tienne. Je veux seulement que tu l’acceptes, que tu fasses un minimum d’effort pour la connaître car là, elle comme moi, nous ne savons plus comment réagir.

Je fis un pas vers lui, hésitant.

- Tu vas avoir un petit frère ou une petite sœur. Et puis, il y a aussi les jumeaux de Cheyenne. On pourrait se reconstruire toi et moi. Mais pour ça, il faut aussi avoir envie d’avancer, tu ne crois pas ?

Mes yeux se baissèrent un instant sur la moquette rouge, avant de les relever vers Kilian.

- Qu’est-ce que tu veux ? Que je rompe avec Cheyenne ? Qu’elle avorte ? Que je coupe les ponts avec elle ainsi qu’avec les petits pour continuer à faire le deuil de ta mère ? Dis-moi ce que tu veux à la fin. Ton bonheur passe avant le mien…
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyMar 27 Nov - 13:25

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Je préfère ne pas répondre. A l'époque, ce gosse m'avait chahuté et comme de nombreux enfants, j'avais refusé de le dire à mes parents. La honte, sans doute. Mais avant tout, la fierté d'un fils qui veut ressembler à son père et qui, par conséquent, ne veut pas avoir à appeler ce même père à la rescousse dès qu'il se fait un peu bousculer. Le lendemain de son intervention, j'avais rasé encore davantage les murs, de peur de représailles. C'est loin, tout ça. Et pourtant, une fois encore, je préfère cacher mon malaise plutôt que d'en parler au seul homme qui devrait pourtant tout savoir. J'avais demandé à ce qu'il soit transparent avec moi... mais je ne l'étais pas avec lui. C'était injuste et plus les minutes s'écoulaient, plus je me sentais fautif de tout ce qui se passait. Je griffonnais maladroitement sur ma feuille sans trop réfléchir à la moindre forme en particulier, je ne cherchais qu'une seule chose : éviter son regard. Je lui demande de me traiter en adulte et depuis quelques temps, j'ai l'impression de me comporter comme un gamin. Oui, j'peux l'affirmer, j'ai honte de mon comportement. Honte d'être toujours celui qui exige mais qui ne fait pratiquement rien en retour. Alors, au lieu de répondre, j'écoute. C'est donc ça ? Non, ce n'est pas que ça. Ce n'est pas que ce bébé. C'est un tout. A la rigueur, ce bébé n'est que la partie visible de l'iceberg. C'est une vraie accumulation qui me pousse à être de plus en plus agressif avec tout le monde. Mes pensées se tournent un instant vers Remy, la soeur de Vraona avec qui j'ai discuté il y a peu... Elle, elle arrive à parler de ses problèmes pour évacuer les tensions. Une solution formidable, j'en conviens, mais je n'y arrive pas. J'ai beau essayer, mais depuis que j'ai sept ans, je ne parle pas de mes problèmes. J'explose, j'insulte, je casse, je m'enferme, je hurle, je pleure parfois... mais je ne parle pas. Parler, c'est prendre le risque de me faire mener en bateau. C'est un traumatisme que je me balade depuis que mon père s'est tiré après la mort de ma mère. Et même si cet homme fait tout pour reprendre la place qui est la sienne, je n'y peux rien, je n'arrive pas à parler de mes ennuis. Je déglutis en l'entendant parler, il me rappelle ce que je lui ai dit l'autre fois, qu'il méritait d'être heureux. Allez, prends-toi ça dans les dents, Kilian. La prochaine fois, j'la fermerai, ça vaudra mieux. J'ai l'impression de tous les ralentir autant qu'ils sont, j'ai l'impression d'être le vilain petit canard qui fait chier tout le monde avec son sale caractère. Me barrer. Me barrer loin, très loin. Voilà ce qu'il me faudrait vraiment. Sortir la tête de l'eau pendant quelques semaines, ne plus penser à ce quotidien oppressant et à ce futur qui l'est tout autant. Ma main libre, enfoncée dans ma poche, se serre de plus en plus, signe que je me retiens. De quoi ? D'éclater en sanglot et de devenir la loque officielle de la famille.
