Je dormais paisiblement. Dehors, l’orage faisait rage, mais j’avais apprit à aimer la pluie, à aimer la nature sous toutes ses formes. L’orage n’était donc pas une chose qui me dérangeait, loin de là. Pourtant, quelque chose vint tout de même troubler mon sommeil. Un cri perçant dans la nuit. Un cri que je connaissais bien et que j’avais, malheureusement, déjà entendu. Ma colocataire, Saphyra, venait très certainement de faire un autre cauchemar horrible. Me redressant rapidement dans mon lit, je tournai la tête vers elle. Elle était bel et bien éveillée et elle semblait dans tous ses états.

Repoussant lentement les couvertures, je pris le temps de regarder dehors. Un éclair déchira le ciel dans toute sa splendeur et j’eu envie de sourire. Pourtant, je ne le fis pas, par respect pour Saphyra qui était terrorisée dans son lit. Je n’aurais pas voulu qu’elle croit que je riais d’elle ou quelque chose dans le genre. Me relevant donc pour marcher lentement vers son lit, je pris place à côté d’elle la forçant à se pousser un peu. Puis, passant mon bras autour de ses épaules, je la serrai contre moi en caressant ses cheveux et en embrassant son front. Elle était toute trempée la pauvre, ça me désolait de la voir dans cet état.

« Chuuut, ça va aller Saphy’… Je suis là, c’est fini. Ce n’était qu’un rêve... »

Je la laissai seule un moment pour aller chercher une petite serviette que je pris le temps d’imbiber d’eau bien froide. Lorsque je revins vers son lit, elle était toujours dans le même état. Passant le bout de tissu froid contre son front et ses joues, j’espérais arriver à la calmer un minimum. Je n’avais pas fait de cauchemar depuis longtemps alors je ne pouvais pas dire que je la comprenais totalement. Quoi qu’il en soit, j’avais toujours été là pour elle et le serais toujours aussi. J’étais triste pour elle. Un coup de tonnerre éclata et elle sursauta, moi avec.

« T’en fais pas, c’est que le tonnerre… C’est dehors, tout va bien, on est en sécurité ici… Tu veux que j’ouvre la lumière? »

Elle s’était excusée de m’avoir réveillé, mais je lui ai dit que ce n’était pas grave. Au contraire, j’étais heureuse d’être là pour elle, de ne pas la laissé toute seule dans cet état. À sa place, j’aurais voulu que quelqu’un soit là, pour me serrer dans ses bras. Je n’étais peut-être pas un homme et je n’avais pas de gros bras musclés qui vous font sentir si bien, mais j’étais délicate et attentionnée et je crois que c’était suffisant. Enfin, peut-être pas vu l’état dans lequel elle était toujours après que je lui ai épongé le front avec cette serviette.

À cet autre coup de tonnerre, elle cria de nouveau et j’eu envie de dire; Désolé tout le monde. Puisque les autres Sampi devaient l’avoir entendu. Peu importe, il était arrivé à tout le monde au moins une fois d’avoir des terreurs nocturnes et les Sampi étaient tous très compréhensif alors je ne m’inquiétais pas d’entendre toquer à la porte pour nous dire de la fermer comme il se passerait sûrement dans une autre confrérie que la nôtre. J’avais demandé à Saphyra si elle désirait que j’ouvre la lumière. Dans un souffle, me regardant dans les yeux elle me répondit :

« Non pas de lumière, mais est-ce que je pourrais dormir avec toi ? »

J’hochai la tête en silence et me levai en le soutenant. Elle tremblait de tout son être la pauvre. Vraisemblablement, c’était un cauchemar terrible. Prenant finalement place dans mon lit, je relevai mon oreiller pour pouvoir m’assoir, les jambes allongées. Prenant place le plus près possible du bord, je laissais ainsi assez de place à Saphyra pour qu’elle, elle puisse se coucher. Je ne m’endormirais pas de si tôt et ça ne me dérangeai pas d’être là pour elle. De toute manière, mes cours commençaient relativement tard le lendemain alors…

« Ça va aller? Tu veux me parler de ton cauchemar? »

Je caressais de nouveau ses cheveux, l’autre main dans son dos. J’essayais d’être le plus réconfortante possible. Je ne voulais pas la pousser à parler, si elle préférait ne rien dire, ça me convenait. Seulement, si elle désirait se vider le cœur, je serais l’oreille attentive dont elle avait besoin. Après tout, c’était ma meilleure amie –ou du moins, l’une d’elle avec Sid- et je serais toujours là pour elle.

