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[UK] Hometown Glory

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MessageSujet: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyMar 21 Mai - 15:23

Hometown glory
Noah & William



- Bonjour mesdames et messieurs. Ici votre chef de cabine, je suis heureux de vous accueillir à bord de ce Boeing 825 à destination de Manchester. Notre temps de vol est aujourd’hui estimé à 13 heures et 15 minutes […]

Je tourne la tête vers Noah, peu rassuré. Depuis le voyage en ski, nous avons réussi à briser cette glace qui s’était formée entre nous. Mon petit frère avait finalement accepté de me donner une seconde chance. C’est donc avec un certain naturel que je lui avais confié mon idée qu’il était à présent nécessaire que je fasse part de mon retour à mes parents. Cependant, je ne pouvais nier le fait qu’à présent, en me retrouvant dans cet avion, je commençais à ressentir une énorme boule de stress me tordre l’estomac. De son côté, Noah semblait beaucoup plus relaxé, heureux même.

- Notre décollage est désormais imminent. Veuillez attacher votre ceinture, relever votre siège et éteindre votre portable. Nous vous rappelons par ailleurs que ce vol est non fumeur et qu’il est strictement interdit de fumer dans les toilettes.

Une nouvelle fois, je tourne la tête vers Noah avec un air dépité. Pourtant, j’avais bien besoin de fumer. Cependant, j’étais parti pour treize longues heures d’angoisse sans pouvoir toucher une seule cigarette. Le Boeing finit par décoller, tandis que je tiens difficilement en place.

- T’es sûr que c’est une bonne idée tout ça ?

En effet, nos parents ne sont même pas au courant de la venue de Noah, et encore moins de la mienne. Nous avons profité de faire ce séjour en Angleterre durant une semaine avant les examens. Une semaine où les cours étaient pour la plupart suspendus, afin de permettre aux étudiants de pouvoir réviser, ou plutôt faire la fête afin de se détendre. Nous étions donc partis sur un coup de tête et allions arriver chez nos parents à l’improviste. Je ne cessais de me faire des scénarios dans ma tête. Comment allaient réagir ma mère en me voyant ? Allait-elle fondre en larme ? Ne pas y croire ? Ne pas me reconnaître peut-être ? Me crier dessus ? Cependant, celui qui m’intimidait le plus restait mon père. Comment m’accueillerait-il ? Avec un coup de poing en plein visage pour me punir ? Allait-il me refuser l’accès à sa maison ? Maison dans laquelle j’avais habité jusqu’à mes dix-huit ans ? J’avais la désagréable sensation d’être une bête se dirigeant tout droit vers l’abattoir. Pourtant, je ne pouvais nier le fait que je ressentais un réel besoin de les revoir. Noah avait accepté de me donner une seconde chance, et l’avoir retrouver me boostait pour renouer avec toute ma famille.

Le vol me parut particulièrement long. Si Noah et moi discutâmes un très long moment de diverses anecdotes où il était question de notre complicité fraternelle, arriva un moment où je le laissais en paix afin qu’il puisse somnoler un peu. D’ailleurs, je profitais de son sommeil léger afin de sortir de mon siège et me diriger vers les toilettes. Refermant la porte derrière moi, j’observais les lieux avec un certain sérieux. J’ouvrais finalement mon pantalon afin de pouvoir me soulager. Et c’est après m’être lavé les mains que j’attrapais mon paquet de cigarettes. Au Diable les règles. Il fallait que je fume. Et afin de passer inaperçu, j’enclenchais à plusieurs reprises le séchoir pour les mains, alors que je tirais longuement sur le tabac, comme si le temps m’était compté. God… ce que ça peut faire du bien…

En ressortant, je croisais une hôtesse de l’air qui se dirigeait vers moi avec soupçon. Et comme elle s’approchait dangereusement des toilettes, je décidais de feinter, de la façon la moins romantique du monde :

- Je vous déconseille les toilettes pour un bon petit moment. Je suis plutôt stressé…

Petit sourire forcé, puis j’allais regagner ma place. Noah ouvrit légèrement les yeux, et lorsque je le vis renifler, je détournais le regard. Loin d’être stupide, il comprenait aisément que je venais de m’en griller une. Et alors ?

Arrivée à Manchester…

- Mesdames, messieurs, ici votre chef de cabine. Nous venons d’atterrir à l’aéroport de Manchester où la température extérieure est de 8°C […] Au nom de toute l’équipe de United Airlines, nous vous souhaitons une agréable journée et espérons vous revoir prochainement sur nos lignes.

8°C. Bienvenue au Nord de l’Angleterre ! Un climat qui, étrangement, me plaisait et dont j’étais fier. Après tout, comment pourrions-nous avoir des paysages aussi beaux et verdoyants sans l’ombre d’une goutte de pluie ? Quoi qu’il en soit, le stress continuait de monter en moi. Et lorsque nous récupérâmes nos valises avec Noah, il était 18h00. Un taxi nous attendait afin de nous emmener dans le Derbyshire, un Comté qui se trouvait à une heure tente de route. C’est là-bas, dans une petite commune que vivaient nos parents. Notre père y tenait une ferme, et mon esprit luttait entre anxiété positive et négative.

- Ils vont me tuer… sans aucun doute…

Je venais de prononcer cette phrase en sortant de l’aéroport en compagnie de Noah. Mon premier réflexe fut de sortir une cigarette de mon paquet afin de fumer. Nous installâmes les valises dans le coffre d’une Austin FX4 Fairway noire, ce que je trouvais en soit très… kitch. On trouvait davantage ces taxis à Londres, mais quelques compagnies de Manchester avaient décidé de reproduire le même service, probablement d’un point de vue touristique.
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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyMar 21 Mai - 17:39




«Homegrown Glory»


Je ne comprendrais jamais ces gens qui ont peur des avions. Pour ma part, je n’avais jamais été plus heureux que dans les airs. Certaines mauvaises langues auraient même l’audace de dire ‘dans la Lune’, mais passons. J’étais heureux ce matin-là, parce que William et moi avons pris un vol en direction de Manchester, pour ensuite rejoindre le Derbyshire. Là où nous allions retrouver nos parents. Et Jane, si elle n’avait pas encore quitté le nid familial. Je dois admettre que ma petite sœur me manque terriblement, et que les nouvelles d’elles se font rares. Plus on est loin, moins on a le temps et la possibilité de communiquer avec le monde extérieur. Quoiqu’il en soit, j’avais pris sur moi durant plusieurs heures pour ne pas changer d’avis et oublier ce voyage en terre natale. Parce que je savais que ma mère, bien qu’elle serait très heureuse de nous revoir, avait horreur des surprises. Or, William et moi avons convenu d’un commun accord qu’il valait mieux ne rien dire jusqu’à ce que nous soyons sur place. Enfin, la vérité était plutôt que mon frère, mon costaud de frère aîné, m’avait donné l’impression de faire de gros efforts d’inspiration et d’expiration à cause du stress. Et, pour éviter de le contrarier dans ces exercices, j’avais décidé de lui accorder cette surprise. Je savais de toutes façons que ma mère allait être en larmes lorsqu’il passerait la porte. Elle ne l’avait jamais oublié. Quels parents pouvaient réellement oublier son enfant ? Même après des années d’amertume et de souffrance, de peur de l’avoir perdu, de recevoir un jour un courrier de l’armée faisant état de sa mort au cours d’une mission, notre mère n’aurait jamais cessé d’espérer que son fils lui revienne. Mon père en revanche, n’aurait sûrement pas la même réaction. Non pas, comme le croyait William, parce qu’ils s’étaient quittés en de mauvais termes, ce qui avait d’ailleurs été l’une des raisons du départ de l’aîné de la fratrie Clives, mais parce qu’il aurait tôt fait de se demander ce pourquoi William revenait justement maintenant, qu’il lui reprocherait, comme moi au départ, de ne pas avoir donné de nouvelles, d’être parti sans un mot, et de revenir comme si de rien n’était. J’avais d’ores et déjà prévu de m’en occuper, laissant le soin à mon frère, de consoler les larmes de notre mère qui seraient sans doute nombreuses.