Une fois qu'il a fini de parler, je garde le silence. Longtemps. Combien ? Une bonne minute... mine de rien, dans une conversation comme celle-ci, ça fait un sacré blanc. Puis finalement, la tête toujours basse pour éviter de croiser son regard, je finis par décrocher un mot avec une douleur dans la gorge à force de m'empêcher de craquer. "J'y arrive pas." Je respire et commence à noircir les carreaux de ma feuille avec la pointe du stylo que je tiens. "J'arrive pas à me réjouir pour toi. Pour vous. Pour tout le monde. J'suis qu'un égoïste qui pense qu'à lui et je suis en train de devenir exactement ce que je ne voulais pas être quand j'me suis posé dans ce fauteuil pour la première fois." Je suis en train de devenir un de ces handicapés qui grognent après tout le monde, qui râlent après tout et n'importe quoi et qui sont de véritables nombrilistes. Il y a quelques mois, malgré un sacré caractère, j'étais pourtant bien plus avenant, plus joyeux, plus serviable et plus ouvert. Je plaisantais, même. Aujourd'hui, j'ai l'impression de me laisser vivre au petit bonheur la chance. Une routine. Boulot, kiné, dodo. "L'autre soir, je... honnêtement, je... je crois que j'étais pas si mécontent d'avoir un petit frère ou une petite soeur..." Là, je ne mentais pas pour lui faire plaisir, j'étais sincère. En soi, cette nouvelle était bonne. Mais je l'avais mal accueillie, c'est tout. "Mais j'arrive pas à vous voir tous les deux ensemble. Vous faites sûrement un joli couple, mais dès que je te vois lui serrer la main, l'embrasser, lui parler, la regarder... j'imagine Maman à sa place. J'y peux rien, j'ai beau essayer d'oublier ces images, elles reviennent sans arrêt. J'ai l'impression que j'fais un blocage là-dessus et j'arrive pas à m'en débarrasser pour apprendre à connaitre Hutchinson." Je l'appelle encore par son nom de famille. C'est toujours mieux que "la grognasse" que j'avais employé pendant quelques mois avant ce dîner, non ? J'évite toujours très soigneusement de regarder Logan, mais ma langue se délie un peu au fur et à mesure. "Je... je suis content que tu arrives à t'en sortir, P'pa. Vraiment. Faut pas croire que je t'en veux ou quoique ce soit. Ni à elle d'ailleurs. Mais le bonheur des autres, en ce moment, ça m'file le bourdon. J'étais heureux aussi, y a trois mois. J'avais une vie normale, de vraies passions, j'avais retrouvé une famille... Et aujourd'hui, j'ai besoin d'une canne pour marcher quand c'est pas un fauteuil, j'arrive plus ni à peindre ni à jouer correctement, j'ai perdu la seule femme que j'ai jamais aimé avec une telle passion et..." Ma respiration commence à s'accélérer, les traits du crayon se font de plus en plus aléatoires et rageurs au gré d'un flux de paroles qui s'intensifie. "Et j'ai cette colère, j'ai cette tristesse, j'ai tout ça en moi que je n'arrive pas à faire sortir... Je me vois être désagréable, méchant, mesquin, avec toi, Cheyenne, mes amis... ça me rend malade, mais j'arrive pas à m'en empêcher. J'ai l'impression d'être un poids pour les autres. Je peux pas me défouler, j'ai rien pour évacuer et je..." Je lève enfin les yeux devant moi, quelques larmes ont mouillé le papier mais je m'empêche encore de regarder mon père par fierté. "J'ai peur de ce que je suis en train de devenir. Un petit con qui pense qu'à sa gueule. J'ai peur, parce que j'arrive pas à m'arrêter, p'pa..." lâchai-je d'une voix tremblante.
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyMar 27 Nov - 14:22


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- J'y arrive pas.

