Sloan était incroyablement beau, ou du moins il avait un charme très particulier. Cette petite étincelle au fond des yeux qui ne laissait personne indifférent. Il avait également ce timbre de voix hypnotisant, grave comme un murmure, un refrain entêtant. Je ne parvenais pas à détacher mon regard du sien, le joint se consumait entre ses lèvres tandis qu’il prenait littéralement son pied à chaque bouffée, c’était l’oxygène qui de nouveau emplissait ses poumons. Le zombie qu’il était quelques minutes plus tôt semblait s’être évaporé, Sloan était redevenu lui même pour mon plus grand bonheur. De nouveau, j’avais droit à ses sarcasmes, son ironie bien maitrisée, et puis son sourire. Ce sourire mi-angélique, mi-démoniaque, celui là même qui dit :  « essaye autant que tu le veux, tu ne me cerneras jamais ». Ce sourire sincère, vrai qui m’était entièrement destiné, je devais être une sacrée privilégiée parce qu’il était très rare de voir Blackburn sourire. Sloan c’était le genre de type infréquentable et qui ne s’en cachait même pas, du soir au matin il déambulait dans le campus à la recherche de son âme, de son coeur ou de quelque chose dans ce genre. Il pensait que la drogue était la solution à ses problèmes, la clé du bonheur, d’un monde plus simple; sauf que bien sur, les choses ne fonctionnaient pas ainsi. Sloan pouvait devenir fou sans raisons ou pour un vulgaire détail, de calme il devenait enragé, et toute la haine qu’il contenait en lui s’extériorisait pour le plus grand malheur des personnes aux alentours. J’affectionnais énormément la relation que j’avais avec lui, c’était comme si on se connaissait depuis des années, des siècles. Il y avait cette tension incroyable entre nous, on était attirés l’un par l’autre comme des aimants mais on ne s’entrechoquait jamais. Fuis moi je te suis, suis moi je te fuis. Tout était dans la suggestions, les non-dits, les regards en coin et les petites attentions lourdes de sens. Je prenais un malin plaisir à le tester, à examiner ses moindres réactions, faits et gestes et il en faisait de même. Je venais de lui annoncer la nouvelle du siècle et je m’approchais près, trop près de lui. Je pouvais sentir son souffle sur ma peau, j’entendais avec précision chaque inspirations de tabac qu’il aspirait, c’était comme si l’espace d’une seconde nous ne formions plus qu’un. Parfois un regard parle plus fort que les mots, c’était constamment ce qu’il se passait avec Sloan, on communiquait par regards, parfois par sourires quand il était de bonne humeur. Aujourd’hui, il me lançait des piques, il prétendait devoir réfléchir alors qu’il n’en était rien parce qu’être un Gamma l’emplissait de joie. De plus j’espérais qu’il accepte mon indécente proposition, ne serait-ce que pour me faire plaisir, ce qui serait une façon légitime de me remercier. Ma proposition d’ailleurs, n’en est pas vraiment une, c’est plutôt un défi, un challenge, le genre de truc que Blackburn est incapable de refuser. Partager ma chambre, un enjeu de taille pour l’homme qui est incapable de maitriser ses pulsions, et qui attend que je fasse un pas vers lui depuis des lustres. Mais, je ne tomberais pas dans les filets du nouveau Gamma parce que c’est la base même de notre relation, pousser le vice toujours un peu plus loin, laisser la tentation grandir encore et encore en attendant que l’un craque. « Parce que tu penses que je vais changer pour toi ? Tu te fourre le doigt dans l’oeil mon grand. » lui susurrais-je au creux de l’oreille, nous étions de plus en plus proches, et j’avais l’envie irrépressible de m’accaparer ses lèvres sur le champs. Le distance entre nous diminue à vue d’oeil tandis qu’il affiche un sourire irrésistible à la sauce Blackburn. Je ne sais pas si il joue, si il me manipule ou si il est sincère. Y’a t’il vraiment quelque chose entre nous, une petite flamme aussi infime soit-elle, le début de quelque chose de grand ? Je n’en sais rien pour le moment mais ma tête est bombardée par ces questions qui m’empêchent de réfléchir correctement. A l’entente de sa dernière réplique je sens un frisson me parcourir, Sloan est redevenu lui même et il ne mâche pas ses mots. Sans même prendre un temps de réflexion, j’entre dans son jeu. « Parce que tu as envie de moi d’habitude ? genre maintenant ? » j’affiche un mince sourire tout en caressant sa joue du revers de la main. Une force mystique m’attire vers lui, et pourtant je sais que c’est dangereux, qu’il est dangereux. On va se bruler les ailes, ou seulement moi, mais qu’importe. « Rien ne t’oblige à résister, c’est juste toi et moi. » murmurais-je de la même façon que lui, puis j’attrapais du bout des doigts ce qu’il restait du joint pour le porter à ma bouche. On plaisantait peut être un peu, mais n’empêche que si la drogue avait été son objet de toutes les tentations toute à l’heure; à cet instant c’était résister à ses lèvres qui me demandait un effort colossal. Les rôles s’étaient inversés. « Et puis qui a dit que j’allais prendre ma douche à quelques mètres de toi, si je veux, je la prendrais avec toi, ainsi t’auras tout le temps de m’exposer tes idées tordues. » Je lui lançais un clin d’oeil un brin pervers avant de frôler son visage du bout des lèvres. Je le laissais sur sa fin avant de m’éloigner afin de refaire un joint, nous avions toute l’après-midi devant nous. Toute l’après-midi pour tester nos limites, pour savoir ce qu’il se passerait si l’on décidait de tomber dans les bras l’un de l’autre. Il suffisait d’un sous-sol désert, d’un peu de drogue, et d’une attirance incontrôlable. .