« you're asked to live life as vibrantly as possible »

Je ne parvenais toujours pas à croire que cette tête à claques de Logan avait pu encore trouver le moyen de ME blâmer pour l'idée de ma présence ici. Dans le fond, c'était Edward qui y avait passé la semaine précédente à me coincer dès qu'il le pouvait et me faire une liste longue comme le bras sur toutes les raisons pour lesquelles je devais venir. J'avais seulement estimé que dans le cas où l'homme désirait si ardemment me voir ce soir, il pouvait tout aussi bien profiter à son tour de l'excellentissime ambiance qui allait s'annoncer à cette soirée. Non pas que le simple fait que les deux hommes allaient être sur le point d'exploser de testostérones dès qu'ils verraient l'autre, chacun ayant une raison bien à lui de vouloir garder un oeil sur moi. Un oeil ou... autre chose, dans le cas de Logan, même si tous les regards meurtriers du monde ne semblait pas prêts de le décourager à agir comme un con. Mais j'avais forcé sur ses épaules le service et lui m'avait réclamé un prix que je pouvais difficilement refuser, même si jamais je ne m'étais attendue à ce qu'il ne clame son dû de manière si insolente. Tant pis si les étudiants nous surprenaient, il était décidé à avoir sa manière de voir avec moi ce soir, dans cette demeure que nul d'entre nous ne connaissait et mon désaccord ou le risque d'être découvert lui passaient loin par dessus la tête. Il était déterminé et j'en payais les pots cassés... Je ne trouvais satisfaction que dans le fait d'avoir pu me procurer les canines allant avec mon accoutrement de vampire baroque: je n'avait pas acheté ce genre de masque dentaire comme en portaient les boxeurs sauf que ceux-là avaient des canines protubérantes. Non. J'avais carrément mis le prix et m'étais achetée de ces implants de nacre que l'on devait fixer sur les véritables dents, donnant ainsi un aspect réel des plus saisissant et, dans l'optique où j'étais déterminée à faire payer à Logan son culot, particulièrement pratique.

Dès l'instant où nous pénétrâmes dans la pièce, le regard perçant d'Edward me localisa immédiatement, un peu comme s'il devait avoir un radar braqué sur moi qui avait dû s'affoler dès le moment où j'étais entrée en l'avertissant de ma présence. Il batailla pour nous rejoindre, alors que je tentais tant bien que mal de rappeler à Logan que s'il venait de m'avoir, il n'avait en aucun cas le droit de me tenir si proche de lui et de me maintenir corps à corps. L'homme n'était qu'une distraction, il était jusque là hors de question de le considérer comme quoique ce soit d'autre. Un coup de coude dans l'abdomen le força à reprendre ses distances alors qu'Edward faisait son apparition juste devant nous, penché légèrement en avant pour reprendre son souffle alors qu'il avait dû faire face à une petite troupe de harpies (littéralement, à en juger par les déguisements) pour nous rejoindre. A peine eut-il récupéré que je finissais dans ses bras pour un câlin qui me souleva de terre tout en m'étouffant à moitié; diable que la prise d'Edward pouvait être puissante lorsqu'il était question de me câliner ! Ou bien était-ce l'alcool que je percevais sur son haleine qui entravait ses inhibitions naturelles et oubliait de lui faire comprendre que serrer quelqu'un à ce point tenait presque de l'indécence. Mais je n'étais pas fragile et l'alcool lui fit bientôt perdre force alors que je revenais sur le plancher des vaches...

EDWARD – « Qu'est-ce qu'il fait là lui ? »

La question que j'avais le plus envie de me poser, c'était "qu'est-ce que moi je pouvais bien foutre là ?" Edward ne me laissa pas le temps de récupérer et la manière dont les deux hommes avaient de se jauger du regard eut tôt fait de me lasser alors que je me murais dans un silence et refusant de répondre à la question d'Edward autrement que par un haussement d'épaule je m'en foutiste. Après tout, Logan pouvait très bien avoir reçu à son tour un carton d'invitation et s'être pointé à la fête dans le seul but de me pourrir l'existence. Cela sonnait comme une excellente réponse à offrir et lorsque je répétais tout haut mes pensées en décochant à Salaun un regard qui aurait tué n'importe qui, Edward se projeta vers moi en me faisant sursauter légèrement. Je ne m'étais en aucun attendu aux mains curieuses de mon grand petit frère de cœur alors qu'il laissait son doigt se balader sur un morceau de chair enflammée, œuvre bien évidente de Logan qui me poussa à faire porter ma propre main à mon cou dans un espoir vain de cacher la marque. L'enfoiré, il allait me le payer...

EDWARD – « Qu'est-ce que c'est que ça ? »

A boire. Il me fallait quelque chose à boire, quelque chose de corsé et qui me permettrait autant d'éviter de répondre à cette nouvelle question que d'oublier le fait qu'il pouvait y avoir preuve visible de ce qu'il se passait entre Logan et moi. Je ne niais rien, mais ma vie privée ne regardait jamais que moi et j'avais toujours pris grande attention à ce que rien ne ressorte jamais... Mais je devais avouer que depuis mon aventure avec Andrew, je pétais quelque peu un câble et je ne savais plus trop où j'en étais ni même ce que je voulais.

CHEYENNE – « De quoi ça a l'air, à ton avis ?! »

Je me sentais hors de contrôle et je détestais ça, aussi je profitais bien vite du sentiment estomaqué d'Edward et de la fierté arrogante de Logan pour me fondre dans la foule comme la vampire que j'étais supposée incarner, me dirigeant d'un trait incertain et plus ou moins direct vers le bar où j'espérais un peu retrouver la boisson qui avait mis Edward dans un état si second...

EDWARD – « Ah non, non, non ! Je ne suis pas d'accord ! »

J'étais coincée entre Edward et le bar, Logan restant en retrait et savourant apparemment la scène d'une manière que j'étais déterminée à lui faire payer plus tard et non pas avec tendresse. Je sentais venir de la part d'Edward le sermon du siècle (ou l'interrogatoire du siècle, je n'étais pas trop sûre en cet instant précis) et si mon regard avait tout de l'animal traqué, le fait que je faisais l'aller retour entre Ed' et l'unique sortie disponible en disait long sur mes intentions prochaines..

CHEYENNE – « Je n'aurais jamais dû venir. Les enfants m'attendent »

Et juste comme ça, j'étais partie, laissant un Edward toujours autant sur le cul qu'un Logan que je ne risquais pas d'avoir envie de revoir de sitôt.