Assis près du hublot – il faut absolument que je sois près des nuages, c’est impératif – je jette de temps en temps des petits coups d’œil inquiets sur mon passager de droite que je sens terriblement nerveux. « T’es sûr que c’est une bonne idée tout ça ? » Un sourire envahit mes jours, malgré moi, et je me remémore les mots qu’il avait utilisés pour me convaincre de ne pas en parler aux parents. « C’est toi qui voulais leur faire la surprise de ton retour, il me semble. » J’ajoute, pour éviter qu’il ne le prenne comme un reproche, en posant ma main sur son avant-bras. « Tout va bien se passer, je te le promets. » Non seulement parce que j’y veillerai, mais aussi, et je n’oserai l’admettre ouvertement devant mon frère – il est suffisamment sur les nerfs – parce que ne rien dire aux parents aurait été bien pire le jour où ils auraient découvert la vérité. Nous avons discuté, ri parfois, jusqu’à ce que je m’endorme. Le voyage était long, et ma nuit avait été très courte. Je songeais sans cesse aux retrouvailles, sans jamais pouvoir être certain de l’issue de celles-ci. Au bout de quelques heures, William qui était parti aux toilettes, revint s’asseoir. Je fronce le nez et l’observe, suspicieux. J’ai toujours eu horreur de la cigarette. Tant le goût que l’odeur. On en reparlera, fais-moi confiance. Si j’ai retrouvé mon frère, ce n’est pas pour qu’il meure d’un cancer. Soupir.

« Ils vont me tuer… sans aucun doute… » Ca y est. Nous sommes arrivés. J’aide William à porter nos bagages jusqu’au coffre d’une magnifique Austin, alors que le taximan nous demande dans un accent très ‘british’ où il doit nous conduire. Nous nous installons à l’arrière du véhicule, et je repense à ce que mon frère vient de marmonner, anxieux. « Il y aura un temps d’adaptation, c’est certain. Tu as quand même disparu pendant de longues années. Mais le fait de te retrouver, de te savoir en vie et bien portant est tout ce qui importe à leurs yeux. » le rassurai-je pendant que nous roulions en direction du Nord. Les paysages défilaient sous nos yeux. Les vallées, les hauts pâturages, quelques moutons égarés nous bloquent la route à quelques mètres de la ferme familiale. Ce sont ceux du voisin. Je souris intérieurement en pensant qu’il n’a toujours pas, depuis le temps, réparé sa clôture. En chemin, nous traversons un immense champ de blé. Plus bas, j’aperçois le village qui a bercé mon enfance et celle de William. Le toit rouge de l’une de ses habitations me fait baisser les yeux. C’est là que vivent les parents d’Emilie. Un autre de mes nombreux cauchemars de la nuit passée. Les revoir … une source de joie et de peur bien réelle. Quoi leur dire…comment faire pour ne pas avoir honte, ne pas fuir devant mon passé… J'entends sans écouter, la conversation animée entre les deux hommes. Jusqu'à ce qu'un bruit de moteur ne me sorte de mes rêveries. « So, it’s here. Welcome to you. » La ferme de la famille Clives. Elle n’a pas changé. Les mêmes pierres qui font office de clôture. Le toit légèrement délabré. Des fleurs de toutes couleurs et de toutes espèces évoluant librement à chaque recoin du jardin. Les animaux de la ferme qui s’attroupent comme pour nous accueillir… « Thanks, sir. Yes, good day to you too. William… tu es prêt ? » lui demandai-je une dernière fois avant d’ouvrir la portière de la voiture, pour me hisser à l’extérieur.

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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyMar 21 Mai - 18:55

Hometown Glory
Noah & William



Je m’installe sur la banquette arrière de l’Aston, aux côtés de mon frère. La chaleur m’envahi, dû au stress. De cette façon, je retrousse les manches de ma chemise jusqu’à mes coudes, afin de laisser de la fraîcheur s’installer sur mes bras, comme si ça allait calmer mon anxiété. J’inspire profondément puis expire lentement à plusieurs reprises. Contrôler sa respiration permet de se sentir mieux, j’ai souvent eu l’occasion de le comprendre.

- Il y aura un temps d’adaptation, c’est certain. Tu as quand même disparu pendant de longues années. Mais le fait de te retrouver, de te savoir en vie et bien portant est tout ce qui importe à leurs yeux.
- On verra ça…


Je reste sceptique face aux paroles de Noah. Certes, ils seraient heureux de savoir leur fils aîné en vie et en bonne santé. Cependant, il paraît qu’entre l’amour et la haine, il n’y a qu’une marche. Ils pouvaient donc tout aussi bien refuser de me laisser revenir près d’eux et se contenter de l’idée que je sois toujours vivant. De toute façon, il est inutile d’imaginer des centaines de scénarios, adviendra ce qu’il adviendra. Je ne pouvais plus faire grand-chose à part attendre que le trajet en voiture soit fait.

Si je ne suis pas revenu ici depuis plus de vingt ans, je reconnais chaque détail. Les routes me sont familières et si je les avais oubliés, je m’en souviens comme si je ne les avais jamais quittées. A partir de là, une forte nostalgie me surprend. Des dizaines de souvenirs affluent dans mon esprit à chaque kilomètre parcouru. Mon regard bleu acier ne perd aucune miette de ce spectacle. C’est une sensation étrange que je ressens, qui blesse et qui, en même temps, fait le plus grand bien. Lorsque nous nous engageons sur la route principale menant au village, des champs s’offrent à nous, à perte de vue. Je me demande s’ils appartiennent toujours aux mêmes personnes. Je me revois, adolescent, détestant cette campagne. Enfant, on y passe ses plus belles années. On passe son temps à jouer dans les arbres, à s’amuser, à faire les quatre-cents coups dans la nature. Et lorsque l’on grandit, on rêve de la ville. On voudrait aller rejoindre les copains que l’on se fait au lycée, cependant cela signifie avoir l’autorisation des parents afin qu’ils nous y portent. On détonne une nouvelle dépendance que nous n’avons jamais connue jusque-là. Oui, arrivé à un certain âge, je détestais cette campagne, cette ferme, ces chemins terreux et son côté paisible. Et aujourd’hui, j’avais l’impression de rêver en la redécouvrant.

Soudain je sors de mes pensées. Je ressens un malaise immense chez Noah, sans vraiment en connaître la raison. J’ai toujours eu ce don pour partager chacun de ses sentiments. Nous étions liés comme des jumeaux. Et s’il devenait triste, sans même que je ne prenne le temps de l’observer, je le ressentais. C’est comme si une sonnette d’alarme résonnait en moi pour me prévenir. Je comprends cependant très vite qu’il ne souhaitera pas en parler maintenant. Je me contente donc, machinalement, de glisser une main chaleureuse sur son épaule, tandis que j’observe ce qui l’a mit dans cet état. Un toit rouge. Je tente de me souvenir qui habitait là-bas lorsque j’avais quitté la maison, en 1990. Cela ne me revient néanmoins pas. J’essaierais d’en apprendre plus ce soir.

Finalement nous arrivons à destination. La ferme de nos parents. Elle n’a pas changé et est la même que dans mes souvenirs. Peut-être un peu plus abîmée par le temps néanmoins. Mais elle gardait son charme. Mon cœur loupe un battement qui me fait mal. Les plantes sont toujours aussi nombreuses. Notre mère a toujours aimé laisser faire la nature, et c’est ce qui expliquait pourquoi le jardin n’était pas symétrique. Cela rendait l’endroit naturel et chaleureux. Les animaux sont toujours aussi nombreux et divers.

- William… tu es prêt ?
- J’ai vraiment une tête à être prêt ?


Mais bon, si je devais attendre de l’être, je risquerais de mourir de faim dans ce taxi anglais. Je sors donc de la voiture avec Noah. Des dizaines d’émotions envahissent mon esprit, entre joie, anxiété, stress et peur. Et comme le moteur de la voiture n’a pas été d’une discrétion à toute épreuve, je finis par entendre la porte d’entrée du cottage s’ouvrir. Alors que je suis en train d’ouvrir le coffre de la voiture afin de récupérer les valises, je me fige et reste de dos, complètement tétanisé. Si seulement je pouvais être invisible…

- Noah ?! Mais qu’est-ce que tu fais ici ? Ahh mon chéri !

