Après ce que je n’avais vu lors de mon retour à la galerie, j’avais été stupéfaite. Tout laissait à croire que Stephen s’était bien gardé de me dire qu’il avait passé la nuit avec cette blondinette que je ne connaissais pas d’ailleurs. Moi, qui m’était donné tant de mal à me livrer à lui, à lui avouer que sans lui j’étais perdue, qu’il me manquait, que je l’aimais encore et ce pour toujours. Mais à mon retour les voir dans les bras l’un de l’autre avait été tel un coup de poignard. Comment était-il rentré la veille alors qu’il avait la gueule de bois à ma visite ? Ne sachant même plus s’il avait refermé derrière lui, Si, il s’était souvenu qu’il avait verrouillé la porte, enfin après lui avoir dit que je m’étais retrouvée devant une porte close, ce qui semblait le soulager. Mais entre son retour à la galerie et la fermeture de la galerie, qu’avait-il fait ? J’étais presque persuadée qu’il avait couché avec cette ELLE. Cela me dit dans un drôle d’état. Non pas de dépression mais au contraire, colérique et sur les nerfs. Que ce soir j’avais décidé d’aller prendre l’air, de fréquenter des lieux loin de mon monde de bourge, en ayant assez de voir toujours ces mêmes têtes, devant afficher un sourire devant ces grands hommes d’affaires que je côtoyais désormais. Un lieu reculé et où je serais tranquille.
Accoudée au comptoir du bar, descendant quelques bières, la deuxième pour l’instant, venant à peine d’arriver, me voici donc à poser les yeux sur l’écran qui se tenait là face à la clientèle, en hauteur au-dessus du bar. Ce soir un match de football était transmis, jeun qui me passionnait et ce depuis mon plus jeune âge. Tenant de me mettre dans l’ambiance de ce sport avec quelques autres personnes, ici présentes absorbé par les actions de chacune des équipes, qu’une voix se fit entendre à mon intention. Tournant le regard, je vis que ce n‘était autre que Stephen. Levant la bière à mes fines lèvres, je m’adressais ensuite à lui ; j’eus un rictus avant de jeter un simple regard sur lui avant de reporter mon attention sur l’écran devant moi.
« Moi non plus d’ailleurs… Si j'aurais su...»Faisant allusion au fait qu’il aurait préféré rester avec sa blonde au lieu de venir trainer les bars si tôt.
Le barman faisant son travail en le servant, je pensais avoir la paix mais il n’ne fut rien au contraire il reprit la conversation à mon encontre. Il me tendait la perche que toujours tout sourire par la contrariété et le dégout que je me tournais vers lui de trois quart.
« À toi de me le dire ? Comment va ton amie ? Et puis …tu sais quoi ? J’veux pas le savoir ça me regarde pas après tout. »Je levais ma seconde bière à mes lèvres avant d’en recommander une pour la route comme on dit chez nous en France.
« De toute façon je ne compte pas rester, je ne voudrais pas me trouver nez à nez avec ta blondinette ».Je pris mon sac pour en retirer quelques billets de mon portefeuille les déposant sur le comptoir tout en regardant le barman accompagné d’un sourire.
« La prochaine tournée est pour moi »Dis-je tout en jetant un regard à la salle peu peuplée à cette heure-ci mais l’ambiance y avait été bon enfant jusqu’à ce que Stephen y pénètre, sentant mes nerfs en pelote. J’étais venue ici pour me détendre, passer un agréable moment pour chasser cette image du peintre et de cette jeune femme blonde aux allures quelques peu vulgaires, il en va de soi, dans les bras l’un de l’autre. D’ailleurs j’en avais oublié le dossier, mais étant dans le métier maintenant je savais comment procéder même s’il me manquait les noms de ces convives choisis par Stephen.
Je gardais la distance, je tentais de ne pas me laisser aveugler par les souvenirs, mais restais figée sur cette image qui me hantait encore et encore. Certes  nous n’étions plus ensemble mais je lui avais ouvert mon cœur comme jamais, et lui se jetait à tout va dans les bras d’une autre juste après mon départ ? Inimaginable et inconcevable ? Je ne pouvais m’en prendre qu’à moi-même certes, mais tout de même ! Autant passer à autre chose, tourner la page et faire que tout ceci ne soit qu’un mauvais souvenir…Je ne prêtais désormais plus attention à celui qui fit mon fiancé, après tout à quoi bon ? Je jouais la carte de l’indifférence à cet instant, ou seule ma bière était ma préoccupation ainsi que ce match de football.
