La vie n’est qu’un « mauvais quart d’heure » composé de moments exquis.

Etrange descente que Davis s’offrait vers les ténèbres que renfermaient les couloirs de la confrérie gamma. Il s’enfonçait dans les abysses obscures des noirs secrets de cette confrérie redoutée comme jamais. Sourire en coin, il cherchait à défier le diable en personne et s’octroyait l’idée qu’il dénicherait la vile créature qui avait pris possession des lieux telle une nymphe déchue aux allures de sirènes attrayante à souhait. On lui avait parlé de la doyenne gamma et le défi avait été lancé de provoquer la donzelle, sortir l’épée de son fourreau et débuter un duel chevaleresque pour emporter la victoire sur celle qui semblait faire craindre le pire à un bon nombre de résidents de cette école. Héro des contes pour enfant, Davis, imbibé légèrement par ce nouveau test des omégas, fonçait dans les couloirs, la crainte inconnue, la témérité éparpillée dans ses veines, s’écoulant à la vitesse délirante du soleil lorsque ses rayons venaient frapper la terre. Au rythme de ses pas, Davis ressassait les propos de ses confrères alors que quelques minutes auparavant, il s’offrait avec délectation, à la contemplation d’une oméga, face à lui, alors que tous, se languissaient dans les canapés de la salle commune de leur confrérie. Les discussions joyeuses jaillissaient au fur et à mesure que les bières glissaient de main en main. Les esprits s’échauffaient souvent dans cette confrérie aussi bien que les pires abandons et, dans une sociabilité presqu’oppressante, tous les délits étaient bons afin de se faire voir devant tous. Et le sujet des femmes était ressorti aussitôt, au galop, sur son destrier à la cavalcade remarquable. Sourire en coin, ils rigolaient tous, les hommes se congratulaient, les femmes soupiraient de désespoir face à cette horde de primates, retombant dans les méandres d’une époque révolue. Mais, se félicitant mutuellement de leurs exploits à faire pâlir, les esprits puritains, Ebony Asher-Grey avait parcouru les lèvres comme si l’on parlait du diable en personne. Il y avait des noms qui revenaient sans cesse, la Rosenbach par exemple, croustillante créature mais qui semblait s’être tapé la moitié de cette confrérie. Non. L’autre gamma, on parlait d’elle à demi-mot parce qu’elle semblait peu encline aux bonnes paroles et qu’elle n’utilisait pas forcément les mots afin de faire taire les personnes qui osaient l’importuner. On dit qu’elle bouffe ses victimes … Il était donc de bonne augure que Davis tende l’oreille face à ces propos totalement barges. Nouveau dans la confrérie, il lorgnait du regard un Zachariah qui échauffait dans son sourire amusé, un tour certain à sa personne. Parce que le monsieur Agusto était un nouveau pion qui parsèmerait les soirées les plus alcoolisés et au sein de cette confrérie, il restait une recrue à bousculer. Cela tombait bien, Davis ne reculait devant aucun défi et n’avait aucune envie de renoncer même à l’idée qu’on pouvait lui prêter du courage. Taisant ses activités nocturnes et éludant les questions sur ses absences la nuit, il mettait cependant de côté sa maîtrise de soi et sa discipline au service des attentes de sa trinité. Il allait évidement en faire les frais. Fier de bomber le torse comme un coq en demandant à perturber la vie de la sorcière, Davis s’était proposé pour débusquer ce maléfice inatteignable. Un instant fugitif de son audace, il se levait et devant les rires des compères qui l’entouraient, traçait une ligne ambitieuse vers l’aile qui renfermait les pires démons de cette année scolaire.  