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don't look back in anger [EVAN]

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MessageSujet: Re: don't look back in anger [EVAN] don't look back in anger [EVAN] - Page 2 EmptyJeu 24 Mar - 0:22

    Cela faisait longtemps qu’Evan ne s’était pas sentie aussi mal, assaillie par les remords, la honte, la culpabilité. D’être une amie aussi déplorable sur laquelle on ne pouvait pas compter, de ne pas savoir quoi dire pour arranger les choses et de sortir des phrases minable qui au lieu de tout arranger ne faisaient que tout empirer. Pourtant, ce n’était pas faute de ne pas essayer de mettre du sien, trop tard, probablement, mais mieux valait tard que jamais, pas vrai ? Sauf que même tard plutôt que jamais ne semblait pas être une réponse suffisante pour Camille, qui ne semblait pas affecté outre-mesure par le fait qu’elle s’en veuille réellement. A quoi d’autre pouvait-elle s’attendre, de toute façon ? Quelles étaient les probabilités qu’ils se retrouvent et reprennent leur amitié comme si de rien n’était ? Minces, pour ne pas dire nulles. Mais ce n’était pas faute d’y mettre du sien. Lentement, un sentiment s’infiltrait insidieusement en elle, un sentiment qui n’avait rien à voir avec la culpabilité ou la tristesse de voir une si belle amitié voler en éclats. C’était un sentiment plus proche de la colère, sans en être réellement. C’était à mi-chemin entre la déception et l’énervement. Attitude typique de la fille qui avait tout à se reprocher, elle cherchait désespérément un moyen de montrer qu’elle n’était pas l’entière responsable de ce désastre et que quelque part, Camille aussi avait un peu de responsabilité. Qu’il ne voulait pas reconnaître, raison pour laquelle lui aussi remettait toute la faute sur elle. C’était une espèce de match de tennis dans le cerveau d’Evan, où elle s’en voulait, mais lui en voulait à lui de lui en vouloir, elle jouait seule à renvoyer la balle des deux côtés. Quoiqu’il en soit, elle trouvait injuste qu’il ne montre même pas un semblant de compassion pour elle. Elle était très consciente du fait que ce qu’il vivait était probablement la pire épreuve que quelqu’un pouvait vivre, et qu’il avait toutes les bonnes raisons du monde de lui en vouloir d’avoir été une amie indigne – le terme même d’amie semblant bien incompatible avec ce qu’elle avait fait, ou n’avait pas fait justement, en réalité – mais elle essayait. Voilà. Peut-être avec un trop grand train de retard mais elle essayait, d’arranger les choses, par ses paroles certes maladroites mais sincères. Lui en revanche semblait se complaire dans sa rancune et même le fait de la voir aussi mal, car c’était visible, n’importe qui aurait remarqué qu’elle était tout sauf joyeuse, ne semblait pas l’atteindre. Il pouvait à juste titre lui en vouloir, elle le comprenait, l’acceptait, l’encourageait presque, mais une petite part au fond d’elle qui tentait de se frayer un chemin ne cessait de dire qu’après tout, si la cause était d’ores et déjà perdue, il ne servait à rien de tenter de faire des efforts. Néanmoins, elle laissa la petite voix de côté, celle-ci ayant déjà été à l’origine de bons nombres de malentendus et autres quiproquos. Sa conscience avait tort. Elle pouvait encore tout arranger. Ou plus exactement elle ne pouvait pas rester ainsi sans rien faire, à se contenter d’être amère vis-à-vis de lui et du fait qu’il semblait peu se soucier de voir leur amitié s’étioler. Il le faisait suffisamment pour eux deux. C’était Camille, son Camille. Il avait beau avoir changé, après toutes ces épreuves, elle savait qu’une petite part de l’ancien Camille était toujours présente, il ne pouvait pas être devenu un monstre de froideur, pas avec elle, alors qu’ils avaient tout partagé pendant des mois et des mois. C’était une perspective inconcevable ; cette amitié valait la peine qu’elle tente par tous les moyens d’arranger la situation, même si cela incluait le fait de ramper à ses genoux en le suppliant et par la même perdre le peu de dignité qu’il lui restait. Elle espérait toutefois ne pas avoir à en arriver à cette extrémité-là.

    Ce qui semblait plutôt mal parti, considérant le fait que plus elle parlait, plus son visage s’assombrissait. Toute la meilleure volonté du monde, ainsi que les excuses les plus sincères possibles, ne semblaient pas être suffisant. C’était comme se battre contre le vent. Inefficace. Il paraissait simplement incapable de lui pardonner son égoïsme. Elle eut envie de crier, de lui crier dessus, plus exactement. De lui dire qu’il était injuste qu’il lui en veuille autant à elle, qu’il avait sa part de responsabilité, qu’elle était passée par des moments difficiles ces derniers temps, probablement pas aussi difficiles que les siens mais qu’il pouvait au moins essayer de faire preuve d’un peu de compassion, ou éventuellement éviter de faire sa tête de mule. Elle aurait bien voulu lui explique par exemple que quelques semaines plus tôt elle avait passé une nuit cauchemardesque à l’hôpital avec William parce que leur fils avait contracté une méningite qui avait failli lui être fatale, ou lui raconter comment elle s’était occupée de lui après cela, ou encore comment elle avait eu le comportement le plus stupide du monde le jour de son anniversaire – qu’il ne lui avait d’ailleurs pas souhaité – lorsque William était venu lui annoncer le décès de son père et qu’en guise de réponse elle s’était contentée d’embrasser Plastic sous ses yeux, brisant ainsi en l’espace de dix secondes trois cœurs. Elle aurait voulu lui dire tout ça, lui dire que ce n’étaient pas des problèmes importants mais qu’à ses yeux, ça l’était, que sa vie n’avait pas été de tout repos, qu’elle avait aussi toutes les raisons du monde de lui en vouloir pour lui avoir caché un événement aussi important et dramatique mais qu’elle était là, en face de lui, à se battre pour recoller les morceaux même si lui ne le voulait pas. Elle était là, présente, suppliante, presque. Et lui semblait s’en moquer éperdument. C’était probablement ça, le plus dur à admettre. Qu’il lui en veuille, elle le comprenait, mais qu’il n’ait même pas l’envie d’arranger les choses était incompréhensible, pas avec toutes leurs aventures.

    Au final, Evan commençait sérieusement à perdre espoir, se demandant s’il servait à quelque chose qu’elle poursuive ses excuses minables, puisque ça semblait être plus une perte de temps qu’autre chose. Pourtant elle ne se tut pas, poursuivant son explication jusqu’au terme, même si l’expression de Camille se durcissait, même s’il semblait n’avoir qu’une seule envie : partir, elle poursuivit, marquant quelques pauses pour reprendre son souffle, mais ne termina qu’une fois qu’elle eut dit absolument tout ce qu’elle pouvait pour sauver leur amitié. Et au final elle fut incapable de se contenir plus longtemps et les larmes se mirent à couler sans même qu’elle ne puisse les contrôler, ajoutant encore à la pagaille de ses sentiments une frustration atroce. Elle ne voulait pas pleurer, ça ne servait à rien, elle n’avait pas envie d’être plus pathétique qu’elle ne l’était et pourtant, elle ne pouvait tout simplement rien faire d’autre. Ces larmes n’avaient pas de but précis, elles n’étaient pas là pour émouvoir son interlocuteur, lui prouver sa sincérité ou quoique ce fut d’autre. Non, elles se contentaient de couler, au fur et à mesure qu’Evan les balayait rageusement. Elle n’était pas cette fille-là, elle ne l’était plus du moins, elle ne pleurait pas dès lors qu’elle ne trouvait pas la solution à un problème. Elle respirait profondément, tentait de réfléchir plus encore et de s’en sortir, forte et digne, comme toujours. Pourtant, contrairement à ce qu’elle aurait pu penser, il sembla qu’elles aient eu un effet imprévisible sur l’humeur du jeune homme qui se calma étrangement. En l’espace de quelques secondes, son visage crispé par la colère et l’amertume se détendit, ses traits également, et durant ces quelques fugitives secondes, elle revit le visage de son ami comme elle l’avait laissé à l’aéroport Charles-de-Gaulle, le jour de son départ. Comme elle aurait aimé le retrouver, à présent, bien que cet espoir ait été réduit à néant rien qu’à voir toute la couleur qui animait son visage.

