You are the avalanche, one world away. My make believing while I'm wide awake. Just a trick of light to bring me back around again. Those wild eyes, a psychedelic silhouette. I never meant to fall for you but I was buried underneath and all that I could see was white.
Neuf ans. Cent huit mois. Trois mille deux cent quatre-vingt-cinq jours. Approximativement. Une courte éternité. Mais ce dernier mois me semble plus éternel encore. Billie n’est pas là. Elle est à Lima, avec son grand-père. Elle aurait dû venir avec moi, en Afrique du Sud. Nous devions rejoindre Swan tous les deux. Mais son grand-père lui a offert un voyage qu’elle ne pouvait pas refuser. J’aurais aimé que le mien soit en mesure de me faire la même proposition. Que nous partions tous les deux pour l’Algérie, qu’il me raconte une fois encore ce qu’il y a vécu. Mais il n’est pas au meilleur de sa forme. Les voyages, nous les faisons depuis sa chambre à la maison de retraite. Il me regarde avec ses yeux d’argent, et me raconte les photos ternies qu’il garde au fond de son tiroir. Je les connais par coeur, ces photos. Il y a celle avec grand-mère, assise sous l’oranger. Celle de leur vieille maison en terre cuite. Et puis celle de papa courant le cul à l’air à travers les champs. À chaque fois que mon grand-père me parle du passé, il y a toujours la même étincelle au fond de ses prunelles. Alors j’espère que Billie retrouve la même étincelle dans le regard du sien, et qu’elle ma racontera leur épopée jusqu’au moindre détail. En attendant, je me replonge dans mon quotidien. Berkeley grouille déjà d’étudiants. Il y a les nouvelles têtes, un peu perdues, et celles que tout le monde connait. Étonnamment, certains étudiants que je ne connais ni d’Ève ni d’Adam m’ont salué dès le premier jour. J’ai pas compris, au début. Puis ça a fait tilt, comme une évidence. La natation. Depuis que je représente l’université au sein des compétitions, ma vie prend un nouveau sens. Un sens que je n’avais jamais envisagé auparavant. Quelque chose de plus grand, de plus enivrant. Alors je m’entraine davantage, parfois même jusqu’à des heures assez tardives. C’est bien le seul avantage que j’ai trouvé à l’absence de Billie. « Jonas, je vais devoir fermer ! » Le gardien me fait signe, à l’autre bout du bassin. « Une dernière longueur et j’disparais, promis. » Alors je m’élance, à nouveau. Le coeur battant. Je donne tout, comme si ma vie en dépendait. C’est une nouvelle facette que je découvre de moi-même. La hargne. Je finis par quitter la piscine, les cheveux mouillés et en bataille, le souffle encore rapide. Je passe rapidement dans la chambre de Billie, y dépose mon sac de sport, et repars aussitôt. Ça fait des semaines que je ne m’achète plus rien à manger, et que je file prendre des trucs à emporter aux quatre coins de la ville. Ce soir n’y échappera pas. Je saute dans le premier métro, sans vraiment savoir lequel j’ai pris, et descends trois arrêts plus loin. Il y a forcément un truc qui me fera envie, un chinois ou un mexicain, qu’importe. J’enfonce mes mains dans les poches de mon pantalon, et commence à arpenter le quartier. Je le connais pour y être venu plusieurs fois, alors j’essaie de prendre des rues qui me sont peu familières. Si la nuit est tombée, la ville elle, commence à s’éveiller. Je m’engouffre finalement dans un boulevard assez animé, sans vraiment me poser de questions, quand au loin une silhouette me semble familière. Je crois voir Billie, et je n’en suis que très peu étonné. Je la vois partout en ce moment. Dans les couleurs de la fac, au détour d’un café. Partout. Billie est partout. Son absence est comme un long silence. Un de ceux que l’on cherche à combler avec n’importe quoi. Avec des phrases sans verbes, des soupirs sans âmes, des grognements sans intérêts. Alors chaque demoiselle à l’allure de Billie attire mon attention, comme pour remplir le manque qu’elle a creusé au fond de mes yeux, et au fond de mon palpitant surtout. Mais cette silhouette, au milieu de la foule, est différente. Plus fidèle, plus intrigante. Je m’approche d’elle, sans grande conviction, mais avec la ferme intention de découvrir le visage de cette jeune inconnue. Et alors que je me tiens juste derrière elle, elle se retourne. Billie. C’est elle. Pas une autre. Elle. Billie. Je reste figé quelques secondes, les sourcils froncés. Qu’est-ce qu’elle fout ici alors qu’elle est sensée rentrer dans seulement cinq jours ? « C’est dingue, vous d’vez être le sosie de ma copine. » Je lui lance un sourire cynique. « Mais franchement chapeau, la ressemblance en serait presque perturbante. » Le regard noir, je la fixe, attendant une explication qui tienne la route. « Mais bon, elle est au Pérou, alors… »