Mars 2011.

C'est bien lui, j'en suis sûre. J'en mettrai ma main à couper, ce regard, ce sourire sadique que j'affectionnais tant. Comment pourrais-je l'oublier ? C'est avec lui que j'ai passé les pires comme les meilleurs moments de ma vie. Je n'aurai jamais pensé le revoir, surtout que la dernière fois qu'on s'est vu c'était dans un hôpital, à Athènes. Il avait tout simplement pris la fuite, comme un lâche, comme s'il n'y avait jamais rien eu entre nous. Comme si.. Il ne m'avait en fait jamais aimé. Les seules personnes qui ont été là pour moi et le sont toujours, c'est mes parents. Que devrais-je faire ? L'ignorer et continuer de marcher ? Ou aller l'affronter, et lui dire tout ce que je pense de lui une bonne fois pour toute. C'est vrai que je ne suis plus aussi en colère qu'avant, parce que si je l'avais aperçu seulement quelque temps après sa fuite, je l'aurais sûrement tué tellement je lui en voulais. Pour faire un test et voir s'il m'a reconnu ou pas, je fis donc quelques pas devant lui. Rien, il était occupé à surveiller deux enfants, se pourrait-il qu'il en ait déjà ? Mon dieu. Enfin peu importe ça ne me regarde pas du tout. Le fait qu'il fasse comme s'il ne m'avait pas vu, m'avait encore plus énervé. Alors, je suis partie le voir. Je me suis placée juste devant lui, il était assis, alors pour une fois, j'avais beaucoup de hauteur. « Qu'est-ce que tu fais ici ? Comment oses-tu apparaître là devant moi ? Je pensais qu'en venant ici, je n'allais plus te revoir. Pourquoi est-ce que tu as pris la fuite ce jour-là ? En me laissant, alors que tu savais très bien que je souffrais ? » J'avais tellement d'autres choses à lui dire. Mes mains commençaient même à trembloter tellement j'étais submergée par mes émotions, un mélange de haine, tristesse et nostalgie que je ne saurai décrire. Après cela, je crois bien que j'aie vécu la situation la plus gênante de ma vie, en fait, il ne s'agissait pas du tout de mon ex, mais juste de quelqu'un qui lui ressemble énormément. Je me suis alors soudainement calmée, je ne savais plus du tout quoi dire ni quoi faire. Peut-être que je ne devrais même pas répondre et partir en courant ? Avec un peu de chance je ne le reverrai plus jamais. Je n'avais même plus la force de m'échapper tellement je me suis sentie gênée, alors j'ai finis par m'excuser plusieurs fois de suite, il a donc fallu que je lui explique toute mon histoire pour qu'il comprenne. Il m'a même offert un café par la suite et on a pu sympathiser. En fait, en le voyant de plus près et en lui parlant, j’ai finis par me rendre compte qu’il ne lui ressemblait pas tellement physiquement, ni mentalement d’ailleurs. J’ai dû avoir une illusion, tellement mon ex me hantait.

Un an après.

Cela fait maintenant presque un an et demie qu’on se connaît. Tazio, c’est quelqu’un qui compte beaucoup pour moi, heureusement qu’il a toujours su se montrer présent pour m’écouter parler de mes problèmes. J’en fais autant d’ailleurs, il est mon confident, tout comme je suis sa confidente. Il nous arrive souvent de passer des heures à se parler, sans s’ennuyer. J’apprécie sa compagnie, il faut dire qu’il n’y a pas beaucoup de personnes qui connaissent mon passé. Alors comme il sait tout, je ne peux qu’être moi-même avec lui. Le fait qu’il soit à Berkeley aussi est une vraie bénédiction pour moi, on peut se voir plus souvent comme ça. Comme à notre habitude, on s’était mis d’accord pour se retrouver au lounge ce soir. Je n’avais rien de bien important à lui dire, mais ça faisait bien longtemps qu’on ne s’était pas vu, alors j’ai décidé qu’il était impératif qu’on se revoit, pour parler de tout et de rien. Surtout pour avoir de ses nouvelles, il doit sûrement avoir une vie plus passionnante que la mienne. Je me suis mise d’accord avec lui par téléphone sur l’heure de notre rencontre.

