« Il l’est. » annonçai-je avec un vague sourire. La question que je me pose est : est-ce que Joe est capable de garder des informations confidentielles pour lui, ou est-ce le genre d’hommes à commérer à droite et à gauche en quête de sensationnel ? Au vu de sa réserve naturelle, je présumais que ce n’était pas le cas. Mais ce n’était qu’une présomption. Comment le lui annoncer sans prendre le risque de se dévoiler totalement ? « A combien estimez-vous vos… talents, monsieur Riley ? » La question du salaire est aussi primordiale. En effet, eu égard au poste très fermé quoique convoité que je comptais lui offrir, il était normal qu’il soit aisément rétribué à hauteur de ses facultés. « Donnez-moi un prix, ne soyez pas gêné. » insistai-je en sachant très bien qu’il serait d’abord gêné de parler salaire alors même qu’il ne savait rien du job pour lequel j’étais en train de l’entretenir, et que la politesse voulait qu’il ne soit pas débattu à voix haute, encore moins dans ce genre d’endroits. « Je recherche un homme qui aime les contacts, et sache obéir aux ordres. A côté de cela, ce travail est assez…indépendant en soi, tant et si bien que vous n’aurez pas de bâtons dans les roues aussi longtemps que vous respecterez deux consignes fondamentales : discrétion, et désinformation. » Ce que je veux dire par là ? « Comme vous le savez, le monde de l’entreprenariat est un océan infesté de poissons. Le concurrent direct, un collaborateur trop ambitieux, un salarié qui accepte mal son renvoi, mais aussi… les médias, qui aiment tout particulièrement mettre leurs nez dans nos affaires, à nous autres requins des finances. » Je contemple l’horizon, sourcils froncés, en me rappelant du fameux procès qui avait eu pour conséquence que mon nom soit cité dans tous les journaux du pays. « Je hais les médias. Mais il y a une chose que je déteste plus que les médias, monsieur Riley. » Je me penche en avant, les doigts entrelacés, et les mains jointes. « Ce sont ceux qui ne savent pas tenir leur langue. Je vais faire court : l’emploi que je vous propose est classé secret défense. Et nul jusqu’à présent, n’est au courant de son existence. » Ni des activités qui le font exister, justement. « Je ne vous en dirai pas plus, au cas où mon offre ne vous intéresserait pas. Elle est valable jusqu’à demain soir, minuit. Si vous acceptez, vous signerez alors un contrat qui stipulera de votre parfaite collaboration et vous devrez alors à la O’Malley Incorporation, ainsi qu’à moi, de garder vos activités pour vous, jusqu’à la mort. Votre famille ne devra sous aucun prétexte être mise au courant. Vous aurez des horaires normaux de bureau, une voiture de location, parmi d’autres avantages à la fois pécuniaires et matériels. » Je me lève, et l’observe une dernière fois en déposant de quoi payer sur la table. « Vous aurez plus de détails lorsque j’aurai votre réponse. Je vous souhaite une bonne journée, monsieur Riley. » Sur ce, je m’éloigne sans un mot de plus. La balle est dans son camp, désormais.

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Un chiffre ? Comme ça ? Sans savoir ce qu'on attend de moi. Je le regarde perplexe et lorsqu'il me redemande, je pense à 150 000. Ca me parait le minimum. C'est sans doute beaucoup, mais je suis un des meilleurs spécialiste de physique nucléaire aux Etats Unis à présent. Ce n'est pas pour rien que Berkeley a négocié un contrat qui lui coûte les yeux de la tête pour m'éviter quelques mois de prison, me faire venir sur la côte Ouest et m'offrir un poste d'étudiant/enseignant. Ca me rappelle d'ailleurs que j'ai déjà un poste...
James me donne quelques explications mais il me laisse sur ma faim.
Un job secret ? Bien payé à SF avec voiture de fonction et heures de boulot ? Je le regarde sceptique. Il insiste sur le fait que toute information est confidentielle. C'est sans doute pour ça qu'il ne me donne pas beaucoup d'explication. Tout d'un coup, j'ai l'impression que je ne vais pas vraiment bosser dans les nouvelles technologies car, oui, je vais bosser pour lui ou du moins essayer. Il est parti en attisant ma curiosité. Ce serait une source de revenu stable, sans doute bien plus sécur' que de vendre de la drogue aux pauvres petits étudiants qui s'abrutissent à chaque joint mais pas forcément plus légal. A vrai dire je n'en sais rien. Mes yeux restent un instant posé sur les quelques billets qu'il a déposés sur la table haute pour payer l'addition tandis que je réfléchis. J'ai aujourd'hui trois source de revenus plus ou moins stable, Berkeley, le grand frère d'Aengus et les mafieux de New York. J'ai récemment décidé d'arrêter de dealer, je pensais même arrêter en débarquant à San Francisco mais ça ne s'est pas fait. L'opportunité que me donne James, aussi obscure qu'elle puisse être est sans doute aussi la porte ouverte vers une vie plus stable et un job qui soit vraiment à la hauteur de mes capacités et rien que pour ça, il n'y a plus de doute à avoir, j'accepte. Je ne peux cependant pas abandonner mes cours.
Je me lève, souris avec un air absent au serveur qui ramasse les billets et me dit merci puis me dirige vers mon vélo. Je ne suis pas sûr de prendre la bonne décision mais une chose est sûre : je l'ai prise.

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