Viiiiite ! Il y avait le sosie de Benedikt dans le hall ! Le pas précipité glissait sur le sol dans un savant mélange de crissement de gomme et de « tutut » que ne cessait de pousser Faith. Ils n'avaient qu'à se pousser. Ce n'était pas sa faute si elle bousculait tout le monde. Elle devait chopper ce gars. Que les esprits mal placé se remettent à au bon endroit. Faith songeait simplement à lui refaire le portrait pour qu’il ressemble moins à un vieux démon. Rien de mal, donc, vous voyez!!!

« OU T’ETAIS PASSE ? » S’écria-t-elle en se plaçant pile sous le nez du jeune fantôme.

Malheureusement, si elle avait freiné, lui n’en fit rien. Normal, avec une queue de poisson pareille, il n'avait rien vu venir. La brune tangua et s’agrippa autant à son précieux cahier qu’à un bras inconnu pour ne pas tomber.

D’abord, il lui rentrait dedans. Ensuite, il aboyait comme un petit chiot. Tellement de réponses parcouraient son esprit. Mais une seule fut à la hauteur, celle qui détrônait tous les fuck et autres injures. Son sourire insolent s’afficha sur sa bouille d’ange. Il ne se portait pas comme une balafre immonde sur le visage, il étincelait tel un diamant au milieu de caillasse impropre. Alors Benedikt était revenu. Monsieur se mettait à genoux pour ramasser ses affaires. Oui, voilà, reste par terre, agenouillé devant elle. Demande pardon ! Comment, il n'était pas à genoux mais il était tombé? Et alors!!!! Qu'il se fasse pardonner!

Mais non. Il osait râler ! N’écoutant que son courage. La brune serra son cahier entre ses mains pour venir faire un service avec la tête de Benedikt. Et 2- 0 pour Faith ! Après ça, que personne n’ose prétendre que les femmes n’étaient pas les plus fortes ! Benedikt en bavait déjà. Tant que ce n’était pas sur les chaussures de Faith. Quelqu’un, quelque part, lui avait affirmé que frapper un homme à terre s’avérait déloyale ! Et fuir durant plus d’un an alors ?

« C’EST TOUT CE QUE TU TROUVES A DIRE ? Je le savais même pas que tu avais une nouvelle coupe de cheveux ! » Hurla Faith dont le frêle corps semblait sur le point d’exploser sous l’effort d’un tel cri. Comment une si petite chose pouvait-elle contenir autant de coffre ? Les oreilles de Benedikt et des étudiants autour tremblaient si fortement qu'elles allaient toutes se décoller et tout le monde finirait par ressembler à Dumbo. Tant mieux ! Tous pourrait s’envoler grâce à leur nouvelle paire d’oreilles extra-large, s’ils préféraient se défenestrer que d’affronter la tornade humaine qu’était devenue Faith. Evidemment, la tignasse de Benedikt n’était qu’un symbole, un détail qui représentait bien plus aux yeux de Faith. Aucun nouvelle de lui n’avait filtré durant tant de temps qu’elle avait même douté de sa survie. Mais le temps des craintes s’achevait enfin pour celle du règlement de compte.

Faith posait alors sa converse sur l’un des carnets de Benedikt. Enlève tes doigts mon petit gars ! Sur quoi travaillait-il ? Avait-il prévu de faire exploser le labo ? Est-ce qu’il magouillait encore une bêtise ? Elle savait pertinemment qu’il n’était pas capable d’être sérieux. C’était un ancien gamma ! Il n’avait tout de même pas prévu une bêtise sans elle ? Hum ? La brune se tenait toujours prête pour un sale coup. Un jean, un débardeur sombre et gilet bleu marine avec capuche pour se dissimuler. Aujourd’hui, la jeune femme n’avait pas accordé une grande importance à sa tenue vestimentaire.

« Qu’est-ce que tu glandes ? » Marmonna-t-elle, suspicieuse.

