Il était précisément 19 heures et Arsène venait d’envoyer un message à un fidèle ami : Junji. « Comment va ? Bon dis, j’espère que t’as rien à faire ce soir, j’voudrais te parler… Rendez-vous à l’endroit habituel dans une heure. J’compte sur toi. » Mais où était-il en ce moment même ? Et bien à « l’endroit habituel » en question… Mais il souhaitait seulement s’y rendre en premier de façon à prendre un peu l’air et à sa libérer de toute sa rage avant que son ami n’arrive pour le rejoindre. C’était dur… Et surtout, il ne se sentait en aucun cas prêt à adresser la parole à qui que ce soit sans fondre en larmes. Non ! Il était un homme oui ou merde ? rah… c’est dans ces moments là que l’on se rend compte à quel point cette phrase était stupide… Pourquoi un Homme n’aurait-il pas le droit de pleurer ? La fierté ? Mais quelle fierté ? Il avait tout perdu, pourquoi devrait-il maintenir un quelconque amour propre ? Un vent frais soufflait sur la plage, et le dandy quitta son rocher pour s’approcher de la mer agitée. Pieds nus, il se pencha pour remonter le bas de son jean au niveau de ses genoux et commença à marcher dans l’eau salée et encore froide pour la saison. Il n’y avait personne… juste lui et sa peine démesurée. Vêtu simplement, il n’avait ajouté à sa tenue habituelle qu’une veste en jean et un foulard. Cela faisait plusieurs jours qu’il restait dans la chambre de Roxanne sans bouger, à se noyer dans la fumée de ses propres cigarettes. Elle était partie… Comment ça partie ? Mais oui ! Partie ! Loin ! Et plus jamais il n’allait la revoir ! Tout ça pour… Un stupide baiser. Et cette Kendall, il n’avait pas intérêt à l’attraper ou elle allait passer un sale quart d’heure, sans doute le dernier de sa vie d’ailleurs. Enfonçant le bout de ses pieds dans le sable imbibé, Arsène plissa ses paupières jusqu’à ne plus rien voir. Cela faisait deux jours qu’il n’avait pas dormis, ni bu et ni mangé d’ailleurs. Juste fumé. Ouai… Il n’y avait rien de bien malin à ça. Lui qui n’avait l’habitude que de se tirer une clope par semaine.

Cela devait bien faire ¾ d’heures qu’il chancelait dans le sable, à éviter les remous des vagues qui semblaient jouer au même rythme que lui. Junji n’allait pas tarder… Ah, cet endroit était bardé de souvenir maintenant. Depuis la première fois qu’il eut rencontré le jeune homme. Des confidences… Des disputes aussi. Oui, il se souvenait bien de ce coup de poing reçu dans la mâchoire et tout ça pourquoi ? Pour une histoire de polygamie ? C’était faux ! Mais comment aurait-il pu le savoir… Arsène avait cette mauvaise habitude de ne jamais rien dire à personne, ‘fallait toujours deviné où il avait mal sinon on ne le savait pas. Cameron… Son amie d’enfance. Il était compréhensible que l’étudiant IOTA se soit senti un peu trahit lorsqu’il vit la belle brune au bras du Franco-russe. Mais savait-il toute l’histoire. Cela faisait des années qu’elle était amoureuse de son Parisien préféré. Elle l’aimait en secret et lui aussi l’avait profondément aimé jusqu’au Lycée. Après ça, il réussit à l’oublier… Au moins en ce sens. C’était elle qui était venue à sa confrérie, elle qui l’avait embrassé puis chauffé… Lui n’avait fait que céder. Non, son tord n’était pas là. Là où Arsène s’était conduit en véritable salaud fut en effet le moment où il entama une relation avec Roxanne sans rompre avec mademoiselle Taylor. Oui, là, il abusait. Pour ce qui est de la séduction, encore une fois il n’y était pour rien. La mannequine avait tout mis en œuvre pour le faire craquer en jetant son dévolu sur lui. C’est ce qu’avait rétorquer l’Alpha à l’asiatique après s’être reçu sa belle droite dans la figure. « Si tu l’avait intéressé, tu n’aurais pas pu lui résister. » En aucun cas il n’avait voulu faire du mal à sa petite amie, seulement avec les filles… il s’y prenait comme un manche avouons-le xD N’oublions pas que Cameron était sa première maîtresse et Roxanne la seconde… Il n’avait pas assez d’expérience pour que l’on puisse lui reprocher un acte volontaire. Et puis, il n’y était pour rien s’il faisait tomber toutes ces dames comme des mouches… Si ?

Enfin, alors que le petit prince se trouvait assis sur le sable, le bruit d’un moteur se fit entendre parmi celui des oiseaux. Arsène ne bougea pas d’un pouce et ce, jusqu’à ce que son invité ne le rejoigne… « - Hey Arsène ... Je sais pas pourquoi, mais j'ai l'impression qu'il y a un soucis ... » Cette simple phrase obligea l’interpellé à sourire d’un geste nerveux. Comme s’il se moquait de lui-même… Junji déposa ensuite sa main sur son épaule, faisant se tourner le visage pâle du garçon vers lui. Il semblait presque… Inanimé. Ses yeux étaient rouges, comme s’il venait de pleurer mais pas seulement… Comme s’il était resté des heures à fumer de l’opium. En gros, une vraie tête de shooté déprimé.

« T’as un 6ème sens féminin ? » Répondit enfin l’étudiant d’une voix ironique.

Pas besoin d’avoir fait psycho pour remarquer ça… Le principal concerné ravala sa salive. Comment lui dire ? Comment parler sans lâcher par la même occasion toute sa souffrance ? Il tenta le coup, sans arrêter de jouer avec le sable avec ses mains.

« Dis-moi que je n’suis qu’un pauvre type… Dis-le moi, j’me coucherais moins con ce soir…»

Clignant plusieurs fois des paupières il reprit, regardant cette fois son confident droit dans yeux.

« Elle est partie ! Roxanne… Elle est partie avant-hier… Pour de bon. Quand je suis rentré dans la chambre ses valises étaient prêtes, elle avait tout cassé aussi… On a eu une grosse dispute et j’ai… j’ai dis des choses impardonnables. Au lieu de la raisonner j’ai préféré péter un câble, et je lui ais bien fait croire qu’elle n’était qu’une simple putain à mes yeux, que je le l’aimais pas et… Et je l’ais envoyé à coup d’pied au cul dans l’escalier en… En l’insultant encore. »

Sa main droite se crispa sur le jean de son interlocuteur et des larmes lui montèrent aux yeux jusqu’à ce que ces derniers ne deviennent vitreux.

« Putain Junji, je la vois encore s’enfuir avec ses valises… Pourquoi j’ai rien fais ?! Depuis j’arrive plus à faire un pas sans penser à elle, sans espérer qu’elle n’apparaisse devant moi avec son grand sourire. Et tout ça à cause d’une sale… Qui lui a dit que j’avais embrassé Cameron quelques jours avant ! Tu… Elle… Ah Kendall ! Si je la vois… JE LA TUE !! »

Sans même s’en rendre compte, à force de patauger dans la poudre de cailloux, le bandage qui recouvrait la main du dandy s’était pratiquement retiré et surtout, les blessures n’étaient plus protégées… ça ? Oh… il avait simplement explosé un miroir sous le coup de la colère. Baissant son regard, Arsène planqua ce ramassis de mauvais souvenirs en le fourrant sous un pan de sa veste. Il n’arrivait même plus à penser correctement, et lorsqu’il ne regardait plus son ami, il imaginait que c’était elle… A côté de lui…