Sujet: pv ♣ lucy & her diamonds are far far away now. Jeu 9 Sep - 23:31
Message envoyé. 30 secondes. Le temps de descendre un escalier, ou le temps de sauter par la fenêtre. La vapeur de la douche que je venais de prendre se mêlait avec la fumée de la cigarette de Cappy. Elle empaquetait ses derniers cartons. C'était trop petit pour elle, il fallait qu'elle s'étale. Moi je crois que c'est parce que ses radios réveils n'ont pas d'avenir avec moi. Il n'empêche que le tabac me manquait. Mais je devais me rendre compte que désormais, je ne pourrissais plus seulement mes poumons, pour au moins neuf mois. Je ne sais pas trop ce qu'il se passera après, c'est surement ça que je hais : la peur de l'inconnu, pas ce gosse. Je m'y attache, m'y habitue un peu plus chaque jour, l'accepte. Et je me dis que j'ai bel et bien envoyé ce message à Charlie, lui disant que je lui donnerais. Quelle conne. Il fallait absolument que je me mette à aimer cet enfant, qui n'en avait même pas encore l'air. Cool, vraiment. J'avais neuf mois pour devenir plus responsable, montrer à tous que la Bela défoncée était partie, pour de bon. Woody avait raison. C'était le signe d'un nouveau départ. Je ne savais pas vraiment qui m'envoyait ça pour que je m'en sorte, que je grandisse, je ne croyais pas en Dieu, mais un truc voulait que j'ai ce gosse. Ouais, peut-être que c'était moi, inconsciemment. Je regardais l'heure, j'étais en retard. Tant pis pour mes cheveux encore humide, mes cernes et le fait que je ne mette pas de maquillage. Je passais au travers des gens. J'empoignai mon appareil photo, mon premier bébé, tout de même. Je devrais le garder... Peut-être qu'au fond, le plan de Woody était le bon. Penser à lui me faisait prendre confiance : je réussirais à voir Charlie sans que ce ne soit un drame. Et puis au pire des cas, j'irais m'effondrer comme le titanic dans les bras d'un inconnu et je rentrerais dans une chambre où il n'y aura plus Capryce. Oui, faisons comme ça. Je passe la porte, après avoir déposé un baiser sur la joue de ma meilleure amie et avoir pris mon sac. Je ne dois pas le faire attendre, il ne m'aime pas assez pour m'attendre, il l'a déjà prouvé.
J'avais l'air d'un zombie. Tant pis. Personne n'avait de raison de m'attendre, je n'en valais pas la peine. J'aurais du manger. Mais bizarrement, rien ne passait. Non pas que je vomissais ou quoi, mais psychologiquement, je n'avais aucune envie de manger. J'étais devenue une genre de mannequin anorexique, la maigreur en moins, mais dans ma tête, grossir signifiait subir la grossesse. Je me suis jamais privée de manger. C'était juste que je ressentait tellement cette grossesse – malgré le fait que l'idée d'être enceinte ou mère me gênait de moins en moins – comme un échec sur moi-même que n'importe quelle chose qui le prouverai encore plus me tuerais. C'est bien pour ça que de jour à jour, Charlie me tue.
Je soupire, j'ai l'impression d'être une vache qu'on mène à l'abattoir. Charlie est mon bourreau. Mon pas se fait traînant, j'ai pas envie d'y aller. Allez Bela, t'es une adulte bordel, tu peux le faire ! J'entends un grincement, c'est la dernière marche de l'escalier. Je grimace seule dans le couloir à cause du bruit, ou plutôt de sa signification : je suis arrivée. Je fais deux pas. Je suis devant la porte. Je reste là. J'arrive pas à toquer putain. J'aurais voulu appuyer ma tête sur le bout de bois, histoire de me calmer. Mais je tombe sur un truc plus mou. Haha. Mon ex-mari a eu la bonne idée d'ouvrir la porte à ce moment là. J'ai le tentation de prendre de l'élan et de l'assommer mais je me remets droite. Je le regardes dans les yeux, ça me vide tellement que je penses même plus à la douleur qui me saisit l'intérieur de la poitrine. Je vois son expression, qui veut dire un truc du genre « Tu voulais t'assommer sur la porte et perdre toutes tes neurones ? Je comprends pas trop. » Bah écoute Charlie, je ne me comprend pas non plus, il y a des choses qui ne s'expliquent pas comme le fait que j'aime bien me défoncer la tête sur les portes, ou encore que je peux m'empêcher de t'aimer encore comme une malade, ou même que je n'arrive pas à parler. J'aimerais bien tu vois, dire un truc qui donne l'impression que je me fous de la situation, genre « je suis enceinte d'un mec qui m'a plaquée pour son ex mari mais tout va bien. » un truc faux quoi. Alors je me tais. Ça aussi, ça ne s'explique pas. Je sais que t'attends que je dise un truc, parce que t'as l'habitude que dans les silences, je parle tout le temps, même pour dire que l'ampoule est basse consommation. Ça ne sort pas. Je me contente de fourrer mes mains dans mes moches et faire un signe de tête vers la porte de la maison de confrérie.
On sait tout les deux que tu vas finir par monologuer, parce que souvent, le silence te met mal, t'as besoin de parler, pour faire croire que tout va bien. On sait tout les deux que c'est faux. Oui, toi ça va, bien sur, t'es heureux. T'as tout pour être heureux. Je ne sais pas si tu te rends parfois compte des choses que j'ai faite pour toi, en deux mois. Nous passâmes devant une vitre, j'avais l'air sur le point de crever, pâle comme je sais pas quoi, je me sentais tellement molle. Mais oui, je suis malade. Je suis malade à cause du monde et je suis malade à cause de toi, Charlie, ça me rend malade de t'aimer tant. J'ai le cœur qui va jaillir de mon corps tellement il bat fort. Un feu d'artifices de Belammée. Il serait moche. C'est le seul organe qui fonctionne encore chez, ce putain de machin, juste assez pour me faire bouger, pour faire vivre ce gosse. Ma tête, la trouillarde, m'a lâchée lorsque tu m'as envoyé un message pour me dire que t'avais couché avec Maxence.
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