the great escape
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And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you...

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MessageSujet: And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... EmptySam 17 Juil - 2:53


Tristan O'Leary & Jude L. Ashcroft


Le mois de Juin avait offert ses plus beaux délices à la ville de San Francisco. Et ce n'était pas les étudiants de Berkeley qui avaient boudé cette chaude promesse de vacances. Un arôme d'insouciance filait et s'élevait partout sur le campus, et l'excitation qui habitait chaque étudiant et qui grandissait de jour en jour semblait même faire vibrer les enceintes de l'université. L'été était là. Les examens n'étaient plus qu'un mauvais souvenir pour la plupart d'entre eux, bien vite effacés de leur mémoire par l'empire et les répercutions de l'alcool et de diverses substances plus ou moins tolérées. Et chacun laissait voguer son esprit là ou ses envies ou plutôt son compte en banque lui permettrait de se rendre pendant les deux mois qui allaient suivre. L'un s'imaginait déjà au bord de la plus belle plage de Bali, ou il pourrait pleinement laisser s'assouvir ses désirs les plus fous au rythme de l'écoulement infini et si tranquille de son compte à plus de six zéros; tandis qu'un autre pensait plus simplement à la douce sensation si familière qu'il éprouverait lors de son passage dans sa propriété des Hamptons. Mais ce n'était pas ce genre de songe, pourtant si prisé, qui occupait la tête de notre protagoniste à ce moment là. Non, ce qui habitait l'esprit de Jude c'était ce changement si soudain de chambre étudiante. Son ancienne chambre, qu'il avait occupé pendant un an et surtout partagé avec un autre étudiant – un troisième année – devait être quittée dans les plus brefs délais. Apparemment, le départ de son précédent colocataire et l'arrivée prochaine des nouveaux élèves amenaient l'administration à effectuer quelques changements dans l'organisation des maisons de confrérie. Et Jude, comme d'autres élèves, généralement de première voire seconde année, allaient connaître quelques potentiels changements dans la distribution des chambres.
Jude n'était pas spécialement ennuyé de devoir déménager, n'ayant pas spécialement tissé de réels liens avec son camarade de chambrée. Ce troisième année, du nom d'Andrew N. Wade s'il se souvenait bien, ne s'était pas montré particulièrement chaleureux durant les quelques mois qu'ils partagèrent le même espace de vie, et son front qui affirmait un certain orgueil n'avait pas poussé Jude a établir un contact qui dépassait la simple politesse amicale dont il faisait naturellement preuve. Et de toute façon, combien de nuits avait-il véritablement passé dans cette chambre? Entre les soirées organisées par telle confrérie ou tel groupe et les nombreuses fois ou il resta dormir chez untel qui invitait dans sa chambre ce soir-là ou n'importe ou sur le campus d'ailleurs, et même, rien que les nuits passées dans la chambre d'Otto, non, Jude n'avait pas beaucoup croisé cet Andrew. Ce qui l'inquiétait peut-être un peu plus alors c'était l'identité de son ou de ses nouveaux colocataires. Disons qu'il ne devait pas avoir non plus les tiraillements au ventre et la sécheresse de la gorge d'une Béta qui change d'un seul coup de « sphère sociale » en changeant de chambre, prenant ainsi le risque de passer de simili reine de tel ou tel truc inutile à littéralement rien, retombant en bas d'une chaine alimentaire – oui parce que si vous écoutez toutes les Bétas vous aurez 150 différents schémas de la pyramide qui est sensée régir l'université; rien n'est acquis dans ce monde d'apparences. Bref, tout ça pour dire qu'il pouvait être un peu anxieux, bien que n'importe qui aurait avancé qu'il n'avait pas à s'en faire, la confrérie SIGMA regroupant pour la plupart des individus relativement sympathiques. Jude n'en doutait pas, il avait passé une très agréable année en compagnie de cette singulière troupe que toute cette confrérie formait, mais bon, rien ne pouvait l'empêcher de légèrement mordre sa lèvre inférieure lorsqu'il rentra des cours pour découvrir sa nouvelle chambre. Il frappa à la porte à deux reprises, avant d'oser enclencher la poignée et de pénétrer dans l'antre ou il comprit que personne n'y était encore rentré de la journée.

Relativement semblable à celle qu'il avait « habitée » pendant un an, Jude ne se sentit pas véritablement étranger à l'endroit. L'organisation de la pièce ne divergeait pas tant que ça, ici aussi, ils ne seraient que deux. La personne de l'administration qui le prévint de ce changement imprévu ne sut lui dire qui serait son nouveau colocataire, et il ne chercha pas à consulter le plan des maisons de confrérie pour savoir avant d'entrer dans ladite chambre. Peu de choses étaient différentes, si on ne prenait pas en compte la décoration des murs qui changeait sensiblement des goûts douteux en matière de peinture du vieil Andrew... Non, il ne se retrouvait pas avec un gothique à tendance satanique ou un japanophile quelque peu entreprenant ou avec une folle de country music! Non pas que Jude se montre totalitaire envers une quelconque forme de passion, mais, je pense pouvoir dire que la cohabitation aurait peut-être été moins facile assez rapidement... Ici reposaient plutôt sur les murs des traces d'un artiste timide, aux esquisses farouches bien que discrètes, et quelques photos auxquelles Jude ne fit pas attention, penché alors sur le trait de ce fusain. La chambre semblait calme, et ne pas indiquer une activité autre que le repos, la lecture et la réflexion. Elle respirait une certaine tranquillité, synonyme de sérénité. Un silence froid semblait entourer cet endroit, le laissant peut-être calme mais nu aussi d'une certaine façon. Jude ne se sentit pas pour autant mal à l'aise, au contraire. Mais il estima bon de rencontrer avant tout son nouveau compagnon de chambre avant d'essayer de spéculer sur sa nature par l'interprétation sensible de l'endroit ou il vit.
Et il avait raison, jamais il n'aurait pu véritablement deviner qu'il partagerait sa chambre avec Tristan O'Leary. Malgré des profils scolaires totalement différents, lui aussi en deuxième année, Jude le connaissait un peu. Sa figure singulière, sa manière de se tenir et de paraître aux yeux des autres ne lui avaient guère échappé. Mais, comme pour beaucoup de monde, ce jeune homme demeurait un mystère. Peu bavard, sauf pour l'ouvrir quand il le fallait et de la manière qu'il fallait, relativement peu impliqué dans une camaraderie vive avec beaucoup de monde a première vue, Jude ne savait que penser de lui. Il avait à plusieurs reprises souligné des traits d'esprit relativement bien menés ainsi qu'une certaine astuce dans sa vision de ce qui l'entoure; Jude avait remarqué alors qu'ils partageaient sans doute quelques traits non négligeables sans même lui avoir jamais véritablement parlé. Mais d'autres facettes plus critiquables laissaient entendre que Tristan O'Leary n'était pas du genre à se laisser aborder ainsi, et que c'était lui plutôt qui prenait les devants – et encore s'il le désirait vraiment – en matière de relationnel. Par ailleurs, Ashcroft se disait bien que ledit misanthrope ne devait pas l'avoir remarqué une seule fois depuis la rentrée, et qu'il devait alors faire sans doute partie intégrante de la foule d'hormones et de vices qui remplissait les salles de cours de cette bâtisse et qui dégrisait les yeux de l'irlandais au quotidien. Jude souligna la présence d'un livre sur une des deux tables de chevet: Crime et châtiment. Fedor Dostoïevski. Intéressant, il devrait avoir affaire à quelqu'un de relativement érudit et psychologue sans doute; ou de peut-être totalement paranoïaque et fou. Quoi qu'il en soit, Jude ouvrit le bouquin à la deuxième de couverture, pour voir apparaître l'inscription en lettres d'encre: T. O'Leary, et sentir remonter en lui toutes ces pensées pour que lui revienne alors le portrait de celui avec qui il allait partager sa chambre à présent. Il imaginait ainsi un silence de mort qui planerait dès son entrée dans la pièce, et qui pourrait durer jusqu'en Juin prochain, s'il ne l'avait pas dévoré avant. Non, plus sérieusement, Jude espérait tout de même nourrir une entente cordiale avec le loup-garou qu'il allait côtoyer. Il n'y avait pas de raison...
Il s'installa, il posa ses bagages, trouva un peu de place pour ses vêtements et autres affaires, il prenait alors ses marques lorsque Tristan retrouvait la chambre. Nous étions en tout début de soirée. Jude ne l'entendit même pas passer la porte, la chambre cloisonnant la scène ayant comme fond sonore le titre de Peter Bjorn & John: Young Folks. Impact dans 10 secondes...9, 8, 7, 6, 5, 4, 3, 2...1...

