Un examen médical tout à fait banal, enfin, elle l’espérait. Elle espérait que tout aille bien, que les médecins ne lui trouvent rien. Elle avait passé le plus clair de sa vie dans les hôpitaux et par conséquent craignait toujours de couver une grave maladie. Ce n’était en rien de la paranoïa, juste la peur de se retrouver comme sa mère à vivre entre quatre murs dans un hôpital, ayant pour seul ami le bruit incessant des machines qui finissaient toujours par vous sortir de vos gonds. Esmeralda avait pris rendez-vous à l’hôpital suite à quelques problèmes. En effet, la jeune femme avait depuis plusieurs jours mal à la gorge, sa voix avait changé, elle peinait même à chanter. Elle devait faire beaucoup plus d’effort que la normale pour sortir un son correct ce qui épuisait sa voix encore plus. La Sigma avait donc préféré laisser ses peurs de côté pour aller passer des examens, elle en profitera pour faire un bilan complet. Mais, étant de nature stressée, elle avait donc demandé à Kaeleigh de l’accompagner, elle se sentirait plus rassurée.

L’Epsilon et la Sigma se connaissaient depuis quelques années déjà, elles s’étaient rencontrées à New York lors d’un concert de musique donné par un ami commun. Ethan était un musicien qui avait fait carrière dans le monde entier, ils s’étaient connus avec Esme en Italie lors d’une soirée où ils avaient tous les deux été conviés, ils s’étaient tout de suite rapproché, appréciant la compagnie de l’autre ainsi que sa musique. Kae’ et Ethan se connaissaient par le biais de l’institution Greenpeace, organisation ayant fait ses preuves dans le monde, militants tous les deux, ils s’étaient liés avec le temps d’amitié. C’était donc grâce à lui que les deux étudiantes firent connaissance et une chose entrainant une autre, elles se lièrent d’amitié jusqu’à se confier leurs secrets qu’elles n’auraient jamais pu confier à une autre personne.

« Un verre d’eau s’il te plaît. » C’était tout ce qu’elle pouvait avaler, elle n’avait qu’une seule hâte : ressortir de son rendez-vous. Elle avait même pensé à l’annuler, sa voix reviendrez bien d’elle-même, elle avait surement dû attraper froid mais, Aaron l’avait convaincu de ne pas le faire lui disant qu’il serait préférable pour elle d’être enfin fixé au lieu de rester dans l’ignorance.

Quelques minutes plus tard, les deux amies se trouvaient dans la voiture de la Sigma, direction l’hôpital. Esmeralda hésita quelques instants à demander à son amie comment elle allait réellement, elle n’avait pas vraiment eu l’occasion de lui parler depuis la mort de sa mère mais, elle se désista à la dernière minute, par respect pour son amie. Elles se connaissaient assez bien pour savoir que si l’une avait besoin de parler, l’autre était présente à n’importe quel moment. Puis, déviant vers un sujet un peu moins fâcheux, elle demanda.

« Tu as prévu quelque chose pour les vacances ? » Un sujet tout à fait banal qui ferait momentanément oublier ce qui les tracassait dernièrement.

*****

Assises dans la salle d’attente de l’hôpital, les deux demoiselles attendaient qu’un médecin vienne appeler Esme pour son auscultation. La nervosité de cette dernière se faisait de plus en plus sentir au point qu’elle ait eu envie de repartir d’où elle venait.

« Dis-moi Kae’, tu ne préfèrerais pas qu’on parte d’ici et qu’on aille faire les boutiques ou autre chose, c’est toi qui vois ? »

Elle regarda son amie avec des yeux de merle en frit dans l’espoir de faire flancher sa meilleure amie. Maintenant devant l’évidence, elle n’était plus du tout sûr de vouloir savoir et elle espérait sincèrement que Kaeleigh accepte son invitation de débarrasser les lieux pour autre chose de beaucoup plus attrayant.

Kaeleigh était une personne très ponctuelle, dès qu’on lui donnait rendez-vous à une telle heure, elle y venait à l’heure, jamais en retard pas même d’une seconde. Très belle qualité qu’Esmeralda appréciait en temps normal. Oui, en temps normal car aujourd’hui, la Sigma aurait bien aimé que sa meilleure amie soit en retard ou qu’elle ait un empêchement pour pouvoir éviter la case docteur mais, c’était sans compter sur cette très chère Kae’ qui répondait toujours présente pour son amie et qui ne l’aurait surement pas laissé tomber surtout quand cela concernait sa santé. Arrivée chez son amie, celle-ci lui offrit un verre d’eau que la Sigma avait demandé. Elle bu son verre d’eau tandis que la belle Epsilon finissait son petit-déjeuner.

