Souris chérie ... La vis nous sourit !

- « Tu triches pas hein … C'est pas parce que je t'ai mal mis le bandeau que tu dois regarder ! Je joue le jeu alors fais pareil sale tricheuse va ! »


Mercredi soir, nous étions assis sur le matelas qui me servait de lit, pausé au milieu de mon salon en ruines. Je rénovais actuellement avec ma colocataire Norah E. J. Delaney une ancienne manufacture qui allait devenir d'ici la fin de l'été un superbe loft ! Très spacieux, cet endroit nous avait tous les deux fascinés et bien que nous ne nous connaissions ni d'Eve ni d'Adam, nous avions choisi de nous mettre en colocation lorsque nous avons apprit par le plus grand des hasards que nous étudions tous deux dans la même université à savoir Berkeley. Nous avions commencé les travaux fin Mai lorsque le contrat de vente fut enfin signé et nous avions pour le moment dans ce qui allait devenir notre loft : une splendide cuisine, une salle de bain taille XXL, une chambre à moitié faite et un salon en chantier. Il ne nous restait qu'une chambre ou deux, un dressing, une autre salle de bain, notre petit salon-bibliothèque, notre salle d'étude, notre piscine … Et ce pour la fin de l'été. Nous avions pour le moment tout fait seuls ou presque mais je crois qu'il allait falloir rapidement se rendre à l'évidence : nous ne pouvions pas faire tout ça à deux – ou cinq quand quelques amis nous prêtaient main forte – en trois mois. Il fallait encore que j'en discute mais il allait sérieusement falloir que l'on songe à engager des personnes et par « personnes » j'entends des professionnels capables de nous aider rapidement dans notre tâche sans quoi nous ne finirons jamais à temps pour la reprise des cours. Alors que nous avions passé plusieurs semaines à manger des sandwich et à se laver avec un gant et une bassine d'eau chaude, nous avions aujourd'hui la possibilité de manger et nous laver comme des êtres humains normaux, restait cependant un détail, une petite ombre au tableau : nous n'avions pas de chambre donc pas de lit confortable dans lequel faire une grasse-matinée parait agréable. Qui dit « pas de chambre à coucher » dit également « pas d'intimité » et c'était précisément ce qui manquait le plus ces jours-ci. Bien que Norah & moi passions de plus en plus de temps dans les QG respectifs de nos confréries, lorsque nous invitions du monde, nous aurions bien aimé pouvoir s'éclipser dans nos chambres sans avoir à demander à l'autre d'aller voir un film au cinéma.


Pour moi les choses étaient devenues un peu délicates lorsque Cara a commencé à venir passé pas mal de temps à la maison. D'abord après des nuits alcoolisées – un peu trop peut-être – ce qui à coup sûr réveillait Norah et me valait le lendemain une ou deux remarques mais également depuis une ou semaines pour des après-midi ou soirées tous les deux. Il devenait donc impératif que ma chambre soit terminée. Nous avions convenus avec Norah qu'une fois ma chambre faite, nous dormirions tous les deux à l'intérieur sauf lorsque nous avions de la visite, dans ce cas, celui qui avait un invité s'y éclipserait jusqu'à ce que nos deux chambres soient faites. Depuis que je sortais avec Caramelle il devenait donc urgent que cette chambre soit finie ! Je n'aimais pas trop savoir que même sans que rien de gênant puisse se passer, Norah ai la possibilité de faire irruption dans la pièce et de casser la dynamique en cours, ce qui vous vous en doutez était arrivé plus d'une fois. Nous savions tous les deux qu'en commençant pas la cuisine & la salle de bain c'était le risque à prendre mais nous avions convenus que le minimum était de pouvoir manger et se laver – sans quoi Cara n'aurait certainement jamais voulu de moi ^^ -, le reste pouvait attendre et s'il fallait patienter 3 semaines de plus pour une chambre, ce n'était pas la fin du monde, nous nous en remettrions !