La voix de ma mère. Je reste dos à elle, restant le plus discret possible. J’écoute chacun des bruits qu’elle fait. J’imagine sans trop de difficulté qu’elle vient de prendre Noah dans ses bras pour le serrer fort contre elle, tellement occupée à l’embrasser qu’elle n’avait pas fait attention à l’autre blond qui était de dos, face à la voiture noire.

- Hey fiston !


La voix de mon père. Il marche sur les graviers pour rejoindre Noah. Cette fois-ci, l’émotion est trop grande. Mes yeux s’inondent de quelques larmes, et d’un clignement d’œil, l’une d’elle coule sur ma joue. Je suis incapable de me retourner. Je suis dans une sorte d’état de choc lorsqu’enfin, on s’aperçoit de ma présence.

- Oh tu as amené un ami ?...

Je reste silencieux. Je sais que mes parents ne prendront que quelques secondes à comprendre qu’il s’agit de moi. La forme de mes oreilles. Le grain de beauté sur mon bras découvert. Et soudain, un long silence. Je retiens ma respiration quand…

- … Wi… William… ?

La voix de ma mère ne semble pas très assurée et pourtant, elle retient déjà un sanglot. Finalement je prends mon courage à deux mains et tourne la tête vers mes parents. Ils ont vieilli, tout comme moi. Les yeux rougis, je les observe, incapable de dire un mot, incapable d’esquisser un sourire et pourtant, tout dans mon regard laisse sous-entendre que je suis heureux de les voir. Je suis tout simplement sous le choc.


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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyMar 21 Mai - 21:39




«Homegrown Glory»


Il était sceptique, ce que je pouvais comprendre. Mais à la différence de William qui, dirait-on, avait oublié ce qu’une mère et qu’un père peuvent ressentir à la disparition soudaine de leur enfant, je savais précisément quelle serait la réaction de ma mère. Celle de mon père, je l’avoue, me laissait plus songeur. Mais je savais qu’au fond, l’amour qu’il portait à William vaincrait toutes les barrières que les deux hommes avaient pu dressées entre eux durant toutes ces années. Au souvenir de mon Emilie, je baisse les yeux, mon cœur me pèse, ainsi que ma mémoire. Une réaction que j’aurai voulu garder pour moi, mais comme toujours, depuis que nous étions petits, William sait lire en moi comme dans un livre ouvert et interpréter chaque mot, chaque geste, chaque silence. Sa main sur mon épaule m’oblige à relever la tête. Je lui souris, comme pour lui dire que tout va bien. A quoi bon lui en parler maintenant ? C’était si loin aujourd’hui … Et peut-être que les parents de ma femme sont en vacances, ou ont décidé d’aller vivre ailleurs pour oublier le drame qui avait brisé leur vie. Un côté de moi, le plus lâche sans doute, l’espérait de tout cœur. L’autre, cherchait encore à obtenir leur pardon…

« J’ai vraiment une tête à être prêt ? » Au lieu de répondre, je préfère en rire. Je l’ai maintes fois observé à Berkeley, depuis son retour. Plus pour me faire une idée de la personne qu’il est devenu, et parce qu’il m’a manqué que par curiosité maladive de veiller à ses moindres faits et gestes. Je me suis rendu compte qu’il savait se faire respecter. Tant de ses étudiants que des autres professeurs. A deux exceptions près, évidemment. Il ne montrait pas facilement ses émotions, faisait état d’un comportement distant, très britannique, et d’une politesse exacerbée. C’est cela qui me fait rire aujourd’hui. Le fait qu’il ne parvienne pas à prendre ses distances comme en Californie. Le fait qu’il n’est plus maître de la situation. Dans un sens, cela me rassure, car cela prouve qu’il n’a pas tellement changé en vingt ans. De l’autre, je prie pour qu’il ne perde pas tous ses moyens lorsqu’il fera face à son passé. La crainte de le voir s’enfuir demeure, malgré tout ce que nous avons pu nous dire depuis qu’il est rentré. Et je sais que si William devait à nouveau nous abandonner, aucun d’entre nous ne le supporterait.

La voix de ma mère me rappelle à la réalité. Un sourire apparait sur mes joues. Plus grand que jamais. « Bonjour maman. » Ma mère est une femme surprenante. Aussi distante que William en public, cynique même parfois, et tranchante dans ses propos, qu’affectueuse et surprotectrice à l’égard des siens. Une mère poule veillant farouchement sur ses poussins. Elle me prend dans ses bras, m’étouffant presque contre sa poitrine, tandis que je ferme les yeux l’espace de quelques secondes, le temps de déposer deux longs baisers sur ses joues. Derrière elle, j’entends les pas de mon père se rapprocher, jusqu’à ce qu’il apparaisse à son tour, dans l’embrasure de la porte. « Bonjour papa. » A son tour de m’enlacer. Une embrassade bien moins longue que celle de ma mère cependant. Je le sens qui observe l’homme que j’ai ramené avec moi. « Oh, tu as amené un ami ? » William est toujours de dos. Il est encore plus crispé que tout à l’heure. Voulant le rassurer, je m’approche, pressant son avant-bras pour l’inciter à se retourner. A leur faire face. « Ton petit-ami ? Tu vois, Maggy, je te l’avais bien dit qu’il préférait les hommes … » Mon père et son humour. « Vraiment très drôle. » ne puis-je m’empêcher de répliquer en levant les yeux au ciel tandis que ce dernier lâche un rire grave. « … Wi… William… ? » Ca y est, il s’est retourné. Ma mère est la première à le reconnaître. Mon père lui, a immédiatement cessé de rire pour le dévisager gravement, surpris, comme s’il n’en croyait pas ses yeux. Moi, je suis immobile. J’attends nerveusement que la nouvelle fasse son chemin dans leur esprit.

« Will….William… mon…fils, mon fils est revenu à la maison ! Oh Willy, mon chéri… ! » Les premières larmes de ma mère. Son sourire plus ému que jamais. Ses mains qui attrapent le visage de William pour qu’il se penche et qu’elle  puisse l’embrasser. Une fois, deux fois… je ne les compte plus. Une larme roule sur ma joue.  Des retrouvailles dont j’ai si souvent rêvées …  « Tu… c’est bien toi… comme tu as changé, mon chéri… Tu as grandi et tu… Oh seigneur, regardez-moi cette musculature !! » poursuit notre mère en tâtant ses biceps.

Mon père n’a toujours pas fait un seul geste. Je pense d’abord qu’il attend le bon moment pour aller à son tour serrer son fils contre lui. Mais non. Il me regarde. Passe à son autre fils. Me regarde à nouveau, avant de hocher la tête. Je ne comprends pas. « Papa…c’est William… il est rentré ! » énonçai-je comme s’il ne voyait rien de ce qu’il avait sous les yeux. « Oui, il est rentré. Bienvenue. Je vais préparer le déjeuner. » Je… quoi ? Comment ça tu vas préparer le déjeuner ? Mais… je… tu… il… Interloqué par son indifférence, j’ouvre les yeux grands, avant de jeter un œil à mon frère, qui sans doute, doit être le plus marqué par sa réaction. « Oh, ne t’en fais pas mon poussin… il est content de te… de VOUS voir. Il lui faut juste un peu de temps, c’est tout. » m’interrompt alors ma mère pour couper court à la discussion.

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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyJeu 23 Mai - 13:52

Hometown Glory
Noah & William



Pendant un moment, je m’étais demandé à qui appartenait cette maison au toit rouge. Il me fallait deux bonnes minutes pour enfin me souvenir. Soudain, tout me revenait en mémoire. Une fillette de l’âge de Noah. Lorsque je suis parti pour l’armée, à dix-huit ans, mon petit frère n’en avait que douze. Et déjà, il semblait être tombé amoureux d’Emilie. Emilie, cette camarade et amie, aux cheveux noirs et à la peau sombre. Espiègle et sans cesse joyeuse. Elle habitait ici à l’époque, chez ses parents. En me rappelant de tout ceci, je baisse finalement les yeux, un peu comme résigner. Je comprends que le simple fait de voir cette maison puisse le mettre dans un sale état.