En route pour l’hôpital, Esme avait abordé un sujet qu’elle pensait sans danger mais, grossière erreur, elle avait complètement oublié que Kaeleigh ne pouvait pas retourner dans son pays natal et la jeune Williams savait pertinemment que ne pas pouvoir retourner chez elle affectait son amie plus qu’elle ne le laissait paraître. Le bon côté des choses était qu’elles allaient toutes les deux à Cancun, des vacances de rêve, dans une ville de rêve, tout frais payé et elles allaient en profiter un maximum, c’était certain. « Oui, avec un peu de chance on sera au même étage ! » Répondit-elle.

Une fois à l’hôpital, elles prirent place l’une à côté de l’autre dans la salle d’attente jusqu’à ce qu’un médecin vienne l’appeler. Si ça ne tenait qu’à elle, Esme aurait pris ses jambes à son cou depuis bien longtemps, elle ne serait pas resté une minute de plus dans cet hôpital qui lui rappelait beaucoup trop de souvenirs et même si aujourd’hui, elle arrivait à vivre avec ses mauvais souvenirs, elle préférait ne pas trop y repenser. La réponse de la belle australienne tomba directement, elle ne la laisserait pas quitter cet endroit sans s’être fait ausculter par un médecin et quand Kae’ vous regardez de la sorte, il ne valait mieux pas la contredire. Se tassant un peu plus dans sa chaise, la jolie Sigma attendit que vienne son tour en espérant que cela ne prenne pas trop le temps. Le médecin ne tarda pas à venir l’appeler et l’australienne en profita pour répondre à sa place, obligeant même son amie à se mettre debout et à suivre le dit médecin.

La jolie grecque entra dans la salle de consultation à la suite du médecin qui lui demanda de prendre place. Remarquant son malaise, il tenta de la rassurer en lui disant que ce n’était qu’une simple auscultation. Esme tenta de se détendre sans grand succès, elle avait comme un pressentiment et elle avait peur. Elle avait toujours peur qu’on puisse lui trouver une quelconque grave maladie tout comme sa mère. Chassant ses idées noires de son esprit, elle se concentra sur le médecin qui l’auscultait. Au bout d’un quart d’heure, il sortit de la pièce avant de revenir quelques minutes plus tard, un dossier en main.

« Mlle Williams, vous avez un kyste des cordes vocales. » Commença le médecin. Il continua de parler mais, déjà sa patiente ne suivait pas un mot de ce qu’il disait. Il le remarqua et s’approcha de la jeune femme, déposant une main sur son épaule. « Mlle Williams, vous m’entendez ? » Ce simple geste la sortit de sa léthargie. Elle croisa le regard du médecin qui semblait compatissant et elle comprit. Elle comprit que les prochains jours n’allaient pas être de tout repos, encore un coup dur pour elle, heureusement qu’elle avait demandé à Kaeleigh de l’accompagner.

« Je suppose que de simples médicaments ne réglerons pas le problème. » Dit-elle avec ironie.

« Non, je suis désolé. On va devoir procéder à une chirurgie pour vous retirer ce kyste. » Expliqua-t-il à sa patiente.

Esmeralda sortit de la salle de consultation en compagnie du médecin qu’elle remercia. Il lui avait expliqué le « programme ». Elle allait devoir revenir dans quelques jours pour se faire opérer, en attendant, elle devra ménager ses cordes vocales pour ne pas aggraver son problème. Elle retrouva son amie là où elle l’avait laissé, un café dans les mains. « J’espère ne pas t’avoir fait trop attendre ! » Kae’ qui ne l’avait pas entendu arriver releva la tête vers elle. Les deux étudiantes quittèrent l’hôpital et tandis qu’elles arrivaient vers la voiture d’Esme, cette dernière donna ses clés à sa meilleure amie. « Ca ne te dérange pas de conduire ? » Elle ne se sentait pas la force de conduire dans son état et bien que le médecin l’ait rassuré quand à ce qui allait se passer, il y avait toujours cette peur qui persistait en elle.