Je ne sais pas quelle réaction me perturbait le plus alors que je mettais enfin le pied dehors, inspirant une goulée d'air froid dans l'espoir de me calmer mais achevant finalement par provoquer une toux qui me poussa à m'emmitoufler juste un peu plus dans la veste courte, mais chaude, que j'avais prise avec moi. D'un certain côté, je réalisais que ce comportement n'aurais jamais été le mien il y a quelques mois, durant la période "avant Andrew" comme je le disais. Mais je n'étais plus la même. Et Logan, si insupportable et arrogant soit-il, avait le chic pour rassurer une part de moi qui se sentait bafouée depuis l'épisode catastrophique sur lequel s'était achevée ma dernière relation. Mais allez-vous expliquer ça au meilleur ami que j'aurais sans doute jamais et qui se montrait bien trop protecteur pour le mérite que j'estimais mien. Comment expliquer encore ce que j'avais encore du mal à m'expliquer à moi-même? Je n'eus jamais le temps de me poser la question parce qu'une main arrêta bientôt ma fuite et me poussa à me retourner pour faire face à l'homme qui m'avait suivie. S'il s'agissait de Logan, il n'allait pas tarder à rejoindre les quelques morts qui reposaient pas trop loin. Et s'il s'agissait d'Edward... Je ne savais pas comment je réagirais s'il s'agissait de lui, aussi préférais-je plus sûr de garder les yeux rivés au sol dans une attitude de fuite qui ne m'était décidément pas caractéristique et qui n'allait pas rassurer l'ami.

CHEYENNE – « Laisse-moi partir... »

Je doutais que l'homme allait s'exécuter sans un soupçon d'explication, mais cela ne me coûtait rien d'essayer...

Logan eut un petit sursaut en ressentant un coude s'abattre contre son abdomen, le rappelant ainsi à l'ordre. Cheyenne était très sérieuse là-dessus, aucun geste affectif quel qu'il soit lors de cette soirée, et en général d'ailleurs. Les gestes tendres ne devaient voir le jour que leur de moment intime quand ceux-ci perdait un peu de leur bestialité. Salaun comprit bien vite qu'elle voulait garder le secret le plus total vis à vis de ce qu'il se passait entre eux. Elle mettait davantage de valeur à ce qu'elle pensait de lui : il n'était qu'une distraction, rien de plus. Il n'avait aucune importance. Seul son pénis en avait une. D'ailleurs, il sembla blessé par cette révélation, même s'il était d'accord pour que ça ne soit que sexuel entre eux. Pourtant, l'idée qu'il avait autant d'attention de sa part que pourrait l'avoir une cuisse de poulet le vexa. Il garda donc le silence tout en observant l'irlandais arriver jusqu'à eux. En moins de deux secondes, Cheyenne fut soulevée du sol dans une étreinte puissante qui se voulait tout aussi affective. Les sourcils de Logan se froncèrent, montrant son mécontentement à la vue qu'un homme soit aussi complice avec Hutchinson. Il voulait silencieusement l'exclusivité. Et Edward se montrait être un rempart, même s'il fut marié et très amoureux.

« Qu'est-ce qu'il fait là lui ? » Logan fronça davantage les sourcils face à la question d'Edward. Cette réaction creusa un peu plus sa ride du lion. À présent, les deux hommes s'observaient comme deux mâles prêts à se livrer un duel violent dans le but de récupérer une femelle. Puis l'irlandais posa ses yeux bleus sur la marque qu'arborait le cou de la jeune femme, dont Salaun était l'auteur. D'ailleurs, ce dernier ne put qu'afficher un sourire de fierté et d'arrogance à O'Malley, lui faisant ainsi comprendre d'un simple regard que c'est lui qui avait marqué c'est délicieuse peau de pêche. Les réactions étaient toutes différentes les unes des autres. Logan représentait l'arrogance, Cheyenne la colère et Edward la surprise. D'ailleurs, l'irlandais se tourna bien vite vers la jeune femme qui se dirigeais dés à présent vers le comptoir. Il la suivit donc, laissant le français seul dans son coin. Salaun ne chercha pas à les rattraper, probablement avaient-ils besoin de discuter entre eux sans qu'il n'intervienne.

Edward se planta face à Cheyenne et l'observa dans les yeux, lui faisant silencieusement comprendre qu'il souhait de plus amples explications. « Je n'aurais jamais dû venir. Les enfants m'attendent. » Les sourcils de l'homme se haussèrent. Il pensa qu'elle était d'une humeur de chien ce soir. Pourtant, il ne déclarerait jamais forfait aussi facilement et elle le savait mieux que quiconque. Quelques minutes plus tard, il se retrouva donc à l'extérieur, sentant la petite brise lui brûler les joues, contraste avec la chaleur de l'intérieur. Il rattrapa Cheyenne, agrippa son poignet pour la stopper net dans son élan. Toute cette histoire venait de le faire décuver à vitesse grand V. Il obligea la jeune femme à lui faire face, même si cette dernière refusa catégoriquement de lever les yeux vers lui. « Laisse-moi partir... » Edward secoua négativement la tête avant d'entendre quelques gestes plus tendres, ceux qu'un grand frère pourrait avoir pour sa petite sœur. Il cala ses mains de part et d'autre du visage de la belle Hutchinson. « Je veux qu'on en parle... », murmura-t-il avant de déposer un baiser qui se voulait réconfortant sur le bout de son nez, comme il aimait tant le faire. Il lui adressa un sourire accompagné d'un clin d'œil pour lui faire comprendre qu'il n'y aurait aucune représailles.

Il s'empara de son manteau qu'il avait attrapé avant de sortir de la maison et le glissa sur les épaules de Cheyenne pour la couvrir et la garder au chaud. Lui prenant la main, il l'entraîna vers un petit coin d'herbe où il prit place. Il attira Hutchinson avec lui et se plaça face à elle, tandis qu'il calait la jeune femme entre ses cuisses. Sa tête se déposa sur son épaule alors qu'il appliquait quelques douces caresses sur le dessus de sa main qu'il avait délicatement prise. « Je veux savoir comment tu te sens et... m'assurer que Salaun te traite bien. » Il aurait pu lui faire une réflexion sur le fait qu'il était probablement trop tôt pour avoir une histoire avec un homme. Néanmoins, il connaissait Cheyenne, elle savait être sérieuse. Mais ce n'est pas pour autant qu'il ne s'inquiétait pas. « Alors explique moi l'histoire avec lui. Je ne te jugerai pas, tu me connais assez pour le savoir. Je veux juste que tu prennes du temps à me raconter ce qui se passe dans ta vie en ce moment. Je t'aime, tu le sais ça ? », lui chuchota-t-il avant de la serrer doucement contre lui, sans pour autant exercer une pression trop forte.

