Le bal de l’université de Berkeley avait lieu le soir même et Leyna Jackson-Stones était allongée sur son lit, pensive. Loin d’être une béta, elle ne rêvait pas de cet événement depuis son plus âge, mais elle aurait tout de même imaginé que la chose se passerait autrement. Du moins, elle avait toujours pensé qu’elle aurait un cavalier et que la soirée serait magique. Comme dans les films. C’était sans compter ses relations compliquées avec les hommes et sa rencontre avec un certain William Rhodes en février dernier. Ce dernier était son correspondant mais n’avait fait que l’ennuyer de A à Z. Les deux jeunes adultes s’étaient bel et bien rapprochés depuis, mais rien de très concluant et le british n’avait pas proposé à la jeune femme de l’accompagner. Y aller seule ou rater le bal ? Leyna y avait songé plus d’une fois ces dernières semaines, et surtout, ces derniers jours. Pas question pour elle d’aller faire des yeux doux aux jeunes hommes pour qu’il daigne lui proposer de l’emmener. « Allez, tu ne peux pas rater cette événement, quand même ! » lança la meilleure amie de la sigma. « Si tu ne viens pas, je t’y traîne de force… je te préviens ! » rigola-t-elle en ne lui laissant pas trop le choix. « Mais, je n’ai absolument rien à me mettre ! » répondit Leyna, dont les finances n’étaient pas vraiment au beau fixe. Comme à son habitude, elle allait devoir improviser.

Lorsqu’elle arriva sur le lieu de la soirée tant attendue, le stress monta d’un coup en elle. Qu’allait penser les gens en l’apercevant toute seule, telle une âme en peine le soir de la soirée la plus romantique qui soit. Elle respira un bon coup et pénétra dans le pavillon Hildebrand, où avait lieu le bal. Leyna était vêtue d’une robe longue imprimée qui lui allait à ravir. Elle avait longtemps hésité à l’acheter, n’ayant pas pour habitude de porter ce genre de vêtement, mais la vendeuse avait été plutôt persuasive. Avec un peu de chance, elle allait rapidement tomber sur des têtes connues, et surtout, peut-être n’était-elle pas la seule idiote à se pointer sans cavalier. La salle débutait seulement mais commençait gentiment à se remplir. La jeune australienne se mit dans un coin, près du bar, après s’être commandé un verre de champagne, et scruta les environs. Elle reconnaissait bien Nina, une connaissance, ainsi que Sheena, une fille avec qui elle avait bien plus de points communs que ce qu’elle voulait bien croire. Au lieu, Jorden et Marni-Lay Rosenbach étaient éblouissants ; tout le monde les connaissait, de près ou de loin. Debout de son coin, Leyna prit une nouvelle gorgée de sa coupe de champagne et pria pour que la soirée s’anime rapidement, histoire qu’elle puisse aller rejoindre des amis au lieu de rester seule.

S’inquiéter ne menait à rien. Pourtant, la blonde ne cessait de se surprendre à garder un œil sur Kirby. Hors de question de la laisser sombrer sans la moindre réaction. Serait-elle une amie autrement ? Bien qu’elle n’avait rien à redire sur la coupe, fort ressemblant à la sienne, Aengus tenait à éclaircir ce mystérieux point sombre qui hantait son amie. Pour cela, elle avait prévu un petit voyage à Tampa avec Kirby. En la voyant approcher, un sourire se dessina aussitôt sur ses lèvres. Une compagnie digne de ce nom arrivait là. Baiser sur la joue de rendu, Aengus admira un instant la robe de la jeune femme.

« Avec une coupe pareille, je vais t’élire Reine du bal. » Taquina Aengus avec un fin sourire.

Le rose habituel d’Aengus ne se remarquait presque pas. Normal. Elle avait mit une jolie perruque blonde. Dessous se cachait un rose intense et des cheveux coupés extrêmement courts, une folie qu’elle avait faite à sa sortie, devant son miroir. Un moyen pour elle de marquer son retour qui s’en était suivi une rencontre fort agréable avec Lisbeth. Alors, l’état de Kirby ne trompait pas, pas la gamma en tout cas. Elle était dans le même panier, en mieux. Peut être est-ce leurs similitudes qui les rendait si proche.

« Un cavalier ? Jamais je ne laisserai un seul mâle avoir l’honneur de porter un bijou comme moi à son bras. Je suis plutôt surprise de te voir sans un beau mâle à tes pieds. »

La taquinerie avait toujours été la marque de fabrique de la jeune femme, à croire que rien ne pouvait devenir sérieux avec Aengus. Aux propos de Kirby, Aengus rit de bon cœur.