C’est le cœur serré et l’âme meurtrie que je décidais en cet instant de clôturer cette relation pour laquelle j’avais été prête il y a quelques jours encore à me donner  à deux cent pourcent pour repartir de zéro…Leurre…
 
 

Je venais de payer une tournée générale et j’aimais cette ambiance sportive qui régnait. Même si chacun ici présent n’était pas pour la même équipe, on s’amusait tout autant se chambrant avec joie, et le tout en descendant de la bière ! Chose que nous n’avions pas en France. C’était une particularité que j’aimais ici en Amérique. L’esprit du sport dans une toute autre mentalité n’allant pas à se frapper dessus se voyant tous comme des adversaires, comme pouvaient l’être le PSG face à L’OM. Pathétique !
Absorbée par l’ambiance qui régnait ici, je ne voulus pas passer une mauvaise soirée, voilà pourquoi je m’étais rendue à l’Absinthe Bar. Soupirant et ne prêtant pas grand intérêt au peintre tatoué, l’ignorant quelques peu, je vis qu’il avait toutefois refusé ce verre en mon nom. Tant pis pour lui dans ce cas ! Entre haine et amour, l’écart est minime, un seul pas et tout pouvait basculer, la preuve en était avec Stephen et moi-même. Et puis haïr -bien qu’ici le mot fut fort- était bien plus « facile » qu’aimer, pouvant tourner la page avec plus d’aisance, n’est-ce pas ? C’est ce qu’il me semblait sur l’instant.je vis bien entendu son regard fermé et contrarié ? Oui, il l’était et alors ? Avant qu’il ne prenne une seconde pour répliquer sur mes propos à son encontre concernant également cette blondasse.
« Je n’insinue rien, je constate tout simplement, mais à quoi bon relever ce genre de détail ? Tu es libre de faire ce que bon te semble. Je ne t’en veux, je ne suis ni en colère après toi d’ailleurs. »Je fis une légère moue songeant à mes paroles et à mes ressentis ou je me sentais vraiment idiote ! Un sentiment de mal être m’envahit tout à coup, intérieurement. Le scrutant du coin de l’œil, il descendit son verre à une vitesse affolante. Et bien ! Mourrait-il de soif à ce point-là ? Ou était ce pour avaler les mots lancés à son encontre ? Soupirant, je levais la bière à mes lèvres terminant le fond qu’il me restait avant de m’en reprendre une, celle que j’avais soigneusement offert à toute cette assemblée !
« Attention de ne pas t’étouffer, ce serait dommage pour ta nouvelle amie, bien qu’à la voir on peut facilement juger le genre de nana que c’est. »Un petit instant de réflexion que je repris après avoir détaché mes lèvres du goulot de ma bière.« Je voulais te dire merci. »Dis-je tout en le regardant droit dans les yeux.
« La prochaine fois je saurais qu’il ne faut jamais faire confiance à un homme. La naïveté est vraiment un sentiment pitoyable et d’une bassesse. »Je m’étais livrée à lui, étais prête à revenir avec lui, voilà ce que je comptais lui dire ce fameux matin à la galerie mais tout avait basculé du mauvais côté. Et cette femme, si proche de lui…la situation de la veille ne se rappelant pas ce qu’il avait bien pu faire…Un tout qui en était de trop pour moi. Pourquoi la souffrance devait-elle toujours faire partie de mon existence ? N’avais –je pas le droit à un tant soit peu de bonheur ? Et d’amour ? Je rirais amèrement après m’être adressée à lui, regardant toute cette testostérone autour de moi.
«Les hommes sont juste bons à satisfaire les femmes, sinon on se retrouve bien assez vite encombré. Sur ce, je te souhaite beaucoup de bonheur avec ta mante religieuse. »Bien sûr je faisais référence à cette blonde aux allures vulgaires, qui ne devaient pas s’arrêter à de simples regards. C’était le genre de femme à compléter son tableau de chasse dès que l’occasion le lui permettait. Si c’est ce que Stephen souhaitait, être un homme de passage, un sex-friend par la suite ou que sais-je encore ? C’était lui que cela regardait.
Je m’apprêtais à aller aux toilettes, me levant du haut tabouret ornant le comptoir me tournant un bref instant vers le peintre ténébreux.
« Pour ton vernissage tu n’as plus qu’à me donner la liste de tes invités. Je leur enverrais ensuite les cartons d’invitations, pour le reste tu es bien assez grand. »Je fis deux pas en direction des toilettes avant de me retourner une énième fois, la dernière pensais-je.