« you're asked to live life as vibrantly as possible »

J'avais pas l'air comme ça, mais je détestais quand il faisait ça. Dernièrement, en tout cas. M'empêcher de fuir et retrouver une certaine tranquillité d'esprit alors que j'enfermais ce qui me dérangeait dans un abysse dépourvu d'émotions et dont les parois étaient en béton armé. C'était plus simple, ainsi. Ne pas faire face là où quelques mois auparavant je n'aurais pas hésité à foncer dans le tas. Était-ce une conséquence d'avoir un cœur brisé? La moindre contrariété finit dans cette boîte, celle estampillée "choses à régler plus tard" pour finir oubliées une bonne fois pour toute ? Mais là, Edward m'avait arrêtée, empêchée de fuir comme je l'aurais voulu et mettre cette histoire derrière moi; les enfants m'attendaient, vrai, mais la baby-sitter ne m'attendait pas avant quelques heures. Je comptais rentrer une bonne partie à pied puis probablement prendre un taxi comme j'étais venue, juste le temps au moins de me changer les idées et de me reprendre avant de retrouver mon cocon familial. Mais Edward se devait d'avoir des plans différents. Sa poigne me brûla un instant avant que son toucher se fit plus tendre et le simple fait que je ne croisais pas son regard, ni ne m'étais chargée de le mettre au sol devait être indicateur des émotions s'emparant de moi.

EDWARD – « Je veux qu'on en parle... »

Il souleva doucement mon visage, même si je refusais toujours de verrouiller mon regard avec le sien. L'attitude fuyante n'avait jamais été dans mon vocabulaire mais j'en démontrais un exemple parfait ce soir... mais il embrassa mon nez. De toutes les choses pas sérieuses qu'il aurait pu faire, il choisi celle là et la tension disparu d'un coup alors que je laissais un tout petit rire percer le silence de la nuit. Mon rire trouva compagnon dans le sourire qui graciait le visage de mon meilleur ami et le clin d’œil qu'il m'adressa eut tôt fait d'abattre mes dernières réticences. J'étais toujours en colère, il n'y avait aucun doute là dessus, mais que cela soit contre le culot de Logan ou bien contre le fait que je me laissais glisser sans plus de résistance dans l'abysse d'oubli que me promettaient l'intensité de ses étreintes, je n'étais pas sûre. Peut-être un peu des deux. Probablement ni l'un ni l'autre. Il me fallu quelques instants pour que mon cerveau ne rattrape le fait qu'il avait déposé un manteau plus lourd que le mien sur mes épaules et m'emmenait à l'écart. Fouinant mon nez dans la chaleur du col, je le remerciais d'un regard avant de le suivre alors qu'il s'installait de manière à pouvoir sérieusement discuter. Ou me réconforter. Ou ne rien faire et juste m'observer jusqu'au matin.

EDWARD – « Je veux savoir comment tu te sens et... m'assurer que Salaun te traite bien. »

Il avait fallu qu'il pose les deux seules questions à laquelle je n'avais pas vraiment de réponse, hein? Comment je me sentais? Comme une mère célibataire complètement dépassée par ce qui lui arrivait, épuisée par son quotidien et le fait qu'elle était trop butée pour laisser paraître une quelconque faiblesse. Comme une femme bafouée par ses illusions, par les promesses d'un "forever" qui ne lui laissait plus que ses yeux pour pleurer. Je ne me souvenais même pas avoir pleuré le départ d'Andrew, concentrée que j'étais de ne pas laisser le stress de son départ avoir un impact trop néfaste sur la grossesse qui touchait à sa fin à l'époque. Mes enfants étaient devenu toute ma vie, ma seule constante, et je m'effaçais doucement au passage. Avec Logan, je retrouvais un peu de vitalité perdue, même si profiter d'une relation exclusivement sexuelle n'était pas ce qui pouvait être mieux pour moi. Je n'étais juste pas prête à replonger dans les désillusions de sentiments peu sincères et, au final, rien de plus qu'éphémère... Est-ce qu'il me traitait bien? Oui.... à la façon Logan. Nous étions tous les deux trop impulsifs dans nos relations et baignant les rapports de violence que je n'étais pas sûre de savoir comment répondre: oui, il me traitait bien, mais le bien passait par une dose de violence qui était la pâle copie de nos joutes verbales, alors transposées à un niveau plus physique et jouissif...

CHEYENNE – « Définis "traite bien" ? »

Quand il était question de Salaun, tout était relatif. Réalisant que ce n'était peut-être pas la meilleure tactique à adopter pour répondre à sa question, je m'occupais de reprendre bien rapidement, dans un soupir.

CHEYENNE – « C'est lui et moi, tu sais bien comment nous sommes quand on est confronté l'un à l'autre. Rien n'a changé hormis la nature des affrontements. Ne t'attends pas à me voir gazouiller de bonheur et lui murmurer des mots doux à l'oreille je... je ne suis pas encore prête pour ça. Remarque, avec ma chance, peut-être ne le serais-je plus jamais, hein? Enfin, un soir il est passé au loft voir comment j'allais, et une chose en a entraîné une autre... il n'a pas pris avantage, il a même été surprenant de self-control de ce côté là, mais j'ai fini par passer la nuit avec. J'ai voulu passer la nuit avec. Et la suivante. Et d'autres. Il ne reste jamais parce que je nous l'interdis et pour l'instant, ça semble convenir à toutes les parties... Cela n'a rien de romantique ou quoi, juste... il est là quand j'ai besoin et d'un certain côté, je suis totalement grisée par sa présence... Même si une fois le soleil levé, il revient dans la case "me tape sur les nerfs comme ce n'est pas permis" de mon répertoire d'amis, hein? »

Seigneur ce que je craignais à ce genre d'explications. Je passais plus de temps à bégayer et douter de la fermeté de mes mots qu'à réellement les prononcer. Le fait est que j'ignorais comment décrire ma relation avec Logan, si ce n'est que la violence et la passion physique qui nous retenaient le temps d'une union semblait suffisante pour libérer le stress et le dégoût que j'exprimais envers moi-même. Quelque part, il me rendait le sentiment d'être vivante et d'être désirable en tant que femme, chose qui avaient été l'un et l'autre mis à mal par la fuite de mon ex. Si un abandon peut heurter n'importe quoi d'autre que le coeur de celui qui reste, c'est bien l'estime de soi. Et si le fait d'avoir une relation exclusivement sexuelle avec un homme qui était réputé pour être ma nemesis parfaite sur tous les plans n'était pas vraiment signe d'estime de soi parfaitement restaurée, pour l'instant, cela me convenait parfaitement.

EDWARD – « Je t'aime, tu le sais ça ? »

L'instinct me prit par surprise et entendre ces quelques petits mots provoqua chez moi une réaction me laissant tendue comme un arc, comme prête à accuser un coup, à m'attendre au pire. Mais si la crainte d'avoir mal à nouveau ne traîna pas, c'était parce que je me souvenais de celui qui les prononçait, de mon petit aventurier personnel qui prenait plus soin de moi que le faisait n'importe qui d'autre. Moi comprise.

