« Hear what your heart wants to deny »

Mes parents avaient fait preuve d'une réelle bêtise en venant m'appeler Shane. Non mais vraiment, quel prénom banal pour quelqu'un qui ne l'était véritablement pas, hein ? Il suffisait de se regarder dans le miroir, de me battre avec la mèche rebelle qui foutait mon apparence en l'air pour vaincre et réaliser que j'étais plutôt pas mal dans mon genre. Bander des biceps, faire le beau, saillir ma musculature dessinée sous un teint plutôt pâle dû à l'absence de soleil en cette saison. BON, je n'étais peut-être pas le plus canon des hommes mais je ne trouvais pas une once de cette apparence qui ne me déplaise. Ou peut-être mes pieds. Baissant les yeux vers les fautifs, je remuais doucement des orteils (j'étais pieds nus!) en me disant à quel point c'était moche, un pied...

SHANE – « Non mais... vraiment?! »

Maya devait sérieusement m'avoir frappé du ciboulot si je devenais si sensible à mon apparence physique. Cataloguer mes atouts, masquer mes défauts, les étaler au grand jour en pavanant comme un paon ou bien me terrer dans mon coin comme si j'étais le vilain petit canard incarner. Vivre avec elle arrangeait bien les choses, je me rendais plus conscient de l'apparence que je devais avoir pour elle... Parce qu'elle valait la peine. Parce que j'avais envie... Parce que jamais aucune autre femme n'avait voulu me faire quitter mon apparence débraillée lors des fêtes de fin d'années jusqu'à ce qu'elle n'apparaisse dans ma vie de nouveau. Passant la main dans les cheveux comme si j'avais le moindre espoir de mettre un jour cette chevelure bordélique en ordre, j'ôtais finalement le t-shirt qui graciait mon corps avant de me diriger -torse nu et uniquement vêtu d'un jean noir délavé- vers ma salle de bain avec la ferme intention de m'éclaircir les idées une bonne fois pour toute. Je n'étais pas un narcissique, je n'étais pas le genre à passer du temps à m'observer dans le miroir comme je venais de le faire et les choses s'annonçaient donc des plus urgentes. Ôtant puis balançant les derniers articles de vêtements sur un portant à proximité, je fus sous le faisceau d'eau avant même de me décider à baisser la température un tout petit peu. Ce n'est que lorsque mes muscles se sont mis à crier sous la chaleur de l'eau que je me suis décidé à bloquer le jet à une température plus supportable.. pour une douche juste un tout petit peu plus longue.

Elle avait passé Noël chez la famille de Cheyenne et je m'étais montré suffisamment délicat pour ne pas m'imposer mais pour le Nouvel An... Pour Nouvel An, elle était à moi et si techniquement nous n'étions pas encore le Réveillon il avait été convenu qu'elle me rejoindrait l'avant-veille. Soit. Le plan était parfait, non ??

Au sortir de la salle de bain, je ne trouvais rien d'autre à me mettre qu'une simple serviette et traverser ainsi mon petit appartement, dégoulinant d'eau, pour aller chercher les vêtements que j'avais oublié comme un con de glaner: prendre une douche pour remettre les mêmes vêtements, ça revenait plus ou moins inutile... mais j'avais été trop tête en l'air pour songer à tout. Non pas que tout le monde était dérangé, hein? Les gloussements que j'entendais de ci et là laissait clairement entendre qu'au moins une personne en bas de mon immeuble appréciait les coups d'oeil à ce corps adoré que je laissais malencontreusement avoir. En moins de temps qu'il ne le fallu, les rideaux étaient tirés et si les gémissements que j'entendais ne surpassaient pas les chants de Noël chantés par une mini chorale au coin de la rue, je n'en avais cure. Il fut un temps où j'aurais adoré l'attention... Une époque où j'aurais probablement apprécié d'être ainsi valorisé et où je n'aurais pas hésité à faire monter la donzelle. Mais les choses étaient différentes maintenant... moi j'étais différent. Maya me rendait différent et si je ne voulais pas paraître pour le plus grand des abrutis du coin, j'allais tout faire pour ne pas foirer ce que nous avions..... quoi que ce fut que nous avions.

Je ne m'étais pas détaché de la fenêtre depuis 15 secondes que j'entendais un bruit bien particulier; la fenêtre ouverte laissait désormais entendre le son d'une porte de voiture qui claque en plus de mes deux groupies habituelles qui n'attendaient que d'atterrir dans mes draps. Une assomption se forma dans mon esprit, doublé de la certitude que Maya était là.... deux heures à l'avance, si j'en jugeais par l'heure indiquée sur l'horloge accrochée dans mon salon.

SHANE – « Meeeerd..... »

Rien n'était prêt, je comptais sur les deux heures qu'il me restait pour finaliser l'ordre chez moi... elle allait me t.u.e.r. ! Et si je devais périr, autant ne pas le faire à demi-nu. Quoiqu'elle pourrait aimer ça. Ou bien que cela ne la dérangerait pas lorsqu'elle me poignarderait le coeur avec son regard criblé de dagues qui ne seraient dirigées que vers moi.... M'habiller. Vite ! Avant qu'il ne soit trop t.... ard. Un pas. C'est tout ce que j'avais pu faire hors de ma torpeur avant que quelqu'un ne vienne sonner à la porte. Maya. Maya heureuse? Maya en pétard ? Maya cherchant des explications quant à la présence des deux bimbos sous mes fenêtres ? Ou bien s'en foutrait-elle et me laisserait-elle vivre pour voir la nouvelle année ?? Mmmh, mystère et boule de gomme. La fin du monde était supposée n'arriver qu'en 2012, je devais au moins espérer survivre jusque là. Non? Je ne le lui avouerais jamais, mais j'avais toujours estimé ses crises d'humeur à la fois fascinantes et terrifiantes... je n'étais juste pas sûr de vouloir être du côté receveur cette fois-ci. A moitié à poil, de surcroît.

SHANE – « Coucou ma puce. Tu es à l'avance ? Quelle bonne surpr.... »

J'avais espéré en placer une. N'importe quoi, atténuer le fait que mon appartement n'étais jamais que partiellement rangé de ma soirée d'hier avec les potes... Mais je n'aurais jamais l'occasion de terminer ce que j'avais commencé à dire: une tornade venait de débarquer et si je devais craindre son courroux ou me délecter de sa passion, je l'ignorais. Seul le temps serait en mesure de répondre à cette question.

SHANE – « ...ise »