L'avantage d'être réceptionniste et secrétaire, c'est qu'on peut obtenir tout un tas de renseignement sur tout et n'importe quoi sans jamais que cela passe pour de l'espionnage, de la violation ou quelque chose dans ce genre que Sydney n'aurait de toutes manières pas compris. En effet, en immense curieuse par nature, elle avait trouvé un passe-temps absolument formidable pour s'occuper entre deux dossiers et trois coups de téléphone : lire en long, en large et en travers les dossiers d'inscription de tout le monde. Oui, c'est fou le nombre de petites choses qu'on peut découvrir ici et là en se donnant la peine de fouiner un peu ! A la rigueur, c'est un peu comme retourner les magazines people d'une librairie : qui a couché avec qui, qui habite où, qui a fait quoi avant d'arriver à Berkeley…? Tout un tas de questions que tout le monde se pose sans arrêt et auxquelles la belle blonde pouvait répondre.
Bien évidemment, il y a des dossiers plus passionnants que d'autres, c'est pourquoi la réceptionniste ne classait jamais ses dossiers par confrérie, par sexe ou par études, mais uniquement pas "intérêt". Il y a la pile des "intéressants" et la pile des "pas intéressants" pour utiliser un langage simple. Là, par exemple, elle venait de déposer le dossier d'un élève qui avait toujours vécu dans une ferme avant d'arriver à Berkeley… les bouseux sans passé palpitant hormis la diarrhée d'une vache qui l'a peut-être traumatisé étant enfant, on les classe direct dans les "pas intéressants". D'ailleurs, Sydney ne s'était même pas donné la peine de lire la suite de ses fiches.
En revanche, elle venait d'entamer un dossier qu'elle dévorait comme le dernier "Closer" : le dossier d'inscription de Chuck Firth-Robertson. Des parents qui l'abandonnent car ils ne s'en occupent vraiment pas bien. Balancée de famille d'accueil en famille d'accueil, chaque situation apportant son lot de nouveaux drames. Un orphelinat dans lequel elle n'a jamais vraiment su s'intégrer… Si avec ça, ils ne font pas un film récompensé aux Oscars, c'est que le cinéma manque d'ingéniosité !
Malheureusement, une fois arrivée au terme du dossier, Sydney prit une mine boudeuse en jetant le dossier sur la pile des "intéressants". Non, ça ne lui suffisait pas, elle avait vraiment envie de connaître la suite de l'histoire… c'est à ce moment-là que son Einstein blond intérieur fit système dans son esprit : quand on veut s'intéresser davantage à l'histoire, on va voir l'auteur et/ou héros ! Rapidement, l'égyptienne pianota sur son ordinateur pour avoir l'emploi du temps de Chuck : aucun cours dans l'après-midi, super. En plus, il faisait beau, elle avait 80% de chance de la trouver dehors.
Après avoir mis le répondeur sur le standard de l'université, la jolie blonde quitta la réception pour marcher de son pas si particulier en direction des parcs du grand domaine… au bout d'une dizaine de minutes, elle aperçut Chuck - ou Charlotte - qui marchait dans sa direction avec une mine un peu absente. Sans trop réfléchir - chose qui n'étonnera personne, vous en conviendrez - Sydney marcha d'un pas rapide dans la direction de la jeune fille avant de se planter devant elle avec un sourire un peu triste.
"Bonjour…"
… puis sans attendre, elle la serra dans ses bras comme s'il s'agissait d'une vieille amie qu'elle voudrait réconforter. D'ailleurs, elle serra si fort qu'elle ne se rendit même pas compte que les livres tenus par l'étudiante venaient de tomber par terre. L'excentrique blondinette regarda face à elle puis murmura tout doucement à l'oreille de Chuck d'une voix rassurante et presque compatissante.
"Je suis vraiment désolée pour tout ce qui t'es arrivé… c'est vraiment difficile, pour toi…"
Et là, techniquement, énorme point d'interrogation pour la principale concernée.