    Etrangement, il sembla que par un miracle qu’elle-même était bien incapable d’expliquer, si ses paroles n’avaient visiblement eu aucun effet, le fait de la voir craquer semblait lui avoir fait l’effet d’un électrochoc. « Oh, non, non, non, Evan, ne pleure pas… » A l’entendre parler avec ce ton plus doux que celui auquel elle avait eu le droit jusqu’à présent, elle se mit à sourire. Ce n’était pas un grand sourire, mais un timide, comme gênée, ce qui était effectivement le cas. Elle essuya une nouvelle fois ses yeux, et dans un élan de superficialité, prit soin de ne pas faire couler son mascara. « Non, je ne pleure pas, je ne pleure pas, pas du tout même ». Du Evan tout craché. Devant une telle évidence, elle aurait pu admettre que de le voir se comporter ainsi l’affectait et que oui, c’était bel et bien la raison pour laquelle elle pleurait, mais au lieu de cela, elle se contentait de détourner la conversation en riant à moitié. Elle avait pleuré bien plus que de raison au cours des derniers mois, et tentait tant bien que mal –plutôt mal d’ailleurs – d’arrêter de s’apitoyer sur son sort et de redevenir la fille forte, digne, sûre d’elle qu’elle avait toujours été. Malheureusement, ses erreurs s’enchaînaient et sa dignité en avait pris un sacré coup, tout comme sa façade de fille forte qui avait elle aussi volé en éclat, mettant en lumière une fragilité qu’elle considérait faiblesse. Mais elle ne le voulait pas, pas devant lui, et surtout pas qu’il lui reparle par culpabilité. « Moi aussi, j’étais préoccupé par mes problèmes. Je voulais qu’on prenne de mes nouvelles… je voulais que vous vous doutiez que quelque chose n’allait pas. Mais logiquement, je n’ai pas à vous en vouloir, ni à toi, ni aux autres. » Elle aurait voulu répondre mais Camille ne lui en laissa pas le temps, enchaînant aussitôt avec une autre réponse. Maintenant qu’il semblait parti pour tout lui dire, elle pouvait bien le laisser parler. « Mais je ne peux pas m’empêcher d’être triste, d’avoir eu l’impression d’être enfoncé en voyant que personne ne semblait s’en soucier. J’avais vraiment besoin de toi, Evan… C’est uniquement parce que tu comptais tellement pour moi que je t’en ai voulu, parce que je t’ai toujours vue comme la dernière personne au monde qui pourrait me faire du mal… Je n’avais pas le droit de te blâmer sans me mettre dans le même plat. Mais je… je sais pas. Je pensais que tout le monde capterait mon appel à l’aide, je pensais que tu le capterais. Mais c’est moi qui me suis trompé… et je me suis emporté. Je n’ai jamais voulu te contrarier ou te blesser – j’avais juste besoin d’exprimer toute la frustration et la tristesse que ces mois de silence ont créées. » Evan comprit qu’il avait fini, qu’il avait tout dit et tenta de trouver une réponse qui puisse exprimer tous les regrets, la culpabilité qu’elle ressentait mais aussi toute l’affection qu’elle lui portait. Plutôt que d’y réfléchir, elle se contenta d’être spontanée, ce qui était plutôt inhabituel de sa part. « Je voulais pas te faire de mal, Camille, je te le jure, mais… mais… » elle s’interrompit, balbutiant à moitié, incapable de mettre des mots sur ses pensées. « Mais le mal est fait, bien malgré moi. J’aurais voulu que tu m’en parles, en voyant que je ne venais pas vers toi, et je sais que c’est stupide, et que c’est trop demander de la part de la fille qui n’a pas géré, mais j’aurai voulu que tu me le dises, que ça allait pas, que tu te confies à moi comme on le faisait ici, que je sois capable de voir ta détresse même à des milliers de kilomètres de toi. Parce que ça j’en aurais été capable. Mais tu l’as pas fait, et je ne peux pas te blâmer pour ça, tu avais de très bonnes raisons de ne pas le faire, mais ce que j’essaye de dire c’est que tout n’est pas tout blanc ou tout noir, j’ai été égoïste et toi trop fier et ça ne fait pas bon ménage ». Elle l’observa, guettant une réaction, craignant que son visage ne s’assombrisse à nouveau. [b]« Où est passé le Camille que je connaissais ? C’est lui que je veux retrouver, je veux le voir sourire en me racontant ses déboires, rire à mes blagues qui ne font pourtant rire personne, passer du temps avec sans se soucier d’autre chose. J’ai peur de ne pas le retrouver. Camille, tu sais à quel point tu comptes pour moi, j’ai fait une erreur, une erreur lamentable que je regretterai toute ma vie, sérieusement, mais tu peux pas faire une croix sur notre amitié parce que tu souffres. » Elle se tut, n’ayant rien de plus à ajouter. Elle avait l’impression de se répéter sans arrêt mais que pourtant ces mots ne s’imprimaient pas dans le cerveau de son ami. Elle craignait d’avoir été trop loin, même dans ses paroles, mais c’était probablement la seule chose qui pouvait le faire réagir et à cause perdue, mesures désespérées.

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MessageSujet: Re: don't look back in anger [EVAN] don't look back in anger [EVAN] - Page 2 EmptyDim 29 Mai - 15:04



On n’aurait su dire par quel miracle, tout à coup, la glace semblait s’être brisée entre Evan et Camille. Sans aucun doute la prise de conscience de Camille avait-elle était directement générée par la vue de cette larme sur la joue de son amie, mais cela n’expliquait toutefois pas pourquoi, comme ça, les dizaines de kilomètres qui avaient semblé les séparer au cours des dernières minutes semblaient s’être réduits aux quelques dizaines de centimètres qui les séparaient en réalité. Camille, qui jusqu’alors avait eu l’impression de parler à une inconnue, tout au plus une ancienne connaissance, venait de retrouver Evan, son Evan. Même si elle avait agi du début à la fin de leur discussion comme la jeune femme qu’il avait connue, avec peut-être un peu moins de joie de vivre qu’à l’accoutumée, elle avait semblé lointaine et irréelle à un Camille dépassé par les événements et par ses sentiments négatifs. Il avait volontairement enfoui tous les sentiments que lui évoquaient ses souvenirs partagés avec Evan, comme s’il avait eu peur de craquer en trahissant le moindre sentiment positif à son égard. Cela ne lui ressemblait tellement pas, pourtant… Camille n’avait jamais été ce genre de type. Ce genre d’homme qui craignait de laisser transparaître ses sentiments, parce que cela signifiait s’exposer, cela signifiait être faible. Camille n’avait jamais eu peur de ses sentiments, surtout pas lorsque ceux-ci étaient suscités par une amitié forte à laquelle il tenait plus que de raison. Jamais Camille n’aurait agi de la sorte, jamais il n’aurait affiché cet air dur et buté en sachant pertinemment que cela faisait du mal à Evan. Il s’en rendait compte, maintenant qu’il était parvenu à abattre ce mur qu’il avait bâti entre eux. La gêne, les silences lourds et oppressants, ça n’avait jamais été de coutume entre Evan et Camille. Ni les disputes larmoyantes, ou les règlements de compte à moitié réprimés par un Camille aussi désireux de parler qu’une huître fermée. Ces quelques minutes pleines de rancœur et de non-dits avaient été des plus inhabituelles pour Evan et Camille. Le jeune homme n’était pas amateur des discussions dramatiques, et il supposait que ce n’était pas non plus le cas d’Evan – d’autant plus que, des deux, il avait été le plus blessant aujourd'hui, à tel point qu’elle avait fini par craquer et laisser les larmes lui monter aux yeux. D’ordinaire, il faisait en sorte de ne jamais devoir en arriver à cette extrémité. Il entretenait toutes ses relations avec un soin et une attention irréprochables, désireux de garder ses amis et les personnes qu’il aimait aussi proches de lui que possible, car il savait combien les perdre serait douloureux. Si quelqu’un faisait une erreur, en général, Camille tentait de réparer les dégâts calmement, au moyen d’une discussion reposée et sincère. Pas avec des regards durs, des silences entêtés et des phrases glaciales. Ça, c’était réservé aux personnes qui n’en valaient pas, ou plus, la peine. Mais peu importe combien il avait pu en vouloir à Evan pour son silence inhabituel, elle en valait toujours la peine et il n’aurait jamais imaginé pouvoir tourner le dos délibérément à leur amitié. Elle comptait bien trop pour cela, et il était bien trop attachée à sa petite personne pour la laisser partir. S’il avait eu l’impression d’avoir déjà fait le deuil de leur amitié visiblement passée, il lui avait suffi de revoir et d’entendre Evan pour réaliser qu’il ne pourrait jamais l’oublier. Elle avait été celle qui l’avait accueilli à Berkeley, elle avait été sa plus proche amie pendant des mois et des mois, elle avait été là dans les quelques moments difficiles qu’il avait vécus en Californie, et elle avait fini par faire une erreur. Mais c’était injuste de la part de Camille de ne pas pardonner cette erreur, d’autant plus qu’Evan n’était pas la seule fautive et que les circonstances s’étaient assez bien prêtées à un éloignement, étant donnés les événements qui avaient secoué leurs vies respectives. Camille s’était entêté à ne voir que l’aspect des choses où Evan était fautive et désormais totalement absente de sa vie, mais maintenant qu’il avait la jeune femme en larmes face à lui, il réalisait combien il avait été stupide. Il se souvint des quelques détails qu’il avait volontairement enfouis pour ne pas devoir les confronter ; comme, par exemple, le fait qu’il avait coupé tout contact avec ses proches, et que même si Evan avait tenté de le contacter une fois, elle n’aurait eu aucune réponse, tout comme la grande majorité de ses autres amis qui avaient tenté de savoir pourquoi il n’était pas revenu à Berkeley. Ça aussi, ça avait été stupide de la part de Camille. Il aurait dû prévenir ses proches qu’il ne comptait pas revenir à Berkeley, et surtout, il aurait dû leur expliquer pourquoi au lieu de s’enfermer dans un silence borné. Camille savait qu’il avait dû en inquiéter plus d’un en agissant comme il l’avait fait, mais sur le coup, cela ne l’avait pas alerté, au contraire même, il s’était dit que c’était pour le mieux ainsi. Il n’avait pas vu l’intérêt de prévenir qui que ce soit alors que lui était en train de s’effondrer sous le poids de son chagrin et que personne n’était là pour l’épauler – et Nina, la seule personne qui était restée jusqu’au bout avec lui, pour le soutenir jusqu’à l’enterrement de Claire, il l’avait quittée sans une explication, sans rien lui dire à part qu’il n’avait plus la force de continuer. Sans doute Nina avait-elle su exactement pourquoi il avait rompu avec elle, car elle était la seule à avoir été au courant de l’histoire du début à la fin. Mais le comportement de Camille n’en fut pas moins blessant, sûrement après tout ce qu’elle avait fait pour lui témoigner son soutien. Aujourd’hui, Camille n’espérait même plus se faire pardonner un jour par Nina, bien que cette pensée lui fût douloureuse et quasiment insupportable, tant il avait aimé la jeune femme. Ce n’était pas le genre de Camille d’être défaitiste et de baisser les bras, même quand tout semble perdu pour de bon, lorsqu’il s’agit de quelqu’un à qui il tient. Non, Camille était un battant, quelqu’un d’attaché à ses principes, qui trouvait impardonnable de laisser tomber alors qu’il était toujours possible d’arranger un tant soit peu les choses. S’il avait tout ruiné entre Nina et lui, et qu’il devait s’avouer qu’être optimiste au sujet de leur avenir relèverait de la stupidité, ou tout au mieux de la naïveté, il ne pouvait parvenir à la même conclusion en ce qui concernait Evan. Au contraire, elle avait été celle qui avait fait le premier pas, qui, depuis qu’ils s’étaient recroisés, tentait tout pour arranger les choses entre eux. Même si tous deux avaient mal agi, dans des domaines différents mais qu’ils ne pouvaient ignorer, tous deux avaient la volonté, Evan depuis le début, Camille depuis quelques minutes, de se retrouver. De faire le nécessaire pour que leur relation se rétablisse des coups durs qu’elle avait eus à encaisser et qu’elle redémarre de plus belle. Afin qu’ils retrouvent enfin cette amitié qu’ils avaient mise sur pause depuis bien trop longtemps. Camille n’aurait, à l’époque où Evan était sa meilleure amie, la seule et l’unique, jamais pu imaginer qu’un jour, il parviendrait à se passer de cette relation, qui plus est sans motif valable. Mettre cette amitié sur pause comme ils l’avaient fait, ou plutôt, comme il l’avait fait, c’était une idée à l’époque inconcevable pour Camille, qui ne voyait alors plus sa vie sans Evan, celle qui était parvenue à s’installer dans sa vie et y prendre une importance considérable en si peu de temps, devenant en l’espace de quelques semaines une amie, une vraie, sur qui il pouvait toujours compter, avant de devenir la meilleure, la plus proches de toutes. Il lui avait tout dit, tout avoué, tout confié, et avait tout écouté de ce qu’elle lui disait, pendant des mois et des mois. Il lui avait accordé une confiance totale et aveugle, conscient que c’était sans risque parce qu’elle n’en abuserait jamais. Il avait fait de son amitié avec Evan une relation centrale dans sa vie d’étudiant, intense, parfois zébrée de disputes plus ou moins violentes, mais solide comme le roc. D’autant plus solide qu’elle n’avait jamais été perturbée par une quelconque ambiguïté ou autres non-dits. Evan et Camille avaient été amis dès le début et jusqu’à la fin. Ou plutôt, jusqu’à la pause. Une pause qui n’aurait jamais dû avoir lieu et que Camille haïssait, parce qu’elle avait détruit une grande partie de leur relation, qui maintenant se retrouvait bancale et incertaine. Ce n’était plus la même chose, ce n’était plus aussi beau, aussi pur, aussi parfait. C’était le fantôme d’une amitié qui avait été dévastée par l’ignorance, la fierté, la négligence et la rancœur. Des sentiments qui n’auraient pas dû avoir lieu d’être, car ils allaient à l’encontre de tout ce qui avait toujours caractérisé Camille et Evan. Jamais il n’avaient laissé quelque chose entraver leur amitié plus que de raison. Les conflits, ils les avaient toujours réglés rapidement, incapables de s’emmurer longtemps dans leur silence ou leurs reproches. Mais après un silence qui avait duré des mois et des mois, comment réparer les dégâts occasionnés ? Camille se le demandait avec une crainte grandissante. Et si c’était vraiment détruit, si tout était fini, pour de bon ?