Comme Noah, j’avais, à l’époque, une voisine avec qui je m’entendais particulièrement bien. Ma meilleure amie. Celle que j’avais toujours considérée comme faisant partie de ma famille. Ses parents habitaient à l’époque dans la maison juste à l’opposée de ceux d’Emilie. Nous étions toujours dans la même classe et après les cours, c’est encore une fois que nous étions inséparables. Avec un autre ami à nous, Milo, nous formions un trio de choc. Elisabeth, plus connue sous le nom d’Izzy. Mais, bien entendu, en grandissant, Milo et moi avions été attirés par elle. Elle n’était plus seulement notre meilleure amie, mais une femme. Et si nous avions finalement gardé notre amitié tout en nous livrant quelques combats de coqs, notre trio était resté soudé. C’est avec elle que j’avais perdu ma virginité. Pourtant, nous ne nous étions jamais mis ensemble parce que Milo avait son importance à ses yeux. Et comme elle restait attirée par nous deux, elle avait décidé qu’il ne se passerait jamais rien avec l’un de nous. Ainsi, je me demandais si elle était encore dans le coin aujourd’hui.

- Will… William… mon… fils, mon fils est revenu à la maison ! Oh Willy, mon chéri… !

Ces retrouvailles sont on ne peut plus émouvantes. Je reste là, à l’observer, incapable de prononcer un seul mot. Pourtant, mes yeux continuent de la contempler. Finalement un fin sourire se dessine peu à peu sur mon visage. Ca vaut tout l’or du monde. Et lorsqu’elle s’approche, je fais également un pas de mon côté pour la prendre dans mes bras. J’enferme son corps frêle contre moi et laisse une larme couler le long de ma joue. Elle a toujours ce même parfum qui, à l’époque, me rassurait. C’est bien elle. Oui, c’est elle. Finalement elle passe ses mains de part et d’autre de mon visage afin de l’attirer vers elle. Là, elle me couvre de baisers. Et si, à dix-huit ans, j’aurais plutôt été gêné par cette grande marque d’affection, aujourd’hui, je ne trouvais rien à redire. Je déposais également mes lèvres sur sa joue pour lui donner un long baiser.

- Tu… c’est bien toi… comme tu as changé, mon chéri… Tu as grandi et tu… Oh seigneur, regardez-moi cette musculature !!

Je lève les yeux au ciel à sa remarque. Effectivement, mon corps était plus massif désormais. A l’époque, si je faisais beaucoup de sport, je restais mince, avec une fine musculature. Aujourd’hui, je possédais le corps d’un homme et qui plus est, d’un ancien militaire et actuellement membre des forces spéciales britanniques.

- Je suis tellement heureux de te voir, maman…

Finalement je pose mon regard bleu acier sur mon père qui, pour sa part, reste immobile et discret. Je comprends très vite qu’il n’arrive pas à se réjouir de mon retour comme peut le faire ma mère. Je baisse un instant les yeux tandis que Noah prend la parole afin de le « réveiller ». Mais rien n’y fait. Il fait preuve d’une froideur exemplaire et finalement s’esquive dans la maison. Je reste assez choqué des sentiments que cette réaction me fait éprouver. Si je m’attendais plus ou moins à ce genre de comportement, le fait d’en avoir la confirmation faisait particulièrement mal. Notre mère tente de nous rassurer, mais je ne cesse de fixer cette porte par laquelle notre père vient de disparaître.

- Je vais aller lui parler.

Je dépose un dernier baiser sur la tempe de ma mère, comme pour la rassurer, puis croise le regard de Noah. Il était temps de se jeter dans la fausse aux lions. Je monte sur le perron et finalement ouvre la porte. Je me stoppe net en regardant autour de moi. La maison n’a pas changé. Certains meubles ont été remplacé, certes, mais dans la globalité, elle reste la même. Je me revois déambuler avec Noah dans ce salon, nous endormir l’un contre l’autre sur ce canapé. Je suis même étonné de voir, dans l’entrée, une photo de moi, lorsque j’avais encore dix-sept ans.

Sans aucune difficulté donc, je me dirige vers la cuisine où, effectivement, mon père prépare le dîner. Je le vois couper des légumes avec un couteau, avec force et nervosité. De quoi effrayer un peu en somme. Lorsqu’il entend le bruit de mes pas, il tourne la tête et durant un long moment, nous nous contentons de nous observer dans le silence le plus complet. Nous nous sommes quitté sur une dispute. Il me semble même que la dernière parole que je lui avais attribué était « Je te déteste ! ». Une lourde histoire couplée à une crise d’adolescence. Rien de bien glorieux donc.

- Papa…
- Pourquoi est-ce que tu es revenu ?! Comment oses-tu te pointer ici après tout ce temps ?!


Il repose le couteau et se dirige vers moi avec un air menaçant. Nous faisons la même taille et pourtant, je le trouve toujours aussi intimidant dans sa façon d’être, que dans son physique. Je ne trouve même pas quoi répondre alors qu’il en profite pour sortir.

- Il ne s’est pas passé une journée sans que nous ayons pensé à toi ! J’en ai terriblement souffert ! Imagine comment ta mère a pu réagir ?! Elle en a fait une dépression William ! On ne retire pas un enfant à sa mère comme ça ! Tu es d’un égoïsme… ! Si tu ne voulais plus nous voir, pourquoi ne pas seulement avoir passé un simple coup de fil ou bien envoyé une lettre, uniquement pour dire que tu allais bien ?! On ne savait même pas si tu étais en vie !

Que puis-je donc répondre à ça ? J’en ai conscience. Terriblement conscience même.

- Tous les jours ta mère a espéré ton retour ! Tous les jours elle a eu peur de la sonnerie du téléphone, de peur qu’on appelle pour signaler ta mort ! Qui es-tu pour avoir décidé de faire mal à ta famille de cette façon ?! Qu’est-ce qu’on a bien pu faire pour mériter ça ?! Réponds-moi !

Je détourne le regard. Pour être honnête, je n’ai pas vraiment de réponse à donner. Avec le temps, j’étais persuadé que l’on m’avait oublié, qu’ils s’étaient fait une raison et pire, qu’ils me détestaient, qu’ils ne souhaiteraient plus jamais avoir de mes nouvelles. Voilà pourquoi je n’étais pas réapparu. Un mauvais jugement. J’ai toujours été solitaire et j’imagine que ça à jouer aussi. Avec mon travail, avoir des attaches n’est pas la meilleure des idées. J’observe mon père dans les yeux, afin de lui prouver ma sincérité.

- Je suis désolé… j’ai toujours cru que vous ne vouliez plus avoir de mes nouvelles. Entre nous… tu sais très bien que j’amenais plus d’ennuis que de bons moments. Ne dis pas le contraire. Je vous épuisais tous, et aussi triste cela puisse être, je n’en faisais pas exprès.

Il ne pouvait pas dire le contraire. Si à l’époque, j’étais un frère formidable, je restais un enfant et un adolescent qui menait la vie dure à son entourage, sans vraiment le vouloir. Mon impulsivité en était maladive et rares étaient les fois où j’arrivais à me tenir à carreaux. J’imagine que je me suis longtemps caractérisé comme un boulet qui est difficile à traîner. Partir à l’armée était donc la solution que j’avais trouvée d’une part pour faire un travail sur moi-même, et d’autre part, pour les ôter d’un poids que je jugeais trop important.

- Laisse-moi seul pour le moment, s’il te plaît.