Tristan: « Rassure-moi, tu ne t'installes pas dans ma chambre définitivement ? »

C'était dit, le premier contact s'était fait mais il ne prétendait guère prédire les évènements qui suivraient. Non, pas du tout. Quoi qu'il advenait de toute façon, ce soir-là, Jude était attendu, et même s'il évitait ainsi pour le moment les ténèbres de Tristan, il évita aussi tout de même de faire le moindre bruit lorsqu'il rentra pour rejoindre son lit alors qu'il était déjà très tôt. Mais il n'allait pas découcher non plus tous les soirs, et, dès le lendemain, Jude souhaitait une bonne nuit à son nouveau colocataire. formule qui devait résonner bien amèrement dans l'esprit de l'intéressé. Ashcroft ne regretta pas tout de suite ses paroles lorsqu'il souligna l'agitation inquiétante de son camarade qui était parvenue à le réveiller en sursaut, trop interloqué d'abord par de telles ruades. Le jeune homme parlait dans son sommeil, ou plutôt balbutiait, Jude était incapable de tirer un seul mot de ce charabia tiraillé, mais surtout il semblait pris de tremblements sévères, comme s'il souffrait d'un mal indéfinissable. Malgré son inquiétude face à tel comportement, Jude ne voulut pas s'affoler trop tôt, imaginant tout d'abord un méchant cauchemar - même si particulièrement tenace dans le cas présent. Il n'osa pas le réveiller ou même l'approcher, ne se rendant pas alors compte de l'état de transe dans lequel Tristan était. Jude demeura docile et ne risqua pas de réveiller la bête, il prit le verre posé sur sa table de chevet et le remplit d'eau pour le poser auprès de son camarade. Il se doutait que s'il se réveillait d'un coup, sa réaction - comme il lui arrivait généralement lorsque son sommeil était troublé - serait de chercher à se rafraichir, à se désaltérer. Ce n'était rien, mais bon, si ça pouvait l'aider à retrouver son calme. Jude parvint finalement à se rendormir, bercé par les plaintes étouffés de son voisin.

Il n'osa pas engager le dialogue le lendemain avec Tristan, que ce soit concernant ses esquisses accrochées aux murs et qui avaient attiré l'intention de Jude; mais surtout concernant son sabbat de la nuit dernière. Peut-être n'avait-il même pas souligné la présence du verre d'eau posé sur sa table de chevet. Quoi qu'il en soit, il n'y était plus. Et c'était peut-être mieux ainsi de toute façon, Jude préféra ne plus se poser de questions concernant les évènements de la nuit dernière, ou même concernant ce singulier personnage dont il venait souiller la tanière. S'il voulait rester muet - enfin jusqu'à ce qu'il se couche -, c'était son problème. Les petits espaces de vie partagés avec des entités peu intimes, Jude avait déjà connu ça pendant un an, et même s'il pouvait envier les chambres ou l'ardeur étudiante ne se taisait que rarement, il n'allait pas en mourir. Comme je vous le disais un peu plus tôt, combien de nuits un étudiant moyen passe véritablement dans sa chambre? Mais voilà, Tristan avait quelque chose d'envoutant. Jude ne savait quoi en dire, il ne savait pas ce qu'il lui donnait cette impression, et surtout si elle était véritablement justifiée mais, Tristan avait quelque chose de subjuguant. Il ne savait quoi, il ne savait comment, il ne savait pourquoi. Mais il savait qu'il voulait en savoir plus sur lui, bien que quelque chose d'implacable paraissait s'élever entre les deux jeunes hommes. Jude le ressentait, un petit trapéziste ne pouvait aisément soumettre le lion. Ils se couchèrent, et les crises ne tardèrent pas à recommencer.

Jude passa plusieurs nuits à attendre que Tristan ne s'endorme pour savoir si cela le hantait chaque nuit, de quelle façon, et avec quelle intensité, même si plusieurs fois c'est lui qui sombra le premier au coup de Morphée, face aux difficultés que l'autre pouvait montrer à s'endormir. Jude ne trouvait aucune réponse plausible, il ne parvenait pas à mettre une cause sur de telles crises d'angoisse et ne parvenait pas à tirer un propos clair des incantations que Tristan déblatérait comme pris d'une forte fièvre, ou alors c'était des brides incompréhensibles qui semblaient mêler plaisir, douleur, joie et horreur; ainsi, rien de bien transparent. La lecture de Crime et châtiment révélait-elle quelque chose? Un crime horrible, une triste faute jugée irrémissible et qui laisserait son auteur dans une frénésie de coupable n'assumant pas son affligeante condition, qui l'entrainerait vers une folie croissante? Non, non Jude, ne laissons pas flotter notre esprit bien romanesque vers ce genre d'analyses farfelues, qui, même si elles demeurent particulièrement passionnantes, s'éloignent bien vite de la vie réelle. Restons rationnels encore un instant. Ces histoires commençaient même à altérer ses rêveries. Sauf que cette nuit là, l'esprit de Jude était parvenu à voter une légère trêve, jusqu'à ce que... Tout à coup, il sursauta, ouvrant de grands yeux ébahis. Il se sentit mal à l'aise. Il rêvait qu'il volait, sensation qu'il avant déjà eu par le passé dans son sommeil, merveilleuse impression, mais un cri inhumain qui lui avait arraché les entrailles le tirait d'un seul coup vers le bas, l'attirant à une vitesse folle vers le sol. Il s'était réveillé à temps, avant de s'écraser violemment. Pris d'un coup de sueurs froides, il se retourna instinctivement vers Tristan, qui émettait des petits sanglots plaintifs entre deux cris de douleur. Cette crise était sans doute la plus forte que Tristan n'ait jamais eu - du moins en la présence de Jude dans sa chambre. Habité par jenesaisquelle intuition, Jude sauta de son lit avant de s'agenouiller auprès de Tristan et de secouer vivement son épaule en répétant son nom d'une voix de plus en plus ferme, malgré l'inquiétude qui se lisait sur son visage. Les yeux tremblants, les sourcils froncés, Jude tentait de l'arracher des visions dont Tristan était alors prisonnier. Trempé de sueur, pris de tremblements terribles, Tristan sombrait dans un trouble théâtral et terrifiant. Sa bouche et son cou étaient tiraillés par la douleur et la volonté de hurler; son coeur grondait dans sa poitrine; ses membres s'engourdissaient, se paralysaient d'un seul coup dans des courbures effrayantes avant de retrouver la brûlure qui les faisaient vibrer et chanceler... Jude cria une nouvelle fois le nom de Tristan pour tenter de le ramener à lui... Tristan ouvrit alors d'un seul coup de grands yeux apeurés qui parcouraient le plafond avec crainte, avant de tomber sur le visage troublé de Jude, à peine adouci par la chaude lumière de la petite lampe de chevet.

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And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Empty
MessageSujet: Re: And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... EmptyDim 18 Juil - 20:22

ONCE UPON A TIME
Tristan O'leary
Le secret, c'est qu'il n'y a pas de secret. Nous sommes des petits enfants égoïstes et malheureux, pleins de peur et de colère...

And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Stas30 _____ And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Bw2
Jude L. Ashcroft _____ Tristan O'leary

    Maman, Papa et Timothée habitent mes rêves, mes craintes et mes désirs. Mon existence. Comment pensez-vous pouvoir vivre, tourné vers l'avenir, quand votre passé s'accroche à vos basques de cette manière ? Je ne suis pas fier des actes et des événements qui ont fait de moi ce que je suis. Si tout était à recommencer, je changerais chacun de mes choix. Je veux être quelqu'un d'autre.

    Berkeley a un charme particulier, lorsque débute l'été. Le soleil, au zénith, joue avec les ombres des nombreux arbres plantés ici et là, pour offrir plus de profondeur au paysage. Les garçons laissent entrevoir aux demoiselles leurs muscles saillants pour la plupart, tandis que celles-ci n'hésitent pas à raccourcir leurs jupes ou leurs tops. Ça sent les vacances, je vous le dis.
    Je ne suis pas adepte de ce genre de coutumes. L'été n'est pas une raison pour devenir plus fou, plus exhibitionniste ou plus avenant avec la gente qui nous intéresse. Ce n'est qu'une saison. Je déteste l'été. Il fait chaud, les gens se ruent sur les plages brûlantes, pour ceux qui n'ont pas les moyens de prendre l'avion et de faire du tourisme en Europe, ou sur ces îles privées qui appartiennent à leurs familles depuis des décennies. Enfin, certains ne seront satisfaits qu'au bord d'une piscine chauffée, sur un transat coûteux, à siroter des cocktails plus ou moins alcoolisés, heureux de se pavaner en petite tenue devant leur femme de ménage ou leur jardinier. La mentalité bourgeoise me dépasse.


    Un garçon me passe devant. Il y a beaucoup de passage, alors que je suis adossé contre un mur d'une fraîcheur recherchée, mais lui, je le remarque. Il est mignon. Mais dans son regard, une lueur de confiance. D'arrogance, même. Il a l'air trop sûr de lui, ça sent le type imbuvable. Un Delta, sûrement. Il a dans les bras un carton rempli, et j'aurais presque envie de lui faire perdre l'équilibre, pour le voir s'écraser sur le sol avec son tas d'affaires. Je me retiens : Je ne suis pas aussi cruel, allons !
    C'est vrai qu'ici, la tradition du changement de chambres a un truc d'idiot : elle se passe à la fin de l'année. Logiquement, c'est quelques jours avant la rentrée que les étudiants changent de chambres s'ils en ressentent le besoin ou si l'administration effectue un remaniement complet des logements. Non, chez nous à Berkeley, ça se passe avant les grandes vacances. Pourquoi pas, me direz-vous ?!
    Je sors mon portable dans le but de textoter Daki sur son programme de demain. En levant les yeux, je m'aperçois que mon petit frimeur a disparu. Soit. Je suis fatigué, de toute façon, et je ne réclame qu'une chose : la fraîcheur de ma chambre. Direction la confrérie Sigma.