CHEYENNE – « Ce sont des mots bien dangereux, tu le sais ça ? Heureusement que je t'aime aussi, Indy... »

Mon petit grand frère. L'abattement qui perlait dans ma voix ne dû pas le rassurer énormément, comme s'il était finalement l'adulte alors que j'étais l'enfant. Pour une fois que l'ordre des choses était telle qu'elle le devait, je restais blottie contre lui alors qu'il réagissait à tout ce que je venais de confier... Même si dans le fond, mon histoire avec Logan donnait des pistes sur le "comment je me sentais" sans que je n'aie vraiment donné de réponse. Parce que je n'étais toujours pas sûre de pouvoir mettre un terme sur ce que je ressentais; le silence serait meilleur adjectif pour l'instant...

Quand je lui expliquais vouloir m'assurer que Salaun la traitait bien, je lui faisais clairement comprendre par cette simple parole que je ne m'opposais pas à ce qu'elle le fréquente. Bien évidemment, si j'avais pu choisir pour elle, j'aurai amené un autre homme en face d'elle. Quelqu'un de plus... agréable à vivre dirons nous. D'un côté, je n'avais jamais nié le fait qu'entre elle et Logan, leurs discussions explosives relevaient d'une relation étrange. Mais j'avais mis cela sur le compte d'une simple tension physique, peut-être sexuelle, rien de plus. Et comme je ne connaissais pas encore l'ampleur de leur relation, j'en déduisais qu'elle commençait tout doucement une histoire avec lui. Pas sérieuse au point de faire des projets, mais assez pour qu'ils se caractérisent comme le ou la petit(e) ami(e) de l'autre. Me trompais-je ?

« Définis "traite bien" ? » Cette simple question me fit l'effet d'une bombe. Sous-entendait-elle par là qu'il la traitait mal ? Mes sourcils se froncèrent avec brutalité, alors que je posais mes mains à plat sur l'herbe dans le but de me donner de l'élan pour me lever. J'allais faire de ce breton de la chair à pâté que je donnerai à manger à Tiago et à Faldo ! Mais quand Cheyenne comprit que j'étais sur le point de me lever dans le but d'aller à la rencontre de Logan, elle reprit bien rapidement, dans un soupir, un petit monologue.

Elle chercha donc à me décrire, avec ses propres mots, la relation qu'il y avait entre Logan et elle. Si je comprenais bien, c'était uniquement sexuel. Elle n'était pas prête à avoir une relation sérieuse avec un autre homme après le départ d'Andrew, qui lui avait clairement ruiné sa conception de l'amour. Et Salaun, au final, était son punching ball le jour, et son jouet sexuel la nuit. Cette idée déclencha un frisson le long de mon échine. Beurk ! Cheyenne, je la considère comme ma petite sœur et involontairement, elle m'expliquait qu'elle prenait son pied et ce, quasiment tous les soirs, avec cet homme qui me sort tant par les yeux. Et je n'avais franchement pas envie de les imaginer en train de... ah non ! Beurk !

D'un autre côté, une partie de moi approuvait cette relation. Cheyenne a besoin de se défouler et même si je suis particulièrement présent pour elle, j'ai tendance à la calmer dans ses agissements. Ainsi, elle garde toute son énergie en elle. Un trop plein d'énergie même. Logan contribuait donc à l'épuiser, aussi bien physiquement que mentalement. Elle était donc capable de se changer les idées et probablement l'aiderait-il à avancer avec ce qui lui est arrivé. Pourtant, j'avais comme l'impression que cette histoire allait finir d'une façon totalement différente de ce qu'ils souhaitaient. Salaun a déjà des sentiments pour elle, Cheyenne m'a-t-elle expliquer. Un jour, il voudra certainement plus qu'une partie de jambes en l'air en pleine nuit comme deux amants discrets. Tout comme Hutchinson risquait de s'attacher à sa façon.

Il me fallait donc la soutenir. Je suis avant tout son ami et elle est assez grande pour savoir ce qui est bien pour elle. À moins qu'elle dérape totalement, je n'avais pas besoin de lui expliquer totalement mon point de vue. Si sa relation avec Salaun lui allait, je la soutiendrai du début jusqu'à la fin. Tout en gardant bien évidemment un œil sur l'homme qui ne faisait pas partie de ceux que j'ai envie de connaître davantage. Quoi que maintenant, ça risquait de changer. Je voudrai tout savoir, absolument tout.

« Ce sont des mots bien dangereux, tu le sais ça ? Heureusement que je t'aime aussi, Indy... » Un large sourire enfantin s'afficha sur mes lèvres alors que je restais particulièrement attendri par elle et par notre complicité. Je me plaçais face à elle et laissais mes doigts parcourir ses joues. Puis le bout de mon nez vint effleurer le sien dans un dit ''bisou esquimau'' particulièrement charmant. Puis je venais doucement la serrer contre moi. « Si cette relation de sex-friends te va pour le moment, profites-en, surtout si ça te permet de te changer les idées, de te défouler avec Salaun et t'aider à avancer par rapport à Andrew. Mais... tu es consciente que ça ne pourra pas continuer comme ça encore très longtemps, hein ? » En effet, je préférais la mettre sur ses gardes, car c'est aussi mon boulot de meilleur ami. « Il t'avait déjà avouée avoir des sentiments pour toi quand tu étais encore avec Holden. Je doute que ça ai changé. Pourtant... j'espère que vous saurez vous arrêter avant que l'un soit blessé par cette relation. C'est peut-être égoïste, mais si c'est lui qui doit chialer, je m'en fiche. Mais toi, je refuse de te voir dans un sale état encore une fois. J'aimerai éviter de devoir te ramasser à la petite cuillère, sinon, je te jure que je le tue. » Mon regard croisa le sien alors que je déposais un baiser sur sa tempe. « Promet moi de continuer cette relation uniquement si ça te rend heureuse. Après, tu lâches l'affaire quand tu comprends que ça commence à partir en vrille. » En effet, elle ne pouvait pas me demander non plus de ne pas m'inquiéter pour elle.

« you're asked to live life as vibrantly as possible »

Un baiser nez contre nez était tout ce qu'il avait fallu pour me faire éclater de rire, calmer mon coeur s'emballant toujours autant et me laisser enfin finalement relaxée contre mon meilleur ami. Cela n'avait pas aidé qu'il se soit senti soudainement d'envie de se lever et d'aller refaire (ou tenter, du moins) le portrait à Logan, chose dont j'avais pu finalement le retenir de faire. Ce n'était pas comme si ses altercations avec Andrew n'avaient pas déjà été dignes des Annales de mon existence. J'avais de la chance d'avoir un ami comme lui et le rappel de ce fait on ne peut plus réconfortant ne me poussa qu'à m'appuyer juste un peu plus contre lui et à savourer tout simplement sa présence....