Pour l’instant j’étais seule, je venais de finir mes révisions. Il me restait encore deux heures avant mon rendez-vous. Après avoir passé une journée aussi fatigante, je n’avais besoin que d’une chose : le sommeil. Après avoir consulté mes mails, j’ai fini par m’affaler sur le lit de ma chambre. J’étais exténuée, oui parce que passer toute une journée dans la bibliothèque à papoter et à survoler ses cours, ça demande beaucoup d’énergie. Une heure et demie passée dans un autre monde, mon inconscient a finalement décidé de faire sa pause pour laisser place à ma conscience. Mes yeux s’étaient ouvert sans que je ne m’en rende vraiment compte, je me sentais lourde, très lourde. J’avais du mal à me lever, mais j’y suis quand même arrivée. Finalement c’est une mauvaise idée de dormir l’après-midi. Je me dirigeais rapidement vers la salle de bain pour commencer à me préparer. Je pris rapidement une petite douche, parce qu’il faisait chaud. J’allais sûrement arriver en retard . Je m’habillais donc rapidement, un peu de make up, j’arrangeais précipitamment mes cheveux, je pris ensuite mon sac, puis je finis par sortir rapidement de ma chambre un peu paniquée, je ne voulais pas être en retard. Je démarrais alors ma voiture, direction DNA Lounge. Un quart d’heure passée au volant après, je suis enfin arrivée, je garais rapidement ma voiture, et quelques minutes passèrent avant que je ne me retrouve juste en face de l’endroit où avait prévu de se retrouver. Tazio n’était pas encore là, parfait, je ne suis pas en retard. Je finis par prendre place dans l’une des tables libres qu’il y’avait. J’avais hâte de le retrouver.

Assise à l’attendre dans ce coin du lounge, quelques souvenirs avaient subitement resurgi dans ma tête. Je me remémorais tous ces instants qu’on avait passé tous les deux à parler de tout et de rien, à rire, à parler de choses sérieuses. Plus je l’écoutais et plus je me rendais compte à quel point il me ressemblait, c’était en quelque sorte une version de moi-même avec beaucoup plus de testostérone, et j’en étais fière. En fait Tazio est quelqu’un à qui je tiens énormément, et je crois bien que je n’aurais jamais pensé m’attacher à une personne qui m’avait faite penser à Darius, mon ex, auparavant. Seulement, il faut dire qu’il est une exception, et je ne regrette absolument pas l’avoir connu. Je peux me confier à lui sans crainte d’être jugée, mais surtout avec la certitude d’être bien comprise. Il fait de son mieux pour être là quand j’en ai besoin, je ne sais d’ailleurs pas comment ni quand est ce que cette attachement a commencé. Je n’oublierai d'ailleurs jamais notre première rencontre, ni ces deux jeunes enfants qu’il devait surveillait. Ils étaient tellement mignons et adorables, ils me rappelaient mes cousins à Athènes qui me manquent énormément. Tazio n’avait rien à avoir avec mon passé, mais bizarrement à chaque fois que je le voyais, je ne pouvais m’empêcher de me sentir nostalgique. Je crois bien que j’ai besoin de retourner en Grèce pour me ressourcer, mais j’appréhende un peu le fait de retrouver Darius là-bas, je ne sais après tout pas du tout où il est, et ça m’inquiète énormément, parce que je n’ai tout simplement pas envie de le revoir. Enfin, assez parlé de lui, je crois bien que je lui donne bien plus d’importance qu’il ne le faut. Je n’avais pas attendu bien longtemps avant de voir apparaître le jeune homme devant moi, il semblait de bonne humeur. D’ailleurs quand je lui avais parlé au téléphone pour fixer un rendez-vous, il semblait être ravi à l’idée de me revoir. Cela me fait toujours énormément de bien de savoir qu’il y’a quelqu'un qui veut me voir. En plus cette soirée allait sûrement me rendre de bonne humeur, je vais pouvoir papoter et être moi-même. Je pense que ça sera pareil pour lui, je sais surtout qu’il a quelques problèmes avec la gente féminine, je connais presque tout de ses histoires de couple et je suis toujours à l’écoute en cas de besoin, j’aime être au courant de ce qui arrive dans sa vie, et peut-être même l’aider en lui donnant des conseils ou autre si je peux. J’aime tout simplement me sentir utile et être là pour lui quand il en a besoin. Il semblerait d’ailleurs qu’il soit tout comme moi malchanceux lorsqu’il s’agit d’amour, enfin dans mon cas, c’est bien pire.