Il ne pouvait s’y résoudre. Lui qui, quelques instants plus tôt à peine, avait été peu amène à établir le contact avec Evan, réalisait ce que cela signifierait de ne plus jamais lui parler comme avant, de ne plus jamais rire avec elle, l’écouter parler de ses problèmes, la réconforter, avant de la laisser le réconforter parce que lui aussi aurait eu des problèmes. Et les problèmes, ce n’était pas ce qui avait manqué ces derniers temps. Camille en avait parlé à quelques personnes, oui, mais ce n’était pas comme avec Evan. Il avait toujours fini par se contrôler, avait toujours arrêté de parler de ses problèmes avant que cela ne parte trop loin et qu’il finisse par craquer. Alors qu’à Evan, il aurait tout pu dire sans crainte d’être jugé, sans avoir à éprouver de honte si les larmes venaient à couler au terme d’une conclusion douloureuse ou d’une évocation difficile. Evan avait toujours su quoi faire. Elle avait juste failli à cette habitude une fois, à un mauvais moment, et c’était ce qui avait tant blessé Camille. Mais il avait été stupide de douter de la loyauté et des bons sentiments de son amie, il le réalisait un peu plus à chaque seconde. Il lui aurait suffi de faire signe à Evan pour qu’elle vienne l’aider. Il avait été trop fier, trop orgueilleux pour le faire, et ne pouvait blâmer lui-même pour ce silence trop long qui les avait séparés jusqu’à présent. Pourtant, Evan continuait à s’excuser, à chercher à s’expliquer, même si elle devait être tout aussi consciente que lui, si pas plus, qu’elle n’était pas la seule à blâmer. . « Je voulais pas te faire de mal, Camille, je te le jure, mais… mais… Mais le mal est fait, bien malgré moi. J’aurais voulu que tu m’en parles, en voyant que je ne venais pas vers toi, et je sais que c’est stupide, et que c’est trop demander de la part de la fille qui n’a pas géré, mais j’aurai voulu que tu me le dises, que ça allait pas, que tu te confies à moi comme on le faisait ici, que je sois capable de voir ta détresse même à des milliers de kilomètres de toi. Parce que ça j’en aurais été capable. Mais tu l’as pas fait, et je ne peux pas te blâmer pour ça, tu avais de très bonnes raisons de ne pas le faire, mais ce que j’essaye de dire c’est que tout n’est pas tout blanc ou tout noir, j’ai été égoïste et toi trop fier et ça ne fait pas bon ménage ». Camille ne dit rien. Que pouvait-il répondre à cela ? Evan avait raison, cétait évident. Il s’en voulait d’avoir blâmé Evan de tant de défauts tous plus crapuleux les uns que les autres, des défauts qui ne caractérisaient pourtant pas. Il s’était laissé submerger par sa rancœur et son amertume et le réalisait pleinement, maintenant qu’Evan le confrontait à une réalité qu’il s’était sans doute forcé à ignorer : elle avait toujours été là pour lui, il lui aurait suffi de faire signe pour qu’elle accourre. Camille avait été suffisamment égocentrique pour penser qu’elle devinerait que quelque chose n’irait pas, et il en avait voulu à Evan de ne pas l’avoir fait ; mais il était évident que s’il l’avait appelée à l’aide, ils n’en seraient pas là. « Où est passé le Camille que je connaissais ? C’est lui que je veux retrouver, je veux le voir sourire en me racontant ses déboires, rire à mes blagues qui ne font pourtant rire personne, passer du temps avec sans se soucier d’autre chose. J’ai peur de ne pas le retrouver. Camille, tu sais à quel point tu comptes pour moi, j’ai fait une erreur, une erreur lamentable que je regretterai toute ma vie, sérieusement, mais tu peux pas faire une croix sur notre amitié parce que tu souffres. » C’est vrai, où était-il passé ? Camille avait tant changé… Sa joie de vivre s’était comme évaporée, laissant un homme terrassé par le chagrin et aveuglé par les regrets et l’amertume, tout le contraire de ce qu’il était avant. Camille ferma les yeux, soupirant, non pas d’agacement mais parce qu’il ne savait pas quoi dire. Il avait honte d’être devenu ce qu’il avait toujours méprisé et voulu éviter. « Je n’y arrive pas, Evan… » Il la regarda à nouveau, avant de poursuivre d’une voix à peine plus haute qu’un murmure : « Tous les matins, je me lève en me disant que je ferai un effort pour au moins paraître plus heureux, plus souriant, mais je n’y arrive pas. J’ai passé tant de temps à ruminer ma tristesse seul que maintenant, je n’arrive plus à faire autrement… » Il inspira et se mordit la lèvre, s’exhortant au calme alors qu’il sentait sa gorge se nouer. « Ça fait un mal de chien, Evan… Tu n’imagines même pas. Perdre Claire dans un putain d’accident comme on en voit partout, ça a détruit toute ma vie. J’aimerais sincèrement pouvoir te sourire et y mettre du cœur, mais c’est trop dur. Je passe mes journées à penser à elle sans pouvoir faire autrement. Je n’ai plus envie de rien, je n’arrive plus à faire des efforts. Si je suis revenu ici, c’edst parce que mes parents avaient mal en me voyant dans cet état, et que je ne voulais pas leur infliger plus de souffrance qu’ils n’en avaient déjà. » Il sentit un voile lui obstruer la vue et cligna des yeux, peu désireux de craquer maintenant, mais à son tour, il sentit bientôt une larme solitaire rouler le long de sa joue sans qu’il pût qui faire quoi que ce soit. Il pinça les lèvres, baissant légèrement la tête. « Te perdre m’achèverait pour de bon. Mais en perdant Claire, j’ai perdu toute ma volonté. Je n’ai même pas le cœur de faire le nécessaire pour sauver notre amitié, même si j’ai conscience que c’est la plus grosse erreur de ma vie. J’ai perdu Nina comme ça, je le regrette chaque jour, mais je n’arrive pas à me résoudre à me bouger pour réparer tous les dégâts que j’ai commis. Je… je suis désolé. » Il ne parvenait plus à croiser le regard d’Evan, devinant la déception qu’il venait sans doute de créer en elle en lui proférant des paroles aussi blessantes et défaitistes. « Tu as fait une erreur, mais ce n’est pas ça qui nous perdra. Pour ça, c’est sans doute moi qui serai le seul à blâmer. » Parler comme ça, en partant du principe que la fin de leur amitié était inévitable et inexorable, ne lui ressemblait pas. Camille ne voulait pas perdre Evan, il voulait tout faire pour la garder parmi ses amis, vraiment. Mais il réalisait qu’il n’aurait pas la volonté d’entretenir leur relation comme il se devait, qu’il devrait se forcer pour sortir de la léthargie dans laquelle la mort de Claire l’avait plongé, et il avait le pressentiment qu’il n’y parviendrait pas. Camille se haïssait d’être aussi blessant et égoïste, lui d’ordinaire dévoué et tourné vers les autres. Mais malgré toute l’affection qu’il avait pour Evan, il réalisait que toute sa volonté avait comme disparu, peut-être pour toujours.