CHEYENNE – « Je pense qu'il sait. Qu'il réalise que.. enfin, ce n'est pas voué à évoluer en quelque chose de plus, tu vois ? Quelque fois, je me demande même si nous ne sommes pas deux à être rebuté par l'idée de plus. Il a des sentiments pour moi, peut-être... mais ça n'est pas supposé signifier quoi que ce soit pour moi, hein? Andrew avait des sentiments pour moi, il promettait d'être là, toujours et de me soutenir coûte que coûte. Regarde où ça m'a menée, hein? Au moins Logan ne nous embarrasse pas de désillusions ou de promesse qu'il n'est pas capable de tenir. »

C'était à se demander s'il n'avait pas eu l'oreille qui sifflait, puisqu'à peine son prénom fut-il prononcé que l'intéressé s'avançait sur le petit porche, appuyé contre une poutre et fouillant sa poche dans le but d'y glaner une cigarette. Inconsciemment, nos regards se cherchèrent et je ne pus m'empêcher le petit sourire désolée qui s'affichait sur mon regard. Pourquoi étais-je désolée? Désolée pour qui? Je n'étais plus vraiment sûre de rien et dans la confusion la plus totale, sans vraiment savoir pourquoi, les yeux commencèrent à me piquer alors que je m'efforçais de retenir les traîtresses qui menaçaient de couler le long de mes joues. Sacrée soirée. Jamais je ne me serais imaginée devoir justifier quoi que ce soit à Edward, et ce n'était pas ce qu'il me demandait -j'en étais consciente- cela n'empêchait cependant pas mes tentatives. Est-ce que cela faisait de moi une mauvaise personne que de rechercher le réconfort dans la violence et la force brute d'un autre homme ? Il y avait certaines choses qu'un meilleur ami ne pouvait contribuer à soigner. "Éviter de te ramasser à la petite cuillère". S'il savait... Baissant les yeux comme si j'accusais l'affirmation d'Edward, je hochais la tête faiblement comme si je prenais la vérité des mots de mon ami pour argent comptant. Mais le fait est que j'étais sur une pente glissante depuis le départ de mon ex et que si les enfants n'avaient pas été là, je pense que j'aurais accusé le coup de manière beaucoup plus dramatique. Je n'étais pas le genre à faire aisément confiance, mais le peu que j'avais, il l'avait piétiné sans vergogne en me laissant derrière. Le pire était sans doute de ne pas vraiment savoir pourquoi. Le doute m'étreignait toujours le coeur et c'était ça qui me rongeait le plus: avais-je fait quelque chose de mal ? Dis quelque chose qu'il ne fallait pas ? Du jour au lendemain nous étions passé de couple heureux en ménage à une absence cruelle soulignée par la seule note qu'il m'avait laissé un matin.... Et je ne parvenais toujours pas à comprendre pourquoi.

CHEYENNE – « Tout le monde a une manière différente de réagir à une perte. Certains dépriment, d'autres noient leur souci dans l'alcool. Je ne peux faire ni l'un ni l'autre, j'ai les enfants... »

Je cherchais à profiter de l'explication que je lui offrais pour tenter de comprendre moi-même le raisonnement derrière mes actes. La vérité étant qu'il n'y avait absolument aucun raisonnement, que je fonctionnais seulement en personne de chair et de sang, libérée du poison des sentiments pour vivre une relation en étant dépourvue avec un homme n'ayant jamais attisé autre chose que la passion et la frustration. L'amour? Une plaisanterie ? Faire confiance à Logan ? Je ne sais pas si j'accorderais un jour ce luxe à quiconque d'autre que l'homme contre lequel je m'appuyais ce soir, autant au sens figuré qu'au sens propre. Je ne me sentais pas encore prête pour ça...

CHEYENNE – « Ne sois pas bête, tu sais bien que je ne suis pas heureuse. Quand les enfants ne sont pas là, tu sais que je ne trouve pas de raison, de vraie raison de l'être... Je vis ma petite vie, mon petit train train quotidien, brillant par l'existence de ces deux anges, mais je ne suis pas heureuse. Logan est ... Honnêtement, je ne sais pas ce qu'il est. Il n'est pas celui qui viendrait à me faire perdre mes repères puisque jusque là, je n'en ai plus. Il n'est pas celui qui viendrait à me désabuser à nouveau sur le principe d'une relation, si houleuse soit-elle, puisque le dernier s'est fait une joie de me dérober ce petit espoir. Logan est là. Surprenant, dans le sens où parfois je ne me serais jamais imaginé certains comportements venant de lui... Bon, ne fais pas cette moue dégoûtée, je ne parlais pas de ça, dis-je avec un petit rire en lui mettant un coup d'épaule joueur avant de replonger mon regard sur l'immensité qui nous contemplait, mais tu sais, le bonheur? Être vraiment heureuse? Peut-être un jour, mais pas encore tout de suite... »

Mes mots étaient maladroits et je n'avais pas trop de doute sur le fait qu'Edward avait trop fortement envie de briser tout ce qu'il pouvait frapper chez mon ex. Andrew s'était fait un ennemi à vie, et ce n'était pas rien de l'indiquer. J'aimais bien son caractère protecteur, si gamin puisse-t-il être parfois. Au moins, il était constant, et ça faisait plaisir de pouvoir compter sur au moins un specimen de la gent masculine. Logan était encore trop instable, trop imprévisible pour pouvoir un jour profiter des mêmes privilèges que mon meilleur ami. Il était mignon, d'ailleurs, à s'inquiéter ainsi et à pincer des lèvres en fronçant des sourcils. Aussi confuse et indécise que je fus par rapport à mes explications, j'appréciais sa présence à mes côtés et si je ne promettais pas verbalement quoi que ce soit, désabusée de la valeur de promesses pour oser l'affront d'en faire une au seul homme constant dans ma vie.

CHEYENNE – « Tu sais aussi bien que moi que tu remarqueras avant moi que quelque chose ne va pas et je te fais confiance pour mettre un terme à tout ça avant que je ne puisse dire ouf. Même si je désapprouve toujours autant le fait que tu te battes, jeune homme. »

J'avais pris la meilleure voix "maman" que je pouvais et je tentais de jouer la femme sévère et décidée à sévir. Tentative complètement foutue en l'air lorsque je m'approchais juste un peu plus d'Edward pour m'accrocher à lui et lui offrir un câlin tel que je ne lui en avais jamais offert, irradiant involontairement de toute l'insécurité et du manque d'estime de soi dont j'étais actuellement victimes. Pendant ce temps, des jeunes entraient et sortaient de la maison, d'autres riaient alors qu'un petit groupe se dissimulait dans les ombres pour faire peur aux fuyards et je devinais Logan dans les ombres. Le regard embrasé par la rougeur de la cigarette sur laquelle il tirait avec rage, espérant sans doute pouvoir mettre un terme à la pauvre clope qu'il laminait honteusement avant que l'étreinte qui me liait à Edward ne s'achève. Son seul problème étant que je n'avais pas envie de laisser mon diablotin partir.