Et le voilà qui laisse la pointe de son stylo se balader sur la feuille. Je ne réponds pas, ne cherche pas à l’arrêter, il a toujours eu besoin de s’occuper les mains, de poser ses yeux ainsi qu’une partie de son attention sur autre chose pour pouvoir s’ouvrir. Faire totalement face à ce qui lui faisait mal ne semblait pas possible pour lui. Je pouvais le comprendre, j’agissais de la même façon. Et si mon fils cherchait à garder de la fierté en refusant de croiser mon regard, il ne faisait que traduire une certaine défaillance sur laquelle je ne mis aucun mot. Je préférais l’écouter, être là pour tenter de le comprendre, le conseiller en conséquence, et surtout, faire en sorte de l’aider à se relever.

En m’expliquant qu’il commençait à devenir comme il ne souhaitait pas en s’asseyant sur ce fauteuil, je compris qu’il parlait d’un handicapé qui broie du noir à longueur de journée, qui aboie sur tout ce qui bouge et qui passe son temps à se plaindre. Mes sourcils se froncèrent. Ce n’était que temporaire, et c’était on ne peut plus normal qu’il se sente désabusé par la situation présente. Qui aurait pu supporter sans rechigner d’avoir un statut de personne handicapée, même si ce n’était pas définitif ? Kilian devait se montrer un peu plus indulgent avec lui-même et accepter une partie des sentiments qu’il possédait tout en les détestant.

Le problème en ce qui concernait Cheyenne et moi, semblait résider dans le fait que nous nous montrions trop amoureux. Et je pouvais comprendre que ça gêne Kilian. Hutchinson m’avait appris à redevenir humain et affectif, si bien que je lui adressais toujours un peu plus de tendresse. Et en tant que nouveau couple où la passion est encore de mise, je devais avouer que nous ne nous montrions pas des plus réservés. J’avais conscience d’avoir peut-être un peu trop abusé en me montrant aussi heureux avec Cheyenne, face à mon fils. Mais j’étais parti dans l’idée que maintenant qu’il s’était fait une idée, tout s’était arrangé. La différence, c’est qu’entre entendre et voir, il y a une sacrée marche. Quand il m’expliqua qu’à chaque fois que j’embrassais l’anglaise, lui parlais ou bien la regardais, Kilian faisait immédiatement le rapprochement avec sa mère. A cette parole, je baissais les yeux pour garder le silence, pas spécialement très fier de moi.

Le véritable problème restait le fait qu’en ce moment, Kilian avait l’impression que tout le monde avançait, à part lui, comme si nous le laissions tous dernier nous alors que lui cherchait à se débattre pour partir dans la même direction sans pourtant y parvenir. Le cumul d’évènements qui le rendaient irritable semblait compréhensible. Effectivement, ces derniers mois, il n’avait pas eu beaucoup de choses ou même de situations joyeuses dans sa vie. Et c’est sur son caractère que tout cela déteignait.

- J'ai l'impression d'être un poids pour les autres.

Cette parole me fit mal, notamment parce que c’est ce que j’avais ressenti lors du décès de Sasha. L’impression d’être un boulet en empêchant les autres de continuer leur route. C’est pourquoi j’étais parti en abandonnant Kilian à ses grands-parents maternels. Je n’avais pas voulu être ce poids lié à sa cheville, en lui volant une enfance heureuse à cause d’un père incapable de passer par-dessus la tragédie de sa vie. Et pour avoir ressenti cette sensation qu’éprouvait mon fils, je me sentis très mal. J’aurais aimé lui arracher cette sensation, tant elle était désagréable. D’ailleurs, quelques larmes coulèrent sur le papier qu’il griffonnait depuis le début de notre conversation à l’aide d’un stylo noir.

Vous voulez savoir ce qui fait le plus mal pour un parent ? Voir son enfant dans un tel état et se trouver impuissant.

- J'ai peur de ce que je suis en train de devenir. Un petit con qui pense qu'à sa gueule. J'ai peur, parce que j'arrive pas à m'arrêter, p'pa...