    Les couloirs sont vides. C'est fou, d'habitude, c'est la foire dans chaque recoin. On ne peut pas dire que les artistes soient les plus discrets, ni les plus classiques. L'originalité prime. Enfin, ne tombez pas de suite dans les clichés. Un artiste ne s'habille pas forcément comme un arc-en-ciel, il n'a pas forcément une coiffure bizarre, et il ne parle pas forcément comme un être venu d'ailleurs. Pas forcément, je précise, parce que oui, ça existe. Bref. Le sujet du jour n'est pas de débattre sur les artistes. Simplement sur le choc entre l'avenir, le passé et le présent. Avant, j'étais malheureux. Aujourd'hui, je ne suis pas heureux. Espérons que l'avenir n'amène que de bonnes choses.
    Je rentre dans ma chambre. Note: ne jamais faire confiance à l'avenir, c'est un bâtard. Génial, je me vois couplé d'un colocataire, qui n'est autre que mon orgueilleux coup de coeur.

    « Rassure-moi, tu ne t'installes pas dans ma chambre définitivement ? »

    Je n'ai pas été trop froid, pour la première approche, mais pas vraiment chaud non plus. Il s'est contenté d'un simple oui. Et la conversation s'est arrêtée là.

    J'étais déjà couché quand il est rentré. Je ne dormais pas. Je faisais tout comme. C'était le petit matin, en fait. Et depuis plusieurs heures, un cauchemar affreux m'avait réveillé en sursaut, en sueur, et en pleurs. Je m'étais alors posé la question, qui me taraudait jusqu'à l'entendre rentrer : comment allais-je cacher mes terreurs nocturnes avec un colocataire ? Bien entendu, lorsque l'heure me paraissait correcte, je me suis rendu dans le local administratif pour demander un changement de chambre. Pas pour moi, non, pour ce gars dont j'ignorais encore le prénom. La crainte qu'il découvre mon secret, mon inavouable secret, me poussait à insister, à mettre en avant les crises de panique en pleine nuit qui pourraient le gêner. Rien à faire, un problème de surplus d'étudiants Sigma, ou une autre connerie dont je n'ai pas compris le strict mot. Me voilà à donner un coup de poing dans le mur. Putain ! Ça fait un mal de chien ! La secrétaire d'administration me lance un regard apeuré, je préfère partir. J'espère juste que toutes les nuits, l'intrus découchera. Sinon, il risque de bien peu dormir.

    Sans prêter attention à mon colocataire, je me glisse dans mes draps avec la peur, incessante, que les cauchemars reviennent. Frayeur multipliée par la présence du jeune homme au visage dur et moqueur à mes côtés. Suivre une thérapie était peut-être une bonne idée, finalement... J'aurais dû la mettre en pratique.
    Je lutte contre le sommeil, et quand mes paupières se ferment, je me pince dans l'espoir de passer une nuit blanche. Ce serait un répit de courte durée, mais un répit quand même. Pourtant, rien à faire, Morphée m'attend et m'étouffe dans ses bras, si bien que les images cauchemardesques reviennent me hanter.
    Dans le silence de la nuit, je me tiens seul, nu, dans la chambre à coucher. J'ai douze ans, un visage de gamin aux joues rebondies, aux lèvres gonflées. Un corps imberbe, strié de coupures dont le sang ne s'échappe plus. Je regarde autour de moi, je cherche une issue, mais il n'y a pas de porte, il n'y a rien d'autre qu'un lit, et une ombre qui se déplace dans le noir. Je reconnais la cadence de ce souffle, la silhouette de ce corps, aussi nu que le mien, et pourtant bien plus imposant. Une main caresse mon épaule, descend le long de ma hanche, et me tire d'un coup sec vers l'homme en question. Il joue avec mon corps, m'offre des frissons qui me dégoûte. J'entends les salacités qu'il me murmure, et ça me dégoûte. Je tente de partir, de quitter sa prise, mais il resserre l'étau, il me rapproche de lui, me comprime. Dans mon dos, le contact froid d'une lame. Celle d'un couteau, sûrement. Celui qu'il utilisait parfois pour me couper un peu, et sucer ma plaie. Il disait que ça nous rapprochait. Que c'était un pacte, celui du sang. Je me débats, je hurle, je ne veux pas de lui, pas de ça ! Mais il est plus fort que moi. Je n'ai que douze ans. Je ne suis qu'un enfant. Une douleur dans mon dos me fait pousser un cri déchirant, les yeux grands ouverts. Il me repousse sur le sol, sanguinolent, et me prend sans préambule, à sec. Je veux mourir. Pourquoi personne ne me tue, mon dieu, pourquoi ?! A la place, juste mes hurlements, de honte, de souffrance, de victime.

    Le cœur battant, j'ouvre les yeux. Je touche du bout des doigts mon dos nu. Rien, évidemment. Ce n'était que des souvenirs emboîtés dans mon imagination, pour me pousser à affronter mon passé. Merci, subconscient. Je remarque alors, sur ma table de chevet, un verre d'eau. Mes yeux passent du liquide, à mon colocataire. Il a les yeux fermés, et la respiration régulière. Je souris. Peut-être que le loup n'est, en fin de compte, qu'un gentil agneau ?

    Les nuits ont suivi. Les jours, aussi. Le dialogue entre lui et moi était toujours inexistant, malgré le verre d'eau, malgré la colocation. Je ne faisais pas d'effort, c'est vrai, mais je n'en ressentais pas le besoin. De mon côté, c'était une sorte d'acceptation silencieuse, sans pour autant que ça devienne une grande amitié complice où un regard suffisait pour se comprendre. Je savais, au fond de moi, qu'on pouvait être amis, même si j'ignorais toujours son prénom, je n'arrivais juste pas à franchir le pas. Peut-être parce que j'avais honte qu'il m'entende geindre ainsi en pleine nuit, sangloter et crier, la tête dans l'oreiller, la peau luisante ?
    Allongé comme je le suis, le regard concentré sur le plafond, je me dis que ça fait une semaine, déjà, et qu'il n'y a eu aucune autre parole échangée depuis le premier contact, assez dur, je dois l'avouer. Je voudrais le réveiller, mais son souffle calme m'en empêche. Par ailleurs, il me berce. Je me sens retourner dans un sommeil de plomb, dont je ne connais que trop bien les terres, mais en habitué des voyages, j'agis par tradition, et je ne décide pas de la destination. Ce sera la même : l'enfer.
    Revient le cauchemar, avec quelques variantes. Un hurlement de bébé, au loin, et la voix rauque de mon père qui crie. Tu es à moi ! Je suis à lui. Ma mère qui sanglote, et le sang qui m'inonde. La main de mon père sur mes cheveux, m'imposant le rythme. Ses grognements de satisfaction, mon envie de mourir. Les larmes qui glissent au coin de mes paupières. Les batailles vaines pour la liberté. L'acceptation de la défaite. La soumission.
    J'ouvre les yeux, les cheveux trempés sur un oreiller tâché de transpiration. Au-dessus de moi, un visage. Je crois d'abord que c'est mon père, qu'il est là, devant moi, et je le repousse de toutes mes forces. Je n'ai pas douze ans comme dans ce cauchemar horrible, et ma force est supérieure. J'entends quelqu'un qui jure, et je m'assieds dans mon lit, le drap laissant mon torse à l'air libre. Où suis-je ? Je... Je reconnais les meubles. Les esquisses maladroites, les photos. Alors, l'homme, c'est ... ! Je tourne la tête. Il est là, debout, les sourcils froncés par la vexation autant que l'inquiétude. Je le trouve vraiment beau. Mais on s'en fout. Je suis brûlant, j'ai soif, et j'ai peur. Je trouve le courage de bafouiller quelques mots.

    « Je.. Tu.. Ce n'est.. » soupir « Désolé. »

    Il s'assied face à moi, sur son lit. On reste là, un moment, dans le silence le plus total, et je me décide à briser la glace, parce qu'au fond, c'est à moi de le faire, c'est évident.

    « Écoute... Les dernières nuits que tu as passé n'ont pas dû être de tout repos, et tu m'en vois navré. silence Ce qui passe dès que mes paupières sont closes, ce n'est pas moi qui le décide, et si le passé m'assaille chaque nuit, j'en suis navré pour toi. silence Tu peux toujours dormir chez un de tes camarades, si ça te dérange vraiment, non ? silence Je ne voudrais pas être une source de problème pour tes études l'an prochain, tu comprends ? »
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And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Empty
MessageSujet: Re: And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... EmptyLun 19 Juil - 0:02

Jude continuait de répéter ce prénom, « Tristan », qui semblait se déshumaniser à mesure qu'il le prononçait, toujours plus fermement, sans lâcher l'épaule de l'aliéné. Tristan avait eut tout à coup un sursaut effroyable, comme lorsque l'on sort sa tête de l'eau après l'y avoir plongée bien trop longtemps. Ses yeux étaient alors grands ouverts, hagards, illuminés par une sauvagerie triste et inconsciente, ils semblaient rechercher autour d'eux une prise, un appui, quelque chose à quoi se rattraper, en vain. Sa respiration était haletante, son maigre poitrail bondissait littéralement, le laissant se découvrir aux yeux de l'ignorant, ses larmes se mêlaient à sa sueur le long de son cou, il semblait alors possédé par une force supérieure à sa conscience. Sa fièvre songeuse le faisait délirer, il eut un violent mouvement de défense face à l'agitation inquiète de Jude. Ce-dernier évita de peu le coup que voulut lui porter le jeune homme mais il glissa alors du bord du lit pour atterrir sur le sol. Lâchant un vif « Pétard! » en français, il se releva aussi vite qu'il était tombé avant de refaire face à son diable de colocataire. Pris légèrement de panique face à telle réaction et à l'idée que Tristan puisse être aussi somnambule, et ne sachant pas vraiment quoi faire, Jude afficha d'un coup une face blafarde. C'est lui qui devait faire peur à cet instant en laissant Tristan se réveiller sur cette figure livide et creusée par la stupeur. Lui semblait exténué, comme s'il avait subi les pires peines dans un temps incroyablement court, sans répit. A présent relevé dans son lit, il ne se tourna pas encore vers Jude. Le souffle coupé, ouvrant la bouche de manière saccadée comme pour tenter d'extérioriser un mal interne, Tristan soufflait bruyamment, gonflant et vidant avec difficulté sa poitrine meurtrie. Poitrine que Jude apercevait pour la première fois.