J’eus droit un petit bisou dans la joue de sa part comme geste de salutation. « Escuse-moi de mon retard. Tu n'as pas attendu trop longtemps j'espère...» Il s’est ensuite installé juste devant moi le sourire aux lèvres. Il semblait vraiment content, j’en étais même venue à me demander s’il ne s’était pas passé quelque chose aujourd’hui au travail. Peut-être qu’il a rencontré une charmante patiente et qu’elle l’a rendu de si bonne humeur ? Je n’en avais aucune idée, de toute façon, il ne me cache absolument rien, donc je finirai bien par savoir. Et puis je souriais de mon côté aussi, parce que j’étais heureuse de le voir dans cet état, je crois bien qu’il est le seul à me faire sourire même quand je n’en ai pas du tout envie. « Non non, ne t’inquiète pas. » Je venais à peine de terminer ma phrase que le jeune homme enchaîna ensuite avec ces quelques paroles qui n’ont fait qu’élargir mon sourire qui était déjà assez large comme ça. « Tu es vraiment magnifique ce soir...» Magnifique ? Je sais qu’il n’est pas vraiment du genre à me complimenter comme ça pour me faire plaisir, il est plutôt franc avec moi, et c’est une qualité que j’apprécie beaucoup chez lui. L’honnêteté est un cadeau très précieux, que seules quelques personnes t’offriront, et Tazio en fait partie. Je ne cesserai jamais de me sentir reconnaissante au hasard pour m’avoir permis de connaître une telle personne. Je me sentais un petit peu gênée, les compliments sur mon physique ont toujours eut cet effet là sur moi, surtout lorsqu’elles sont dites de façon aussi sincère. Je dois avouer que je me suis préparée très rapidement, et que je n’ai même pas eu le temps de bien me contempler sur la glace avant de quitter mon lieu de résidence, mais s’il trouve que je suis magnifique alors tant mieux. « Euh..Merci. Tu es très beau aussi ce soir, et de très bonne humeur ! ça me fait plaisir de te voir sourire comme ça. » Je venais de le complimenter à mon tour, et je le pensais sincèrement. D’ailleurs je ne me montre jamais hypocrite avec lui, il compte beaucoup trop pour ça. Comme il est franc avec moi, je le suis tout autant. Et on peut dire qu’il était à son avantage ce soir, je suis sûre qu’étant un homme, il n’a pas dû perdre beaucoup de temps pour se préparer, surtout qu’il a travaillé jusqu’à 22h, il n’a donc eut droit qu’à quelques minutes pour ça. On avait pas attendu très longtemps avant de voir arriver le serveur prêt à noter ce qu’on allait choisir. Comme on est des habitués et qu'on connaît bien les cocktails proposés ici, je n’ai pas vraiment eu à réfléchir très longtemps. Je n’aime pas prendre de risques et essayer de nouvelles choses, alors je me contenterai de prendre quelque chose de classique. « Un blue lagoon s’il vous plaît. » Je prends toujours ce cocktail, il correspond parfaitement à mes attentes au niveau esthétique et gustatif, alors pourquoi changer mes habitudes. Par contre je n’avais aucune idée de ce que Tazio allait choisir, mais il avait ses habitudes lui aussi. Peut-être qu’il changera qui sait, les gens sont imprévisibles, enfin lui, il l’était positivement de mon point de vue.