« Attends de voir Jorden s’enfiler un verre de jus d’orange et tu trouveras tout de suite le jus de fruit moins sage. » Avec un air mi mystérieux, mi amusé, elle porta son verre à ses lèvres avant de recracher dans son verre. « Beurk !!! Y a des trucs dedans !!!! »

C’est la pulpe Aengus… Juste la pulpe. C'était certainement pas son jus de fruit de bas de gamme avec 75 % d'eau et 25 % de fruit qui pourrait lui avoir enseigné ça. Regardant son verre avec un air aussi catastrophé que suspicieux, elle grogna menaçante. Peut être devrait on lui rappeler que le verre n'allait pas la tuer.

Qu’avait elle dit déjà ? Ah oui, elle était un bijou unique. Ouais, pour la classe, on repassera. Heureusement qu’elle n’avait pas recracher totalement sur la personne en face, ou elle aurait douché quelqu’un ! Finalement, Aengus senti son radar se mettre en route. Abandonnant sa vergogne son verre de jus de fruit parmi les autres, elle attrapa le bras de Kirby pour l'entrainer vers une sigma.

« Salut moi c'est Aengus, appelle moi Gus comme tout le monde, elle c'est Kirby et tu peux l'appeler Kirby la jolie. C'est du champagne avec de l'alcool ou du ... faux? »

Quoi? On était une ivrogne ou on ne l'était pas! Louchant lourdement sur le verre de Leyna, Aengus en oublia le reste. Comme quoi, l'alcool offre des perspectives de rencontres admirables!

D'accord, je n'avais pu me résoudre à ne pas me mettre sur mon trente et un. Après tout, un bal était un bal et même si cela différait bien des grandes soirées dont j'avais l'habitude et autres galas en tout genre, je me disais que je ne pouvais esquiver une robe du même calibre que celle que je portais dans ces circonstances. C'est pour quoi j'avais demandé expressément à me faire livrer une robe Roberto Cavalli sur laquelle j'avais craqué lors de la fashion week. Je ne la reçus qu'aujourd'hui et pour moi, c'était tout comme le paradis que je tenais du bout des doigts. La mode était mon gaga, une vocation. Cette robe était comme l’aboutissement de nombreuses heures de travail et plus que ça, elle représentait un chef d’œuvre. Les peintres utilisaient de la peinture pour montrer leur art et bien les créateurs c'était un enchevêtrement de tissus et joaillerie en tout genre. La pièce unique d'un des plus grands pour moi, se tenait entre mes mains et je me demandais à présent que je la revêtais, si cela ne ferais pas trop. Tant pis, une reine reste une reine, ma mère m'avait dit ça une fois et j'avais toujours retenu cette partie dans ses longs discours d'une femme à sa princesse. Enfilant enfin des escarpins, j'entendis à la porte de ma chambre quelques coups sourds. J'ouvris alors pour laisser place au visage tendre de mon Casey, ses yeux bleux me faisant légèrement rosir les joues. Ce n'était qu'une sortie entre ami. Une simple sortie entre ami. Et puis zut, ça arrivait que deux meilleurs amis finissent dans le même lit non ? Après tout, il fallait le dire que nous étions plus qu'attirant et vu notre histoire d'amour et d'amitié, il était évident qu'on pouvait des fois s'y perdre et mélanger les passages de notre passé avec ceux de notre présent non ? Sourire aux lèvres, j'essayais de me persuader que oui, nous étions amis et quoi qu'il arrive, ce qui s'était passé entre nous il y a peu, n'était qu'une faiblesse de notre part. Une faiblesse que nous avions effacés instantanément de nos mémoires au moment où je l'avais enfin quitté le lendemain matin. M'en persuader aurait été facile si seulement je n'en avais parlé avec Marni. Cela montrait déjà bien assez à quel point cette situation me taraudait. Voila, j'allais y penser, trop réfléchir et j'allais complètement paniqué au bras d'un homme dont mes sentiments se mélangeaient étrangement. Contenance à part, j'embrassa sa joue ayant eut l'envie brusque de déposer plutôt un baiser sur ses lèvres puis me recula. Tu es à croquer. Cette réflexion ne put que me faire penser au moment où je goutais sa peau avec plaisir mais j'oubliai de suite ce souvenir qui venait de traverser mon esprit. C'était le genre de remarque que je disais à chaque fois. Aujourd'hui, elle me paraissait encore moins dénué de sens qu'avant ! Sourire aux lèvres, je le trouvais à tomber et pour cause, son regard ne quittait pas le mien comme s'il comprenait parfaitement ce que je ressentais et qu'il essayait de me rassurer. Je marcha alors à ses côtés jusqu'à la salle de bal et ne pus m'empêcher d'avoir un large sourire en voyant les têtes connues qui étaient déjà présentes. Entre autre, j’apercevais ma Marni au bras de Jorden et je ne pus m'empêcher de repenser à notre fameuse conversation avant cet évènement.