Je pouvais comprendre sa réaction. C'est ainsi que j'étais incapable de lui en vouloir. Et c’est donc sans broncher que je hochais la tête afin de lui donner une réponse positive à sa requête. Je tournais donc les talons et ressortais de la cuisine. Après un court moment d’hésitation, je ressortais de la maison où le soleil, s’il n’allait pas non plus se coucher tout de suite mais plutôt dans quelques heures, commençait déjà à baisser dans le ciel. Je croisais le regard de Noah, puis celui de ma mère. Et c’est un peu gêné que je me dirigeais vers eux, non sans jeter un dernier coup d’œil vers la porte derrière moi, espérant que mon père en ressortirait afin de venir m’embrasser. Mais ça semblait peine perdue. Il m’en voulait terriblement et j’imaginais que ça n’allait pas changer d’une minute à l’autre. Pourtant, j’acceptais de lui laisser le temps nécessaire. Peut-être ne me pardonnerait-il jamais ? Dans le fond, c’est ce que je méritais. Je m'approchais donc de ma mère ainsi que de mon petit frère.

- Il va falloir du temps, oui.
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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyVen 24 Mai - 6:36




«Homegrown Glory»


Gêné vis-à-vis de l’attitude indifférente, voire glaciale de mon père, je reste bouche bée, bras ballants, le regard tourné vers la porte d’entrée comme incapable d’en détacher les yeux sans que la colère ne m’envahisse. Même ma mère avait cessé de cajoler son fils aîné pour baisser les yeux, tant l’attitude de son mari avait paru déplacée en la circonstance. On n’accueille pas son fils disparu après vingt ans d’absence en allant préparer le déjeuner. Je rêve. « Je vais aller lui parler. » Hochant la tête, très légèrement, et toujours ahuri, je laisse William s’en charger pour rejoindre les bras de ma mère que j’avais, en arrivant, bien trop vite délaissée. « Je… je ne comprends pas. Comment peut-il… » La surprise laisse place à l’entêtement. Et dieu sait que j’ai une idée derrière la tête, il en faut beaucoup pour m’en détacher sans perdre quelques plumes au passage. « Calme-toi chéri… le plus important, c’est que vous soyez ici, tous les deux. Ton père finira bien par revenir à de meilleurs sentiments. » soupira ma mère, trop heureuse d’avoir retrouvé William pour émettre une objection à cette simple idée. « Il a plutôt intérêt. » soufflai-je sans même me rendre compte du ton grave avec lequel je venais de m’exprimer. Un sourire s’égara sur les lèvres de ma génitrice au moment où elle passait sa main dans mes boucles blondes. A croire que les rôles s’inversaient. Par le passé, il revenait à William de me protéger. Aujourd’hui, j’avais l’impression que son salut reposait sur mes épaules. Et je n’avais pas l’intention de le laisser se dépatouiller tout seul. Sur ce point, mon père allait devoir se faire une raison. « Tu aurais pu nous prévenir de votre arrivée quand même, poussin ! » Hum, pardon ? « Je suis navré. William voulait vous faire la surprise et… j’avoue que, ne sachant pas vraiment comment vous alliez réagir, j’ai aussi opté pour cette solution. » Finalement, un sourire égaye mon visage. Enfin. « Et puis, les retrouvailles sont bien plus émouvantes que par téléphone, tu ne trouves pas ? » la taquinai-je après avoir déposé un baiser sur sa tempe. « Vous êtes incorrigibles, tous les deux. » murmura t-elle pour elle-même en levant les yeux au ciel. « Depuis quand l’as-tu retrouvé ? » Je hoche la tête. Ma mère n’avait jamais perdu des yeux le ressentiment que j’avais envers William de m’avoir abandonné, enfant. Ce qui m’avait toujours surpris, en revanche, était l’amour qu’elle avait continué de lui porter, sans que jamais la rancœur ne vienne l’entacher – à défaut de mon père ou de moi-même – après tout ce temps passé sans l’avoir à ses côtés. Il n’y a aucun doute à avoir : notre mère est une femme exceptionnelle. « Cela fait environ deux mois. Il est venu en Californie dans le cadre d’un échange universitaire. Oh, oui, tu ne sais pas. Il est professeur d’Histoire. » ajoutai-je avec fierté. Sentiment tout aussi partagé par ma mère qui avait toujours craint l’armée et son fonctionnement aussi archaïque, que dangereux. A bon entendeur. Pendant ce temps, à l’intérieur de la maison, les deux hommes discutent. Mon père n’en démord pas. Au moins a-t-il dit ce qu’il avait sur la conscience. Cela ne me suffisait pas. Aussi, lorsque l’ombre de William réapparut dans l’embrasure de la porte, mes sourcils se froncèrent à nouveau. Et j’eus besoin de toute la volonté de ma mère et de sa main sur mon avant-bras, pour ne pas courir à l’intérieur de la maison, direction la cuisine pour aller lui toucher deux mots sur ce que je pensais de son comportement. « Noah, ça ne sert à rien…. Chaton… » Déjà, je ne l’écoute plus. J’ai beau être adulte, responsable, mâture, aujourd’hui, j’avais l’impression que l’enfant que j’avais été jadis refaisait surface. Ne souhaitant pas davantage me contrarier, ma mère me laissa donc m’en aller, pour reprendre la taille de William entre ses bras, comme par peur qu’il ne s’échappe à nouveau. « Tu as faim, mon chéri ? Je viens de sortir un crumble aux groseilles du four, justement … » Ma mère et la cuisine. Je me suis toujours dit qu’elle avait cuisiné pour les Dieux, dans une autre vie.

« Je peux savoir ce qui te prend ? Tu viens de retrouver ton fils après vingt années d’absence, et c’est ainsi que tu l’accueilles ?! » Et en plus, il me tournait le dos ! « Papa, je te parle ! » Lorsqu’il se retourna, un sourire était apparu sur ses lèvres. « Qu'est-ce qu'il y a ? Je ne vois vraiment pas ce qu’il y a de drôle. Cela t’amuse de traiter ton fils comme un étranger ? » Il ne dit toujours rien. Ce qui a le don de m’exaspérer. Je n’étais pas venu ici pour un cours de théâtre. « Ce qui me fait sourire, c’est le fait que tu prennes la défense de ton frère comme lui le faisait à l’époque. Je ne suis pas amusé, Noah, je suis attendri, il y a une différence. » souligna mon père en continuant de faire la cuisine, se déplaçant à droite et à gauche, pendant qu’il me parlait. « Si je me souviens bien, toi aussi tu lui voulais d’être parti. Une époque qui n’est pas si éloignée, je me trompe ? » Touché. « Oui, mais moi c’est différent. Je suis son frère et je… c’est… » Quoi ? Les liens paternels et fraternels étaient-ils vraiment si différents ? « …de toutes façons, peu importe. Je lui ai pardonné, tu dois en faire autant. » Cela sonnait presque comme un ordre. « Pourquoi ? Donne-moi une seule bonne raison, mise à part le fait qu’il soit mon fils. » Je n’en crois pas mes oreilles. Je n’arrive même plus à articuler sans bégayer. « Mais… je… comment ça une raison ? Tu… c’est une plaisanterie ? » Finalement, après que le repas soit prêt, mon père me fait face. Son sourire a disparu. Un visage d’une neutralité que je ne lui connaissais pas jusqu’alors. « Noah, ton frère a fui pendant vingt ans. Quelles que soient les raisons de son départ, il aurait dû nous appeler. Nous donner de ses nouvelles. S’il ne l’a pas fait, c’est par pur égoïsme de sa part. Je peux comprendre qu’il ait eu peur de ma réaction. Nous nous sommes quittés en de mauvais termes, c’est vrai. Mais ta mère … tu as la mémoire courte, fiston. Tu ne te souviens pas dans quel état elle était lorsqu’il est parti ? Des nuits blanches, des cris, des pleurs, des jours entiers à attendre un coup de fil, à veiller le facteur … Je regrette, Noah. Je ne peux pas lui pardonner de nous avoir fait endurer cette souffrance pendant vingt ans. C’est au dessus de mes forces. Alors oui, je suis heureux de le revoir, ne te méprends pas. Il restera toujours mon fils et je l’aimerai, quoiqu’il en coûte. Mais faire comme si rien ne s’était passé, comme ta mère ou toi êtes en train de le faire, je ne peux pas. » Immobile, les bras ballants, je l’avais écouté jusqu’au bout, tandis que mon teint pâlissait à vue d’œil, et qu’une moue désemparée prenant place sur mon visage. Au fond, je savais qu’il n’avait pas tort, et que sa réaction était légitime. Notre père n’avait jamais eu le même tempérament que ma mère ou moi-même. Ou Jane. Il ressemblait davantage à William et Danaë. Et je savais que rien ne pourrait désormais le faire changer d’avis. Que je devais me résoudre à ce qu’il voulait bien nous offrir en échange du pardon de son fils. « Mais… tu… lui pardonneras un jour… n’est-ce pas ? » C’était la question que je me posais. La question qui me trottait dans la tête depuis que nous étions dans l’avion. La question dont la réponse me terrifiait. « Je l’ignore, chéri. J’aimerai que tout soit aussi simple. Etre à même d’oublier les erreurs du passé. Mais je ne suis pas comme toi, je regrette. » Là-dessus, il s’éloigne en direction de la table en bois, située dans le jardin. C’est ici que nous avions l’habitude de déjeuner, lorsque la famille était au complet. Aujourd’hui, j’avais l’impression que ce repas n’aurait pas le même goût que par le passé. « Va dire à ta mère et à ton frère que la table est mise, s’il te plait. Je monte faire le lit de William, et je redescends. Vous dormez bien ici, n’est-ce pas ? » La façon qu’il a de poser cette question. Elle parait presque anodine… Je hoche la tête, toujours aussi dépité. Aucun son ne sort de ma bouche. Je m’éloigne jusqu’à la porte d’entrée. J’ai beau avoir compris, savoir que je ne peux rien y changer, je demeure ce même petit garçon blond d’il y a vingt ans, qui cherchera toujours des explications, des solutions. Lorsque je relève les yeux vers l’extérieur, ma mère rigole, tenant fermement son fils entre ses bras. Autrefois, j’aurai tout donné pour une scène aussi touchante. A présent, devant la froideur de mon père, il manquait une page à cette histoire.