S'il avait imaginé que son nouveau colocataire avait fait preuve d'une simple pudeur égale à la sienne en ne se découvrant pas d'un poil en sa présence depuis qu'ils partageaient la même chambre, il sut à cet instant précis que cela cachait autre chose de bien plus grave. La faible lueur qui éclairait la pièce accentuait l'étendue et la profondeur sur sa chair des empreintes de la douleur. Jude, qui ne s'était jamais cassé un seul os, dont les seules marques notables sur son corps n'étaient que quelques humbles grains de beauté, put souligner avec application l'action de la pure barbarie. Son regard partit de ses épaules fines avant de suivre la courbure de ses bras usées et l'angle de son échine pour se pencher finalement sur le creux que formait son torse. Sans s'en rendre compte, il s'était laissé tomber en arrière pour se rasseoir sur le bord de son propre lit, alors qu'il scrutait le corps chiffonné de son voisin. La totalité ou presque de sa peau dénudée laissait apparaître d'anciennes traces diverses de violences, révélatrices d'une minutie et d'une cruauté exaltées. Des marques de telles nature, situées à de tels endroits, et qui semblaient avoir été polies par le temps, ne témoignaient pas d'un comportement auto-destructeur. Jude, malgré son état d'ébahissement parvint à faire ce constat sans aucun doute possible. Tristan n'était pas son propre bourreau, il ne cachait pas les preuves de ses propres vices, mais celles des vices d'un autre, rejeté, oublié, ou presque. Tenter de masquer pareil mal n'était pas suffisant pour totalement le mettre de côté et parvenir à ne plus jamais s'en soucier. Jude ne le savait que trop bien. Et le sceau douloureux qui touchait ces victimes ne s'effaçait jamais aussi docilement.

Jude eut alors la vision sublime d'un enfant blessé, qu'il aurait surpris au moment ou il était le plus vulnérable. Le moment était nullement propice à cela, mais un instant, un seul instant, il fut saisi d'un sentiment splendide qui lui laissait imprimer mentalement les contours d'une scène qui touchait presque le merveilleux et qui resterait gravée à jamais dans sa mémoire. La peau moite de Tristan miroitait légèrement sous le clarté tiède de la lampe. Ses membres ne tremblaient presque plus, sa poitrine s'élevait et se rabaissait timidement à présent. Ses yeux retrouvaient une teinte obscure et perdue. Jude était témoin de son retour à la réalité. Son expression changea ainsi malgré lui. Ses sourcils se décrispèrent, son regard retrouva une profondeur intelligible, sa bouche s'apaisa. Mais le charme si singulier se rompit instantanément, au moment même ou un son relativement déchiffrable sorti de la bouche de Tristan. Ses lèvres abattues parvinrent à former le simple mot « Désolé » après une série d'onomatopées nerveuse et un soupir d'effort. Jude perdit alors sur son visage cette accalmie éphémère, retrouva un air neutre, gardant le silence. Pourquoi s'excusait-il ainsi en exprimant une honte qu'on lisait naturellement sur les joues d'un gosse coupable? Quelques secondes plus tard, qui semblèrent si longues pour nos deux jeunes gens, Tristan prit finalement sur lui pour briser l'aura lourde et assoupissante qui commençait à fleurir au-dessus d'eux.

Ashcroft demeura muet pendant la tirade de son compagnon. Il ne manifesta aucun geste, à peine battit-il des cils. A mesure que chaque mot s'échappait de la bouche de Tristan, l'esprit de notre énergumène se troublait, et son visage prenait des traits de plus en plus impassibles, il semblait s'effacer. Comment Tristan pouvait-il être si dur et froid après n'avoir pu contenir une telle rage face à lui? C'était incroyable de voir comment il revenait à lui, à sa figure quotidienne, à son esprit farouche mais si sec aussi soudainement après une telle preuve de fragilité. Son embarras fugace avait laissé place à une légère arrogance presque offensante. Son interpellation impérative relevait de la plus grande indifférence, l'empathie dont il tentait tant bien que mal de faire preuve sonnait particulièrement fausse. Ces silences prenaient les traits de soupirs intérieurs qui soulignaient une apathie sereine. Mais le bouquet de son discours demeurait sa péroraison, dans cette sympathie partielle, artificielle, qui trompait pour servir ses simples intérêts, cette totale condescendance. Mais Jude ne s'arrêta pas à ce jugement primaire, voyant dans cette réaction une défense dont il connaissait les ressorts. Tristan avait riposté instinctivement, et comme son subconscient est architecturé d'une manière sibylline, il avait laissé parler son impétuosité comme défense mécanique. L'intrus avait tout de suite percé à jour les mobiles de ce comportement, puisque lui-même les nourrissait depuis son plus jeune âge. Il connaissait cette pudeur innocente qui engendrait alors des natures obscures mais virulentes; cette figure incohérente, qui balance entre pruderie et ardeur. A la différence que Jude savait manifestement mieux jongler avec les masques que le dragon à qui il faisait face, qui avait alors trouvé un esprit qui saurait ne pas se buter à ses fureurs réfléchies.

Il ne cligna pas, il tenta de ne pas trahir son ahurissement soudain en choquant un peu plus Tristan qui ne pouvait que se sentir de plus en plus mal à cet instant. Sans crier gare, ll se retourna, prit alors la fine couverture pliée au bout de son lit pour la reposer sur les épaules de l'autre et couvrir sa peau mutilée tout en posant sa bouteille d'eau devant lui. Alors il reprit sa place à ses côtés, laissant ses yeux glisser le long du visage confus de son camarade. Il ne s'était passé que quelques instants depuis que Tristan avait enfin fini de déblatérer ses sottises. Le visage de Jude prenait une expression complice et douce, il garda le silence. Il ne savait pas quoi lui répondre de plus à cet instant, il ne savait plus comment agir, comme on peux se sentir bête dans ces moments là! Et pourtant, il savait, il savait ce qu'il voulait dire, et il savait comment lui aurait aimé qu'on agisse s'il tenait l'autre rôle, mais comment s'assurer que Tristan était à ce point semblable? Allait-il tout simplement l'envoyer valser encore plus violemment qu'il ne l'avait tenté à son réveil? S'ils se ressemblaient en tant de points, il savait pertinemment qu'il aurait un mal de chien à lui arracher la moindre réaction, même avec les caresses les plus trompeuses, comme les plus pures. Il était alors tout à fait conscient que Tristan pouvait tout simplement se braquer, laissant la scène qu'ils habitaient dans une stase dont la rupture ne dépendait plus que du bon vouloir de l'indiscret, par sa capitulation.

_ " Je sais que tu ne veux pas parler, je sais que tu ne souhaites rien avouer et, je sais que tu ne désires aucunement révéler la moindre faille... Mais, sache que je ne vais pas découcher chaque soir, que je ne vais pas trouver un autre lit chaque nuit, que je ne vais pas chercher à fuir naïvement ce qui m'empêche de dormir pour être tranquille. Je sais que ça te ferait trop plaisir. Non, je ne vais pas faire ça. Je vais rester ici, je vais rester, même si tu t'enfermes dans un mutisme complet, ou même si tu choisis alors de te montrer au quotidien particulièrement acariâtre et acide, enfin...plus que tu ne l'es déjà. Je m'en fiche, je ne suis pas le petit Candide que tu as sans doute cru voir, ou du moins, je ne le suis pas seulement, loin de là... J'imagine bien que je ne représente sans doute pas le genre de nature dont tu souhaites t'enticher, et je ne cherche pas à être niaisement compatissant ou à paraitre tout bêtement humain pour m'attirer ta sympathie, mais...on a tous nos blessures, et ça n'est jamais bon de tout garder ainsi, par peur de se découvrir, et, de peut-être offrir des faiblesses aux autres. Tout le monde n'est pas forcément ennemi un jour ou l'autre, certains évitent ce statut dans notre vie. On finit toujours par se perdre en agissant ainsi, on nourrit ce mal en s'enfermant dedans... Je suis bien placé pour te le dire... "