CHEYENNE – « Je suis désolée d'avoir gâché ta fête, tu es super déguisé comme ça. C'est bluffant, dis-je en accompagnant mon commentaire d'un sourire taquin, flattant le col de mon diablotin en ruminant sur à quel point le choix était judicieux. Tu devrais retourner à l'intérieur, t'amuser, je pense que j'ai cru reconnaître certains professeurs là dedans -Batman ?- donc tu ne serais pas seul et moi je vais juste prendre un taxi et rentrer. Je suis fatiguée... »

La note sur le super-héros avait été mentionné avec un octave d'écart, le ton taquin comme si je pouvais vraiment me demander de qui il pouvait s'agir. Mais la fatigue que j'éprouvais n'était pas feinte, les explications peu à l'aise ayant le mérite de m'exténuer à vitesse grand V . Je me préparais déjà à m'éloigner, défroissant ma robe quelque peu avant de faire quelque pas vers la barrière. Ce n'est qu'une fois arrivé au portail du domaine, donnant sur la rue, que je réalisais que je n'y étais pas seule...

CHEYENNE – « Sérieusement ?? »

Entendre Cheyenne rire de bon cœur réchauffait le mien. J'aurai fait n'importe quoi pour la voir heureuse et c'est la raison pour laquelle je m'adonnais à un bisou esquimau, sachant pertinemment que ça l'amuserait. Oui, j'ai besoin de voir la joie d'Hutchinson. C'est pour cela d'ailleurs que j'ai été particulièrement blessé qu'Andrew mette les voiles de cette façon. Je ne l'ai jamais vraiment apprécié, et notre entourage l'a bien vite comprit quand nous nous étions battus à deux reprises. Pourtant, j'avais gardé le petit espoir que je me trompais, qu'il n'était pas aussi salop que ce que j'avais pu imaginer. Cheyenne l'aimait, il devait bien avoir une raison à cela. Ainsi, quand il est parti, la laissant enceinte jusqu'au cou, pas une seule seconde je n'eus envie de lui dire quelque chose comme : « Je t'avais prévenue ! », car il est clair que j'aurai préféré me tromper.

Elle m'expliqua que la relation pour le moment qu'elle entretenait avec lui était claire, nette et précise. Pas de sentiment. S'il devait y en avoir, ils ne devaient pas compter. Pourtant, je doutais clairement que Logan puisse faire taire ces derniers avec autant de facilité. Là, il y arriverait sûrement, oui. Mais dans quelques mois ? Il y a un moment où ils devront prendre une décision car jouer avec les sentiments de l'autre n'étaient pas non plus la meilleure solution. Suite à ces paroles-ci, Salaun apparut au niveau de la porte d'entrée. Il s'alluma une cigarette. Je croisais son regard. Pourtant, il ne fronça pas les sourcils, et ne montra aucune réticence au fait que je sois aussi proche d'elle. Probablement comprenait-il que je tâchais de lui remonter le moral, si bien qu'il ne souhaitait pas s'y opposer. Enfin je reportais mon attention sur Cheyenne alors qu'elle reprenait la parole.

Elle tenta ensuite de me faire comprendre ce que Logan représentait pour elle. À l'une de ses paroles, je grimaçais. Était-elle en train de parler de ses prouesses sexuelles ? Probablement non dans la mesure où j'eus le droit à un coup d'épaule. J'esquissais un sourire amusé avant d'envelopper son corps de mes bras pour la caler contre moi avec toute la tendresse du monde. La savoir malheureuse me faisait tout aussi mal, car je restais impuissant face à cela. Oui, je pouvais être présent, l'écouter, la gratifier d'une multitude de gestes tendres, était-ce suffisant ? Ma main chercha la sienne alors que je jouais avec ses doigts, les sourcils froncer. Ma joue passa contre la sienne alors que je fermais les yeux un instant. Elle semblait comprendre ma détresse présente, car elle m'expliqua que je lui étais d'une certaine aide, qu'elle pouvait compter sur moi. Mes yeux bleus se rouvraient, alors que je croisais son regard. Elle détestait mon côté bagarreur ? Moi non plus, je ne l'aimais pas à vrai dire. À partir de là, elle m'adressa un câlin qui me surpris, comme si c'était le dernier qu'elle pouvait me faire. Mon visage arbora une mine attendrie alors que je la laissais faire. Mes bras puissants repassèrent autour de son corps. Nous devions être très mignons à voir.

« Je suis désolée d'avoir gâché ta fête, tu es super déguisé comme ça. C'est bluffant. » Je tentais un bref sourire. Non, elle n'avait absolument pas gâché ma fête. « Tu devrais retourner à l'intérieur, t'amuser, je pense que j'ai cru reconnaître certains professeurs là dedans -Batman ?- donc tu ne serais pas seul et moi je vais juste prendre un taxi et rentrer. Je suis fatiguée... » Mes sourcils se froncèrent à nouveau, et avant même que je ne puisse comprendre le pourquoi du comment, elle était déjà debout et se dirigeait vers la sortie du domaine. D'un geste rapide, je m'élançais vers elle. Je tombais nez à nez avec Logan. Nos regards se croisèrent. « Mh... ça ne te dérange pas si je dors chez elle ? » Pourquoi lui demandais-je la permission ? Mes sourcils se froncèrent. Probablement par respect car jusqu'à preuve du contraire, il contribuait à la remontée de Cheyenne à la surface. Il m'observa, puis ses yeux firent la navette entre Hutchinson et moi. Puis il se résigna en hochant la tête. « Prends soin d'elle. », me lança-t-il de sa voix rauque. Je sentis beaucoup de sincérité dans sa voix, ce qui arriva à me surprendre davantage. Je hochais la tête puis reprenais ma route, d'un pas rapide pour rejoindre Cheyenne.

