Il s'agit là Mademoiselle Hargrove d'un excellent projet que l'on vous propose. Avouez que vous êtes tentée ! lança l'un des membres de la commission étudiante de l'université à Charlie. Elle avait été convoquée dans un bureau recouvert de velours pourpre du sol au plafond pour s'entendre faire une proposition : celle de co-diriger la mise en place d'une grande soirée au nom des élèves.
Vous ne me pensez pas capable de m'occuper de tout ça seule ? dit-elle, faisant sentir une légère offuscation dans sa voix. Elle avait dans sa vie et plus particulièrement sa vie familiale été reléguée au second plan. Elle était avec son frère, la triplette qui ne convenait pas, qui ne faisait pas l'affaire toute seule et dont la présence de sa frangine Alexie rehaussait apparemment le teint. Toutes ses âneries la faisant passer pour une incapable, surtout qu'elle était autant sinon plus que sa soeur douée en matière de dessin (d'où son cursus scolaire), l'exécrait horriblement. Pourtant, elle était tout à fait à la hauteur. En fait sur de nombreux points elle excellait même plus que n'importe qui d'autre et s'il y avait une chose qu'elle détestait c'était avoir à prouver sa valeur. Parce qu'elle en avait, c'était indéniable et quiconque s'amusait à en douter en faisait sévèrement les frais.
Mais non mais non ce n'est pas la question... Il y eut un silence gêné de la part de l'homme en face de Charlie tandis que cette dernière arquait un sourcil légèrement exaspérée.
Ce que je veux dire, c'est que le travail d'équipe rapporte souvent gros et qu'allier vos nombreuses compétences à celles de Mademoiselle Butcher pourrait être un plus. Butcher ? Charlie fronça les sourcils. C'était qui ça ?
Je suis sûr que vous la connaissez... Elle organise souvent des évènements apparemment, le chancelier m'a dit qu'on la connaissait bien ici à Oxford. La Hargrove eut un petit rire mesquin.
Oui sûrement si vous le dites. Enfin peut-être que revoir sa tête me la remettra. Si vous saviez le nombre de personnes qui s'estimaient connues à Oxford parce qu'on les regardait dans les couloirs. La moitié avait la carrure d'une huître avariée et se pavanait en conséquence. La brune se passa la main nonchalamment dans les cheveux et après un bref regard dans le vide, se leva.
Si c'est tout ce que vous aviez à me dire, sachez que j'en suis, je ne voudrais pas qu'une organisatrice amatrice nous fasse passer une soirée assommante. Sur ce.. Elle tendit la main à son interlocuteur, toute souriante et presque innocente.
Bonne journée, lança-t-elle d'un ton à la fois badin et amusé.
Charlie vagabonda dans les couloirs quelques minutes avant de sortir de l'établissement. Elle mit ses lunettes de soleil sur son nez, sortit une cigarette de son paquet et l'alluma. La voici donc qui allait devoir coopérer avec une personne dont elle ne se souvenait pas. Ou peut-être qu'elle ne la connaissait vraiment pas. Mais la jeune femme ayant une mémoire extrêmement sélective il se pourrait bien qu'elle ait simplement oublié. Elle s'assit sur le capot de sa voiture tout en tirant sur sa clope. Coopérer. Elle soupira. Elle sentait la galère arriver. Avec un peu de chance elle allait se retrouver avec une fille qui la sous-estimait et qui comptait s'imposer. Quoi de plus amusant, une nouvelle bestiole à dresser. Le problème étant que l'anglaise ne pouvait pas se laisser voler la vedette : bientôt il allait y avoir un échange avec une université amérciaine et le chancelier avait été clair. Charlie écrase tout sur son passage, elle prend le trône de reine de berkeley et si l'établissement doit se noyer sous un bain de sang alors qu'elle monterait tranquillement dans son avion retour pour Oxford alors ainsi soit-il. Et cette fête était une sacrée opportunité pour avancer encore un peu dans son plan car avant de se mettre les ricains dans la poche elle devait s'assurer de la fidélité de ses sujets anglais. Si elle s'était déjà faite remarquer de part son caractère, il était clair qu'en temps qu'organisatrice d'une soirée débauche complète, elle allait faire les gros titres. Elle recracha la fumée et jeta par terre le filtre de sa cigarette. Oh non elle n'avait pas besoin de prouver sa valeur et de faire ses preuves mais si certains osaient encore la sous-estimer, on les avait prévenus, elle leur ferait mordre la poussière. D'autant plus s'ils lui faisaient obstacles.