Ce soir nous n'avions pas de soucis à nous faire, Norah ne rentrerait pas, ni dans 5 minutes ni dans 2heures. Elle avait une soirée chez des amis et dormait sur place, je l'y avais convaincu. Non pas que je veuille la foutre dehors mais la voir débarquer à 4heures du matin éméchée de m'aurait clairement pas ravi et j'imaginais également d'ici la tête de Cara. Nous avions donc le loft pour nous tous seuls et ce jusqu'à demain matin.
Bien que notre « histoire » soit assez récente, elle me faisait un bien fou. Caramelle était une fille pleine d'énergie, toujours le sourire aux lèvres, toujours une idée farfelue dans la tête, ce petit sourire enfantin comme gravé sur son visage … Elle était d'une beauté fascinante mais contrairement à certaines – qui pouvaient se rhabiller devant elle – n'en faisait pas des tonnes. Elle était selon moi très naturelle et spontanée, toujours bien habillée mais jamais dans l'excès, ses cheveux couleur des blé un peu en bataille auraient fait bondir ma mère pour qui, la chevelure est l'atout principale d'une femme mais pour moi c'était le cas, j'aimais cet air faussement négligé que lui donnait sa coiffure. Très grande, très fine également, elle n'avait pas beaucoup de formes – moi qui en ai eut l'habitude avec Holla – mais je n'en étais en aucune façon gêné. Elle n'était pas le genre de fille à faire des remarques sur ses seins plus petits que la moyenne et préférait mettre en valeur ses jambes aussi longues que fines – non pour m'en déplaire - plutôt qu'une poitrine proéminente. Si tout avait commencé je l'avoue par une partie de jambe en l'air après une soirée fort arrosée, je crois que c'est le déroulement de cette soirée très originale qui nous a décidée à passer plus de temps ensemble pour finalement sortir ensemble. Cette fille était ma bouffée d'air frai, certainement ma plus belle rencontre depuis mon arrivée à Berkeley. Nous rigolions beaucoup tous les deux et j'avais, depuis plus d'un an oublié ce que rire voulait dire, comment même on pouvait y parvenir … Si lors de notre rencontre, Cara m'a trouvé plutôt crispé et timide, c'est bien pour lui prouver qu'elle avait tord que j'ai commencé à me lâcher et à vraiment me révéler à elle, sous mon vrai jour, elle en a fait de même. Je crois que notre force c'est ce sentiment de réalité qui nous englobe quand nous sommes tous les deux. Si je ne veux pas la voir parce que je préfère dormir je n'ai qu'à lui dire, si elle ne veut pas que je la rejoigne alors qu'elle est entrain de faire les boutiques parce qu'elle déteste qu'un homme commente ses choix vestimentaires, elle n'a qu'à me le dire également.


Ce soir nous étions trop occupés pour nous dire ce que nous n'aimions & ne voulions pas, nous avions chacun préparé de notre côté un repas pour une personne que nous faisions gouté à l'autre, assis sur mon matelas, au milieu du salon les yeux bandés. Nous devions essayé de faire manger à l'autre ce que nous avions préparé et l'autre devait deviné de quel plat il s'agissait. Nous en étions au dessert et c'était clairement le moment le plus amusant du repas. Sans pouvoir ni me voir ni la voir, j'étais convaincu que nous avions les têtes toutes barbouillées, pleines de nourritures, je lui avais mis par mégarde de la sauce dans les cheveux ce qui m'avait valu une petite réflexion et elle s'était vengée en me mettant des miettes de pain dans les narines & oreilles. Je n'avais pas bien mis le bandeau sur les yeux de Cara & vérifiait donc toutes les 5 minutes qu'elle n'était pas entrain de tricher ni pour voir le contenu de mon assiette ni pour viser certaines parties de mon visage avec de la nourriture car il fallait bien l'avouer, nous avions plus de notre repas sur le visage et les vêtements que dans le gosier. Ce soir était la démonstration parfaite du type de couple que nous formions tous les deux soit deux tarés rassemblés qui passent leur temps ensemble à ne faire que s'amuser comme deux gamins dans une cour de récréation oui mais voilà …. S'amuser, c'est tellement plaisant !