« Ne compte pas sur ma présence ce fameux soir, j’aurais d’autres projets. Tu t’en sortiras comme un chef, comme à New-York n'est-ce pas ? »Mains dans les poches de mon pantalon droit de couleur beige, je marchais vers les sanitaires, d’un pas franc et sur, croisant le regard de certains hommes jeunes et moins jeunes, leur rendant leur sourire, avant de pousser la porte des dames…

J’étais dans une vision d’optique autre que la pauvre Emy, des mois passés. J’vais eu cette passe ou plus rien ne semblait compter pour rien, me noyant de par moi-même sous tout ce qui m’arrivait puis cette seconde phase ou je pris sur moi, avançant comme je pus à ma manière avant de m’ouvrir totalement à Stephen, étant prête à revenir vers lui, dans ses bras. Mais ce même jour, je le vis là, dans les bras de cette blonde…Mon monde s’écroula, telle une flèche en plein cœur au moment où je crus que tout allait repartir de nouveau ! Mais ce fut un leurre ! Alors je repris cette fâcheuse manie que j’ai eu d’antan, à me refermer dans cette bulle, reformant ma carapace. Celle qui m’empêchait de souffrir de nouveau, tout en devant faire face aux obstacles de la vie mais également face aux gens. Ce côté rebelle et sur de moi, pouvait en décontenancer plus d’un ou d’une et alors ? Stephen avait été le seul à me faire aller au-delà de cette limite, me libérant peu à peu de ma propre emprise mais il avait également su m’y remettre…sans le vouloir peut-être…
Redevenant cette peste que j’avais pu être, cette jeune femme si certaine dans ses paroles et dans ses actes, que d’un pas sur et décidé je me rendis aux toilettes aux dames, du moins c’est ce que je crus lorsqu’on m’agrippa par le bras. Mes yeux se posèrent d suite sur la personne de Stephen. Ou je fronçais les sourcils…Mais mes traits de vexation sur le visage, s’évanouissaient passant d’un air plus taquin, moquer, voire presque foutiste ! Le ton avait monté d’une octave, sous les regards de tous ces clients ici présents ce soir quand un homme vint s’inquiéter de ma situation. Le peintre ne tardant pas à l’expulser de par sa voix, avant de m’adresser de nouveau la parole avant de retourner au bar.
Pendant ce temps je fus encercler de ces jeunes gens, de sexe masculin bien entendu, avant de les rassurer que tout allait bien. Puis soupirant et leur lançant un sourire je revins vers le peintre tatoué, ne prenant pas de gant. Autant jouer dans la même cour non ?
« La prochaine fois, ne prends pas la peine de venir m’accoster. Je ne t’ai rien demandé. Comment ai-je pu être aussi stupide de croire à des choses qui désormais sont loin derrière nous. »Je m’approchais de lui, tout près avant de le regarder intensément dans un éclat de voix, similaire à un murmure afin de bien me faire comprendre ! Tournée de trois quart vers sa personne imposante.
«Non. Pourquoi j’aurais dû rester à vous voir vous envoyer en l’air ? Trouve quelqu’un d’autre. Je ne suis pas faite pour tenir la chandelle, je vaux bien mieux que ça. Et cesse de te justifier ou que sais-je encore, je m’en fiche et si tu n’as rien à te reprocher pourquoi tenter de m’expliquer quoi que ce soit ? Et pour ta gouverne je ne fais plus tourner l’autre en rond comme tu dis si bien, puisque tu as su mettre un frein à toute cette histoire au moment même où je m’apprêtais… »Je ne terminais pas ma phrase. À quoi bon d’ailleurs ? Et puis toujours ce rictus je finis ma bière en quelques gorgées faisant une pause entre deux toute de même avant de bien rétorquer à ses propos. Reposant la bouteille de verre sur le comptoir du bar, où Stephen avait toute mon intention je repris.
«T’as tout de même fini par avouer que tout était de ma faute. T’es pathétique au fond, tu le sais ? Peut-être que les choses devaient en arriver là pour mieux se séparer.il faut parfois toucher le fond pour mieux remonter ? C’est ce que je fais depuis ce fameux jour à la galerie où je t’ai vu avec ta pétasse de bas étage. Maintenant tu m’excuses mais j’ai d’autres chats à fouetter et puis tu libres de la taper ou tu veux, elle ne demande que ça… »Finis je par lui murmurer à l’oreille avant de reprendre, sur un ton des plus normal.
« Suis-je bête ? J’avais oublié que tu n’avais pas attendu jusqu’à ce soir pour te l’envoyer. Montre lui ton côté sauvage et brutal, j’suis sur qu’elle va adorer ! »Sur ce, je repris ma veste et pris la direction de la sortie après un petit moment à converser avec deux, trois hommes. J’avais tout de même été me rafraîchir cette fois ci en me rendant aux toilettes.
J’étais sur le trottoir du bar, où l’on m’offrait t une cigarette que j’acceptais. Un homme la trentaine, bien habillé, semblant être classe et des plus polis…sans prêter attention à mon ex-fiancé.