Elle ouvrirait bien quelques uns de ses carnets pour voir ce qu’ils pouvaient contenir. La curiosité constituait un vilain défaut. Oui, elle le savait. Mais elle était prête à aller en enfer pour satisfaire ce mauvais penchant. C’était le seul à rendre sa vie supportable !

Ce type avait sombré dans la plus basse idiotie. La première erreur fut de ne l’attraper qu’avec une seule main et celle de Faith, de garder assez de confiance en lui pour le laisser faire. Etrangement Faith ne paniqua pas. Une main attrapa le poignet de Benedikt alors qu’il la forçait à reculer. Ou pensait-il la conduire comme ça ? En tant que femme, un principe de base devait s’appliquer. Ne jamais utiliser sa force pour contrer un homme. Seuls les films montraient des filles plus fortes que les mâles bourrés de testostérones. Mais Faith ne pouvait se battre dans les couloirs. Aussi, elle préféra lui laisser une chance, cette fois, de lui prouver qu’il n’avait rien d’un monstre.

Arrivée contre le mur, l’air manquait déjà et les regrets s’emparaient de son petit cœur pulsant à une vitesse folle. Pourquoi avait-elle cru qu’il était différent des autres être humains ? Sa survie dépendait des prochaines secondes. L’inconscience se faisait sentir. Sa chance se présenta en remarquant le visage arriver à quelques centimètres d’elle. Faith n’accorda plus aucune forme de confiance à cet étranger. Les deux mains tombèrent sur le visage de Benedikt avant qu’il ne soit trop près pour la mordre ou profiter de la proximité. Les pouces vinrent aussitôt trouver les yeux pour appuyer avec force. De l’air merde !

Alors qu’il reculait d’un pas, Faith se glissait sur le côté afin de ne plus avoir le mur dans le dos. Hors de question de rester bloquer. Même si Benedikt devait voir flou à présent, Faith ne tenait plus à tenter le diable comme elle avait pu le faire précédemment. Ses jambes ne tenaient plus que sous le coup de l’adrénaline. L’air remplissait ses poumons dans une brûlure aussi jouissive que douloureuse. Il n’était plus le garçon qu’elle avait connu et plus encore, Faith demeurait persuadée qu’il n’avait jamais été celui qu’elle avait connu.

« T’aurais dû crever à sa place. On aurait une pourriture en moins sur Terre. » Annonça Faith dont le sourire ne se souciait en rien de la peine de Benedikt. « Le feu purifie, il paraît. Sinon ca t’aurait donné un avant-goût de l’enfer qui t’attend. »

Tous les gammas savaient pour la mort de Tacha. Perdre un membre n’était pas monnaie courante malgré leur rythme de vie effrénée. Tous savaient mais Benedikt devrait subir les horreurs de Faith. La haine devenait un sentiment coutumier de son existence. Il se portait sur Zmiadja ou sur des silhouettes encore méconnues, celle vers qui elle tournait sa vengeance. Dans peu de temps, elle espérait, elle aurait oublié le réconfort que Benedikt avait pu lui offrir par le passé pour se souvenir de cet instant précis où il avait voulu l’étrangler.

« Pourquoi est-ce que j’aurais envie de te revoir alors que visiblement que tu es devenu une pauvre merde ? Mais rassures toi. Je ne vais pas me salir les pompes pour t’écraser. Même avec le pied gauche, t’en vaut pas le coup. » Annonça-t-elle toujours aussi souriante et pétillante que la rosée du matin. Même si son teint n’avait plus rien de très frais, l’attitude continuait à rayonner par son insolence. Après tout, sa date de péremption n’avait pas été dépassée. Elle avait survécu.

« Maintenant tu permets ? Je vais aller signaler à la direction qu’un membre de leur personnel m’a agressée dans une des salles de l’université. Je ne voudrais pas que tu tues quelqu’un d’autre. » Dans une ultime provocation. Sa tête se secoua doucement pour montrer les marques de la main de Benedikt sur son cou. Preuve numéro 1 et un bon nombre de témoin dans le couloir.