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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptySam 25 Mai - 10:55

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Noah & William



Lorsque je reviens à l’extérieur de la maison, je fais comprendre à ma mère ainsi qu’à Noah que le chemin risque d’être long pour avoir le droit au pardon de mon père. Je comprends aisément qu’il puisse m’en vouloir, et pourtant, malgré sa rancune, je ne doute pas une seule seconde du soulagement qu’il ressent en me sachant en vie, en bonne santé et aux côtés de ma mère. Il garde un amour paternel pour moi, bien que gâcher par la haine qu’il pouvait m’adresser. Il n’y avait donc rien d’étonnant à cela. En somme, il m’en voulait, mais il m’aimait avant tout. C’est pourquoi je préférais lui laisser du temps et ne pas bousculer les choses en le forçant à me parler. Cela reviendra petit à petit. Pourtant, Noah ne semblait pas le voir de cet œil. Si, pour ma part, je me faisais une raison et évitais de me focaliser sur la première réaction de mon père afin de rester positif, ce n’était pas le cas de mon petit frère qui, de son côté, semblait aussi décontenancé qu’outré. Ma mère tenta pourtant de le retenir, mais face à ce Noah hors de lui – ce qui restait assez rare, avouons-le –, elle décida de le laisser agir. Le cadet des fils Clives s’éloigna donc d’elle pour passer la porte de la maison, dans le but de parler à notre père. De mon côté, je fis quelques pas vers ma génitrice afin de la retrouver.

- Alors, il paraît que tu es professeur d’Histoire ? Toi qui étais incapable de rester assis sur une chaise plus de quinze minutes.
- C’est toujours le cas. J’ai fait un long travail sur moi-même pour calmer mon hyperactivité. C’est ce qui m’a permit de reprendre mes études. Donc oui, je suis professeur d’Histoire maintenant.
- Où ça ?
- A Oxford.
- Oxford ?! Bravo mon cœur ! C’est là où ton frère a fait ses études.
- Oui je sais. J’étais d’ailleurs connu pour être « le frère de Noah Clives ».


N’importe qui aurait pu être jaloux ou bien tout simplement énervé de vivre dans l’ombre du succès de son frère. Pourtant, ça n’avait pas été mon cas. C’était avec une grande fierté que j’avais accepté la notoriété de Noah. Je passais mon temps à entendre parler de lui, de ses ouvrages, à être comparé à lui. On m’avait laissé sous-entendre qu’il était meilleur que moi dans bien des domaines. J’en étais heureux pour lui, très heureux. Il avait réussi son parcours professionnel. Et il le méritait.

- Tu dois avoir tellement de choses à me raconter. Tu as une petite amie, peut-être même une femme ? Ou… tu as peut-être toujours des copines ?

Oui, avant même de quitter la maison pour m’engager dans l’armée, j’étais connu pour être un véritable Don Juan. Et si, celle qui me plaisait restait Izzy, je restais un bourreau des cœurs. J’enchainais les histoires très peu sérieuses, restant néanmoins un célibataire endurci. Il m’arrivait d’avoir plusieurs relations non-officielles en même temps. Tout le monde était au courant de cela, y compris mes parents. Et aujourd’hui, ma mère semblait vouloir savoir si je m’étais calmé à ce niveau-là. Elle risquait d’être surprise en voyant que non.

- Mh… j’ai toujours… des copines.
- Oh… t’as rien eu de sérieux toutes ces années ?
- Ah si. Une. Mais ça n’a finalement pas marché.


Je ne l’avais même pas dit à Noah. Si, contrairement à lui, je n’avais pas été marié, j’avais perdu l’amour de ma vie. Alice. Cette femme des forces spéciales américaine. Celle qui avait perdu la vie lors d’une mission. Et si je possédais la date de naissance de Noah en chiffres romains sur le poignet droit, je m’étais fait tatouer celle de la jeune femme sur le gauche. Personne n’était au courant de cette histoire, mis à part Joe qui, suite à ce décès, avait été témoin de ma disparition. Je n’avais plus donné un seul signe de vie durant des mois et des mois. A chaque fois que l’on me demandait si j’avais connu quelqu’un de façon sérieuse, comme Noah avait pu le faire, je répondais toujours avec toute la discrétion du monde « Ca n’a pas marché », tout simplement.

- Tu es incorrigible. Un jour, il faudra que tu penses à te poser.
- Il parait que l’on recherche toujours inconsciemment une personne avec le comportement de sa mère ou bien de son père. Et comme tu es exceptionnelle…
- T’es bête ! Ne te moque pas de moi !


Elle me donna une tape sur l’épaule en riant, avant de venir de nouveau se blottir contre moi. Souriant, je l’entourais de mes bras, heureux de la retrouver. C’est à ce moment-là que Noah décida de revenir. Il nous expliqua que le dîner était prêt, et c’est donc tous ensemble que nous allâmes dans le jardin pour manger.

Le dîner fut quelque peu tendu. Mon père ne décrocha pas plus de deux paroles, et se contenta d’écouter la discussion que nous avions tous les trois, avec ma mère et Noah. C’est donc volontairement qu’il ne s’en mêla pas, mangeant silencieusement. Je ne cherchais pas à le reprendre sur son comportement, je préférais ne pas le brusquer. C’est juste après manger qu’il décida de quitter la table afin d’aller se coucher, prétextant qu’il avait passé une journée épuisante. Je tournais la tête vers Noah, lui faisant silencieusement comprendre de le laisser faire s’il en ressentait le besoin.

Un peu plus tard dans la soirée…

- Qu’est-ce que vous êtes mignons là-dessus !

J’attrapais la photo. Dessus, j’étais petit, allongé sur le sol, observant mon petit frère, lui, sur le dos sur un tapis moelleux. A l’époque, il n’était encore qu’un bébé. Et je devais avouer que nous avions la classe. Lui torse-nu, dans un jeans, et pour ma part, vêtu d’un pantalon et d’un marcel blanc. Malgré notre jeune âge, nous sentions déjà une grande complicité entre nous. Sur la photo, Noah m’observait en rigolant, alors que je faisais l’idiot pour obtenir ce résultat. Oui, déjà, on voyait qu’il était tout pour moi.