J’y étais allée fort certes, mais de le voir l’autre jour avec cette fille qui avait l’air de sortir d’un film où elle tenait le mauvais rôle, celui de la jeune femme totalement écervelée et facile…que je me sentis entrer dans une colère noire ! Des jours étaient passés mais pourtant la fureur qui m’avait gagné était toujours belle et bien présente ! Mon sang n’avait cessé de bouillir en mes veines depuis cette fameuse matinée. Je n ‘avais jamais été aussi méchante que ce soir, mais j’avais été blessé dans mon amour propre. Comment avait-il pu être ainsi, si proche d’une autre femme alors que je venais de lui ouvrir mon cœur ? M’étais-je si mal exprimée ? Non il avait bien compris comme j’avais bien compris ces dires à montour.il ne reviendrait vivre avec moi, nous irions doucement, voire si nous pouvions recoller les morceaux, mais j’avais perdu de cette confiance en lui et ce n’’était de la faute que d’une seule personne. Moi ! À l’avoir tant écarté de ma vie qu’il avait fini par se lasser. Ou plutôt désespérait-il de ne jamais me voir revenir ? En colère surtout après moi-même d’avoir été si stupide et peut-être si longue à prendre conscience de la situation, que de détenir le rôle de la méchante était une façon de moins souffrir ? Certains pensaient qu’ils valaient mieux quitter que d’être quitté, que cela apaisait la souffrance, que l’on avait moins mal…Mais au final je me sentais perdante… Sans oublier ce fameux blocage qui malgré tout s’est dissipé en majeure partie après mes aveux auprès du peintre ce matin-là…Voilà pourquoi j’vais voulu prendre l’air pour revenir le lui avouer sans plus tarder…Le cœur serré mais toujours aussi fière , mon orgueil touché, que je ne me démontais pas face au beau peintre devant toute cette testostérone...enragerait-il comme je l’avais été ?
Commençant à discuter avec cet homme BCBG, me voici donc surprise quand soudain une tornade s’abattue sur cet homme qui me tenait compagnie le temps d’un instant. Stephen Winston-Carter venait de se montrer plus conquérant que jamais mais aussi plus idiot ! Aussitôt je vins à m’inquiéter de l’état de santé de Gaylor –se prénommait-il ainsi donc- voulant m’agenouillée mais je fus vite coupée dans mon élan par le peintre ! Fronçant les sourcils à son encontre, ne tolérant pas ce genre d’attitude bête et enfantin.
« Non mais ça ne va pas, qu’est ce qu…. »Je fus interrompue dans mes propos par un baiser des plus torrides ! Je crus fondre littéralement. Cela faisait combien de temps qu’il n’avait pas été aussi persuasif dans sa façon d’être –un côté de sa personnalité que j’adirais chez lui, à m’en faire trembler d’émoi- mais je revins bien vite à cette dure réalité lorsque je sentis ce mordillement avant qu’il ne me lâche. Une main portée à mes lèvres, les oppressant pour ne plus sentir cette douleur quand j’eus ce gout de sang dans la bouche. Choquée et interdite, je regardais Stephen qui me débitait un tas de choses …blessantes, comme celle que j’avais prononcées un peu plus tôt…Avant de le voir s’éclipser dans la pénombre et de m’apercevoir que Gaylor s’était relevé malgré tout. S’en était de trop. Ne pas être avec lui comme l’être m’était difficile qu’il était inconcevable de ne plus voir le moindre contact avec lui. Fulminante et lançant un regard au jeune homme à mes côtés, d’un pas précipité je me mis devant le tatoué et sa berline qu’il s’apprêtait à ouvrir.
« Il te prend quoi au juste ?! T’étais obligé de frapper ce pauvre garçon ?! Il ne t’a rien fait à ce que je sache ! Tu devrais apprendre à contrôler tes pulsions ! Et la prochaine fois que tu me touches je ne resterais pas de marbre, crois-moi ! Je pourrais culpabiliser de me dire que c’est par ma faute que tu es ainsi, mais au final… »Dis-je avec un rictus
« Tu as toujours été ainsi. T’as ça dans le sang, ce côté démonique à tout vouloir détruire sur ton passage quand Monsieur n’est pas content, comme maintenant d’ailleurs. Je croyais te connaitre, mais j’me rends compte que non. »Je le toisais sans plus un mot, toujours dressée devant lui, comme perçant ses prunelles avant de le percuter d’un coup d’épaule et lâchant ses quelques mots mais avec une certaine douceur ou plutôt une certaine lassitude, sur un ton de désolation.
« Vas la retrouver… »
Sur ce, je repris le chemin inverse pour rejoindre cet homme, si toutefois il était encore présent sur ce trottoir face à l’Absinthe Bar.