Le jeune homme s'était surpris lui-même à avoir pris la parole, brisant la paralysie partielle de leur échange, en se laissant entrainer par son mouvement avide. Il retrouva le silence, sa tête détournée du regard de Tristan qui peut-être fondait alors sur lui, plongeant le sien à travers la fenêtre dans le vide placide de la nuit. Il avait perdu son éclat. Il n'avait pas pu retenir ses paroles; dans son ventre, il ressentait une impression de creux contrarié, comme s'il s'était épuisé à recracher tout ce qu'il contenait. Et cette sensation lui était étrangère, c'était une nouvelle forme de vide qui l'habitait alors, mais qui ne concernait pas son corps, mais son âme. Et il avait déjà mal d'avoir découvert un point faible à son opposant. Mal à l'aise, il ne voulut rien laisser paraitre de tel aux yeux de l'autre, et il se contenta alors de se taire, c'était peut-être la meilleure des solutions. Qu'est-ce qu'il lui avait pris tout d'un coup? C'était de Tristan dont il s'agissait, pas de lui. Ils n'avaient sans aucun doute rien à voir d'ailleurs, et ses plaies en attestaient. C'était comme si ses cris, comme si sa transe avaient éveillé quelque chose en lui, sans qu'il puisse y réfléchir, comme si cette empathie l'avait surpassé, évènement tout à fait extraordinaire et étranger pour Jude, et dont l'inconstance assurait qu'il n'aimerait pas que cela se reproduise. Et de toute manière, comme si son couplet avait pu animer son interlocuteur... Cela aurait été bien surprenant. Jude ne le regardait plus, gardant ses yeux comme éloignés de son agresseur par une pruderie honteuse, comme apeuré à l'idée d'être abusé rien que par son regard, regard qu'il savait aiguisé et déchirant; il ne bougeait plus. Mais Tristan ne tremblait plus, et son expression était alors toute autre.

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ONCE UPON A TIME
Tristan O'leary
Devine si tu peux, choisis si tu l'oses.

And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Stas30 _____ And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Bw2
Jude L. Ashcroft _____ Tristan O'leary

    Le silence est un compagnon. Beaucoup n'y trouvent pas leur compte, prétextant une oppression sans bruit, comme si on était jugé par quelqu'un d'invisible, comme si le danger pouvait venir de partout.
    Au contraire, je trouve qu'un peu de quiétude, c'est idéal pour réfléchir. Reprendre ses esprits, retrouver une certaine constance, faire le tri. Un peu comme si les idées, les pensées, lorsqu'elles étaient muettes, trouvaient toute leur signification.

    Dans la pâleur de la chambre, je scelle enfin mes lèvres. Des perles de sueur courent sur mon échine, suivent les veines saillantes de mes bras, glissent sur mes joues. Je me remets du cauchemar, de l'horrible cauchemar, en silence. Je garde les yeux accrochés à ceux de mon colocataire, dont le nom m'est toujours inconnu. J'ai envie de le nommer Julian. J'essaie de déchiffrer une émotion, n'importe laquelle, sur son visage, mais l'obscurité assombrit ses traits, et je ne vois rien d'autre qu'une neutralité presque agaçante. Il semblait en pleine analyse, décryptant chacun de mes gestes, chacune de mes paroles. Je déteste ça. C'est moi l'étudiant en psychologie, celui qui connaît un homme rien qu'à sa façon de s'exprimer, sa manière de se mouvoir, d'agir, de penser.
    Il se lève, me couvre et pose une bouteille d'eau sur ma table de chevet. Il me donne enfin matière à décrypter. Il est soucieux, attentionné, mais quelque chose le retient à s'exprimer. Moi ? Aie-je l'air si antipathique qu'il ne veut rien avoir à faire avec moi ? Ou bien ma rudesse inconsciente a eu raison de ses tentatives amicales ? Peut-être, qu'au fond, je l'ai mal jugé. Je me suis basé sur des préjugés pour me faire une opinion de lui. Ça m'arrive, parfois, quand je n'ai pas envie de creuser plus en profondeur. Ça m'apprendra.
    D'un autre côté, me montrer agréable avec Julian, qui connaissait de moi des choses dont personne d'autre n'avait eu vent, c'était me dévoiler. Être vulnérable. Je n'en avais nullement envie. Alors, feindre l'indifférence et la froideur, ou se révéler humain ?

    Enfin, le garçon prit la parole. Sa voix était onctueuse, et je m'accrochai à ce qu'il disait, sans en perdre une miette, malgré moi. Un beau parleur, allons bon. Je n'aimais pas le ton condescendant qu'il venait de prendre, je n'aimais pas le discours qu'il avait tenu sur moi, comme s'il connaissait plus de choses sur la nature humaine que moi, et plus que tout, je n'aimais pas le sourire satisfait sur ses lèvres, qu'il soit une tentative de complicité ou non.
    Pourtant, j'étais fasciné par son assurance. La façon dont il choisissait les mots qu'il utilisait, comme s'il préparait un simple argument destiné à me convaincre d'être franc sur toute la ligne. Comme s'il voulait gagner je ne sais quoi. Ma confiance, peut-être, ou mon respect pour commencer. C'était gagné.

    Là, assis sur mon lit, lui à mes côtés, si proche, je ne me sentais plus animé par un rôle, un personnage, simplement par moi-même. Il voulait connaître le véritable Tristan O'leary. Et bien, soit. Si ce qu'il découvrait ne lui plaisait pas, je pouvais toujours l'étrangler, le découper en morceaux, le mettre dans un sac poubelle et le jeter dans une benne à ordures. Ça lui évitera d'être tenté de dévoiler mes secrets.
    En attendant, je me sens obligé d'avouer que son visage pousse aux confidences. Les cheveux rebelles après avoir passé la nuit sur l'oreiller, ses paupières clignent encore pour s'habituer à la lumière. Il ressemble à un gamin égaré, mais déterminé.
    Je repris le contrôle de mon corps, arrêtant les tremblements incessants, retrouvant la fermeté d'un visage au regard méfiant, calculant mes gestes autant que mes mots. Redevenir intouchable, redevenir insondable. C'était là l'utilité de ma carapace. Si je devais parler avec Julian, je ne briserai pas l'ensemble de l'armure, je n'en ôterai qu'une parcelle, on n'est jamais trop prudent.

    « Tu as raison. Je n'ai pas à t'éloigner de cette chambre, c'est la tienne autant que la mienne, à présent. Libre à toi de supporter mes douloureuses nuits à mes côtés. Je ne sais pas ce que tu attends pour autant de moi, garçon dont j'ignore le nom. Si c'est mon respect, tu l'as. Mon amabilité viendra avec, je te rassure. Ma confiance ? C'est plus difficile, et je ne crois pas qu'une bouteille d'eau, peu importe les bonnes intentions qui l'accompagnent, te fasse l'obtenir. Des confidences ? »

    Une envie de théâtralité, peut-être, ou simplement le désir qu'il comprenne l'importance des choses et qu'il prenne le temps d'y réfléchir, me pousse à m'approcher de lui, plus près encore. Ma bouche à la hauteur de son oreille, je hume un instant l'odeur de sa peau, et diable qu'elle est alléchante. Je murmure, comme si je lui racontais un secret dans un endroit où la foule est grande, mais nous sommes seuls ici, et mes mots ricochent sur les murs pour s'insinuer dans son esprit, encore, encore, tel un écho qui ne veut pas partir.

    « Je me rappelle des lames qui ont traversé ma peau et fait couler mon sang, je me souviens des brûlures de cigarettes et des tortures sexuelles. La paternité a quelque chose de magique, non ? »

    Je m'éloigne de lui, et lui fait face, affrontant son regard.

    « Je ne doute pas des douleurs de ta vie. Ne les compare juste plus jamais avec les miennes, ok ? »

    Sans attendre de véritable réponse, je me laisse tomber sur mon oreille trempé, je déplie les jambes, et je ferme les yeux, sans m'endormir, guettant un mouvement de sa part qui me permettrait de remettre sur moi le drap qui s'entrelace entre mes jambes nues. Sur le moment, je ne pense pas au simple boxer que je porte, à vrai dire. J'ai juste envie qu'il me fiche la paix, parce que voilà, c'est sorti, ce que jamais personne n'a su, lui le sait, un inconnu qui fera de cette information ce qu'il voudra.
    Je voudrais pleurer, mais mes yeux n'y arrivent pas. Putain, what's the hell.

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Notre ingénu a toujours eut un certain plaisir à analyser les choses, sans savoir vraiment pourquoi. Mais il a toujours eu depuis son enfance un attrait pour scruter, décortiquer et examiner ce qui l'entoure, ce qui le dérange ou ce qui le fascine. Bien entendu, cela prenait tout son sens dans les différentes rencontres qu'il pouvait faire, surtout lorsque vous passer le stade de la puberté, ou le regard et la compréhension des choses autour de vous prend une nouvelle signification, complète ou partielle, vraie ou fausse. Physionomiste sans être psychologue, comme un véritable petit anthropologue, Jude s'est toujours penché – et presque inconsciemment même – sur les habitudes, sur les manières de penser, de parler, d'agir, sur les petits détails qui illustrent votre quotidien et dont vous ne faites pas nécessairement attention ou même qui peuvent vous échapper. Il fait preuve alors d'une mémoire exceptionnelle, et vous surprendra à vous rappeler un élément que tous avaient balayé de leur mémoire même quelques instants après qu'il ait eu de l'importance. Bref, tout ça pour dire que cette façon d'apparaitre parfois comme un regard scrutateur et profond, n'était pas inhabituel pour lui, et la gène occasionnée chez le sujet en question non plus, même si on ne lui avait jamais fait la remarque; comme si ces prunelles étaient assez discrètes ou dégageaient un pouvoir qui préservait leur innocence. Mais Tristan l'avait souligné, et il en ressentait doublement le malaise qui l'écrasait.