- On avait la grande classe, oui !
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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyLun 27 Mai - 8:03




«Homegrown Glory»


Durant tout le temps du dîner, je n’avais pas beaucoup touché à mon assiette, moi qui pourtant d’ordinaire, raffolait des plats cuisinés par ma mère. Trop désarçonné par l’attitude qu’avait eu mon père, j’avais gardé la tête basse, ne parlant que très peu, ne riant jamais vraiment. Lorsque mon père prétexta la fatigue pour monter jusqu’à sa chambre, je ne pus que le suivre du regard, jusqu’à ce qu’il ait disparition de mon champ de vision. Un soupir s’échappa de mes lèvres, alors que je me décidai d’écouter le regard que William m’avait lancé, m’insufflant de rester à table. Oui, il faudrait beaucoup de temps.

Plus tard, notre mère ressortit les vieilles photos de famille. Je ne sais si c’est le feu de la cheminée qui nous réchauffait le cœur, ou le fait de me voir en compagnie de mon frère sur ses photos, on avait l’air si heureux, tellement complices, mais je riais malgré moi devant les mimiques que ce dernier faisait à l’époque, pour me faire sourire. J’avais déjà des boucles blondes, et lui, des cheveux plus ébouriffés que jamais. On était trop mignons, c’est bien vrai ! « Surtout toi. Maman, tu te rappelles de ce jour-là… quand j’avais mangé le gâteau que tu avais cuisiné pour grand-mère et que William s’était accusé à ma place ? » En y repensant, j’étais aussi indiscipliné que lui à cette époque. Mais j’écoutais plus vite et ne me rebellais jamais. Là faisait toute notre différence. « …et toi, tu as vivement protesté en disant que c’était toi qui l’avais mangé. Et William a insisté. Je ne savais même plus qui je devais punir ! » s’exclama Marguerite en riant aux éclats. « Oh, et celle-ci… tu te souviens, chéri… quand tu t’étais battu pour la première fois avec le garçon qui faisait des misères à ton petit frère… » « Je m’en souviens ! » l’interrompis-je en me rappelant du cocard que William avait fait à ce pauvre Robert lorsqu’il était venu me chercher à l’école. A chaque fois que j’en sortais, je me faisais voler mon goûter et mon argent de poche, et une bagarre avait lieu. Etant donné que j’avais un physique plutôt menu déjà tout petit, et que surtout, je ne savais ni n’aimais me battre, je revenais toujours à la maison en pleurs, les mains toutes sales, et ma chemise en lambeaux. Je n’avais jamais voulu dire ce qui s’était passé. Je voulais être grand et prouver à mes parents que j’étais un petit garçon courageux. Seul William avait appris la vérité plus vite que je ne l’aurais voulu. « Je me demande ce qu’il fait aujourd’hui. » songeai-je à voix haute. « Il a rejoint le Canada, en compagnie de la petite Annie. Tu te souviens Willy, .. la petite Annie. Elle en pinçait pour toi à l’époque. » le taquina ma mère en lui faisant une pichenette sur la joue. « Ils ont une petite fille qui s’appelle Tania. Elle est adorable si j’en crois ses parents. » Je souris. Comme quoi, même les gros durs ont un cœur. « A propos de petits-enfants… » Mes oreilles se dressent. William, est-ce que tu sens le danger toi aussi ? Notre mère vient de refermer l’album de famille, subitement, et nous regarde l’un après l’autre avec des yeux de chat botté. Je ne sais pas pourquoi mais c’est une expression qui me donne la chair de poule, tout à coup. « …quand est-ce que vous vous déciderez à m’en donner, tous les deux ? » C’est un reproche, ou de l’humour ? Elle sourit, mais sous cet apparent bonheur, je sens le sérieux de la situation. Je sais que ma mère a toujours voulu mon père aussi d’ailleurs, pouponner. Sauf que, à ma connaissance, ni William ni moi n’avions de petites amies. En revanche, pour ce qui était des enfants… Je jette un coup d’œil discret à mon frère. Kenzo. Devait-on en parler à notre mère tout de suite … ou attendre qu’elle nous fasse des reproches de lui avoir caché l’existence de son petit-fils, plus tard ? Je laissais la décision à William. Après tout, il ne le connaissait pas encore suffisamment pour vouloir en parler. Ou alors, peut-être que oui. Je n’en sais rien au fond. Et ce n’est pas à moi de prendre une telle décision, dieu merci. « William… je sais que tu es un habitué des aventures, mon chéri. Mais tu ne veux pas… te caser ? Juste pour donner un petit garçon ou une petite fille à ta maman ? » Trop mignon. Ma mère est très douée pour manipuler par les sentiments. « Noah, poussin… ce que je dis à ton frère est valable pour toi aussi, tu sais. Je ne serais pas toujours là et … » Stop. Arrête, maman. Je n’aime pas quand tu parles comme ça. « …et j’aimerai devenir grand-mère avant que le tout puissant ne décide de me rappeler chez lui… » La religion. Tout était une question de religion en Angleterre. Pays où la majeure partie de la population était catholique pratiquante. « Mammannn, mais tu es encore jeune,… ne dis pas ça. Tu sais que je déteste quand tu dis ça… » soupirai-je, le cœur gros.

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MessageSujet: Re: [UK] Hometown Glory [UK] Hometown Glory EmptyLun 10 Juin - 13:39

Hometown Glory
Noah & William



Les photos me propulsaient des années et des années en arrière. Une enfance remplie de souvenirs. Je ne possédais que peu de photos du passé, en en ayant emportées seulement quelques unes lors de mon départ pour l’armée. Je pouvais cette fois-ci toutes les revoir et la nostalgie battait son plein. Je me souvenais de cette fois où, en sentant la bonne odeur du gâteau qui venait de sortir du four, le ventre de Noah avait crié famine. Et si je me rappelle vaguement lui avoir faire comprendre qu’il ne devait pas y toucher, son estomac avait eu raison de lui. Aussitôt notre mère s’en était aperçu, je m’étais dénoncer à la place de mon petit frère, afin qu’il ne se fasse pas gronder. La différence, c’est que Noah faisait bien moins de bêtises que moi. Pour ma part, je passais mon temps à faire les quatre-cent coups et à me faire disputer, au point de passer une année entière dans un pensionnat religieux afin de me recadrer. Mais finalement, même eux n’avaient pas voulu de moi tant j’étais intenable, si bien que mes parents avaient dû me récupérer. Et à leur plus grand étonnement, j’avais appris à me calmer un peu pour éviter que l’on m’y remette.

- En même temps, il l’avait cherché, répondis-je en fulminant.

A l’époque, je devais avoir treize ou quatorze ans. Le Robert en question avait le même âge et Noah sept ou huit. Dans une petite bourgade comme celle-ci, tous les enfants se connaissaient. L’école primaire ainsi que le collège se situaient dans le centre-ville, non loin l’un de l’autre. Et si mon petit-frère était encore petit et sans défense, cela n’empêchait pas l’adolescent de voler les gamins de primaire. Il trouvait cela amusant, sans aucun doute. Il se sentait plus fort en s’en prenant à plus faible. Je l’avais appris en voyant mon petit frère rentrer en pleurs à la maison. Et s’il n’avait rien voulu dire aux parents, il avait accepté de se confier à moi. Le lendemain matin, j’avais pris Robert sur le fait, alors qu’il s’en prenait à mon frangin. Une seconde à peine plus tard, je lui avais déjà envoyé un violent coup de poing en plein visage qui l’avait sonné quelques instants, avant que nous en venions tous les deux aux mains. Et avec la misère que je lui avais mise, clairement, il n’avait jamais recommencé.

- A l’époque, je préférais Izzy. Mais j’ai du mal à croire qu’Annie ait fini avec ce naze.

Comment ça les gens grandissent ? Certes, mais ce type était un vrai pourri à l’époque. Difficile à croire donc qu’il ait pu s’arranger lorsque je me souviens de notre adolescence, lorsqu’il était encore un cas perdu. Mais bien vite, je sors de mes pensées en entendant ma mère parler de « petits-enfants ». Là, Noah et moi n’avons même pas besoin de nous observer pour ressentir l’angoisse de l’autre. Une expression d’alerte vient de prendre possession de mon visage. J’écoute attentivement ma mère, en cherchant des yeux un détail ou bien un objet dans la pièce qui pourrait m’aider à changer de sujet. Mais rien ne me vient à l’esprit.

