L’Irlande. Partir à la chasse aux lutins et divers chaudrons magiques aurait pu le réjouir s’il n’avait pas eut à braver le pire fléau que l’homme ait pu inventer. L’avion ! Aussi, Sacha avait soigneusement tout préparé. Il avait prit des cours de gestion de stress. Il avait tenté de faire des simulations sur son ordinateur. Il avait même prévu de prendre divers cachets si l’angoisse gagnait trop de terrain. Il en était déjà à son deuxième. Un truc homéopathique qui n’avait pour effet que de laisser un goût amer dans la bouche. Le jeune homme souhaitait être le plus solide possible pour que son père ne se doute jamais qu’il avait participé à la création du pire trouillard des airs que la planète ait pu porter. Plongé dans sa réflexion pour déterminer quel était le moteur de l’avion, Sacha tourna la tête vers le nouvel arrivant.

« Ils sont où les leprechauns ? Les trèfles ? Les fers à cheval ? » Demanda Sacha en tournant son regard sur l’ensemble de l’avion. Un avion sans tout ça n'était PAS bien équipé! « Non parce que là, on a aucune chance d’arriver vivants ! Je suis pas superstitieux d’habitude, mais là… on ne sait jamais ! »

Lorsque la raison ne pouvait plus rien, on s'accrochait à tout et n'importe quoi. Quelle question avait posé le gars déjà ? Son âge ? Pourquoi il voulait connaître son âge, d’abord ? Les doigts plantés dans le cuir de l’avion, Sacha tentait un nouvel exercice de relaxation. Il fallait des trucs particuliers quand on était mineur et qu’on prenait l’avion ?

« QUOI ? » Hurla Sacha en attendant la dernière phrase de l’inconnu. Comment ça en général il n’y a pas de morts avant le décollage ? Aussitôt l’homme en question obtînt toute l’attention du rouquin. Les yeux ronds comme des billes, le plus jeune venait de perdre les derniers neurones disponibles et le peu dignité qu’il lui restait.

Ignorant ce que son paternel venait de lui dire, Sacha se leva d’un bond et marcha sur les pieds du type en question. Il pouvait se réjouir, s’il était pratiquant des rituels masochiste du premier contact réalisé avec son amant imaginaire. Finalement, il pu perdre tout espoir lorsque Sacha se rua à toute vitesse vers la sortie.

« MÔÔÔMAAAAAAAAAAAAAAN ! » Hurla Sacha en entrevoyant la chevelure blonde de sa mère.

Ils avaient eut l’occasion d’enterrer la hache de guerre quelque jours plus tôt. Sacha était tout bonnement incapable de bouder sa mère plus d’une journée entière. Il lui fallait être sûr que Kitty serait toujours là et il avait besoin qu’elle sache qu’il était là aussi. Alors que Kitty admire son œuvre, son fils courant comme un éreinté en sa direction, les bras grands ouverts et le regard traumatisé. (Encore l’œuvre de James ça aussi! ) Qu’elle regarde oui , parce qu’il arrivait maintenant à quelques mètres et il n’avait toujours pas ralenti d’un pouce. Certes, il n’était pas très grand mais il restait tout de même un adepte pratiquant de cross, jeu durant lequel les joueurs se bousculaient, se chargeaient et autre réjouissance.

Sans le moindre mal, Sacha attrapa les hanches de sa mère pour la soulever et la porter en continuant sa course. Non, non et non ! L’avion c’est dangereux, elle ne monterait pas là dedans ! Oui, il tenait Kitty comme un sac à patate qu’il aurait jeté sur son épaule. Il avait abandonné les valises et sacs de sa mère et il se fichait bien de défaire son brushing ! Il lui sauvait la vie quand même !

     

 
Dans un grognement, Sacha tourna les talons en compagnie de sa mère. Lui aussi lui serra la main en guise d’encouragement. Elle avait aussi peur que lui et il le savait. Un seul regard sur son comportement le démontrait sans souci. En revanche, un être ici possédait une attitude étrange. Mac, au vu des perpétuelles remarques de James, passait son temps à jacasser, pire qu’une fille ! Cet homme lui tournait autour comme une mouche flirte avec un pot de confiture. S’en était agaçant que cet incessant bourdonnement à ses oreilles. Heureusement, Sacha avait une patience d’ange, ou presque. Disons qu’il avait une composition facile à prendre en main, et socialement agréable. Pourtant, il détestait déjà Mac. Tout du moins, il ne le portait pas dans son cœur. Sacha n’était pas le genre de garçon à détester, il n’aimait pas. C’était une grande différence. Cet homme se jouait de lui pour mieux le ridiculiser devant son père. De plus, il occupait toute l’attention de son paternel, gâchant le départ et le moment privilégié qu’il aurait pu avoir avec lui.