Malgré une totale absence de tromperie lorsqu'il lui faisait face, et, si Jude savait relativement bien manier les apparences, il ne pouvait s'empêcher de trahir l'empathie naturelle qui habitait ses yeux si composés, qui pouvaient passer de la plus grande sensibilité à la cruauté la plus extrême. Sans être une réelle faiblesse, il n'était jamais parvenu, et il n'avait jamais essayé de la contrer. Libre à vous ensuite de la percevoir comme il vous plaira, comme une confiance sucrée ou comme une arrogance acide. Cette éloquence composite traduisait aussi un attrait certain pour une forme de théâtralité, qui, si elle n'attisait pas les esprits, passait pour une marque de fourberie selon des dires. Si Tristan voyait cela comme de la ruse – artifice pénible pour tenter de cacher une cruelle absence de profondeur – c'est qu'il se cabrait sans doute de toute ses forces pour ne pas se risquer à affronter les réalités de la nature de son interlocuteur. Jude n'y pensait pas, il avait juste tenté une approche, en connaissant les risques de nourrir considérablement le verrouillage des sens de Tristan. Il n'avait pas cherché délibérément à jouer les psychanalystes, à capter et à absorber le reste de contenance qui le tenait encore éveillé, en lui arrachant le peu de caractère qu'il tentait de préserver à travers le regard grave qu'il retrouvait alors. L'indiscret n'avait aucune idée de l'impact que ses paroles pouvaient avoir eu sur l'autre, ce que Tristan pouvait vraiment dégager de cette tirade presque clichée, presque, et de cet apitoiement humain, trop humain qu'il avait mal manœuvré pour l'aborder. Il ne se doutait alors pas une seule seconde de l'influence qu'il venait d'avoir, et il n'en avait surement pas demandé autant.

Mais encore Tristan gardait le silence, et je dirais même qu'il maintenait le silence; un mutisme froid, personnel et presque gênant. Même si Ashcroft s'était détourné et ne pouvait prendre connaissance du changement de figure que connaissait O'Leary, s'il avait imaginé cette réaction avant même qu'il n'ouvre la bouche, il n'en demeurait pas moins ébahi. Son voisin était-il finalement qu'une figure sans grande sympathie? Une nature rude dont la moindre forme de chaleur ou d'empathie blasait et écœurait? Un être dont l'affect fut trop souillé pour qu'il n'en demeure une partie encore apte à ressentir quelque chose qui surpasse cette neutralité grave qu'il semblait afficher à cet instant comme familièrement? Non. Non, Tristan ne pouvait être si désillusionné, il ne pouvait être si vide, une touche de cynisme au moins devait l'animer face à pareille sensiblerie. Car Jude avait fait preuve de sensiblerie, tout simplement. Ce caractère si simple et que lui-même aurait méprisé sans doute en temps normal. Mais son destinataire restait-il vraiment de marbre? N'avait-il rien entendu, ou feignait-il une indifférence maussade? Ou au contraire, pouvait-on penser que le propos de l'effronté n'était pas si dérisoire? Jude sentait qu'il ne tremblait plus du tout, et que sa respiration, à peine audible, retrouvait une cadence franche. Lui sentait sa poitrine gauche frapper avec caprices, il n'avait pas l'énergie de se retourner, comme lorsque vous êtes gamin, et qu'une sensation bête vous ordonne de ne pas vous retourner dans votre lit, par peur de se retrouver nez à nez avec je ne sais quelle créature loufoque issu de votre esprit plus ou moins inventif; jusqu'à ce qu'enfin Tristan reprenne a parole.

Il avait retrouvé cet air étrange, que Jude ne parvenait pas à juger pleinement ici, et ce timbre de voix presque provocant. Il pensait véritablement que Jude jouait un rôle, se donnant bonne conscience, comme beaucoup, cherchant toujours le respect de l'autre si ce n'est l'attirance. Jude ne cherchait pas ça. Relativement apprécié, il n'eut jamais grande difficulté à engendrer l'affection chez autrui, sans pourtant être de ces natures qui ne vivent que de ces affinités, sélectives et hypocrites pour la plupart. La patience du Sigma suffirait à passer au-dessus de l'antipathie endurcie de son colocataire, et dans le pire des scénarios, ces crocs feraient le reste. Le prenait-il pour gamin dont la simplicité d'esprit enviable suffit à se faire un ami en partageant son goûter? Jude ne voulait pas de confidences, même s'il peut les apprécier à leur juste valeur, qu'ils approchent plus le ragot que la confession, il ne cherchait pas à accabler un inconnu. Il n'eut pas de toute façon le temps de réfléchir sur ce que Tristan venait de lui répondre, il le sentait alors se rapprocher, calmement, comme un prédateur, avec la légèreté et l'assurance inquiétante d'un prédateur. Il le sentit glisser vers lui, comme une ombre normalement rassurante mais que l'on craint en même temps, le long de son bras, le long de son cou, atteignant les quelques mèches blondes qui fondaient sur ses oreilles. Cette sensation était saisissante, et effrayante. Et le murmure déchirant de Tristan qui suivit sa légère inspiration prenait alors l'aspect du plus pénible des hurlements.

L'échine de Jude fut parcouru par un nouveau frisson, sa colonne vertébrale semblait alors soudainement saisie par un éclair, frappant finalement de plein fouet son crâne; ses yeux retrouvèrent alors un nouvel éclat, celui du désarroi, du trouble. Toutes ses pensées furent alors renversées, ses lèvres tremblèrent aussi, un instant, comme prêtes à balbutier une plainte, un sursaut. « Je me rappelle des lames qui ont traversé ma peau et fait couler mon sang, je me souviens des brûlures de cigarettes et des tortures sexuelles. La paternité a quelque chose de magique, non ? » Cette phrase s'entrechoquait entre les parois du crâne de Jude et prenait toute son ampleur dans l'esprit du gamin qui n'avait jamais eut pareil spectacle que celui du corps blessé de... « Je me rappelle...je me souviens... » ... « le sang...les brûlures... » ... « ...la...paternité... » .............................................................................................................................. Jude avait compris tout de suite un trouble extérieur, un mal que Tristan subit par la main de quelqu'un d'autre; mais ce qui l'avait poignardé alors était sa voix, cette façon de lui susurrer pareille chose, gardant presque les dernières traces d'insolence de sa précédente réplique... Que cherchait-il à provoquer chez l'impertinent? Le choc, et le silence...?

Que croyait-il? Que Jude ne pouvait pas comprendre les souffrances d'autrui à force d'être formaté dans un moule dit unique et surtout parfait, qui n'accepte aucune tâche provenant de l'extérieur? Qu'il n'était qu'un simple produit de cette part de la société qui suit le cours de son existence sans même s'en rendre compte à force d'être du début à la fin écartée de toute souillure, souillure dont elle n'avait d'ailleurs même pas conscience? Que Jude était un fils à papa qui n'a rien à détester de la vie et dont l'existence rose bonbon n'admettait aucune crasse extérieure, et que le moindre risque était tout de suite étouffé de toute façon par les débordements d'avantages que d'autres appellent privilèges? Mais c'est exactement ce qu'il était. Exactement ce que tout le monde voyait. Exactement ce qu'il laissait voir et imaginer, exactement ce qu'il voulait laisser voir et imaginer, à son échelle, et cela depuis bien longtemps, même s'il pouvait critiquer ses semblables, qui ne sont en fait que des exemplaires beaucoup plus remarquables et piégés dans cette mécanique que lui. Le revers de médaille était bien dur à affronter. Mais Jude Linus Ashcroft, fils d'Alexander Ashcroft et de Louise Hambourg ne rentrait pas si facilement dans ces critères prédisposés. Peut-être qu'inconsciemment, le jeune prodige s'efforçait par des moyens peu estimables de s'extirper de cette matrice trop communément pré-construite et dont les soi-disant bienfaits nuisaient plus qu'ils n'exaltaient, qui le considérait comme un client parfait. Non, cette fable n'était pas la sienne. Il n'avait rien à voir avec cette population en plastique qui décevait surement Tristan et qui surtout le décevait lui.