Mon cœur se déchirait lentement en voyant mon fils ainsi. J’aurais pu donner tout ce qu’il m’appartenait pour qu’il retrouve le sourire et la joie de vivre comme avant. Finalement, j’allais m’asseoir sur le siège juste à côté du sien, ne l’obligeant pourtant pas à lever les yeux vers moi. Je me contentais de déposer mon front contre sa chevelure brune et murmurer à son oreille :

- C’est tout à fait normal que tu te sentes mal ces derniers temps. Avec tout ce qu’il est arrivé, ce serait te mentir que de te dire que tu n’as pas à faire la gueule. Mais ce n’est que temporaire. Tu vas bientôt quitter totalement ce fauteuil. Tu as vu les progrès que tu as faits en si peu de temps ? A partir de ce moment, tu arriveras à repeindre parce que ce qui te bloque, c’est justement ce fauteuil. Il te rappelle ce que l’on a vécu, et tant qu’il ne sera pas sorti de ta vie, il te rebalancera tous les jours en pleine figure ce que tu as subi. Pour ce qui est de Vraona…

Je pris un moment de réflexion avant de poursuivre.

- Si elle est vraiment la femme de ta vie, vous vous retrouverez d’une façon ou d’une autre. Ca fait peut-être vieux romantique, mais c’est la vérité. Et enfin, pour Cheyenne et moi, je suis désolé. J’avoue m’être montré un peu trop affectif avec elle, sans ne jamais t’y avoir habitué. Je m’abstiendrais plus dorénavant.

Un baiser se déposa sur sa tempe.

- Mais je refuse de t’entendre dire que tu as l’impression d’être un poids. C’est justement parce que j’ai ressenti ça que j’ai préféré partir en te laissant à tes grands-parents. Je n’avais pas envie de t’empêcher d’avancer en sachant que je venais de m’enfermer dans une sérieuse dépression. Est-ce que ça a été la bonne solution ? Tu m’as prouvé que non. Alors ne fait pas la même erreur que moi. Allez, viens par là.

Je passais mes bras autour de lui pour l’attirer contre moi. Qu’il le veuille ou non, je comptais bien l’obliger à faire un câlin à son père. Par fierté il aurait été capable de refuser, tout en en ayant pourtant envie. Donc je ne lui laissais pas le choix.

- Je t’aime fiston, murmurais-je en sentant les larmes monter à mes yeux. Si tu savais à quel point je peux t’aimer.
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyMar 27 Nov - 18:47

