Il a de ses remarques des fois. Mais autant ne pas relever, au risque qu'il le prenne mal finalement. Ce n'est pas comme si ça m'importait vraiment qu'il prenne mal ou non mes réflexions, mais tout de même, autant éviter le conflit pour ce genre de chose, y'a des choses bien plus amusante sur lesquelles se disputer.
« C'est sûr. »
C'est dingue le genre de personne qu'on peut rencontrer alors qu'on était juste entrain de jouer un peu de piano inocemment dans une salle de musique. D'ailleurs ça ne m'était jamais arrivé de tomber sur quelqu'un ici. D'habitude je me débrouille pour être seule et tranquille. Comme ça je suis libre de faire ce qu'il me plait sans avoir à subir un oeil inquisiteur, ou un jugement sur ce que je fais.
Je joue pour mon plaisir, et ça s'arrête là, je ne veux pas avoir de public.

Mais ça c'est sans compter sur Jonah. Il a fait sa petite démonstration et je crois que je suis amenée à en faire de même sans avoir d'autre choix. Et puis tant que mes mains ne sont pas en contact avec le piano tout va bien. J'ai encore du mal à synchroniser les deux et parfois on a le droit à un résultat chaotique, alors je crois que le chant suffira pour le moment. De plus Jonah à l'air de s'en contenter, et finalement, le choix qu'il émet me plait, et il finit par commencer à jouer du piano pour moi.
Je dois admettre que je suis stressée. Je ne suis pas comme Jonah capable de débarquée dans une salle où il y a déjà quelqu'un et chanter comme si c'était la chose la plus naturelle au monde. Mais finalement je le fais et je finis même par arriver à me détendre un peu.
A la fin de la chanson je baisse les yeux sur mes mains qui reposent sur le piano, et je reste sans rien dire jusqu'à ce que Jonah se décide à faire un commentaire.
Sa remarque me fait sourire, bien que je ne sois pas vraiment à l'aise avec le compliment qu'il m'a fait.
« Tant mieux ça m'évitera de chercher un moyen de la faire partir de mes vêtements. »
Oui je sais j'aurais put trouver mieux à lui répondre, mais sans m'en rendre vraiment compte je viens de lui ouvrir un petite fenêtre sur moi, et c'est assez embarrassant, et gênant pour moi...

En général mes sarcasmes ne font pas si décalés, et les gens comprennent assez bien. Mais peut être que Jonah n'a pas l'habitude d'être avec quelqu'un qui utilise à tout bout de chant ce genre de procéder pour dénigrer un peu plus la vie...
Après avoir débattu sur le fait de savoir si la tomate allait me tâcher, donc à savoir si il fallait que je porte du rouge lors d'une prochaine représentation, ou même sur le fait que peut être que je ne recevrais pas de tomates, car de son point de vue, il n'y avait pas de raison que j'en recoive, il n'oublie pas de relancer sur le fait que je n'ai pas répondu à sa question. Et c'e'st le cas. Pourquoi je ne voulais pas chanter devant lui ?
Parce que c'est mon petit monde. Quand je chante je crée une bulle autour de moi et je n'ai pas envie de la partager avec quelqu'un. Surtout pas avec le premier inconnu poussant la porte de la salle de musique alors que je suis entrain de jouer.
« Ou alors j'investirais dans un ciré. »
Ok c'est bon j'arrête avec mon humour pas drôle.

Mais il n'est pas beaucoup mieux que moi. Effectivement encore une fois je le regarde s'enfoncer alors qu'il insiste pour savoir la réponse à sa question, et puis finalement me dire le contraire.
« Un peu.
C'est pas que je veux pas te répondre. C'est que j'ai pas de réponse. Je ne suis pas habituée à chanter devant qui que se soit, c'est comme ça. »
Cependant ça ne me préparait pas vraiment à la question suivante.
Je n'ai pas vraiment de choses prévues après, d'ailleurs je n'avais pas prévu de passer autant de temps dans la salle de musique.
« Si tu veux. »
Je crois que je ne réalise pas vraiment sur le moment que j'ai dit oui à son invitation...
Malgré tout je commence à me demander s'il ne va pas aller s'imaginer des choses du fait que j'ai accepté son invitation... C'est juste pour un café, après tout.

Je sens mes joues devenir roses, comme d'habitude... Mais ce n'est pas comme si ça me gênait. Sans paraître arrogante, ou même trop fière, ce n'est pas la première fois qu'on me le dit, je sais joué de cet atout pour avoir ce que je veux. Enfin là ça n'a rien à voir...
« Ca dépend. Si y'a que le ciré ça peut donner une touche sexy. »
Oui c'est de la grande répartie... Je le sais. Mais ce n'est pas faux d'ailleurs. Ok avec un trench ça serait certainement mieux. Mais un ciré ça peut tout aussi bien l'affaire. Enfin je n'ai pas envie de faire ce genre du chose, du moins pas pour Jonah, et puis pas dans ce genre de situation. A la rigueur si les gens m'écoute si jamais je fais un concert ce serait pour moi, et pas parce que je ne porte rien sous un ciré que j'aurais mis juste pour ne pas me faire tacher par des tomates.