Il n'avait rien à voir cet héritier d'un des plus gros banquiers du pays qui ne sait pas épeler le mot Q.I et dont le seul trouble émotionnel ne surpasse pas la crainte de se retrouver seul au bal de promo'; il ne ressemblait en rien à cette Beta dont les désordres internes lui faisait recracher toute nourriture solide, fondés selon elle sur les conséquences émotionnelles du divorce de ses parents et de la dure vie sur le campus; il était nullement ce paumé agrippé par les Gammas dès son arrivée, dont les frasques toxicomanes se traduisaient par un manque d'attention parentale. Non, Jude n'était rien de tout ça, son mal était d'une autre nature, même s'il prenait les traits les plus communs. Et sans admettre qu'il pouvait pleinement comprendre les effets de telles atrocités, il avait un minimum de sensibilité pour ne pas être "un des leurs"; et un tel culot enflamma littéralement toute la désinvolture juvénile dont il pouvait faire preuve. Il n'avait pas peur de répondre à ça, et c'est surement dans un élan d'audace irréfléchie, oubliant toute sa pudeur, qu'il se retourna vers Tristan, qui semblait juste vouloir qu'on lui fiche la paix, essayant d'oublier la présence de Jude, qu'il s'approcha lui aussi de son oreille à son tour, et qu'il lança:

_ " J'ai connu des lames...des lames qui ont effleuré ma peau, qui ont serré mes veines... J'ai connu des lames plus secrètes, plus discrètes, qui ont poignardé mon estomac, mes intestins, et d'autres qui encore doucement lèchent mes poumons si ce n'est tout mon système nerveux. Elles ont tailladé doucement ce qui me sert de corps, mais elles ne sont jamais satisfaites, jamais assouvies; mon esprit malade ne l'est jamais... "

Jude avait gardé une voix douce et sereine, presque rassurante comme celle que l'on adopte pour souffler des mots doux dans la plus grande intimité. Mais il gardait ses yeux dans le vague, fixant la lueur tiède de la lampe. Une seconde plus tard, il clignait des yeux comme pour sortir de ses songes, comme s'il revenait à la réalité après avoir juste pensé tout haut sans s'en rendre compte; tournant légèrement la tête vers les jambes de Tristan, pour revenir à son visage, qui lui parut presque impassible un instant. Celui-ci gardait les yeux clos, paisibles, comme s'ils n'avaient connu aucun trouble depuis qu'ils avaient été scellés par Morphée. Jude demeura un instant encore au-dessus de son colocataire sans bouger, les mains docilement posées sur ses jambes, le souffle calme. Encore une fois, sa réplique avait-elle atteint les esgourdes de ce diable? En avait-il assimilé toutes les notes? Jude n'attendit pas de le savoir et se releva brusquement du lit de l'endormi, qui semblait avoir clôt toute conversation. Il se sentait alors bien bête.

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ONCE UPON A TIME
Tristan O'leary
L'homme est un apprenti, la douleur est son maître, et nul ne se connaît tant qu'il n'a pas souffert.

And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Stas30 _____ And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... Bw2
Jude L. Ashcroft _____ Tristan O'leary

    Allongé sur des draps trempés, paupières closes, des images me reviennent en mémoire. De douloureux souvenirs, et non des songes égarées au fond de l'inconscient. De vraies réminiscences. Ce sont des bouts de phrases, des scènes de vie arrêtées à l'instar de photographies anciennes, des odeurs, des sensations, qui tournent autour de moi. Le moi presque adulte, qui revoit, rétrospectivement, toute son enfance. Là, au centre du tourbillon, s'impose un moment particulier.

    En position horizontale sur le lit familial, comme bien souvent, mon père me domine, assis à califourchon sur mon bassin. Il recrache à mon visage la fumée de son cigare, et j'ai envie de vomir. Quelle puanteur ! Un mélange âpre et amer, aveuglant, qui pique mes yeux. Il rit à forte voix, et effectue quelques mouvements de reins, en poussant des grognements de porcs. Je sens la petite bête se réveiller, tu vois que t'aimes ça, petit cochon ! Avec le recul, je sais que cette formulation était destinée à me soumettre et me faire ressentir mon infériorité. Or, à cet instant, je n'avais aucun recul, pas de tranchée où aller me cacher. Aucune échappatoire.
    Il laisse courir sur mon torse dénudé la pointe allumée de son cigare, la promène du cou au nombril, du flanc gauche au droit. Au centre même de mon ventre, il appuie sur la chair, brûlant la peau avec lenteur, avec sadisme. Le hurlement monte dans ma gorge et malgré mes efforts pour l'arrêter, il sort, il emplit la pièce, la maison, la rue, et j'ai l'impression que le monde entier peut m'entendre geindre. Un poing s'écrase contre ma joue, la bague de mon père frappe à l'intérieur, la mâchoire, et un gout métallique emplit ma bouche : du sang. Les coups jaillissent, inévitables, et bloqué sur le lit, sous les jambes de mon tortionnaire, j'accuse en poussant des gémissements plaintifs, le visage boursouflé, ensanglanté. Combien de temps ça dure ? Je n'en ai aucune idée. Mais si ce cigare m'a troué la peau, il a aussi signé la fin de mon calvaire. A ceux qui disent fumer tue, je réponds fumer sauve.

    Un mouvement à côté de moi me ramène à la réalité. Je garde les paupières closes, mais j'écoute. Julian, bien sûr, je l'avais presque oublié. L'approche du colocataire fut plus rapide que la mienne, mais pas moins troublante. Plus vite que je ne le pensais, il arriva à la hauteur de mon oreille, à laquelle il murmura quelques mots. Sa proximité réveilla en moi quelque chose de confus. Un désir de chaleur, de réconfort. Une envie d'intimité que je ne saurais m'avouer vraiment.
    J'essaie de comprendre ce qu'il m'avoue. Parce que ce sont là des confessions, à n'en point douter. Il semblerait que les miennes aient provoqué chez lui une envie soudaine de réponse arrogante et provocatrice. A quoi s'attend-il ? Une réaction, sûrement, mais je me terre dans l'obscurité rassurante que m'offre le mime du sommeil. Je réfléchis. A coup sûr, il parle en métaphores. Cool, il est cultivé, c'est un bon point, en attendant, c'est pas forcément facile de se concentrer sur ces révélations si elles sont incompréhensibles. Je m'y attelle cependant, pour une raison étrange : je veux en savoir plus sur lui. Je veux connaître son sale petit secret, sa faiblesse, maintenant qu'il connaît la mienne. En voilà, un manège malsain. Si je comprends bien, il teste ses limites. Il s'approche sans cesse de la mort, ou du moins de la douleur. Dans quel but ? Je ne le comprends pas.

    Diable. Le voilà qui s'apprête à quitter mon lit pour rejoindre le sien, je le sens, il bouge, et bientôt, le matelas se libère de son poids. Instinctivement, je me redresse rapidement et capture son poignet. Il semble surpris, peut-être croyait-il vraiment à mon demi-sommeil ? Je l'implore du regard de se rasseoir, mais je ne peux pas le supplier de rester à côté de moi. Ce serait une réaction trop révélatrice de ma fragilité intérieure, et qui sonnerait étrangement pour lui comme pour moi. Après tout, il n'a aucune obligation envers moi. Nous ne sommes pas amis, pas amants, et à peine de bons colocataires.
    Si je disais quelque chose, il déciderait peut-être de reprendre sa place, de me réchauffer de sa présence, de rassurer mon esprit troublé ? Parce que, quelles que soient mes sentiments à son égard, une seule certitude persiste : je veux qu'il me parle.
    Pas seulement pour me perdre encore dans sa voix suave, légèrement rauque, qui m'envoûte autant qu'elle me révolte, mais parce que je veux connaître de lui tout ce qui pourra m'aider à le cerner.

    « Reste là. silence S'il te plaît. Je.. J'ai envie d'en savoir plus sur toi. »

    Julian se rassied. La chaleur rassurante que dégage son corps, sa présence, simplement, qui me fait presque plaisir, tout ça m'arrache un sourire. Assis maintenant, à peine caché par le drap qui sèche doucement, je m'approche un peu plus de mon colocataire, qui me fixe, en attente de quelques mots. De quelque chose.

    « Je ne suis pas très.. loquace, et habituellement, assez méfiant de ceux que je ne connais pas. Toi y compris. Mais, je ne sais pas, il y a ce truc qui me pousse à vouloir en savoir plus, et c'est peut-être, sûrement d'ailleurs, déplacé de ma part, mais j'aimerais que tu te confies à moi. silence Si tu veux, on peut faire un truc. Un action ou vérité, ou une connerie de ce genre ! J'veux dire, j'en dirais autant sur moi, que tu en diras sur toi. Ça.. te dit ? »

    Morsure de la lèvre inférieure. J'ai beaucoup parlé, même si c'était avec calme et parcimonie, et ce n'est pas mon habitude. Il y a, dans ce gars, quelque chose qui me pousse à être différent, à être moi-même. C'est effrayant. Mais aussi très excitant. Qui sait, peut-être qu'entre lui et moi, ce ne sera pas toujours si bizarre, vague et confus. Les confidences, ce serait ça, notre truc ? Nouvelle certitude à ajouter à la liste : je ne veux pas m'arrêter là, pas avec lui. Let's go !