- Me caser ? J’aurais trop peur d’avoir un enfant qui a mon caractère. Autant me passer la corde au cou tout de suite.

Au moins, je suis conscient du fait que j’ai été particulièrement difficile à vivre. Mais là n’est pas l’unique raison de mon refus de me poser avec une femme. Je n’avais pas envie de me confier sur la mort d’Alice – dont personne ici ne connaissait l’existence –, comme je ne me voyais pas dire cash à ma mère « Ecoute maman, je préfère coucher avec des femmes à qui je ne promets rien. Et avec une relation sérieuse, je ne pourrais plus prendre passionnément deux belles créatures dans le même lit. ». Ca serait… déplacé, non ?

Pour ce qui est de Kenzo, je préfère éviter de lui en parler maintenant. Lui et moi ne nous connaissons pas encore bien dans la mesure où nous venons à peine de nous rencontrer. Mais si effectivement, un lien venait à se créer entre nous, je n’hésiterais pas à mettre ma mère au courant. Pour le moment, c’était bien trop tôt. D’ailleurs, lorsqu’elle retourne sa remarque à Noah, je me demande s’il lui a parlé de la fille de Sydney ? Après tout, c’est lui qui a adopté la petite Eleonora. Une question que je m’empresserais de lui poser lorsque nous serons tous les deux.

- Oh, avec un peu de chance, tu te réincarneras et tu pourras en profiter d’une certaine manière.

Contrairement à Noah, je préfère m’amuser de la situation et me montrer plus taquin. Je connais le degré de religion de la famille pour avoir été élevé dedans. Mais, dans la mesure où j’avais toujours expliqué par A B que rien n’était possible dans la Bible, je me jouais souvent de ce genre de propos en faisant référence à une toute autre relation : le bouddhisme. Ca suffisait à la voir lever les yeux au ciel, de façon gentiment exaspérée.

Il est minuit. Notre mère est partie se coucher alors que Noah et moi décidons de faire une petite promenade dans cette bourgade de notre enfance. Une façon de nous retrouver tous les deux dans cette nostalgie. Il fait nuit, mais les lampadaires ainsi que la lune donnent une bonne visibilité.

- Dis-moi, est-ce que tu as parlé d’Eleonora à maman et papa ?

Soudain, j’entends un bruit de portière, au niveau de la maison des parents d’Izzie. Je me demande si la maison a été vendue depuis toutes ces années. Noah et moi passons devant et soudain, je me stoppe, surpris. Ma meilleure amie d’enfance est là, cigarette aux lèvres, en train de décharger sa voiture d’une valise ainsi que d’un sac contenant sans aucun doute tout ce qui est nécessaire pour s’occuper d’un bébé. D’ailleurs, l’enfant doit déjà être à l’intérieur si j’en juge les lumières allumées dans ce qui doit encore être le salon, malgré l’heure tardive. Je n’ai écouté la réponse de Noah que d’une oreille – et encore – que déjà, mon regard bleu acier contemple cette femme que je connais si bien, mais qui est devenue une étrangère en plus de vingt ans. Soudain, en entendant du mouvement derrière elle, elle se retourne et Noah et moi entrons dans son champ de vision. Là, elle reste bouche bée. Aucun son ne sort de ses lèvres. Elle a bien reconnu mon petit frère, qu’elle doit encore voir à l’occasion. Et très vite, elle fait le rapprochement avec moi. Du moins, c’est ce que j’en déduis avec une telle surprise sur son visage.

- Bonsoir, Mrs Isaac.

Ses longs cheveux bruns, ondulés, la rendent toujours aussi ravissante qu’à notre adolescence. Malgré la faible lumière, je crois apercevoir ses yeux bleutés. Elisabeth Isaac. C’est d’ailleurs pour son prénom et son nom de famille que nous avions trouvé comme contraction, le surnom d’Izzy. Elle était juive et m’avait appris beaucoup de sa religion d’ailleurs, si bien qu’aujourd’hui, avec tous ces souvenirs, je restais incollable à ce sujet.

- Will’ ?

Je lui adresse un sourire alors qu’elle en fait tomber sa cigarette. Elle lâche ses bagages et s’élance vers moi en courant, avant de me sauter dessus. Ses bras entourent ma nuque et ses cuisses immobilisent ma taille. Izzy a toujours été assez vive dans ses gestes, et pourtant très câline.

- Oh mon Dieu, tu es revenu ! J’arrive pas à y croire !
- Tu n’as pas changé.


Elle repose ses pieds sur le sol et m’observe longuement afin de découvrir si, de mon côté, j’ai beaucoup changé physiquement. Finalement elle esquisse un sourire en passant son doigt sur les petites rides que je possède au coin des yeux. Je prends un air faussement exaspéré et hautain alors qu’elle me fait comprendre silencieusement que j’ai vieilli.

- Pourquoi est-ce que tu n’as jamais donné de nouvelles ?

Dans sa voix, je ressens de l’énervement mêlée à de l’incompréhension.

- Longue histoire. Je te la raconterais plus tard.

Pour me punir, elle donne une tape sur mon torse, avant de se tourner vers Noah pour l’embrasser et donc le saluer, en lui expliquant qu’elle est également heureuse de le voir ici. Elle ne put s’empêcher de passer sa main libre dans les cheveux bouclés de mon petit-frère avant de se mordiller la lèvre inférieure.

- Ah, si j’étais seule Noah, je t’aurais déjà kidnappé.

J’esquisse un sourire amusé devant la remarque d’Izzy. Elle n’a jamais vraiment caché son attirance pour les hommes, d’une nature franche. Et visiblement, Noah est à son goût, même si elle vient de m’avouer implicitement qu’elle n’était pas seule. Je pose mon regard sur sa main gauche et vois une alliance.

- Oh, mariée ?
- Tu croyais peut-être que j’allais t’attendre ?
- Qui est l’heureux élu ?
- Milo.

Là, mon visage se fige sous la surprise. Milo ? Notre meilleur ami d’enfance ? Aller savoir pourquoi, je ressens une pointe de jalousie.

- Je pensais qu’il ne se passerait jamais rien avec l’un de nous deux ?
- Certes. Mais tu es parti sans donner d’explications. Et Milo, lui, ne m’a jamais fait souffrir de la sorte.


Je lève les yeux au ciel avant de les reposer dans les siens. J’esquisse finalement un sourire assez fier.

- Je ne serais pas parti, c’est moi que tu auras choisi, avoue-le.
- A ton avis.


Elle vient de m’avouer qu’à l’époque, c’est moi qu’elle préférait et que Milo avait été comme sa roue de secours. Bien évidemment, cette simple idée rend particulièrement fier le coq qui sommeille en moi.

- Arrête de sourire comme ça. J’aurais fait la plus grosse erreur de ma vie. Je suis très heureuse avec Milo. Il est gentil et attentionné.
- Oui, c’est Milo. Pour ma part, j’étais méchant et négligeant, mais tu étais folle de moi.
- Crois-le si ça te fait plaisir, Clives. Mais parfois, il faut prendre la bonne décision entre le gentil qui est capable de rendre heureux une femme, et le bad boy qui n’est bon qu’à éveiller notre désir.


Elle me défie du regard alors que je plisse les yeux en souriant. C’est ce qu’on verra.

- Il faut que j’y aille. Demain, tu as intérêt à m’accorder du temps, Will’.
- Oui, chef.


Elle vint déposer un baiser au coin de mes lèvres avant de disparaître dans la maison de ses parents qu’elle a visiblement choisi pour les vacances.

- Elle est encore folle de moi.

Je connaissais parfaitement bien Izzy pour le savoir. Je tournais finalement la tête vers Noah, toujours aussi fier de moi. Mon comportement laissait parfaitement présager que j'allais tenter de la séduire à nouveau. Comment ça elle est mariée et maman ? Comme si ça allait me bloquer dans mon élan.

- Pourquoi tu me regardes comme ça ?
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