Je ne savais pas si elle m'en parlerait, mais comme j'ai dit un peu plus tôt, ça ne me dérangeait pas. Elle faisait comme bon lui semblait après tout, moi j'étais là pour elle et c'est tout. Continuant de caresser son dos et ses cheveux en silence, j'attendais patiemment qu'elle trouve le courage de me répondre ou alors simplement la force de prononcer quel qu’autres paroles. Au bout de quelques minutes dans un silence qui, selon moi, n'était pas lourd du tout, mais plutôt relaxant, elle me fixa droit dans les yeux et frissonna quelque peu ce qui me décrocha un sourire en coin.

« Quand j'étais adolescente, j'avais entendu mon père frapper ma mère et j'avais décidé de m'interposer entre les deux. Mon père m'a frappé au visage et au jambe. Je n'ai jamais oser appeler la police et je me suis réfugier seule dans ma chambre. Depuis ce temps-là, je fais toujours le même cauchemars : je rêve que mon père défonce ma porte pour ainsi me tuer de peur que j'aille le dénoncé à la police. J'ai du subir un traumatisme depuis cette histoire et je suis incapable de m'en remettre. C'est pourquoi je suis incapable de dormir seule. Je vais probablement vouloir me réfugier avec toi assez souvent. »

Ses paroles pesaient sur moi comme un poids immense. C'était... terrible. Personne ne devrait vivre une telle chose, encore moins une jeune fille comme elle. Comment un homme avait pu même penser à battre sa femme -celle qu'il était supposé aimer et chérir- en plus de sa fille... Sa chair, son sang, son enfant chérie. Yule frissonna et eu une soudaine envie de vomir ou de crier, ce n'était pas tellement clair à l'intérieur d'elle.

Puis, tentant de faire taire les milles et unes questions qui avaient envie de sortir dans un flot incompréhensible de paroles de sa bouche, elle ferma les yeux un moment pour faire le point. Saphyra ne lui avait pas parlé de tout ça dans le but que son amie lui rappelle son passé douloureux. Non, si elle lui avait dit tout ça, c'était simplement pour mettre un contexte à son rêve, lui permettre de comprendre. Elle inspira profondément, recommençant de caresser son dos avec un peu moins d'assurance cette fois. Elle avait froid soudainement et ne savait que dire. C'était encore plus terrible que ce qu'elle avait imaginé. Bien entendu qu'elle avait dû subir un traumatisme. Bien entendu qu'elle ne s'en remettrait pas de si tôt et bien entendu qu'elle ferait encore et encore des cauchemars terribles à propos de ce jour... Enfin, dans la mesure où il n'y avait eu qu'un événement de la sorte. Yule eut un autre haut le cœur. Elle ne voulait pas imaginé qu'il avait pu faire ça plus d'une fois.

« Tu.. peux venir dormir avec moi quand tu veux Saphy'. Je.. je comprends totalement... »

Elle déglutit et fixa le vide un moment, le cœur gros. Puis, dans un élan de bonté et de réconfort, elle serra fortement son amie dans ses bras.

Saphyra frissonna sous mes caresses dans son dos et je me demandai pendant un instant si ça la dérangeait que je la touche ainsi. Ce n’était que pour la réconforter après tout et je ne voulais pas la mettre mal à l’aise dans l’état où elle se trouvait présentement. Enfin, mettre quelqu’un mal à l’aise n’était jamais réellement dans mes plans, mais disons que, présentement, c’était encore moins le temps, pas vrai? Si seulement je savais ce qu’elle ferait ensuite, peut-être n’aurais-je pas pensé à la rendre mal à l’aise. Enfin bref. Un silence plus ou moins lourd et d’une durée que je ne pourrais pas déterminer s’installa entre nous jusqu’à ce que Saphyra brise la glace en prenant de nouveau la parole.