Mais il n'a pas l'air de voir où je veux en venir. Je ne ressens pas le besoin de chanter devant qui que se soit. Chanter pour me faire plaisir, c'est une chose, mais chanter pour quelqu'un sans est une autre, et jusque là ça me fait plus de stress qu'autre chose... « Je n'ai pas envie d'y être habituée. Chanter pour moi et seulement moi ça me suffit. Pourquoi je voudrais chanter devant d'autres gens ? » D'ailleurs ça ne m'est jamais vraiment venu à l'esprit. « Chanter devant les gens ça veut dire s'ouvrir à eux, partager quelque chose avec eux... Et puis en plus il faut se trouver un minimum talentueux pour le faire.... Je ne le suis pas. »
Voilà... « Et puis le Karaoké c'est bien en soirée pour rigoler... » C'est une activité que je n'arriverais jamais à prendre au sérieux.

Pour continuer dans le genre des choses bizarres comme de chanter devant des autres, enfin là je n'ai chanté que devant une seule personne, mais ce n'est que la première fois pour moi, Jonah m'invite à boire quelque chose. Sans m'en rendre vraiment compte j'accepte la proposition... Il ne semble pas en revenir lui même.« J'ai dit oui non ? » Je lui souris d'un air entendu et hoche la tête quant il propose d'aller à la cafétéria.
Je prends mon sac de par terre et le suis vers la porte de sortie.
Je lui dis merci en lui passant la porte qu'il retient pour moi, et on commence à marcher vers la cafétéria.
« De... ? »
C'est le genre de question qu'on ne se pose pas d'habitude...
« Hum...Ca fait combien de temps que t'es à Berkeley ? »

Oui mais c'est le but de mettre un ciré : ne pas se tâcher ou se mouiller. Pourquoi on parle de ça ? C'est une très bonne question, et je ne suis plus sûre de me souvenir du rapport avec le reste... Ah si ! Si je chantais devant des gens ils m'enverraient sans doute des tomates, donc conclusion il faudrait quelque chose pour me protéger, d'où le ciré. Comment en quelques instants on n'a put partir aussi loin ?
Je me contente d'hocher la tête après sa remarque, mine de rien. J'ai déjà utilisé beaucoup de salive aujourd'hui, et j'ai beaucoup trop parlé.
Enfin ce n'est pas comme si ça allait prendre fin tout de suite, non je dirais même que ce n'est pas le cas, puisque qu'on est toujours sur ce fameux débat, de chanter ou pas chanter. Telle est la question. Shakespeare doit certainement être entrain de se retourné dans sa tombe à l'heure qu'il est pour cette déformation de son be or not to be, mais ce n'est pas grave.

Non visiblement, on arrivera pas à se mettre d'accord. Peut être parce qu'aucun de nous n'écoute vraiment l'autre quant il parle, mais je crois que Jonah n'a pas compris que ça ne me plait vraiment pas de chanter devant quelqu'un, et que je n'en ressens pas le besoin. Je n'ai pas envie de chanter devant d'autre personne, je n'ai pas envie que quelqu'un me juge sur ma performance, sur quelque chose qui me touche. Parce que justement ça me touche ! Comment lui faire comprendre ça ? Je crois qu'il n'y a aucun moyen de le faire. J'aimerais bien couper court à la conversation mais je ne sais pas si il va me laisser le faire.
Je baisse un moment les yeux cherchant quoi lui dire. Et puis finalement...
« Certainement, mais j'ai juste pas envie de chanter devant quelqu'un. »
Voilà, il n'y a rien de plus à rajouter, pas besoin de polémiquer sur le sujet plus longtemps. Si j'avais voulu étaler mes capacités -que je ne considère pas le moins du monde comme un talent- et bien j'aurais peut être été une sigma, et j'aurais pris des cours d'art. Sauf que je suis une GAMMA, et que je suis des cours de langue, et de littérature. Quoi dire de olus ? C'est dans le tempérament de Jonah d'être extraverti, pas dans le miens.

Malgré tout quant il m'invite à boire un café je ne refuse pas. Je ne sais pas trop où ça va nous mener cette histoire, mais pourquoi pas, après tout ça fait maintenant un moment qu'on parle. Est ce que c'est une bonne idée ? Seul le destin nous le dira.
Et alors qu'on se dirige vers la cafétéria, il me demande de quoi je veux qu'on parle. C'est bien la première fois qu'on me pose ce genre de question. Qu'est que l'on est sensé répondre à ça d'ailleurs ?
La première chose qui me vient à l'esprit est : depuis combien de temps il est à Berkeley, rien de bien original il faut l'avouer... Après avoir répondu brièvement - je ne savais pas qu'il était capable de faire ce genre de chose- il me retourne la question.
« Je viens de Chicago, je suis en troisième année aussi. »
Mais je ne lui en dirais pas plus non plus, de toute façon on arrive déjà à la cafétéria.
« Vas y je vais trouver une place, je prendrais un cappucino avec un supplément crème, s'il te plait. »
Je lui souris, et vais m'asseoir vers le fond de la salle près de la baie vitrée.