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Ca avait toujours été l'un de mes principaux défauts. Me mettre la pression, m'imposer certaines limites drastiques pour avoir une ligne de conduite exemplaire. Si je n'avais pas agi de la sorte, je n'aurais jamais eu de notes aussi brillantes au cours de ma scolarité, par exemple. Mais avec le temps, ceci est devenu un défaut qui me joue des tours. J'ai parlé sans discontinuer, trouvant tout de même une part de réconfort dans le fait de me confier. Mais en même temps, je mets des mots sur mes problèmes et je m'aperçois de la situation dans laquelle je me trouve. Je tourne en rond, j'ai besoin de faire du mal aux autres et je me dégoûte d'en arriver là. Heureusement que ce handicap n'est supposé être que temporaire... je sais d'avance que je n'aurais pas passé ma vie dans ce fauteuil. Je n'ose pas le dire à mon père, mais il est clair que j'aurais mis un terme à tout ça bien avant de commencer à me morfondre ad vitam aeternam. Mes yeux restent posés dans le vague, je ne veux pas le regarder. Je ne veux pas qu'il me voit dans cet état. Surtout pas de pitié, pas quelque chose qui me fasse sentir que j'étais bien au fond du trou. Je voyais les gens marcher, s'amuser, rire autour de moi, et je n'arrivais plus à le supporter. Je n'avais qu'une envie, c'était de m'enfermer quelque part, loin. Loin d'une bonne humeur que je n'arrive pas à partager avec les autres. Même la fête organisée par les Sigmas et les Bêtas/Deltas ne m'a pas rendu le sourire. Pourquoi ? C'est tout bête : les autres pouvaient danser. Et moi non. De la jalousie pure et dure qui s'ajoute à tout le reste. Je n'ai pas voulu en parler à Logan avant car il avait l'air si heureux avec Cheyenne. Je n'avais pas voulu lui gâcher ça, il avait mis plus de treize ans ans à se remettre de son deuil. J'avais agi de façon beaucoup plus lâche : je m'étais enfermé dans le silence, un silence blessant et un désir de ne surtout pas expliquer pourquoi j'agissais ainsi. Je savais que la compagne de Logan n'était pas ma mère, qu'elle ne cherchait pas à le devenir et que je ne cherchais pas non plus à faire en sorte qu'elle le devienne. Mais j'avais beau en être convaincu, j'étais hanté par des flashs. Notre vie à Paris. Tous ces rires, tous ces mots doux qu'il échangeait avec Cheyenne me rappelaient invariablement Maman. Je n'avais connu mon père qu'avec une seule et même femme, il m'avait laissé avec ce modèle en tête... et il faudrait du temps avant que je puisse mettre ce modèle au placard pour de bon. De toutes manières, ma démarche ne visait en aucun cas Cheyenne personnellement : n'importe quelle autre femme aurait engendré le même résultat. Peut-être qu'un tel constat la rassurerait un peu. Je n'avais rien contre elle, j'étais juste obsédé par ce qu'elle représentait et ce qu'elle remplaçait. Mon père vint s'asseoir à côté de moi et colla son front contre ma tête. Je me mordais la lèvre inférieure avec violence, sentant l'émotion commencer à me submerger. Mais je luttais pour me retenir. Je ne voulais pas tout laisser éclater maintenant, pas en sachant qu'il y avait encore des tas d'étudiants qui attendaient en dehors du théâtre. Mes mains tremblaient, mes épaules également. Je l'écoute sans l'interrompre, je hoche à peine la tête pour marquer mon approbation. J'ai peut-être imaginé que tout s'effacerait rapidement, mais non. Je les voyais constamment. Ces types qui m'avaient menacé, qui avaient tiré sur mon père. "Dès que j'ai un pinceau en main, je... j'ai l'impression de sentir ce canon sur ma tempe..." murmurais-je sur un ton détaché et effrayé, le regard humide. Logan avait raison, peut-être que j'arriverais à peindre de nouveau. Il me fallait juste un déclencheur. Comme ma première prof de peinture. Elle m'avait reproché d'être trop technique, elle m'avait poussé à bout jusqu'à ce que je pète un câble. Je m'étais jeté sur elle, j'avais failli l'étrangler... puis je l'avais embrassée avant de nous unir. C'était ma première fois. Ce jour-là, elle avait libéré la passion chez moi. C'était ça qu'il me fallait. L'étincelle qui déclenche à nouveau le feu de la création. Je n'en avais jamais parlé à mon père, d'ailleurs. Le fait qu'une femme de vingt ans mon ainée ne m'avait pas initié qu'à la peinture... sans doute la peur qu'il le prenne mal, je n'avais eu que seize ou dix-sept ans à l'époque.
Je me laisse attirer contre lui en grommelant à peine. Juste pour la forme. Rapidement, mes bras entourent son torse et je niche ma tête dans son cou par réflexe, comme lorsque j'étais petit. Juste pour sentir la chaleur de sa peau et son parfum si particulier pour me rassurer. C'est quand même dingue, ce que les souvenirs peuvent marquer le comportement des gens. Je ferme les yeux, quelques larmes supplémentaires coulent. L'histoire semble apparemment faite pour se répéter si je subis un passage à vide similaire à celui de Logan à la mort de Sasha. "C'est moi qui t'aime le plus..." soufflais-je en le serrant encore un peu plus fort. Une sorte de petit jeu de compétition entre nous depuis toujours, à savoir qui aime le plus fort. C'est idiot car nous sommes au même niveau, mais il comprendra le message. Cette fois-ci, je me sens fatigué pour de bon. Consentir à dire ce qu'on a sur le coeur après tant de retenue, c'est épuisant. Il fallait juste éviter de penser que j'étais un poids pour tout le monde... facile à dire, moins à faire. Mais le fait d'avoir un homme qui soit déjà par là m'aiderait certainement. "T'as raison... puis j'crois pas que m'engager dans l'armée, ce soit une idée fabuleuse." lâchai-je avec un soupçon d'humour noir. C'est ma manière de détendre un peu l'atmosphère, il parait que ma mère était de ce genre. "Merci de faire un effort... au moins le temps que j'arrive à gérer un peu tout ça. T'façons, vous pouvez faire ce que vous voulez dans l'appartement pendant la semaine." Depuis que la cohabitation est instaurée, j'habite à l'université. Pendant la semaine, car les week-ends, je préfère rentrer à l'appart' pour être un peu plus au calme. Comme Benedikt, d'ailleurs... dommage qu'on ne partage pas la même chambre. Ca aurait rendu les choses tellement plus simples... passons. Je reste serré contre mon père avant de regarder devant moi avec plus de sérénité. "Tu vois qu't'es pas un si mauvais père que ça." Comprenez par là que ça faisait du bien de pouvoir converser avec son père, cela faisait un sacré moment que ça n'était pas arrivé. C'est ma façon gentille de lui dire qu'il assure, sachant que lui aussi a besoin d'être rassuré sur son rôle. "Je constate seulement qu'on se cause vraiment quand ça va mal... faudrait voir à le faire aussi quand ça va bien." J'essaie de passer à autre chose. On reparlera sûrement plus tard de choses graves mais là, j'en ai déjà bien assez dit. Le reste se règlera au fur et à mesure, avec son soutien. "Allez, reprenons le cours, les autres vont finir par se demander ce qui se passe..." Même si au fond de moi, je n'ai qu'une envie : rester dans cette position et ne plus bouger. Ouais, j'ai vingt piges mais j'apprécie encore les étreintes père/fils. J'en ai été privé pendant treize ans, alors j'assume parfaitement ce besoin d'être également proche de lui physiquement. Ca me rappelle tout simplement qu'il est là.
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MessageSujet: Re: Meurtre en salle de théâtre ? Meurtre en salle de théâtre ? EmptyJeu 29 Nov - 12:40