« Merci beaucoup Yule, je t'en suis extrêmement reconnaissante. »

Je me tournai vers elle, lui faisant un petit signe positif de la tête. Que dire de plus de toute manière ? Je n’allais pas la laisser pourrir sur son sort, c’était ma meilleure amie. Et puis, si ma réponse était tout ce que ça prenait pour voir le sourire qu’elle affichait présentement, je me trouvais bien stupide de ne pas le lui avoir dit plus tôt.

Au bout d’un moment, je relâchai mon étreinte sur elle. Bien mieux dans ma peau, j’avais l’impression d’avoir vraiment réussi à l’apaiser. C’était une grande fierté pour moi qui croyait que tout ce que nous faisons nous est rendu trois fois. Imaginez si j’étais vraiment arrivé à lui rendre le sourire, à lui faire oublier quelque peu ses craintes et à la mettre en confiance. Alors un tas de bonne chose me serait rendu! J’avais simplement envie de sourire maintenant et ne pensais même plus à ce qu’elle m’avait raconté. Au final, il était complètement inutile de m’en faire avec son passé, l’important était de l’aider à avoir un beau futur!

La regardant dans les yeux, un sourire au coin des lèvres, j’avais du mal à la voir correctement dans le noir ambiant. Mes yeux s’étaient lentement habitués à la noirceur ambiante, mais pas assez pour que je vois bien son expression. Son visage étant à contre jour avec la fenêtre par laquelle des éclairs continuaient de déchirer le ciel dans une lueur étincelante. Cependant, lorsque Saphyra vint poser sa main sur ma joue, je pouvais très bien sentir cette sensation. J’eu comme un mouvement de recul, mais tellement peu perceptible que je n’ai pas vraiment bougé. Clignant des yeux, je me demandais ce qu’elle faisait. Avais-je des larmes qui me coulaient toujours sur la peau? Elle me caressait la joue pour les retirer de là? J’aurais pu faire pareil avec elle, ce geste n’avait rien de particulier pas vrai?

Non, je ne pouvais plus nier l’évidence. Ses lèvres étaient maintenant contre les miennes. Elle m’embrassait? Oui, ça non plus je ne pouvais pas le nier. On s’entend, c’était devenu aussi évident que le nez dans le visage. Elle m’embrassait réellement. Était-ce par envie? Ou simplement parce qu’elle était en détresse et cherchait de l’affection? Est-ce qu’elle planifiait faire ça depuis longtemps? Je ne comprenais pas, j’étais complètement perdu. Je crois que je n’avais même pas encore fermé les yeux et elle devait être là depuis près d’une minute maintenant.

Fait quelque chose Yule, me disais-je. Mais je n’arrivais toujours pas à bouger. Finalement, je fermai lentement les yeux, me crispant un peu plus que je ne l’étais déjà et entre ouvrit lentement les lèvres pour lui permettre de m’embrasser plus aisément. Je ne savais pas si j’avais envie qu’elle m’embrasse. Je ne savais pas non plus si j’avais moi-même envie de l’embrasser. Tout était flou, comme si tout tournait rapidement autour de nous et que nous allions nous faire prendre dans ce tourbillon très rapidement.

Je ne la repoussais pas, mais je ne faisais rien non plus pour prolonger ce baiser. J’étais simplement perdu. Saphyra n’était pas la première fille à m’embrasser. Pourtant, j’étais encore une fois tout aussi surprise. Il faut dire qu’appart embrassé, je n’avais jamais été plus loin sur ce plan ce ma vie. Pour l’instant, ça me convenait, mais je savais que, tôt ou tard, j’aurais envie d’aller plus loin. Jusque là j’avais toujours cru qu’il n’y avait que les garçons qui m’intéressaient. Peut-être à cause de Ken aussi… Quoi qu’il en soit, peut-être que je m’étais trompé durant toutes ces années. Peut-être que la gente féminine aussi était attirante après tout…