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MessageSujet: Re: don't look back in anger [EVAN] don't look back in anger [EVAN] - Page 2 EmptyJeu 2 Juin - 19:28

    Depuis quelques minutes, Evan expérimentait quelque chose de bizarre : passer par toutes les émotions possibles en un court laps de temps. La joie de revoir son ami français, la déception de voir que lui au contraire n’avait pas l’air aussi ravi qu’elle, la tristesse, la culpabilité, l’amertume. La jeune femme se sentait fatiguée de cette rencontre, incapable de savoir sur quel pied danser pour que Camille lui pardonne. Lorsqu’elle s’excusait, cela ne semblait pas être assez et lorsqu’elle versait une simple larme, l’Alpha faisait machine arrière et se calmait. Elle était un peu désarçonnée par cette réaction qu’elle n’attendait plus. L’ancien Camille n’aurait jamais réagi comme ça, et c’était probablement cela qui la déboussolait. Il n’y aurait même pas eu de confrontation de ce genre, quelques paroles et tout serait parti, et ils auraient recommencé comme si de rien n’était. L’ancien Camille ne se serait jamais montré aussi dur et froid avec elle, il lui aurait pardonné d’emblée, rien qu’en la voyant, parce que c’était comme ça que leur amitié fonctionnait. Ils avaient eu des mots plus hauts que l’autre, comme dans toute relation, qu’elle soit amicale ou sentimentale, mais Evan avait l’impression qu’un réel fossé s’était créé entre eux deux, sans qu’il ne soit possible de faire marche arrière. Et pourtant, alors qu’elle ne croyait plus à la possibilité qu’il passe outre cette erreur de la Sigma, un peu de lumière venait de percer à travers les nuages gris et lourds des reproches et de l’incompréhension. Il changeait du tout au tout, presque versatile et elle ne savait vraiment plus quoi penser ou quoi croire. Elle n’avait jamais vécu ce genre de situations. L’amitié avait toujours incroyablement pour elle, parce que, comme le disait si bien le dicton, on ne choisissait pas sa famille mais on choisissait ses amis, et puisqu’elle n’avait pas eu de chance pour la première, elle faisait en sorte de choisir avec précaution ses proches, sa nouvelle famille, celle qu’elle s’était créée. Evan était quelqu’un de loyal, de sincère, en amitié, mais pas seulement. Elle n’avait jamais eu à vivre ce genre de situations où finalement, elle n’était pas la seule en tort mais la seule que l’on blâmait. Et elle comprenait que Camille réagisse comme ça. C’était un moyen de défense et peut-être que si la situation avait été inversée elle aurait fait de même, dressant un mur épais entre eux deux, pour se protéger face à une nouvelle déception. Mais mettre des œillères n’était pas la solution, et puisqu’elle n’était pas à sa place, elle ne pouvait pas réagir de la même façon que lui. Elle n’avait jamais douté de leur amitié, même s’ils étaient à des milliers de kilomètres l’un de l’autre, même s’ils ne se parlaient plus, elle ne l’avait jamais remise en cause, parce qu’elle avait un enfant, ou qu’elle avait failli être renvoyée de Berkeley, ou encore parce qu’Andrea était malade à peine trois semaines plus tôt, ou qu’elle prenait les mauvaises décisions dans sa vie sentimentale. Pas une seule seconde. Il reviendrait quand il reviendrait, ou ne reviendrait pas, mais même si leur relation était en pause, elle aussi finirait par revenir. C’était aussi ça pour elle l’amitié, ne pas douter, malgré les difficultés ou la rancœur. Au final, tout revient à la normale. Et elle réalisait seulement maintenant qu’elle avait peut-être trop idéalisé, que tout ne s’arrangeait pas avec le temps, que des paroles ne peuvent pas tout réparer et que plus que la colère, la déception était peut-être la seule chose qui pouvait briser une amitié, si forte soit-elle. Mais elle aurait préféré, et de loin, ne jamais avoir besoin d’en faire l’amère expérience. Et surtout pas avec Camille, alors qu’ils avaient été aussi proches, aussi soudés, même face aux difficultés. Et face à une situation inconnue, elle ne savait pas comment s’y prendre. Adieu control-freak, bonjour improvisation. On ne sait jamais comment l’on peut réagir lorsque l’on risque de perdre une personne qui nous est chère, et Evan ne faisait pas exception à la règle. Elle ne savait pas quoi dire, elle ne savait pas trouver les bons mots, elle était juste désarmée face à ce Camille si différent de l’ancien, si dur et froid avec elle qu’elle en venait à ne plus le reconnaître. C’était un changement radical, et la Sigma savait que perdre sa petite sœur devait être le moment le plus éprouvant de toute sa vie. Elle n’osait pas imaginer ce que l’on pouvait ressentir en vivant quelque chose comme ça, même si elle avait une vague idée de ce que cela pouvait faire d’avoir l’un des siens dont la vie ne tient qu’à un fil. Alors elle essayait de comprendre, de se mettre à sa place, pour ne pas lui en vouloir de lui dire des mots aussi durs, même si jusqu’à présent, elle n’y parvenait pas vraiment. Et puis durant quelques secondes, elle eut l’impression de le retrouver, de revoir tous les moments qu’ils avaient vécu, les plus amusants, les plus difficiles, et elle se rappela pourquoi elle ne pouvait prendre non pour une réponse. Qu’il le veuille ou non, qu’il l’admette ou non, il avait besoin d’elle, ou en tout cas de quelqu’un qui le connaissait suffisamment bien pour ne pas mettre les deux pieds dans le plat, mais être là malgré tout pour lui. Avec 6 mois de retard, certes, mais apparemment sa situation n’avait pas évolué depuis et si elle n’avait pas été là pour lui avant, elle pouvait l’être maintenant. Même si ce n’était pas facile, même s’ils ne passeraient pas au-dessus en un clin d’œil, même s’ils devraient probablement reconstruire leur amitié en repartant de zéro ou presque, elle était prête à le faire et avait l’impression que lui également. Tout chez lui s’était adouci, son visage, son regard, même ses paroles. Il semblait prendre conscience qu’Evan ne pouvait pas toujours être la plus forte, qu’elle avait ses moments de faiblesse et que de se voir sur le point de perdre l’un de ses meilleurs amis était une perspective assez dure pour justifier qu’elle puisse pleurer. Elle ne pouvait toujours être aussi froide, aussi insensible en apparence, et tout garder pour elle. Et de toute façon elle estimait qu’il la connaissait assez pour savoir que si elle avait adopté cette attitude, il l’aurait démasquée sur le champ. Du moins elle l’espérait. Ce qui la ramène au fait que de son côté elle avait été incapable de faire de même. Et à sa culpabilité. Elle aurait du au moins prendre de ses nouvelles et être capable de voir qu’il n’allait pas bien. Bref, pour résumer, d’un côté comme de l’autre, il y avait eu des erreurs, et leur amitié qui semblait si indestructible en avait pris un sacré coup. Et si jusqu’à présent elle n’avait jamais douté de ça, maintenant elle en venait à croire qu’elle n’était peut-être pas réparable, même si elle préférait ne pas y penser. Mais l’optimisme n’étant pas franchement son point fort, il n’était pas aussi surprenant qu’elle voit le verre à moitié vide plutôt qu’à moitié plein.