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Avec le temps, Kilian a fini par se montrer plus renfermé, à garder ses émotions sur lui, n’extériorisant qu’avec l’aide de l’art. La différence, c’est qu’aujourd’hui, il se trouvait dans la même situation qu’un écrivain face à la fameuse page blanche. Et j’étais quelque peu déçu qu’il ne veuille pas se confier à moi, me gardant volontairement à l’écart de tout ça. Pourtant, je connaissais sa façon de penser : il refusait de me gâcher le moral en voyant que je commençais à reprendre des forces après de nombreuses années au plus bas. Adorable de sa part, certes, mais je ne suis pas un enfant qu’il faut protéger, mais bel et bien son père. Le bonheur de Kilian passait avant le mien. Et j’aurais beau être triste, si mon fils, lui, souriait, je ne pourrais que voir le bon côté des choses Mais ça, le jeune homme semblait l’oublier. Il restait le facteur le plus déterminant de mon bien-être. Le voir dans cet état m’anéantissait de jour en jour. Je voulais lui venir en aide et pourtant, je me sentais terriblement impuissant. Oui, je me trouvais dans un grand état de frustration.

- C'est moi qui t'aime le plus...

Je gardais mon fils contre moi, me retenant de laisser couler davantage de larmes. Je voulais seulement profiter de sa présence contre moi, et revenir de nombreuses années en arrière quand il passait une bonne partie de son temps dans mes bras. Et comme à notre ancienne habitude, nous nous adonnions à une petite compétition, à savoir qui aimait le plus l’autre.

- Ca, c’est dans tes rêves demi-portion. C’est moi qui t’aime le plus…

Je fermais un instant les yeux tout en souriant. Mes lèvres se déposèrent dans ses cheveux bruns. Qu’il est bon de serrer son enfant dans les bras. Il avait beau avoir désormais la vingtaine, je n’avais aucune honte face au fait de me montrer affectif avec lui. Et s’il avait grogné au moment où je l’avais attiré contre moi, c’était uniquement pour la forme puisse qu’il nichait toujours un peu plus dans visage dans le creux de mon cou. Il n’y a pas d’âge pour les câlins. J’en avais conscience. Tenir mon fils contre moi me faisait d’ailleurs le plus grand bien.