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MessageSujet: Re: And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... And we don't care about our own faults, talkin' 'bout our own style. All we care 'bout is talking , talking only me and you... EmptyMer 28 Juil - 12:23


Un sentiment. Un instinct. Un réflexe. Une simple pression sur le poignet qui brise totalement cette aura lourde. Jude est stoppé dans son mouvement, il sursaute légèrement, et un flash illumine son esprit. Il se retourne légèrement, et les images reviennent. Vous connaissez cette sensation étrange dont nous faisons presque tous l'expérience, et que, communément nous nommons « déjà vu »? Jude était relativement souvent témoin de pareil phénomène, même s'il n'en comprenait jamais vraiment les ressorts, mais à cet instant précis, il était certain de ce qu'il se passait. Il revoyait Otto, son ami Zéta qu'il connaissait depuis son arrivée à Berkeley, assis sur son lit dans sa chambre, retenant Jude de ne pas fuir au milieu de son récit, posture, rappelant la scène qu'il était en train de jouer. C'était une autre nuit comme celle-ci, chaude, douce, calme, qui, si elle amenait à un climat de confiance et de paix, ne semblait pas promettre l'échange qui avait uni les deux personnages. Rien n'avait prédit cette scène, rien ne l'avait devinée, rien ne l'avait préparée. Otto révélait ses plus grandes peurs, ses craintes de l'avenir tandis que Jude confessait alors ses fantômes du passé, ses terreurs d'antan, qui ne faiblissaient pas peu à peu, mais s'imprimaient en lui, indélébiles, comme des tâches de sang sur la clef de Barbe Bleue. Mais le contrat qui unissait alors ces deux entités fragiles n'étaient pas aussi égal qu'ils l'imaginaient. Et même le menteur, Jude en l'occurrence, ne concevait pas exactement sa faute. Il mentait par omission, il se mentait à lui-même, en ne signalant pas exactement toute l'étendue des maux qui le frappaient jusqu'alors.

Les longues jambes de Jude semblaient trembler, comme si elle allaient chanceler sous le poids de son maigre corps, sa main se laissait alors porter totalement, ne montrant aucune résistance, sans traduire pourtant aucun agrément. Il s'était laissé soumettre, presque inconsciemment d'abord, puis avec une certaine satisfaction qu'il n'oserait jamais trahir, qu'il n'oserait jamais s'avouer. Le voile se troubla, les yeux de Jude reprirent leur lueur habituelle. Il ne voyait plus Otto, le regard triste et désireux, mais Tristan, relevé sur son lit dépouillé, le front habité par une émotion indescriptible qui ne pouvait traduire tous les sentiments qui lui passaient par l'âme. Jude ne sentit pas tout de suite ce changement d'expression soudaine, pourtant particulièrement remarquable pour n'importe qui d'autre qui se serait tenu dans la pièce, demeurant toujours sous la surprise d'une réaction si vive. Il ne souligna pas ce trouble qui illustrait une singulière imploration, qui le laissait sans voix, s'il n'était pas juste bloqué, incapable de pousser plus loin cet effort. Tristan paraissait dubitatif, lâchant l'expression ferme et solide qu'il adoptait habituellement, comme lorsque vous parvenez à freiner un gamin dans ses réflexions, et qui ne sait plus quoi vous répondre. Et pourtant, des mots s'efforcèrent de se libérer, du fond de sa gorge. Ce furent ces mots qui finalement redonnèrent totalement ses couleurs à Jude. Il faisait un pas en avant, une réelle avancée vers l'autre, sans qu'on l'en supplie, sans effort. Et quelle demande faisait-il alors! Il semblait avec candeur et sincérité ne pas vouloir s'arrêter là, et vouloir surtout dépasser leur contact purement arrogant et provocateur, leur rixe animale qui correspondait plutôt à la rencontre de deux chats errants, fiers et indépendants.

Machinalement, Jude se rassied, sans lâcher du regard le visage de celui qui vient de le rappeler à lui. Il demeure silencieux, les lèvres closes, les yeux brillants et dociles. Il ne dit mot, comme de peur de gâcher l'instant. Ou alors, attend-il encore de l'autre quelque chose; pour ne rien laisser d'inachevé. Ce-dernier tient encore son poignet, Jude n'y prête pas attention. L'esprit de l'ingénu est alors hors d'atteinte, complètement flou, brouillé, sans point d'accroche, sans amorce ni limites sûres. Il ne saurait même plus vous dire ou il se trouve à cet instant précis. Perdu, avec juste en face de lui une figure dont seul le visage pourrait être descriptible, et encore. Cette mine marquée, qui ne laisse pourtant pas passer grand chose, ces yeux expressifs, mais généralement insondables; Jude semblait ensorcelé. Enfin, un signe, un léger sourire, peut-être spontané, involontaire, mais tout de même un rictus énigmatique, presque amusé, ou tout simplement rassurant. Tristan semble vouloir le masquer rapidement, aussi se rapproche-t-il avant de reprendre la parole, il semblait avoir compris qu'il devait continuer, devant l'ahurissement de son interlocuteur, pour l'inciter vivement à réagir. Il ne cachait pas son manque notable d'amabilité. Jude sourit intérieurement, il suffisait de croiser Tristan O'Leary pour le savoir; mais celui-ci paraissait alors empli d'une intention toute particulière, et qui, dans la simplicité de sa voix, ne semblait plus si extraordinaire. Il voulait connaître Jude Ashcroft, enfin...toucher cette profondeur que personne n'avait jamais vraiment atteint; il voulait rendre palpable ce qui entourait sa figure, et pouvoir donner une véritable forme à ce qu'il percevait. Soit. Jude n'avait sans doute lui-même jamais fait pareil examen de conscience, mais, si le fin disséqueur désirait s'y atteler... Mais dans quel but?

Bien que Jude ne connaissait pas les détails du cursus universitaire que suivait Tristan, moi je peux poser la question à sa place, mettait-il juste en pratique ses leçons? Ou répondait-il juste à un sentiment pervers, simple effet secondaire de ces études en psychologie? A quoi jouait-il exactement? Ses intentions étaient-elles si sincères? L'idée d'échange équivalent à travers ce jeu, était-ce simplement une tactique? Non, la simplicité de pareille proposition et ce naturel ne pouvait être calculés... Jude laissa cette méfiance automatique, il cédait. Que pouvait-il bien espérer de lui? Quelle que soit la perversion qui habitait la proposition d'O'Leary, il serait sans doute bien déçu... Mais pour la première fois, et sans doute aussi pour la toute dernière fois, Tristan affichait un indice d'embarras, une marque d'incertitude, une preuve de trouble. Jude retint un court sourire, le jeune homme aussi ne pouvait se retenir de se mordre la lèvre lorsqu'il se sentait d'un seul coup fautif, ou que quelque chose trottinait dans son esprit. Il ne se rendait qu'à moitié compte de toute la signification d'une telle réaction chez l'irlandais. Gardant les yeux tristes qu'on lui reconnaissait bien souvent, Jude ne réagit pas tout de suite, laissant un temps, qui parut bien bref pour lui, avant de baisser les yeux, comme par abandon. C'est alors, dégagé du regard accrocheur de Tristan qu'il put reprendre la parole dans un soupir d'effort.

_ «  Jouons... », souffla-t-il difficilement, le nez pointé vers le sol.

Le jeune homme bien entendu connaissait ce jeu, qui, même puéril, assurait toujours un certain amusement quelque soit son âge, que l'on se connaisse bien ou non. Mais dans le cas présent, ce divertissement prenait des traits cruels, en essayant d'arracher, de soulever ce qu'on gardait avec le plus de minutie au plus profond de soi, les règles étaient fixées. Malgré ce charme singulier qui agrippait l'esprit de Jude, mené par le souffle de Tristan, et qui à présent semblait flotter tout autour de la pièce – mélange entre la lumière tépide, l'air alourdi et prenant, et ce silence maladif – Jude ne pouvait étouffer cette anxiété, qui prenait forme par cette longue immobilité, et par ce grondement au niveau de la poitrine gauche. Il savait ce qu'il en couterait alors de s'être lancé ainsi, surtout sans avoir pu estimé clairement et avec soin son opposant. La partie prendrait vraiment une tournure intéressante. Moi-même je ne pourrai en pressentir la moindre péripétie, et encore moins l'issue finale, je laisse ma poupée se débattre. Le sombre mutisme que partageaient les deux caractères et qui s'épanouissait alors devait être rompu. Jude se disait que s'il ne crevait pas l'abcès bien vite, il ne pourrait plus tenir longtemps ainsi; Tristan devait s'attendre à ce que se soit lui qui prenne enfin les devants; ce à quoi il dut se résoudre. Il avala sa salive, chercha ses repères autour de lui, fixant le sol, puis la table de nuit, avant de revenir sur le bord du lit, avant de lancer:

_ « Je m'appelle Jude Linus Ashcroft, et j'ai une existence qui ne présente rien de triste, au contraire. Je ne prétends pas faire rêver les similis « grands » de ce monde, mais je sais que j'ai bien plus que beaucoup, même parmi les plus enviables de notre société... J'ai des parents aimants, qui ont une situation relativement confortable, un frère et une sœur avec lesquels je m'entends plutôt bien, et même, une grande famille qui semble aller dans le meilleur des mondes. J'ai pu bénéficier dès mon plus jeune âge d'une atmosphère commode et solide, qui m'a largement défendu de nombreuses inquiétudes extérieures. Je n'ai aucune réelle tare physique je pense...ni mentale, et je jouis d'une santé correcte; j'ai eu la chance qu'on m'offre sans grande difficulté tout ce que le monde demande de la vie ou presque, que tout ce que je souhaite soit consenti et obtienne entière satisfaction. J'ai pu entreprendre ce que je désirais, j'ai côtoyé les meilleurs établissements, eu les meilleurs conseils, et j'ai la chance de pouvoir suivre aujourd'hui un enseignement qui compte parmi les meilleurs à l'échelle mondiale. Mon avenir ne semble pas bien menacé, et plutôt destiné à de nouvelles satisfactions... On m'a offert au berceau la baguette même de la liberté... Et face à tout cela...je me déteste. »

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Sujet clos suite au départ d'un des protagonistes.
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