La vie, la mort.. Deux contraires auxquels ont est confrontés tous les jours, on adule la vie et on craint la mort, certains d’entre nous prient chaque jour, pour que leur corps s’éteigne le plus tard possible et sans aucune souffrance, mais que connaît-on après tout de la mort ? Comment pouvons-nous savoir s’il existe un quelconque sentiment d’agonie dans le fait de disparaître à jamais de cette planète ? On en sait rien après tout, on ne fait qu’imaginer, supposer, et croire sur parole ce que nos aînés nous narraient à propos de la mort et de l’au-delà. J’ai déjà pu côtoyer la mort de très près, et je peux vous dire que ça n’a absolument rien d’agréable, être dans un hôpital, en réanimation, se sentir abandonnée par celui que l’on aime, se sentir rejetée, trahie et seule, non ça n’a rien d’agréable. A ce moment là, j’ai ouvert les yeux. Moi qui ne suis pas vraiment croyante, je me suis mise à prier, je suis devenue une toute autre Thalia. Plus du tout cette fille naïve, innocente, qui pourrait croire à tout ce qu’on lui dit. Je me sens libre maintenant. Je ne ressens plus toutes ces craintes, je ne suis plus aussi hésitantes face aux choix que je me dois de faire, finalement ce centre de désintoxication et cette overdose était ma thérapie, j’ai pu y trouver des réponses à mes questions les plus enfouies. Je me surprends de jour en jour, je me découvre des qualités et des défauts dont je ne soupçonnais même pas l’existence. Je me connais mieux qu’avant, et je peux faire face à n’importe quel danger, rien ne me fait plus vraiment peur. Enfin si, les démons de mon passé peuvent ressurgir de temps à autres, mais je fais de mon mieux pour ne pas tomber dans le piège. Je vois un peu de Darius dans chaque homme que je rencontre, et j’ai beaucoup de mal à leur faire confiance. Pourtant, avec Tazio, je me laisse aller. Je suis juste moi-même, je me sens très à l’aise en sa compagnie, je peux lui dire tout ce qui me passe par la tête, lui faire part de presque toutes mes pensées sans avoir peur d’être jugée un instant. Il est si accueillant, si souriant, et gentil avec moi. C’est mon seul confident, l’une des rares personnes que je pourrais considérer comme mes vrais amis. Je n’ose même pas imaginer ma vie à Berkeley sans lui, ou ma vie en général sans lui. Je ne crois d’ailleurs pas qu’il soit conscient de l’importance qu’il a pour moi. C’est mieux ainsi d’ailleurs, il en serait effrayé je crois. Quoique non, avec un peu de chance, peut-être qu’il tient à moi tout autant. Je suis aussi sa confidente après tout. « Je n'aurai pas pu m'empêcher d'être de bonne humeur aujourd'hui. Cela fait tellement longtemps qu'on ne s'est plus vu.» Il avait aussi le don de me faire sourire quoiqu’il arrive. Ces paroles m’avaient fait un bien fou, il ne faisait pas si longtemps qu’on ne s’était pas vu en fait. Juste quelques jours je crois, mais c’est vrai que ça m’a semblé être une éternité. « C’est vrai que ça fait longtemps! Te parler m’a beaucoup manqué. » Je tenais à ce qu’il sache que j’étais aussi contente de le revoir. « Pour moi ce sera un Copa Cabana, s'il-vous-plaît » Je n’étais pas du tout surprise par son choix, il prenait assez souvent ce cocktail, même s’il lui arrivait quelque fois de changer un peu. Contrairement à moi, qui suis si prévisible. « Tout à l'heure, j'aimerai qu'on prenne des risques toi et moi. J'ai regardé la carte et le Kamasutra semble être un coktail délicieux. Seulement, il est pour deux personnes. Ca te dit de tenter cela avec moi?» Je me suis spontanément mise à rire après ces paroles. Non pas à cause de son idée, ou à cause du nom du cocktail, mais parce qu’en parcourant le menu, j’avais eu la même idée. Mais je ne sais plus pourquoi, je me suis rétractée et je ne lui ai pas proposé. Je me disais qu’il serait contre, puis j’avais oublié avec tous les noms de cocktails, tous plus bizarres les uns que les autres.

« C’est drôle, parce que je me demandais quel goût ça pourrait avoir ! Donc bien sûr que je tente ça avec toi. Je me dépêcherai de finir mon cocktail pour découvrir celui là. J’ai hâte. » Mon dieu ce que je peux sembler louche à parler comme ça. "Bien sûr que je voudrais tenter un Kamasutra avec toi", haha, qui pourrait croire que c’est un cocktail ? Cette idée me semblait si amusante, que je ne pouvais m’empêcher d’être enthousiaste pour essayer. Ils nous arrivaient d’ailleurs de prendre un cocktail à deux de temps à autre je crois. Je ne m’en souviens plus vraiment, mais je suis sûre qu’on n’a jamais essayé celui là auparavant. D’ailleurs je me demande bien pourquoi ils l’ont appelé de cette façon. Il doit peut-être avoir un effet magique sur les performances sexuelles de la personne qui en boit. Je n’en savais rien du tout et ça ne m’inquiétais pas tant que ça. Faut bien que j’essaie pour savoir. « Alors, dis-moi, que s'est-il passé depuis la dernière fois qu'on s'est vu. Je veux tout savoir...» Je me doutais bien qu’il allait me poser cette question, seulement je ne savais pas vraiment par quoi répondre. Depuis la dernière fois qu’on s’est vu, à part sortir de temps à entre et faire de nouvelles connaissances, et puis concernant mes amourettes, c’était le néant. Il savait déjà que j'étais plus ou moins avec quelqu’un, de toute façon à ce moment là, je me considèrais célibataire. Puis quelques flirts par ci par là, rien de bien spécial. Je préfèrais juste m’amuser, et profiter du moment présent sans trop m’attacher, parce que je savais que ça ne servait à rien, à part à être déçue et blessée par la suite. « Oh tu sais, rien de bien spécial depuis la dernière fois. En fait je crois avoir aperçu quelqu’un qui ressemble énormément à Darius, mais je dois probablement m’être trompée comme avec toi. Bref et toi alors ? Ta vie doit sûrement être plus passionnante que la mienne. » Après quelques minutes à peine, le serveur finit par arriver avec nos commandes, qu’il déposa soigneusement sur notre table. Toute mon attention était malgré tout dirigée vers Tazio.