Occupée à regarder un disque dur dans la vitrine d’un magasin, Lullaby sursaute alors qu’une voix, masculine, s’adresse à elle. Un frisson parcourt son échine avant qu’elle ait le temps de tourner son regard en direction de celui qui l’accoste. Que lui veux-t-il donc ? La princesse ne comprend pas du tout ce qui lui arrive ni pourquoi l’étudiant qui s’adresse à elle et qu’il lui semble avoir déjà vu semble lui faire des reproches. Qu’a-t-elle fait de mal ? A sa connaissance, strictement rien. Alors qui a-t-elle bien put faire fuir ? Bee sait qu’elle plaît, elle a l’habitude. Mais jamais aucun garçon n’a fuit de la voir arriver. Ou elle ne l’a jamais vu faire. Alors cette éventualité est loin de frapper l’esprit de la russe qui s’étonne et fait part des questions qui la tarabustent à celui qui lui fait face.

«- Je vous demande pardon ? Je n’ai rien dit, rien fait. Je ne vois guère comment j’aurai pût faire fuir qui que ce soit. Néanmoins je suis navrée que cela soit arrivé… » Interroge et répond la demoiselle en étant on ne peut plus sincère.

Dévisageant l’homme qui lui demande si elle n’a pas cinq cent dollars, Bee se demande s’il est sérieux. Elle a une telle sommes, oui. Mais certainement pas en liquide dans son sac, ce ne serait pas prudent. Et quoiqu’il en soit, la jeune femme n’a pas vraiment envie de débourser autant pour acheter un objet que les deux amis pourront toujours s’offrir ultérieurement. La demoiselle préfère user de son argent avec plus de sagesse, pour des causes qui lui semblent justes. Toutefois elle finit par faire glisser son sac devant elle et à farfouiller dedans, en tirant bientôt un chéquier.

«- Disons que je fais un chèque qui couvre tout le montant et tu me rembourse ta part, ok ? Parce que je n’ai pas une si grosse somme dans mon sac, tu t’en doute bien, j’imagine. C’est combien ? Le coût total de l’article ?» le questionne-t-elle avant de remplir le chèque qu’elle lui tend. «Voilà pour toi. Et donc, qu’est ce qu’a eut ton ami pour détaler si vite en te laissant en plan ? Je crains de ne pas vraiment comprendre qu’elle mouche l’a piqué ni en quoi je peux être responsable de son départ… » interroge la russe avant de reporter son attention sur son disque dur. C’était tellement sa veine, ça ! Impossible de sortir tranquillement flâner dans les rues de la ville sans être immédiatement ennuyée par quelques évènements fâcheux, comme ces accusations dont elle ne parvient pas à saisir le fondement, malgré toute l’intelligence dont la nature l’a dotée. Que lui reproche-t-on au juste ? La brune n’a pas l’impression d’avoir fait quoique que ce soit qui puisse provoquer la fuite de qui que ce soit. Alors quoi ? Que s’était il donc passé, en fin de compte ? La belle a peur de ne pas bien comprendre la situation. Qu'elle mouche a donc bien put piquer les deux garçons ? Elle donnerait cher pour le savoir.

«- Je comprend. Dès que l’on commence à s’occuper de ce genre de projet, c’est tout de suite très couteux. Personnellement j’étudie dans les sciences alors je suis très bien placée pour savoir qu’effectivement les coûts pour un matériel de qualité peuvent rapidement prendre des proportions énormes. Comme tu veux, je ne suis pas pressé… Pas que l’argent n’ait pas de valeur à mes yeux, au contraire quand on verse dans l’humanitaire on a conscience de ce que représente un sous, mais justement, je me doute que ce n’est pas évident pour tout le monde, de concilier études et finances… » répond la demoiselle en espérant que ses mots, prononcés tout en gentillesses, ne vont pas vexer le jeune homme.

Intriguée par le départ de l’ami de l’homme qui lui fait face, Lullaby questionne ce dernier pour connaître les raisons de cette étrange fuite dont l’homme l’a accusé d’être à l’origine. Et la réponse de John-Thomas n’est pas pour plaire à la jeune femme qui affiche alors une moue boudeuse. Qu’y a-t-il dans un fessier ? Pas grand-chose d’intéressant en soit. Rien de glorifiant, en tout cas. La demoiselle préfère largement être reconnue pour son intellect et pour ce qu’elle est à l’intérieur, que pour les fesses que la nature lui a donné. Et elle ne manque pas de le faire savoir à John.

«- Tu pourras lui dire qu’un physique ne fait pas tout. On peut être canon à l’extérieur et être la pire des garces au fond de son cœur. Je préfère être reconnue pour ce qu’il y a en mois que pour ce corps, auquel la plupart des gens semblent s’arrêter. Je ne suis pas juste de belles fesses et de longues jambes. Je suis, aussi, une étudiante. Comme les autres. Qui bosse comme vous et qui essaie de réussir dans ses études tout en s’engageant dans l’humanitaire. Cela devient lassant d’être jugé sur mon corps. Je ne suis pas si garce que certaines femmes peuvent le penser simplement parce que je suis mince. Et je ne suis pas une excitée au pieu juste parce que j’ai des formes. Je suis plus que ça. Comme toutes les femmes. Tu pourras dire ça à ton pote. Derrière une silhouette, il y a un cœur et parfois même de l’orgueil qui se trouve blessé quand on n’est pas reconnue pour ce que l’on est à l’intérieur. Tu n’es pas obligé de le lui dire, mais il s’est grillé tout seul. Je pourrai m’intéresser à un garçon quel qu’il soit s’il cherche à me comprendre et à voir au-delà de l’apparence. En revanche, je ne pense pas pouvoir trouver de l’intérêt à celui qui s’arrête à la façade d’une chose. » explique-t-elle sans se démonter et très calmement.