    Quand est-ce que les relations s’étaient autant complexifiées ? Lorsqu’ils n’étaient que des enfants, il aurait probablement suffi d’un jouet ou d’un goûter partagé pour que tout redevienne à la normale. A présent, même les mots les plus sincères ne semblaient pas suffisants pour tout réparer. Ou peut-être bien que si. Elle ne savait plus à vrai dire, ni sur quel pied danser, ni sur ce qu’il comptait faire, elle n’était même pas sûre d’avoir réussi à trouver les mots justes, à lui avoir fait oublier pour au moins quelques secondes toute l’amertume qu’il devait probablement ressentir à son égard. Elle ne savait plus rien, en fait. Etait-ce trop demander de vouloir qu’il passe au-dessus ? Qu’ils reprennent là où ils en étaient restés, et faire comme si ces mois sans lui n’avaient jamais existé ? Prétendre que rien n’avait changé et repartir comme avant, et finir par se persuader qu’effectivement rien n’a changé ? Non, ça c’était une mauvaise idée. La rancune ne s’efface pas aussi facilement que cela et elle était bien placée pour le savoir, elle la rancunière, incapable de passer au-dessus des erreurs des êtres. Et puis l’arroseur fut arrosé. Au moins maintenant elle pouvait avoir une vague idée de ce que c’était que de se heurter à un mur de froideur lorsqu’à peine quelques semaines plus tôt tout allait encore bien. Note à elle-même, elle se montrerait moins dure avec tout le monde. Parce que cela faisait vraiment mal de se retrouver dans la position de celui que l’on assaille de reproche, en face de quelqu’un qui ne veut pas faire comme si de rien n’était. « Je n’y arrive pas, Evan… Tous les matins, je me lève en me disant que je ferai un effort pour au moins paraître plus heureux, plus souriant, mais je n’y arrive pas. J’ai passé tant de temps à ruminer ma tristesse seul que maintenant, je n’arrive plus à faire autrement…Ça fait un mal de chien, Evan… Tu n’imagines même pas. Perdre Claire dans un putain d’accident comme on en voit partout, ça a détruit toute ma vie. J’aimerais sincèrement pouvoir te sourire et y mettre du cœur, mais c’est trop dur. Je passe mes journées à penser à elle sans pouvoir faire autrement. Je n’ai plus envie de rien, je n’arrive plus à faire des efforts. Si je suis revenu ici, c’est parce que mes parents avaient mal en me voyant dans cet état, et que je ne voulais pas leur infliger plus de souffrance qu’ils n’en avaient déjà. » Elle comprenait. Elle comprenait parfaitement ce que ça pouvait faire d’avoir tellement mal que l’on finissait par ne plus savoir comment l’on était auparavant. Elle l’avait vécu, elle aussi. Pas dans les mêmes circonstances, pas forcément la même chose, mais elle savait que l’on ne pouvait parfois tout simplement pas reprendre goût à la vie et aux autres. Pas tout de suite en tout cas. Il lui avait fallu deux ans et son arrivée à Berkeley pour qu’elle aille mieux après l’épisode désastreux de la soirée dont elle ne gardait que très peu de souvenirs et qui pourtant avait tout fait basculer. Lui n’avait eu le droit qu’à 6 mois. Evan aurait voulu pouvoir lui dire que ça s’arrangerait, et qu’un matin il se réveillerait et que la douleur ne serait plus là, et qu’il reprendrait sa vie comme si de rien n’était, qu’il retrouverait le sourire et la bonne humeur qui le caractérisaient. Mais elle n’aimait pas mentir. Et rien n’était plus faux. Il pouvait simplement essayer, espérer, même, de pouvoir diminuer la souffrance, de la mettre sur pause de temps en temps mais elle ne cesserait jamais de l’envahir à des moments inattendus. Une musique, une photo, un parfum, et tout recommencerait. Dit comme ça, c’était à se demander si ça valait vraiment la peine de continuer. Et à cette question Evan répondait que oui, ça en valait la peine. Parce qu’on peut recommencer à vivre, un jour ou l’autre. Et aussi que personne ne voudrait qu’on le voie aussi malheureux. Elle vit une larme rouler sur la joue de Camille et fut tentée de le prendre dans ses bras, pour… elle ne savait pas pourquoi. Lui dire qu’elle était là, peut-être. Mais elle ne fit rien de ce genre. « Camille… » elle soupira, prenant une profonde inspiration « j’imagine. Je ne l’ai jamais vécu, mais je l’imagine. Et je sais que la douleur est insupportable et que tu aurais préféré que ce soit toi plutôt qu’elle. Je sais qu’elle te manque chaque jour un peu plus et qu’à force d’être triste tu ne sais même plus ce que c’était avant. Et tu ne sais pas à quel point je suis désolée que tu l’aies perdue. Je voudrais bien pouvoir te dire que tout ira bien, mais ce serait faux. Ce que je peux te dire par contre, c’est que tu n’oublieras pas, mais que tu t’y feras. Que tu le veuilles ou non, tu t’y feras, même si ça doit prendre des années. Ca ne veut pas dire que tu l’oublieras, simplement que t’arriveras à vivre avec ». Ses paroles étaient maladroites, elle en avait conscience, mais là non plus elle ne savait pas vraiment ce qu’elle devait lui dire, comment elle devait le réconforter, pour n’avoir jamais vécu cette situation. Elle voulait simplement qu’il se sente mieux, même si elle n’y était pour rien. « Te perdre m’achèverait pour de bon. Mais en perdant Claire, j’ai perdu toute ma volonté. Je n’ai même pas le cœur de faire le nécessaire pour sauver notre amitié, même si j’ai conscience que c’est la plus grosse erreur de ma vie. J’ai perdu Nina comme ça, je le regrette chaque jour, mais je n’arrive pas à me résoudre à me bouger pour réparer tous les dégâts que j’ai commis. Je… je suis désolé. » Elle sentit la boule se former dans le ventre, ce genre de sensation qui présage de quelque chose d’encore plus mauvais. « Tu as fait une erreur, mais ce n’est pas ça qui nous perdra. Pour ça, c’est sans doute moi qui serai le seul à blâmer. » Dans le mille. Elle pinça ses lèvres pour les empêcher de trembler, mais elle eut du mal à ne pas réellement fondre en larmes. Elle n’était même pas sûre de savoir comment interpréter ses paroles, s’il était bel et bien en train de lui annoncer que leur amitié était définitivement révolue, ou s’il ne pourrait pas le faire et qu’elle devrait elle tout faire pour que ça s’arrange. Et puis quand bien même, pourquoi devrait-elle s’occuper de tout si elle n’était même pas sûre que cela change quelque chose. Quel était l’intérêt de s’investir corps et âme, cœur et âme même, pour réparer une amitié qui avait souffert, si elle n’était même pas certaine que cela marche. Il émanait de Camille un tel défaitisme que c’en était blessant. Il pouvait douter de leur amitié, il pouvait lui reprocher beaucoup de choses, mais de partir du principe que rien ne pourrait changer, c’était quelque chose qu’Evan n’arrivait pas à comprendre. Lorsque l’on veut améliorer quelque chose, on se bat pour ça, on ne laisse pas tout tomber malgré les difficultés. Elle ne savait pas quoi répondre, ni même quel ton adopter, si elle devait se montrer douce ou furieuse, rassurante ou froide. Elle leva les yeux vers lui, avant de détourner le regard. Elle hocha la tête, comme pour dire qu’elle avait compris, mais qu’elle ne cautionnait absolument pas. Incapable de retrouver un ton calme et serein, elle ne put que laisser éclater sa frustration. « Alors c’est tout ? On en reste là, on n’essaie même pas de recoller les morceaux ? On laisse juste tout tomber, et on retrouve chacun nos préoccupations et notre vie comme si de rien n’était ? Ca te convient peut-être, mais moi non. Que tu ailles mal je le conçois, je le comprends, j’en suis terriblement désolée, mais ça ne te donne certainement pas le droit de t’en servir comme prétexte pour ne pas essayer de rattraper les choses. J’ai commis une erreur que je paye cher, et je me sens vraiment mal. Si c’est ce que toi aussi tu as envie de ressentir, alors restons-en là, repartons chacun de notre côté, faisons comme si rien ne s’était passé, on se contentera de s’ignorer et ça ira très bien comme ça et de mon côté j’arrêterai de culpabiliser pour une erreur qui n’est même pas à l’origine de la fin. Si c’est tout ce que ça vaut pour toi, alors qu’il en soit ainsi ». Elle n’avait pu s’empêcher de laisser parler la colère. C’était plus fort qu’elle. Elle trouvait ça injuste qu’il puisse être le seul à avoir son mot à dire, il ne pouvait pas simplement décider du jour au lendemain de la rayer de sa vie sans qu’elle n’ait pu dire ou faire quoi que ce soit pour le changer, n’est-ce pas ? Et bien apparemment si. Elle avait envie de partir, de le laisser là et de retourner jusqu’à chez elle. Mais elle voulait entendre ce qu’il avait à dire, parce que malgré tout, une petite part d’elle ne pouvait s’empêcher d’espérer, de croire que peut-être ses paroles allaient avoir un réel impact sur lui et qu’il ferait marche arrière, comme tout à l’heure. Le spectre d’émotions ne faisait que s’amplifier, et même si la colère la dominait largement, elle avait envie de croire que tout n’était peut-être pas terminé.
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MessageSujet: Re: don't look back in anger [EVAN] don't look back in anger [EVAN] - Page 2 EmptyMar 7 Juin - 2:34