- Merci de faire un effort... au moins le temps que j'arrive à gérer un peu tout ça. T'façons, vous pouvez faire ce que vous voulez dans l'appartement pendant la semaine.

Comme si j’avais entendu sa bénédiction pour profiter de l’appartement avec Cheyenne durant son absence. De toute façon, quand elle n’était pas chez nous, c’est moi qui me trouvais chez elle. Quoi qu’il en soit, nous savions profiter des moments intimes. Un peu trop peut-être. Mais évitons de dire ce genre de choses.

- Très bien, dorénavant, on en profitera…

… bien plus encore ! J’esquissais un sourire en coin que Kilian dû capter très rapidement puisque j’en venais à croiser son regard. Ben quoi ? Je détournais les yeux pour passer inaperçu, amusé par la situation.

Lorsque Kilian m’avoua que je n’étais pas un si mauvais père, mon regard se tourna une nouvelle fois vers lui, en souriant. Je comprenais par ses mots qu’il était fier de moi, fier de ce rôle que j’avais réussi à reprendre. Touché, je déposais ma tête contre celle de mon fils en fermant à nouveau les yeux. J’avais besoin d’être rassuré sur ce point là, de savoir que je ne faisais pas fausse route. Il est difficile d’être parent, surtout dans mon cas. J’avais dû reconquérir le cœur de mon enfant, et savoir que j’y arrivais doucement mais sûrement me faisait plaisir. Au moins, je pouvais récolter les fruits de mes efforts.

- Toi non plus, t’es pas un si mauvais fils que ça.

Comprenez également par là un ‘‘Je suis très fier de toi mon fils, tu es ma plus belle réussite’’. Et je le pensais réellement. Kilian restait la preuve concrète que je n’avais pas tout perdu, que j’avais au moins réussi à faire une prouesse : mon fils. Quoi qu’il puisse faire, je resterais l’homme le plus fier. Mais je savais la route encore longue pour retrouver la parfaite osmose qui nous reliait lorsqu’il n’était encore un enfant. Je comptais m’améliorer, jusqu’à ce qu’il soit aussi fier de moi que je le suis de lui.

- Compte sur moi.

J’avais simplement murmuré ses mots pour lui faire comprendre que je n’attendrais pas de le voir dans un sale état pour avoir une discussion sérieuse et riche avec lui. Je le gardais contre moi quand il reprit la parole.

- Allez, reprenons le cours, les autres vont finir par se demander ce qui se passe...

A ces mots, je resserrais un peu mon étreinte autour de lui, gardant toujours les yeux fermés pour profiter de chaque seconde. Sentir le cœur de Kilian battre contre moi représentait le plus grand soulagement qu’il y ait sur cette Terre. Et c’est dans un murmure que je lâchais une plainte d’enfant gâté.

- Non. Je ne te lâcherais pas. On a plus de treize ans de câlin à rattraper. Donc j’espère que tu as du temps.

J’esquissais un large sourire en déposant un baiser sur sa tempe.

- Bon, il va de soit qu’à un moment, je vais avoir faim. Donc on continuera cette séance câline quand j’aurais mangé quelque chose. En attendant, on va aller fumer une clope.

Je tentais de le lâcher, avant que je ne vienne le serrer une dernière fois dans mes bras. C’était tellement bon comme situation ! Et ce n’est qu’après avoir déposé un baiser volontairement bruyant sur sa joue, comme j’aimais le faire quand il était plus jeune, je me levais enfin. Me dirigeant vers ma veste, je sortais deux cigarettes de mon paquet et en lançais une à Kilian. Ce n’est que lorsqu’il rejoignit son fauteuil que nous nous dirigeâmes vers l’extérieur des locaux afin de fumer.

- D’ailleurs, tu as de la chance quelque part, je ne peux plus te faire la morale sur la cigarette. Il va de soit que ça se serait passé quelques années plus tôt, je t’aurais fait fumer l’équivalent d’un paquet entier en une soirée pour te dégoûter.

Je lui adressais un sourire amusé. Mais voilà, je ne le pouvais plus, si bien qu’aujourd’hui, je venais même à lui payer une clope.
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Meurtre en salle de théâtre ?

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