Le défi relevé avec concupiscence, violente envie de montrer qu’il était et qu’il n’avait peur de rien, la jeune oméga laissait trainer ses pas sur le sol couleur ivoire qui s’échappait sous ses chaussures à force de progression d’une rapidité haletante. Une voix intérieure néanmoins l’admonestait gravement face à son manque évident de jugeote et bien que la situation soit risible aujourd’hui, elle l’était bien moins lorsqu’il empoignait ce même regain de vitalité dans des conditions qui lui étaient bien moins favorables. Davis fonçait toujours vers les ennuis pour se prouver qu’il ne serait jamais comme le monde qu’il avait connu et qui l’avait élevé. Semblables à des pantins sans cœur ni raison, Davis avait vécu au milieu d’une population défrayant les idées de crise économique au sein même d’une ville espagnole réputée qui avait été gravement touchée. Mais lui avait vécu dans une bourgeoisie accrue par l’envie d’appâter toujours plus de monde et de richesses. Ce n’était pas lui, ce n’était pas le destin qu’il désirait et c’était pourquoi, gardant intacte l’éducation irréprochable qu’on lui avait conférée, il ne reculait devant aucun sacrifice afin de fourvoyer son destin au gré de ses humeurs impulsives. Arrivant enfin dans l’antre du diable, il se disait qu’un détail avec été omis dans sa fulgurante progression de guerrier inassouvi. Il n’avait aucune idée où les chambres de la trinité se trouvaient et surtout qu’est-ce qu’il allait bien pouvoir faire une fois franchit le seuil menant en enfer. Alors il entama quelques enjambées afin d’avancer aux confins d’un hasard, s’enfonçant plus bas qu’il ne l’aurait dû. Une seule porte donnait une présence supplémentaire à sa solitude. Poussant le battant pas fermé à clé, il entrait dans une pièce sombre. S’attendant à une odeur d’humidité prenante, il remarquait bien vite que la cave qu’il venait de profaner avait été aménagé avec goût mais sans artifice. Lumière tamisée, endroit d’une fraicheur hérissant les pigments de sa peau, il avançait vers des instruments posés ci et là sur une immense table, sûrement utilisée avant pour des travaux divers. Rien à voir avec une chambre universitaire, Davis se demandait bien où il avait mis les pieds. Etait-ce un squat d’une personne extérieure à l’établissement ? En vue de la salle qui abritait dorénavant son intuition ébranlée, il se disait que personne ne pouvait vivre là. Mais le lit aux draps chamboulés qui recouvrait le fond de l’espace, lui donnait le contraire de sa logique. Encore plus lorsqu’un son presque inaudible mais qu’il repéra tout de même de son ouïe fine, vint altérer son jugement. Se retournant, il apercevait une silhouette qui lui faisait face. C’était ça le démon ? Se prenant en pleine figure la lumière pendue au plafond, il plissait ses paupières afin de mieux apercevoir le visage de celle qui lui faisait face. C’était elle Bonybitch ? A en croire par son aspect elle n’avait rien d’un monstre. Se rapprochant plus alors, il s’arrêta net. C’était peut-être finalement une très mauvaise idée que d’avoir voulu estropié un adversaire dont il ne savait rien. Parce qu’aujourd’hui, il se retrouvait devant le spectre d’une vie antérieure. Bel et bien réel, Davis sentit son sang se glacer à l’apparition de la jeune femme qu’il reconnaissait à présent. Alors c’était ça ? Pour tenter d’approcher le diable il fallait témoigner de son courage face à ses supplices intérieurs ? Finalement, les rumeurs qui circulaient s’avéraient vraies, la confrérie gamma regorgeait des pires peurs qu’il existe, et il en faisait à présent les frais en se remémorant un ami de longue date, mort à présent, qui avait su immiscer en lui, la haine intarissable de la perte cruelle qu’il avait ressenti.  Lux ? C’est toi ? Reculant d’un pas, Davis ne pu s’empêcher de plaquer la main contre son front pour tenter de localiser une quelconque forme de fièvre qui s’emparait de son cerveau agonisant sous l’effort pour trouver une logique à la présence de la jeune femme, face à lui. Tu … Vis là ? L’oméga n’imaginait pas une seule seconde qu’elle soit étudiante dans cette université mais plutôt le fantôme de son passé, perturbateur auprès des éléments qu’elle côtoyait, et qui avait aussi, été affecté de la même manière qu’il l’avait été, par un être qu’ils avaient chéri au même instant, le temps d’une autre vie …