Camille avait pleinement conscience de ce qu’il était en train de faire. Au fur et à mesure qu’il parlait, il réalisait parfaitement qu’il était en train de détruire ce qu’il avait tant chéri, pendant des mois et des mois. Lui, dont la vie avait toujours été dictée et guidée par les relations qu’il avait tissées au fur et à mesure qu’il grandissait et évoluait, était à présent en train d’anéantir ce qu’il y avait de plus important à ses yeux. Camille n’avait jamais eu à se plaindre de sa vie. Elle n’avait sans aucun doute pas été toujours facile, entre des problèmes financiers récurrents et des responsabilités lourdes à porter pour un enfant qui s’étaient rapidement accumulées, au fur et à mesure que la famille s’agrandissait et que ses parents avaient de moins en moins de temps pour tout gérer seuls. Mais Camille n’avait jamais été malheureux. S’il avait plusieurs fois éprouvé un sentiment d’injustice car il avait dû grandir bien plus vite que ce que voulait la règle général, il n’avait toutefois jamais manqué d’amour. Sans doute avait-il manqué d’attention, ça, oui, et il avait ressenti un cruel besoin qu’on lui prouve que lui aussi était important, que lui aussi pouvait parfois être sous les projecteurs. Lorsqu’il entra dans l’adolescence, Camille se plaignit régulièrement de devoir passer sa vie à s’occuper des autres alors que personne ne s’occupait de lui. Mais en réalité, il avait toujours eu une famille aimante. De bons amis. Une vie sentimentale qui n’avait encore jamais croisé le chemin d’un amour dévastateur et briseur de cœurs, sans pour autant être une seule morne et banale routine. Camille avait toujours eu beaucoup de chance. Mais ce n’est pas pour autant qu’il avait négligé l’importance de chacune des relations qu’il avait nouées avec les différentes personnes qui peuplaient sa vie. Camille trouvait important de leur accorder à chacun toute l’attention qu’ils méritaient, et avait toujours mis un point d’honneur à scrupuleusement respecter cette règle qu’il s’était lui-même imposée. Jamais rien n’avait pu s’interposer entre lui et les personnes qu’il aimait. Sans doute la mort de Claire avait –elle changé la donne. Depuis la perte de sa sœur, Camille n’était plus le même homme. Pas seulement parce qu’il était anéanti et rongé par le chagrin – non, si ce n’était que ça, il n’aurait rien eu à se reprocher car chacun pouvait imaginer combien ce devait être douloureux pour lui d’apprendre à gérer cette atroce perte. Mais Camille avait connu des changements à d’autres niveaux que son moral. Il était devenu plus froid, plus taciturne, renfermé sur lui-même. Mais comme si ce n’était pas assez, Camille avait également pris l’habitude de troquer son habituel altruisme et son dévouement à toute épreuve contre un égoïsme et une insensibilité face aux autres dont personne n’aurait pu se douter qu’ils viendraient un jour frapper à la porte du jeune homme et que celui-ci endosserait les deux sentiments avec une facilité et une efficacité effrayants. Adieu le Camille que tout un chacun connaissait et qu’il était difficile de détester, bonjour l’ombre désagréable, égoïste et implacable. Qu’il ait trahi un signe de faiblesse face à la larme d’Evan tenait presque du miracle. Camille n’avait plus pensé aux autres, mis à part sa famille proche qu’il considérait comme une exception à observer dans son comportement, depuis la mort de Claire. Revoir Evan avait remué des souvenirs si joyeux, insouciants et touchants qu’ils en étaient devenus amers et douloureux, maintenant qu’ils appartenaient à une autre réalité désormais révolue. Mais malgré tout, Evan comptait toujours énormément pour Camille et même si celui-ci avait désormais tendance à ne tenir aucun compte des sentiments des autres, trop occupé par sa propre souffrance, il n’avait pu s’empêcher de radicalement changer d’attitude en voyant son ancienne meilleure amie craquer sous la dureté des paroles qu’il avait proférées. Alors, pourquoi n’était-ce pas suffisant pour le convaincre de mettre toute son énergie et sa bonne volonté dans des efforts pour récupérer l’amitié qu’ils semblaient avoir définitivement perdue ? Camille ne voulait pas accepter la perspective de la fin de leur amitié, la fin de toute une histoire qui, un an durant, l’avait empli tous les jours de joie et de reconnaissance. Mais sa mauvaise foi et son absence de volonté l’empêchaient de faire quoi que ce soit de plus concret que regretter pour récupérer Evan. Au plus il l’observait, au plus il scrutait son visage marqué par la tristesse, les regrets et l’appréhension, au plus il réalisait la stupidité de son comportement. Mais c’était comme si les choses avaient été inscrites de cette façon dans le destin. Camille ne pouvait faire autrement. Le deuil de Claire avait fini par occuper un tel espace dans son cœur, dans son attention, dans sa vie entière, qu’il ne pouvait même plus imaginer les choses comme elles auraient dû être si sa petite sœur n’avait pas perdu la vie dans un accident de voiture quelques mois auparavant. Camille ne parvenait plus à se souvenir des réactions qu’il aurait eues s’il en avait été différemment, si Claire était toujours en vie et qu’il s’agissait simplement de se rabibocher avec sa meilleure amie. Un peu de logique en connaissance de cause de leur passé commun lui aurait suffi afin de réaliser qu’il aurait tout de suite mis en œuvre le nécessaire pour que tout soit à nouveau comme avant. Mais Camille était têtu, Camille était borné, Camille pouvait être stupide, quand il s’y mettait. Et surtout, Camille n’était plus le même, tant il était blessé pour des raisons toutes différentes mais reliées entre elles. Camille savait que normalement, il n’aurait pas agi de la sorte, parce qu’il était précisément en train d’adopter le comportement typique des personnes qu’il méprisait. Des personnes trop occupées par leur nombril et leurs petits soucis personnels que pour s’inquiéter du devenir de leurs proches, de ce que ceux-ci peuvent ressentir et de la mesure dans laquelle ils pouvaient être blessés par des propos déplacés ou irréfléchis. Camille se détestait d’être devenu ainsi. Mais il ne pouvait faire autrement, il ne pouvait être différent. Maintenant qu’il était tombé dans cette spirale d’égoïsme et d’indifférence, focalisé sur sa seule souffrance, il réalisait combien c’était facile d’y rester, même si les autres en souffraient. Au moins, lui souffrait un peu moins, car il n’avait plus à faire le moindre effort pour prétendre qu’il avait encore une once de volonté pour se ressaisir et aller de l’avant. En réalité, Camille était quasiment satisfait de cette situation, même si sa conscience lui soufflait constamment que c’était mal et totalement inadapté à sa personne. S’il avait vraiment été blessé par l’indifférence que semblaient avoir manifesté tous ses proches à la mort de Claire, il s’en servait maintenant à son avantage pour avoir une excuse qui lui permettrait de ne plus devoir leur adresser la parole. Camille n’avait plus envie de nouer le moindre contact avec ceux qu’il avait chéris plus que tous les autres, pendant des mois, parfois même pendant des années. Evan faisait partie de ces personnes. Mais Evan échappait pourtant à la règle – car maintenant qu’il l’avait vue, Camille ne pouvait refuser d’admettre qu’elle n’avait en aucun cas agi par mauvaise foi ou par désir de le laisser tomber, loin de là. Lui qui s’était cru immunisé contre les excuses bidon qu’ils s’était déjà attendu à recevoir avant même de mettre le pied en Californie s’était retrouvé démuni devant la tristesse de sa meilleure amie, qui l’avait confronté à cette réalité qu’il fuyait avec un acharnement consternant et stupide : il n’était pas seul. Ses amis étaient encore là, du moins, Evan était encore là, et elle le serait toujours. Camille le savait, elle le lui avait clairement signifié et ce depuis toujours. Jamais il n’avait eu à se plaindre d’un manque de présence de son amie, à l’exception de cette seule et unique fois qui leur avait coûté leur relation entière, mais qui était plus le fruit d’un malentendu, d’un concours de circonstances qui les avaient éloignés que de la volonté d’un des deux amis. Camille ne pouvait rien nier de tout cela – car après tout, Evan restait sa meilleure amie, et si elle l’avait été depuis qu’ils se connaissaient, c’était sûrement pour une bonne raison, en aucun cas parce qu’elle n’était pas à la hauteur. Tout le monde fait des erreurs, et Evan avait été la première à le reconnaître. Camille, lui, laissait entendre par des excuses et des périphrases que lui aussi avait conscience des siennes, mais sa fierté et son entêtement l’empêchaient de le dire à voix haute, de l’admettre clairement comme elle l’avait fait. Au lieu de tout faire pour réparer les dégâts qu’il avait causés, Camille partait du principe que tout était perdu. Cela signifiait qu’il ne faisait pas le moindre effort pour garder l’estime d’Evan, pour faire en sorte qu’elle reste à ses côtés malgré tout ce qui s’était passé. Cela signifiait qu’il préférait partir du principe qu’il n’y avait plus aucune chance que tout redevienne comme avant, plutôt que de continuer à espérer que les choses s’arrangent, même si cela semblait peu probable. L’ancien Camille aurait toujours choisi la solution la plus optimiste, même si l’optimisme en question relevait souvent de la naïveté, voire de l’imbécillité. Mais Camille avait toujours été le premier à accepter avec un grand sourire aux lèvres qu’il était parfois, et même souvent, trop optimiste, mais qu’il ne troquerait ce trait de caractère pour rien au monde parce que c’était ce qui lui permettait de maintenir sa bonne humeur toujours au plus haut niveau. Si à l’époque il avait su contre quoi il aura fini par troquer son légendaire optimisme…

La scène se déroulait exactement à l’opposé de ce qu’on aurait cru voir se dérouler aux retrouvailles des deux amis. Evan n’y était pour rien, car elle était restée la même – le seul à blâmer de ces retrouvailles catastrophiques était Camille, et celui-ci l’avait déjà admis à Evan, acceptant d’endosser la culpabilité de perdre pour de bon leur amitié. Camille, désormais aussi pessimiste et cyniques que les personnes qu’il avait toujours détestées, était persuadé qu’il valait mieux en finir tout de suite, étant donné que, de toute façon, leur amitié n’était plus à sauver . Cela n’en valait pas la peine, non pas parce qu’Evan n’était pas digne des efforts que demanderait ce nouveau rapprochement, mais simplement parce que rien ne parvenait à convaincre Camille de se bouger un peu, ne fût-ce que pour arranger quelque chose pour laquelle il aurait été prêt à mourir l’année passée. Paradoxalement, Camille sentait son cœur se serrer à chaque fois que son regard noisette croisait celui, perdu et triste, d’Evan. Il tenait encore tellement à elle… Impossible de le nier. Elle restait et serait toujours Evan, sa Evan, sa meilleure amie. Peu importe tout ce qu’il pouvait bien faire pour se convaincre du contraire et mettre un point définitif à leur relation, il n’arrêterait jamais de la considérer comme la meilleure et la plus proche amie qu’il ait jamais eue. Renoncer à Evan était déchirant, et se trouver au milieu de ce dilemme, se forcer à la retrouver ou s’en éloigner pour préserver son âme fatiguée des efforts qu’il devait fournir, l’était tout autant. Camille ne savait plus quoi penser, son esprit confus tournait à du cent à l’heure, alors que son attention restait focalisée sur Evan. Elle était loin de se douter de l’ampleur du défaitisme qui s’était emparé de l’esprit de Camille, et c’était tout à son honneur, car après tout, elle avait connu mieux que quiconque l’ancien Camille, celui qui ne baissait jamais les bras, peu importe de quoi il s’agissait. Celui qui se battait jusqu’au bout pour ses convictions et pour ceux qu’il aimait. La cohabitation de l’ancien Camille avec le spectre qu’il était devenu depuis la mort de Claire était inimaginable, et chacun aurait eu tendance à dire qu’entre les deux, ce serait quand même l’ancien qui l’emporterait sur l’autre – mais ce n’était pas le cas. Mais ça, comment Evan pouvait-elle le deviner ? Certes, Camille semblait rongé par le chagrin au premier coup d’œil mais cela ne signifiait pas forcément que son être entier était accablé et dénué de la moindre once d’espoir. Au contraire, cela aurait dû être un signe de la sensibilité toujours présente du jeune homme, de la force avec laquelle les événements le frappaient, et normalement, Camille aurait aussitôt tout fait pour s’en remettre. Lui-même était loin de se douter de l’ampleur qu’avait prise son pessimisme et il la découvrait en même temps qu’Evan, s’étonnant à chaque seconde un peu plus de s’enfoncer dans son égoïsme de cette manière qui semblait implacable et inévitable.