S’asseyant à côté de sa mère, histoire d’être sûr et certain qu’il pourrait la protéger en cas de problème, il sourit en remarquant le pauvre malheureux plier l’échine sous le poids des bagages de Kitty. Dire qu’il n’avait prit qu’un sac à dos de voyage. Sûr qu’elle avait oublié quelque chose malgré tout. Mac continuait son cinéma, mieux qu’une grande diva, et Sacha sentait la mauvaise humeur gagner en altitude. Tout avait une vague tendance à déraper dernièrement. D’une part, il avait réellement envie de partir avec James en voyage. Il savait que c’était important. D’autre part, il aurait préféré attendre pour faire les choses en grands. C’était à peine s’ils savaient quoi se dire dans une discussion et ils devaient passer tout un week end l’un proche de l’autre. Il n’avait pas envie d’avoir besoin d’être coupé de leur monde habituel pour pouvoir se fréquenter. Il ne voulait pas que ca ne soit qu’une bulle. D’accord, nous l’aurons compris. Sacha n’avait rien d’un voyageur et sa peur de l’avion rongeait son enthousiasme habituel. Lui, il aimait les choses les plus simples et les plus anodines. Il savait se réjouir d’une rencontre dans la rue, rire autour d’un verre et profiter des petites choses que la vie pouvait offrir. Mais tout ça, l’avion, les hommes et le voyage, s’était de trop, trop pour être son monde à lui. Tellement de trop que c’était finalement lui qui se sentait de trop. Tout irait probablement mieux une fois l’avion atterrit sur les pistes Irlandaises. Sa bonne humeur pourrait refaire surface et son humour réapparaitrait probablement dans la foulée. En attendant, il devait tenter de se montrer social.

« Oh, c’est dommage. Y a pas d’hôtesse de l’air. » Taquina Sacha qui savait déjà par cœur le texte récité par l’hôtesse de son dernier vol.

   

 

Comment ça ? James ne venait tout de même pas dire que Mac se plierait à certaines bassesses comme celle de faire du mal à Kitty ? Non !

« Ma mère n’a pas de prix et je tiens à rappeler qu’il n’y a pas pire arme qu’une paire de talons aiguilles.  Méfiance ! » Taquina Sacha en rappelle envers James.

On ne touche pas à sa mère. On ne menace même pas de la toucher. Tout au moins, il refusait que l’on puisse lui faire du mal. Durant des années, son beau père avait fait planer une ombre effrayante sur sa vie. Sacha refusait que par sa faute, Kitty se retrouve à affronter un homme de la trempe de James ou de ses amis.

Et maintenant, les deux échangeaient, comme si, lui, Sacha Weiss ne comprenait rien. Il n’était pas idiot et surtout assez grand ! On parlait de lui éviter les avances de cet étrange bonhomme comme s’il n’était pas là. Levant les yeux au ciel, Sacha inspira profondément de planter ses doigts dans les accoudoirs alors que l’avion commençait à décoller. Oh pitié… on allait mourir !! Il allait vomir surtout ! Le nez contre le hublot, Sacha regardait le nuage approcher. Dur !

« Oh bah il devrait être content. On vient de s’envoyer en l’air ! Tous ensembles en plus. Il ne pouvait pas rêver mieux non ? » Reprit Sacha d’une voix vaguement stressée.

Surtout, ne pas montrer sa peur. Sa mère devait bien avoir assez peur pour éviter de lui imposer de gérer la sienne.

« D’accord… et c’est quoi les villes où on s’arrête ? » Demanda Sacha le nez toujours collé sur la vitre.
Parce que malheureusement, il ne savait toujours pas où se situait le berceau de Monsieur O’Maley Senior. Même s’il restait curieux de connaître ses origines. Il demeurait bien trop inquiet de sentir quelques vibrations sous son siège. Sa concentration habituellement inébranlable restait scotchée contre l’extérieur. Il était un peu comme James dans le fond. Lui avait les yeux rivés sur son journal, probablement à lire les hausses ou les baisses de la bourses tel que l'on pouvait le voir dans les films. Et bien Sacha, lui, avait les pupilles aimantées par le ciel et la terre en dessous.