Le ton sec de l’homme ne manqua pas de heurter Lullaby qui se sentit immédiatement mal à l’aise à l’idée d’avoir blesser, vexer, le jeune étudiant, ce qui n’était pas du tout son intention. Mais avant même qu’elle n’ait put répondre et s’excuser de cette méprise, car certainement s’était-elle mal exprimée, John-Thomas sortit un chéquier de sa poche en répliquant qu’il pouvait très bien se débrouiller tout seul. Ne sachant plus où se mettre, la princesse déchire le chèque qu’elle remplissait et replace son chéquier dans son sac en cherchant un moyen de se sortir de ce pétrin dans lequel elle s’est mise et qui ne lui plait pas le moins du monde. Bee déteste ce genre de situation où elle se sent maladroite. A vrai dire, Lullaby déteste avoir de mauvaises relations avec les gens. Aussi cherche-t-elle à réparer ses erreurs auprès du jeune homme sans le froisser davantage mais déjà la discussion dérive sur l’ami de ce dernier et, plutôt que d’arranger les choses entre eux, la voilà partie à expliquer combien il est agaçant d’être jugée sur son physique. Et si la jeune femme parle pour elle, un peu, elle parle surtout pour la généralité car, qui, de nos jours, peu se targuer de ne pas être victimes des préjugés chez les autres ? Que l’on soit maigre, gros, grand, petit, roux, brun, blond, le jugement qui va de paire ne tarde pas. Et John-Thomas, ne comprenant pas qu’elle s’en prend à tout le monde et pour tous les jugements, se fait prompt à la mitrailler en vol.

«- Je crains que tu ne m’ai pas comprise. Je parlais pour moi, mais je parlais pour n’importe qui. Dans ce monde, nous sommes tous jugés pour n’importe quoi et pour des critères plus débiles les uns que les autres. J’ai un ami rondouillard, que l’on juge sur son corps sans chercher à voir plus loin. Je connais une anorexique qui subit ce même problème. Quand… je l’ai moi-même été, j’étais moi aussi victime de ce jugement superficiel. Et je le suis encore aujourd’hui que je vais mieux. Ce que je veux dire, même si je parlais dans mon cas, c’est qu’au-delà d’un physique il y a autre chose. Et cela nous concerne tous. Que l’on soit petit, grand, gros, maigre… on est tous victime de ce genre de superficialité.»

Et le voilà qui, d’un ton qui exprime clairement qu’il reste vexé par les propos de la jeune femme, lui répond que, pour sa part, il la trouve franchement banale. Loin de se vexer pour autant, la demoiselle préfère s’intéresser à sa question en se qui concerne ses études.

«- Je suis étudiante en médecine, résidente, en vue de devenir titulaire en chirurgie cardiaque, neurochirurgie ou chirurgie plastique. Je sais que ce dernier point est très décrié mais ce qui m’intéresse, c’est de changer la vie de personnes défigurés par le feu, un animal ou… ce genre de chose. Je ne fais pas ça pour le côté superficiel de certains patients, c’est clair.»

La demoiselle éclate de rire alors que le jeune homme se déclare être plein de beaugossitude. Pas que la chose soit fausse en soit, mais la tête qu'il arbore alors est simplement risible. Si sûr de lui, qu'il en paraît presque réellement imbus de sa personne quoique l'étudiante se doute que ce n'est là qu'un genre qu'il se donne, pour que la plaisanterie paraisse réelle. En tout cas c'est très réussit et voilà que, de fait, Lullaby en rit. Mais les choses sérieuses reprennent rapidement alors que John-Thomas fait observer que la tâche défendue par la jeune femme doit être bien compliquée à mener, ce qui n'est pas faux et ce que la demoiselle admet volontiers d'un simple hochement de la tête. Et rapidement, tout deux embrayent sur les études de médecine que suit la princesse.

«- Pour la chirurgie plastique, si je conçois que régler un complexe peut être une bonne idée car certains se bouffent vraiment la vie avec ça, je suis totalement contre la sur-chirurgie. Certaines personnes font tellement d'opérations que cela en devient effrayant. En fait, je pense qu'avant de songer à faire une chirurgie plastique, ou plutôt avant de parvenir à monter sur le billard, il faudrait faire un suivie psychologique. Pour voir si c'est vraiment une nécessité pour la personne ou simplement un caprice pour faire «comme tout le monde» parce que parfois, c'est vraiment ça et c'est, quelque part, on ne peut plus déplorable. Bon évidemment, cela arrange bien les affaires des professionnels de cette branche, mais bon...» répond la demoiselle en souriant avant de reprendre. «Et même les complexes, les trois quarts du temps, ce n'est pas tant par rapport à nous qu'au monde qui nous entoure, au regard des autres... Comme quoi, tout est lié dans ma tête.» rit elle avant de reporter son attention sur le disque dur, se demandant s'il va finalement entrer pour l'acheter, ou non.

Alors que tout deux sont devant la vitrine, sans plus rien dire, Bee s'interroge, se demandant ce que lui même fait comme études, à proprement parler. Si elle sait qu'il travaille sur une expérience, ce qui peut relever du simple loisir, elle ignore totalement si il étudie dans une branche similaire ou non. Alors, au bout de plusieurs minutes de silence, la demoiselle se décide.

«- Et toi alors, tu étudie dans quoi ? Et tu compte acheter ton disque dur en fin de compte, ou pas ?» le questionne-t-elle en souriant.