Quelque part, cependant, Camille continuait à se battre. Au fond, tout ce qu’il voulait, c’était l’aide d’Evan. C’était que, pour une fois, on prenne soin de lui. Lorsqu’il céda à cette unique larme, il aurait voulu qu’Evan se blottisse contre lui pour le consoler comme elle le faisait autrefois. Mais il n’en fut rien - car ils n’étaient plus que des étrangers, désormais. Et c’était horriblement douloureux de le réaliser une fois supplémentaire. Camille se demanda si Evan avait pensé à la même chose que lui. Si, l’espace d’un instant, elle aussi avait envisagé d’agir comme au bon vieux temps. En tout cas, rien sur son visage ne l’indiquait, car son expression était toujours la même, peut-être un peu plus peinée encore qu’auparavant, face aux révélations difficiles à entendre de Camille. « Camille… j’imagine. Je ne l’ai jamais vécu, mais je l’imagine. Et je sais que la douleur est insupportable et que tu aurais préféré que ce soit toi plutôt qu’elle. Je sais qu’elle te manque chaque jour un peu plus et qu’à force d’être triste tu ne sais même plus ce que c’était avant. Et tu ne sais pas à quel point je suis désolée que tu l’aies perdue. Je voudrais bien pouvoir te dire que tout ira bien, mais ce serait faux. Ce que je peux te dire par contre, c’est que tu n’oublieras pas, mais que tu t’y feras. Que tu le veuilles ou non, tu t’y feras, même si ça doit prendre des années. Ca ne veut pas dire que tu l’oublieras, simplement que t’arriveras à vivre avec ». Les paroles d’Evan étaient vraies et réconfortantes, du moins, c’est ainsi que Camille supposa qu’elles auraient dû être. Car même s’il connaissait les intentions d’Evan et qu’il savait qu’elle disait cela uniquement pour qu’il aille mieux, il ne put s’empêcher d’avoir encore plus mal à l’entente des vérités pénibles qu’elle lui racontait. Camille baissa les yeux, se mordit la lèvre, s’exhortant au calme. Il ne répondit rien, se contentant de fixer un point quelque part à ses pieds, avant de fermer les yeux, craignant de sentir une nouvelle fois ses yeux s’humidifier. Alors, il préféra en terminer tout de suite, quitte à le regretter plus tard. Camille ne savait même pas pourquoi il proféra ces paroles blessantes, et s’il avait su dans quel état elles mettraient Evan, sans doute se serait-il tu. Car la réaction d’Evan fut bien plus violente et affectée que ce qu’il avait pu imaginer, bien qu’il s’était douté dès le début qu’elle n’accueillerait pas sa sentence sans broncher. « Alors c’est tout ? On en reste là, on n’essaie même pas de recoller les morceaux ? On laisse juste tout tomber, et on retrouve chacun nos préoccupations et notre vie comme si de rien n’était ? Ca te convient peut-être, mais moi non. Que tu ailles mal je le conçois, je le comprends, j’en suis terriblement désolée, mais ça ne te donne certainement pas le droit de t’en servir comme prétexte pour ne pas essayer de rattraper les choses. J’ai commis une erreur que je paye cher, et je me sens vraiment mal. Si c’est ce que toi aussi tu as envie de ressentir, alors restons-en là, repartons chacun de notre côté, faisons comme si rien ne s’était passé, on se contentera de s’ignorer et ça ira très bien comme ça et de mon côté j’arrêterai de culpabiliser pour une erreur qui n’est même pas à l’origine de la fin. Si c’est tout ce que ça vaut pour toi, alors qu’il en soit ainsi » Entendre quelqu’un lui dire ses quatre vérités ne fut pas agréable, au contraire. Camille sentit son estomac se tordre, encore plus affecté de réaliser qu’elle avait raison du début à la fin. Elle avait, comme elle le faisait toujours si bien, touché une corde sensible, trouvé exactement la petite bête – qui, ici, avait plutôt des allures de monstres.

Un silence de quelques secondes suivit la réponse d’Evan, pendant lequel Camille s’efforça de soutenir son regard. Lorsqu’il prit la parole, sa voix était à peine plus forte qu’un murmure, et teintée d’une intonation dont il aurait été difficile de déterminer la nature exacte – s’agissait-il d’amour ou de haine ? « Tu ne comprends rien à rien, Evan… Tu crois vraiment que ça me fait plaisir de réaliser que je n’ai même plus la force de faire le moindre effort pour toi ? Tu sais très bien combien tu comptes à mes yeux, et c’est certainement pas une partie de plaisir de te perdre… loin de là. » Tout en parlant, Camille avait dévié son regard, mais il s’assura de regarder Evan droit dans les yeux en confiant la suite : « Je t’aime énormément, Evan, plus que tu peux ne l’imaginer. Tout ce que je veux, c’est que tout redevienne comme avant. Mais je sais que je n’y arriverai pas, je n’arriverai pas à me forcer, je n’en ai plus la force. Ce ne sont pas des prétextes, Evan… tu n’as pas la moindre idée de ce que je vis en ce moment. Et je ne te souhaite surtout pas de l’expérimenter un jour, surtout, surtout pas. Personne ne mérite ça, et moi, j’essaie toujours de comprendre ce que j’ai fait pour le mériter. C’est comme si j’étais mort, et pas elle. » Il soupira, exaspéré de ne pas parvenir à s’expliquer clairement, comme il l’aurait voulu, en étant sûr de se faire comprendre, et haussa légèrement le ton, à bout de patience. « Je peux pas, Evan, tu comprends pas ça ? Je n’y arrive pas ! J’ai beau essayer, j’ai beau me forcer… Je n’en ai même plus envie. »

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MessageSujet: Re: don't look back in anger [EVAN] don't look back in anger [EVAN] - Page 2 EmptyJeu 9 Juin - 19:58

    Peut-être était-elle naïve, ou trop optimiste, mais Evan restait convaincue que tout n’était pas perdu. Certes, elle n’était pas sûre de connaître la personne en face d’elle, ni même de vouloir la connaître, mais il ne pouvait pas avoir changé à ce point. L’ancien Camille était là, quelque part, noyé sous la tristesse, le chagrin, la colère, l’amertume, mais il n’avait pas complètement disparu. En plusieurs mois, la jeune femme avait eu l’occasion de le connaître, elle savait qui il était, son passé, son présent, son caractère, elle avait l’impression de le connaître encore mieux qu’elle ne se connaissait elle-même. Et puis ils avaient partagé tellement de choses durant l’année précédente qu’elle ne pouvait s’avouer complètement vaincue. Cela faisait partie des qualités – et des défauts, en fait – d’Evan. Elle était incapable de lâcher prise, même quand le combat était perdu d’avance, même lorsqu’il ne servait plus à rien de se raccrocher à quelque chose, même lorsqu’elle savait qu’elle ne pourrait plus rien faire, elle persévérait, persuadée de réussir, d’atteindre ce qu’elle cherchait. Malheureusement, le peu d’optimisme dont elle pouvait faire preuve parfois l’empêchait de voir la réalité en face. Ce n’était pas qu’il n’arrivait pas à redevenir l’ancien Camille, c’était surtout qu’il ne le voulait pas. Et la différence était de taille. Et même sans cela, elle ne voulait pas être amie avec celui qu’elle avait en face d’elle, si froid, si indifférent, si colérique. D’autant plus que se voir imposer la décision sans même avoir son mot à redire, c’était plutôt injuste. Elle aussi avait connu des moments difficiles, en aucun cas comparables à celui que vivait son ami, mais quand bien même, elle n’aurait jamais fait ça, ni même penser à faire ça. Prendre du recul, possible, c’était sa façon à elle de gérer les problèmes, en s’éloignant des gens, en se repliant sur elle-même, en enfouissant tout profondément, en évitant de montrer le moindre signe extérieur qu’elle n’irait pas bien, mais décider comme ça, presque du jour au lendemain, qu’il n’avait même pas envie de faire l’effort de remettre sur pieds une amitié autrefois éclatante, c’était quelque chose qu’elle n’arrivait pas à concevoir. N’était-ce pas le concept même de l’amitié que de venir en aide aux personnes qui comptaient pour nous ? Apparemment, Evan avait du se planter en chemin, car Camille semblait avoir une vision bien différente. Ce qui lui laissa penser qu’en fait, leur amitié n’avait été qu’un leurre, pendant tous ces mois, qu’au final ils étaient proches sans l’être, puisqu’un rien pouvait la faire céder, et que l’affection qu’elle lui portait semblait ne plus être réciproque. Elle avait été contente de le revoir, après tous ces mois sans lui, sans même avoir de nouvelles de sa part, même si elle savait qu’elle n’échapperait pas aux explications concernant leurs silences respectifs, elle était juste soulagée de retrouver l’un de ses meilleurs amis. A présent, elle réalisait qu’elle aurait préféré ne pas le revoir. Il s’était agi d’une question de chance, de hasard, de tomber l’un sur l’autre, l’occasion de régler les différends, de repartir sur une base plus saine, sans rancœur, ni regrets, ni quoique ce soit pouvant troubler leur relation, mais elle n’avait jamais pensé qu’ils se règleraient de cette façon. Et le pire de tout ça était que Camille l’avait dit d’un ton qui laissait penser que ce n’était pas une décision difficile à prendre, qu’il estimait que c’était la meilleure chose à faire et que ne plus avoir aucun contact avec elle ne lui poserait aucun problème. La désillusion était douloureuse. Et pourtant, question désillusion elle avait eu son compte les semaines précédentes. Elle croyait qu’après toutes ses histoires entre Plastic et William, elle était blindée de ce côté-là, qu’elle ne pouvait plus être affectée d’une quelconque manière, bref qu’elle avait eu son compte pour les semaines ou les mois à venir, et au final, non. Elle n’était pas aussi solide qu’elle se plaisait à le laisser croire. C’était bien le problème, à force de la croire irréductible, et invulnérable, les gens finissaient par penser qu’ils pouvaient dire ou faire n’importe quoi, sans que cela ne l’atteigne d’une quelconque manière. Oh, de toute façon elle est forte, elle peut encaisser tout ce qu’on lui dit sans broncher. Et bien non, grande nouvelle, non, elle ne l’était pas, surtout pas lorsque cela touchait quelqu’un auquel elle attachait une grande importance, comme Camille. Savoir qu’il pouvait du jour au lendemain la rayer de sa vie, c’était plutôt le genre de choses qui effrayait Evan. Ses paroles étaient autant de lames de rasoirs, et elle avait beau accuser le coup sans rien montrer, elle était profondément blessée. Alors elle avait adopté la technique de la fille glaciale, technique qu’elle maîtrisait à merveille et cela depuis des années. Dès lors qu’elle se sentait blessée, au lieu d’essayer de se défendre, elle passait à l’offensive, en agressant presque son interlocuteur. Avec le temps, elle n’avait même plus besoin de se forcer, les remarques parfois dures lui venaient naturellement. C’était peut-être aussi pour ça que beaucoup de gens la considéraient comme quelqu’un de froid et de hautain. Elle savait l’être, uniquement parce qu’elle préfèrerait inspirer de l’intimidation plutôt que de la pitié. Et qu’elle n’était pas non plus du genre très sociable au premier abord, peut-être. Cela l’avait probablement protégée de déceptions amicales ou amoureuses, mais elle devait également être fréquemment passée à côté de rencontres enrichissantes. Elle avait beaucoup de mal à faire tomber les barrières et à arrêter d’être tout le temps méfiante, et lorsqu’elle y parvenait, en général elle n’était pas déçue. Oh, bien sûr, comme à tout le monde, les erreurs de casting lui étaient arrivées plus d’une fois mais ça n’était pas la majorité des cas. Et jamais elle n’avait eu de réel problème question amitié, pas à Berkeley en tout cas. Jusqu’à Camille et ce qu’il venait de lui dire. Elle était encore dans sa phase « j’attends et j’accuse le coup », espérant peut-être qu’il se mette à rire en lui disant qu’il plaisantait, mais étrangement plus les secondes s’écoulaient plus le calme régnant dans le couloir était oppressant. Il n’avait pas vraiment l’air de plaisanter et de toute façon elle pensait le connaître suffisamment pour savoir que ce n’était pas son genre, de faire des blagues au goût douteux, à ce sujet du moins.