Nos regards se croisèrent. « Tu n'as absolument pas gâché ma fête. Et... si t'es d'accord... j'aimerai bien dormir chez toi. Après tout, ça fait longtemps qu'on ne s'est pas fait une soirée posée, avec des pots de glace et de Nutella devant la télévision. Et... ça sera l'occasion de voir mes filleuls. » Je la suppliais du regard. « Allez, dis oui ! » Je savais que ça ne la dérangeait pas. Mais j'insistais autant pour lui faire comprendre que j'en avais clairement envie, et que ce n'était pas par pitié que je plaquais les collègues à cette fête. A partir de là, un moteur se fit entendre. Logan avança en voiture. « Je vous ramène ? », proposa-t-il sur un ton assez neutre. « Allez, grimpez. Comme ça, vous arriverez plus vite et je pourrais ensuite rentrer chez moi. » Il adressa un petit sourire arrogant à Cheyenne avant de l'inviter à prendre place avec moi dans la voiture. « Et toi O'Malley, tu vomis l'alcool que tu as bu, je t'abandonne sur une route. » Je levais les yeux au ciel. « C'est trop gentil de ta part... »

« you're asked to live life as vibrantly as possible »

Edward avait parfois cette façon de me regarder, un peu comme s'il était à la fois désolé pour moi et désireux de me caller entre les dents juste à quel point j'avais pu me tromper sur Andrew. A quel point il avait pu voir clair dans un jeu auquel j'ignorais être joueuse. C'était la première chose que je lui avais dit lorsque le moment était venu de mettre une raison sur l'absence perpétuelle d'Andrew à mes côtés et Edward s'est contenté à l'époque d'un petit hochement de tête bien sobre avant de passer la nuit avec moi. Je n'avais pas pleuré lorsque mon couple a volé en éclat... A ce jour, encore, je me refusais pertinemment à verser une larme et c'était peut-être l'une des raisons pour laquelle je plongeais en piqué dans une relation charnelle sans réel lendemain avec Logan. Parce que ça animait le sentiment mort en moi...

Peut-être...

Ainsi nichée contre Edward, je ressentais pendant juste quelques secondes que rien ne pourrait m'atteindre ou me faire de tort; mais la fraîcheur ambiante, couplée à l'humidité du sol contribuait à un mal être croissant qui me rappela à quel point le moment était mal choisi pour câliner mon meilleur ami: le vent d'automne était frais, et ce n'était pas avec ma tenue extrêmement fine que j'allais bien pouvoir éviter d'attraper froid, même si le manteau d'Edward doublé des bras du gaillard faisaient pour l'instant un bon rempart contre le froid. Je n'étais juste pas à l'aise, sans vraiment pouvoir dire de me justifier pourquoi.... Il dit m'aimer, je lui rétorquais la même chose, mais le sentiment comprimant mon coeur revenait au galop comme si les mots, si honnêtes furent-ils, portaient toutes les marques de danger qu'il fut possible d'avoir. Le malaise s'intensifia et quelques secondes plus tard je plantais Edward, prenant mon congé en balbutiant quelques excuses minables et m'engageait rapidement vers l'extrémité du domaine en oubliant même de rendre sa veste à Edward. Le soulagement que je ressentais en entendant Edward s'avançait dans la direction opposée fut de courte durée puisque je pouvais l'entendre clairement parler à Logan, même si je ne parvenais pas à discerner l'exactitude de leurs paroles. Quelques secondes plus tard et j'étais à moitié écrasée par le poids d'Edward qui avait fondu sur moi comme un aigle sur sa proie, passant son bras par dessus mon épaule et s'appuyant sur moi comme un mec s'appuierait sur un pote.

EDWARD – « Allez, dis oui ! »

J'en étais au point de me retourner afin de voir si je ne pouvais pas capturer l'expression de Logan à l'entente de cette demande. Je ne lui devais rien, certes, mais les hommes autour de moi avaient une fâcheuse tendance à se battre comme des coqs pour un rien, et je ne voulais pas qu'Edward se prenne la raclée du siècle juste parce qu'il avait l'intention de passer une soirée pyjama chez moi. Mais Logan était déjà hors de vue, me laissant avec un pincement au coeur que je ne parvenais pas à définir... Edward se laissait toujours entendre, gazouillant comme un gosse à Noël en me faisant état de tout ce que nous allions pouvoir manger, regarder, faire, tout ça à un soir d'Halloween. Mais je ne pouvais jamais m'empêcher de me dire qu'il avait une famille aussi.

CHEYENNE – « Maria ne risque-t-elle pas de t'attendre ? »

Je n'avais pas l'intention de me montrer réprobatrice ou quoi que ce soit, mais je n'avais jamais été le genre égoïste assez pour faire passer mes besoins avant ceux de sa famille et dans le naturel protecteur que j'étais, je voulais juste être sûre que tout avait été pris en compte... Logan entrava toute possibilité de discussion plus avancée lorsqu'il débarqua en voiture, nous repêchant sur le côté de la route en nous proposant presque gentiment de nous raccompagner.

CHEYENNE – « Qu'est-ce qu'il y a, Logan, tu as peur que mon meilleur ami ne me ravisse et profite de ma nuit plus que toi ? Jaloux ? »

Il ne répondit rien, mais le soudain grondement de moteur trahit le réflexe qui dû tendre son corps entier pour se retenir d'une quelconque répartie. Connaissant Logan, si seulement il avait aimé Edward, que ce dernier ne soit pas mon meilleur ami ou que cela soit mon genre tout court il aurait presque pu proposer de partager à trois. Dieu sait qu'il avait la réputation de l'avoir déjà fait avec plusieurs femmes à la fois.... Mon esprit tortueux m'entraînant là où il ne fallait pas, je me pinçait l'arête du nez en fermant les yeux et me concentrant comme si je désirais faire disparaître une migraine. J'ai besoin d'un verre... Le murmure n'avait pas été plus que ça, un murmure, mais je savais pertinemment que les deux hommes m'avaient entendue. Ce n'est que lorsque Logan menaça légèrement Edward de l'abandonner sur le bas côté s'il venait à être malade que je ne relevais la tête, le regard plein de malice et de défi alors que je laissais les mots prononcés faire leur chemin dans l'esprit de Logan...

CHEYENNE – « Arrête tes menaces à deux balles, Logan, tu sais que si ça venait à arriver tu n'as pas envie de dégager mon meilleur ami. Dans le genre pour rentrer dans mes bonnes grâces, je suis sûre que tu trouveras mieux que ça... et puis on sait tous les deux que si on venait à se battre pour la voiture, c'est moi qui gagnerais. Donc... »

Je décochais un regard malicieux au chauffeur tout en arquant un sourcil dans un air qui donnait presque l'impression de dire "CQFD". Je me retrouvais dans cette situation étrange où je n'avais envie de me chamailler avec aucun des deux, juste me laisser porter par le support moral que les deux hommes prodiguaient. Certes, les tonnes de glace qu'Edward me ferait manger ce soir n'allaient rien faire pour ma ligne, mais j'adorais le fait qu'il ait proposé l'idée. Je préférais garder sous silence le fait que Logan n'avait pas à demander où je vivais, en revanche, Edward avait déjà bien trop d'informations à mon goût sur ce propos bien particulier pour encombrer son esprit de davantage d'informations.

CHEYENNE – « Et puis, Edward est un grand garçon, il ne va pas être malade, hein ? »

Oh, à quel point je savais que lorsqu'il était question de boire, Edward était un pro ... pas dans le mauvais sens du terme, juste assez pour savoir se contenir et bien tenir l'alcool. Il était irlandais de naissance, après tout... Ces gars là avaient une belle descente, au moins pour me rendre curieuse assez et d'imaginer les deux hommes, deux bels alphas, en pleine compétition pour déterminer lequel des deux tiendrait debout en dernier.