Plus tard dans la journée, elle se rendit dans la grande salle réservée expressément pour la soirée. Ses talons claquaient sur le sol du couloir y menant et ses allures de diva en tailleur ajusté en disaient longs. Sa majesté des glaces allait entrer en piste. Elle poussa alors la porte et balaya l'endroit d'un regard dur. Lorsqu'elle croisa finalement celui de sa désignée coéquipière, elle n'eut aucune réaction. Non elle ne la reconnaissait pas mais elle pouvait parier en mille que l'après-midi avec la jeune blonde allait être très longue.
Contente que tu sois venue. Je ne sais pas trop ce qu’on attend de nous mais, j’espère qu’on arrivera à faire un truc sympa pour cette fameuse fête. T’as des idées ? Charlie haussa les sourcils exaspérés. On aurait au moins pu la prévenir qu'elle allait devoir se taper un moulin à paroles exécrable de part son apparent enthousiasme, très probablement feint mais qu'importe. Le résultat final donnait à Hargrove une sauvage envie de vomir.
Te force pas à être agaçante d'entrée de jeu, lâcha-t-elle. Elle traversa la salle en direction de Miss Butcher et posa son sac sur une chaise juste à côté.
J'espère que t'as pas prévu quoi que ce soit qui ressemble de près ou de loin à des ballons, des costumes ou autre thème stupide ? demanda-t-elle de son habituel ton cassant tout en cherchant dans son sac son précieux téléphone portable. Elle n'avait pas l'intention d'y aller dans la douceur, quand on entrait dans le domaine de l'organisation et de la décision, alors là il n'y avait plus de cadeau à se faire. Charlie tourna la tête vers la salle, une main sur la hanche. Pour elle il s'agissait de transformer cette soirée en véritable orgie.
Ce qu'il faudrait c'est faire de cette endroit un de ces night club ultra sélect où chacun se débauche à l'envie. Elle se tourna finalement vers Kathleen.
Cette soirée doit rester mémorable, et elle ne le restera que si elle est dans l'air du temps. Armée de ses talons aiguilles, elle arpenta la salle telle une conquérante.
Là, au centre un bar. Autour des tables privés, quelques poufs. Le must ce sont les alcôves et les barres de pôle dance. Il faudrait une ambiance tamisée et intime qui incite à vraiment lâcher prise. Bien sûr il faut de la bonne musique. La jeune femme parlait sans vraiment attendre de réponses de sa coéquipière, d'ailleurs c'était à se demander si elle n'avait pas quelque peu oublié sa présence.
Tenue correcte mais minimaliste exigée. Pas de pétasses mais de la classe même en micro short. Quand elle eut enfin fini d'énumérer tout ce qu'elle comptait faire, elle retourna vers Kathleen qui n'avait pas sortit un seul mot.
Vu ta tête je me doute que ce n'était pas vraiment ce que tu attendais mais puisque je suis dans un bon jour, je vais te poser la question : qu'avais-tu prévu ? ne t'attardes pas trop non plus sur la réponse parce que je sens qu'elle ne va pas franchement me passionner et j'ai pas que ça à faire, fit-elle en souriant et en tapotant la paume de sa main avec son iphone. Il était clair net et précis qu'elle n'allait rien lâcher à la jeune blonde concernant le déroulement de la soirée car elle voulait que ça ce passe comme elle l'avait décidé. La brune était une directive née et elle n'aimait rien de plus que de voir ses décisions appliquées.
Oh ! dit-elle alors que Kathleen allait parler.
Il va de soit qu'il faudra de grandes vasques remplies de préservatifs un peu partout dans la salle. Les partouzes oui, les mst non, finit-elle d'un air amusé. De toute évidence pour son interlocutrice, ça allait être le pompon mais qu'importe : Charlie savait gérer ce genre de situation et si jamais la blonde ne se pliait pas, elle corserait un peu le jeu pour la dresser pile comme elle le souhaitait. Who's the boss guys.