    « Tu ne comprends rien à rien, Evan… Tu crois vraiment que ça me fait plaisir de réaliser que je n’ai même plus la force de faire le moindre effort pour toi ? Tu sais très bien combien tu comptes à mes yeux, et c’est certainement pas une partie de plaisir de te perdre… loin de là. » Le coup de grâce. Elle n’aimait pas le ton avec lequel il disait cela, comme si elle n’était qu’une pauvre demeurée incapable de comprendre qu’il puisse traverser une mauvaise passe. Elle comprenait, très bien, peut-être même mieux que ce qu’il ne croyait, mais apparemment ça ne semblait plus avoir grande importance pour lui. Cette sensation de fausses excuses revint l’envahir. Il ne cherchait que des prétextes pour se justifier, et c’était d’autant plus lamentable. Quel genre d’ami faisait ça ? L’ambiance qui avait commencé à se réchauffer à peine quelques minutes plus tôt était de nouveau tendue et cela devenait insupportable. Plus d’une fois, Evan songea à partir et le laisser en plan. Après tout, qu’est-ce que ça pouvait bien faire, qu’elle parte et le laisse, alors que de toute façon il lui faisait clairement comprendre que leur amitié s’arrêtait là, devant la chambre de Catahleen. Et puis s’il n’arrivait pas à surmonter tout ça, il n’avait qu’à pas revenir à Berkeley, et rester s’apitoyer et se morfondre chez lui, plutôt que d’essayer d’aller de l’avant. La pensée était plutôt mesquine, la jeune femme le savait, mais d’un autre côté, lui demander d’accepter sans rien dire était impossible. Obstinée, elle avait du mal à lâcher prise, même quand la situation l’exigeait. Tout ce qu’elle savait, c’est qu’elle avait à peu près épuisé toutes les ressources possibles et imaginables pour que la situation s’arrange et au final elle n’était même plus sûre de vouloir qu’elle s’arrange. Triste constat qui s’infiltrait insidieusement en elle. Après tout, à quoi bon essayer d’arranger les choses lorsque l’autre personne concernée n’a même pas l’envie de faire de même. « Je t’aime énormément, Evan, plus que tu peux ne l’imaginer. Tout ce que je veux, c’est que tout redevienne comme avant. Mais je sais que je n’y arriverai pas, je n’arriverai pas à me forcer, je n’en ai plus la force. Ce ne sont pas des prétextes, Evan… tu n’as pas la moindre idée de ce que je vis en ce moment. Et je ne te souhaite surtout pas de l’expérimenter un jour, surtout, surtout pas. Personne ne mérite ça, et moi, j’essaie toujours de comprendre ce que j’ai fait pour le mériter. C’est comme si j’étais mort, et pas elle. » Evan avait de plus en plus de mal à comprendre quel était le lien entre elle et la perte de sa sœur. Pourquoi devait-elle payer de leur amitié le fait qu’il soit incapable de passer au-dessus de sa mort ? Il n’y avait aucune raison pour qu’elle doive le faire et si un choix devait être fait, elle préférait encore garder un semblant de dignité. Elle était résolue à ne plus s’y opposer. Elle ne ferait rien pour que les choses s’arrangent puisque là ne le voulait pas, elle n’irait pas le supplier de repartir à zéro parce que quand bien même il l’aurait accepté, plus rien n’aurait été pareil. Evan avait beaucoup de défauts, parmi lesquels une rancune tenace qu’elle avait beaucoup de difficulté à mettre de côté. Parfois, elle aurait voulu y arriver et ranger sa foutue fierté ailleurs, parce qu’elle avait causé plus de problèmes qu’elle n’en avait réglé, mais non, elle en était incapable. Tout comme elle savait qu’elle serait incapable d’oublier ce qu’il venait de lui dire, même s’il ne le pensait pas vraiment, même s’il finissait par regretter ses paroles, même s’il se donnait du mal pour que les choses redeviennent comme avant. Non. Niet. Il ne voulait pas ? Elle ne le forcerait pas. Et quand viendrait le jour où il réaliserait l’erreur qu’il avait commise elle serait partie sans aucun retour possible. Comment Camille le battant avait-il pu en arriver là ? Lui qui avait fait tant d’efforts, de sacrifices, qui n’avait jamais baissé les bras même face à l’adversité, comment pouvait-il comme ça décider de tout laisser tomber ? Et cette façon qu’il avait de croire que c’était une sorte de punition cosmique laissait Evan partagée entre consternation et compassion. Elle savait qu’il avait mal, mais la mort de Claire n’était pas une vengeance, il arrivait tout simplement que parfois, les choses ne se passent pas comme on l’aurait voulu et espéré, encore que dire ça fût un euphémisme. « Je peux pas, Evan, tu comprends pas ça ? Je n’y arrive pas ! J’ai beau essayer, j’ai beau me forcer… Je n’en ai même plus envie. » La Sigma hocha la tête. Elle tentait presque désespérément de voir une petite lueur d’espoir quelque part dans ses mots avant de s’avouer vaincue. L’amitié ne devait pas être forcée, ou quoi que ce soit d’autre, elle devait être innée. Et s’il n’était même plus capable de cela, ça ne servait plus à rien. Et le ton avec lequel il lui disait ça. Jamais il n’avait osé lui parler de cette façon, comme s’il s’adressait à quelqu’un de particulièrement attardé à qui on aurait besoin d’expliquer un calcul particulièrement simple. Une fois de plus, se sentant agressée, elle opta pour la solution de défense offensive, adoptant son ton froid, à mi-chemin entre le mépris et l’indifférence. « Tu crois que je suis stupide ? Que parce que, par chance, je n’ai jamais vécu ça, je suis incapable de comprendre ? Et bien devine quoi, Camille, si je le comprends, je le comprends même très bien. Et arrête de dire que tu ne te cherches pas d’excuses, que tu m’en veuilles parce que je n’ai pas été là quand il l’aurait fallu, soit, je le conçois parfaitement, si la situation avait été inversée il en aurait été de même de mon côté. Maintenant il n’y aucun rapport entre le fait de vouloir gâcher une amitié et ne pas être capable de surmonter sa peine. Sois honnête, rien qu’avec toi-même, au fond de toi tu le sais très bien, que ça n’a rien à voir. Mais tu sais quoi, parfait, ça m’est égal, fais ce que tu veux, si à tes yeux cette amitié ne vaut plus rien, je n’essaierai même pas de m’acharner. Tu veux laisser tomber parce que tu es incapable de passer au-dessus de la douleur ? Parfait, je ferai de même. » Elle avait tout prononcé en reprenant à peine son souffle, ce qui la laissa essoufflée pendant quelques secondes, durant lesquelles elle fixa du regard son ami, ou ancien ami, elle ne savait plus trop. La colère qu’elle s’efforçait de contenir jaillissait sans qu’elle puisse s’en empêcher. « Mais bon sang, la mort n’est pas juste, qu’est-ce que tu crois ?! Que les personnes les plus mauvaises partent les premières ? Mais si c’était comme ça, ça se saurait. Bien sûr que non ce n’est pas juste, mais rien n’est juste dans la vie Camille. Il n’est pas juste qu’elle soit morte, tout comme il n’est pas juste que je me sois faite violer, tout comme il n’est pas juste qu’on en arrive là, à ne même plus pouvoir faire des efforts. Rien de tout ça n’est juste, mais la vie n’est pas juste. Et tant que tu n’auras pas compris ça, tu n’avanceras pas. Ce n’est pas une question de mériter ou de ne pas mériter, personne, absolument personne ne mérite de vivre ce que tu vis, mais ça n’est pas une punition qu’on t’inflige ou quoi que ce soit d’autre, c’est juste… appelle ça comme tu veux, la fatalité, le destin, le hasard, mais certainement pas une punition. Tu n’as pas mérité de vivre ça, il serait grand temps que tu t’en rendes compte. Tu sais très bien que tu comptes pour moi, que je tiens énormément à toi, mais n’espère pas que quand tu auras réalisé que tu n’y pouvais rien et qu’il est temps d’essayer d’aller de l’avant je sois là, parce que je ne le serai plus. »

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