Je ne sais pas ce que j'avais ce soir, mais mon esprit fonctionnait de manière con, ce n'était pas possible autrement. J'étais sûrement plus fatiguée que ce que je voulais bien le laisser prétendre, promettant une fin de soirée pyjama prématurée. Chose qui, si Edward était déterminé à me faire parler de moi et ma situation, était probablement pour moi la meilleure des choses qu'il puisse m'arriver...

« Maria ne risque-t-elle pas de t'attendre ? » J'eus uniquement le temps de secouer la tête de droite à gauche tandis que nos regards se croisaient à nouveau. Maria est d'un naturel jaloux, néanmoins, elle savait que jamais quelque chose se passera entre Cheyenne et moi. C'était juste impossible, et cette simple pensée me choquait et m'écœurait presque. Hutchinson est une très belle femme, attirante, avec une personnalité qui en charme plus d'un, mais jamais nous pourrions avoir une quelconque histoire. Nous étions trop complices pour cela, et à part donner l'impression de tomber dans l'inceste, une relation autre qu'amicale ne pourrait pas nous apporter grand chose. Maria en était clairement consciente, et dans la mesure où je lui avais dis que je passerai la soirée avec Brooke – et là, ça lui posait un réel problème – le changement de situation la rassurera, j'en étais persuadé. Et puis, dans la mesure où Cheyenne et moi n'avons pas vraiment eu, ces derniers temps, l'occasion de passer un moment juste tous les deux, ça ne pourra que nous faire du bien. Je n'aurai qu'à envoyer un message à mon épouse pour lui expliquer que je passerai la nuit chez Hutchinson, notamment pour garder un œil sur elle.

Néanmoins je n'eus pas vraiment le temps de lui faire part de tout cela dans la mesure où Logan arriva, aux commandes de son véhicule. « Qu'est-ce qu'il y a, Logan, tu as peur que mon meilleur ami ne me ravisse et profite de ma nuit plus que toi ? Jaloux ? » Salaun n'avait absolument rien répondu. Il garda le silence et son sang froid, uniquement pour ne pas avoir à répondre à son pic, en sachant pertinemment qu'elle n'avait pas besoin d'une quelconque joute verbale ce soir. Il prit donc sur lui, et je ressentis une certain compassion envers cet homme qui, probablement par amour, préférait encaisser des paroles maladroites et probablement un peu vexantes, plutôt que de se montrer désagréable envers celle pour qui son cœur balance. Je venais même à penser que Cheyenne ne devrait pas lui parler de la sorte à chaque fois, et ce, même si je n'appréciais pas vraiment le français.

« Arrête tes menaces à deux balles, Logan, tu sais que si ça venait à arriver tu n'as pas envie de dégager mon meilleur ami. Dans le genre pour rentrer dans mes bonnes grâces, je suis sûre que tu trouveras mieux que ça... et puis on sait tous les deux que si on venait à se battre pour la voiture, c'est moi qui gagnerais. Donc... » Logan se mit à froncer les sourcils avec une telle force qu'il aurait probablement intimidé plus d'une personne. Il fusilla Cheyenne du regard, d'une telle façon qu'il sembla lui faire comprendre qu'il voulait bien faire des efforts, mais qu'en aucun cas il n'était soumis à elle. Que si elle le provoquait, il serait capable de l'abaisser plus bas que terre. Ce fut à mes sourcils de se froncer. Je n'avais aucune envie qu'il traite ma meilleure amie d'une telle façon et d'un autre côté, je pouvais comprendre sa réaction dans la mesure où les hommes ont un égo démesuré. Et en vue de la façon dont Cheyenne lui a parlé, lui faisant clairement comprendre qu'elle portait la culotte, il semblait évidemment que Logan ne laisserait jamais une telle chose arriver, ce que je trouvais également légitime. La seule différence entre nous deux, c'est que lui estimait que l'un des deux devaient dominer, qu'une hiérarchie était nécessaire. Pour ma part, j'estimais que personne ne devait porter la culotte, que dans un couple, les deux sont sur un pied d'égalité.

Néanmoins, encore une fois, Logan prit sur lui et j'en fus étonné. J'ai toujours cru que c'était le genre d'homme à partir au quart de tour. Peut-être l'était-il, mais pas en présence de Hutchinson. Il ne semblait pas avoir envie de se battre ce soir. « Et puis, Edward est un grand garçon, il ne va pas être malade, hein ? » Nos regards se croisèrent et je secouais négativement la tête, persuadé de mon coup. « Je suis irlandais, je sais m'arrêter quand il le faut ! » Je pus percevoir Logan qui levait les yeux au ciel alors que nous prenions place dans la voiture. Sur la route, malgré les effets de l'alcool dans mon sang, je pus voir quelque chose de flagrant. Salaun était tiraillé entre deux réactions. D'un côté, il était vexé de se faire ainsi planter à cette soirée après que Cheyenne l'est obligée en quelque sorte à y aller. Il comprenait qu'il ne faisait pas le poids face à moi en ce qui concernant la complicité qui me liait à Hutchinson. Mais d'un autre côté, il ne disait mot par rapport à cela. Il comprenait qu'elle avait besoin de ma présence pour passer une soirée juste tous les deux, nous retrouver. J'étais celui qui serait capable de la faire sourire. Il se résignait à ne pas montrer – le moins possible – sa jalousie et sa frustration.

Et c'est probablement pour ne pas gêner que je jouais la carte de l'alcool. Jouant l'enfant, j'ouvrais la vitre arrière, à côté du siège sur lequel j'étais installé et y passais la tête, tout sourire. Mes yeux se baladaient partout comme un grand curieux de dix ans. Nous arrivâmes à un feu, et voilà que je tirais la langue à un môme de l'âge des jumeaux, dans la voiture juste à côté de nous. En contrepartie, j'eus le droit à de belles grimaces. Je faisais donc de même. Et pendant ce temps là, j'entendais Logan et Cheyenne discuter entre eux, bien que je ne cherchais pas à comprendre ce qu'ils se disaient. C'était leur histoire, et en vue du faible volume qu'ils utilisaient, je comprenais que ça devait le rester.

« Tu m'as obligé à me déguiser pour quoi ? Vingt minutes de soirée. Tu m'as planté. Je te demanderai une compensation la prochaine fois que je débarquerai chez toi. » Malheureusement, ça, je l'entendis et une grimace s'afficha sur mon esprit. Je fus pris d'un frisson alors que je me bouchais les oreilles avec mes mains. « Beurk, beurk, beurk ! » Et Logan se mit à sourire.