« Mais je ne m’en fais pas trop. Tu as toujours su te mettre sous la coupe de personnes qui peuvent allonger les billets sans problème. Ton papounet devrait te tirer de ce mauvais pas. Heureusement que c’est ton père d’ailleurs, sinon je pourrais penser que ton cul est toujours à vendre. Prostitué de mère en fils.»

S’il pensait qu’elle baisserait sa garde simplement parce qu’il avait le dos tourné, il se leurrait. Plus il bougeait, plus elle l’observait. Elle savait qu’il reviendrait à la charge. Tous les hommes réagissaient de la même façon. Ils agressaient pour obtenir raison. Obtenir une chose par la force semblait la plus grande marque de faiblesse aux yeux de la jeune femme. Ils finiraient droit dans le mur, tous les deux ! Ils ne parvenaient plus à se parler. Avaient-ils seulement réussi un jour ? Non. Et son propos prouva amplement à Faith qu’elle avait raison.

Mais elle n’avait pas le temps de répondre. Il lui sautait littéralement dessus. Alors qu’il arrivait tête baissée, la jeune russe exécuta une prise toujours aussi efficace sur ce genre de brute épaisse qui ne jouait que sur leur force pour se faire respecter. Un pivot sur le côté lui permit d’éviter la confrontation de face. Alors que Benedikt tentait d’attraper son poignet, la brune utilisait un mouvement  d’aïkido pour attraper son avant-bras en même temps qu’elle effectuait un pas vers l’avant. Son pied en appuie pivotait pour qu’elle se retrouve le bras le long de celui de Benedikt. Elle finissait alors roulant le long e Benedikt pour venir lui assener un coup de coude entre les omoplates du bras opposé à celui présent contre Benedikt. Non, il ne l’aurait pas une deuxième fois. Elle n’était pas une de ses filles que l’on maîtrisait facilement. Son dur travail lui offrait maintenant la possibilité de savoir se battre et surtout réagir vite. Faute d’une grande force, la vitesse serait son allier. De vieux réflexes se déclenchaient parfois tout seul.

A quoi pensait-il ? Il savait pourtant que depuis gamine Faith était éduquée pour cogner, que sa famille avait la réputation de patauger dans des affaires louches, raison pour laquelle, Faith avait dû apprendre à se défendre et tuer. Elle savait se battre avant de savoir lire et écrire. Certes, son niveau était faible à cet époque, à mais à celle où Benedikt connaissait Faith, elle était bien plus douée. A force d’une quinzaine d’heures d’entrainement à la semaine, la petite Russe pouvait rivaliser avec bon nombres d’adversaires. Néanmoins, elle se savait fragile et loin d’être toute puissante. On lui avait enseigné qu’il était parfois préférable de se défendre et fuir que de chercher une perpétuelle confrontation. De plus, elle ne voulait pas lui faire de mal. Dans le fond, elle ne serait jamais capable de porter un coup réel à sa personne. Le coup de cahier n’avait tout de même pas réussi à lui retourner la tête à ce grand garçon. Malheureusement, Benedikt n’était pas de cet avis et n’hésitait pas à la faire souffrir.

C’est pour cette raison qu’elle ne chercha pas à relancer le combat mais à fuir. L’orgueil blessé d’un mâle pouvait les pousser à des comportements stupides. Elle espérait simplement qu’une personne avisée parviendrait à lui apprendre qu’il ne pouvait tout avoir par la violence et plus encore qu’il pouvait finir en petits morceaux s’il continuait sur cette voie. Malheureusement, elle n'aurait pas cette honneur. La fuite ne fut pas évidente et avant même qu'elle ne puisse atteindre la porte, Benedikt la plaquait au sol. Quelle merde. Écrasée entre le sol et le russe, Faith senti la plus puissante des frustrations qu'elle avait pu connaître. Ce n'était pas la première fois qu'elle se retrouvait dans cette position ou une similaire. Néanmoins, son ressenti demeurait toujours le même. Peut être était-il temps de revoir son égo à la baisse. Les propos de son tortionnaire lui parvenaient, décousus de sens. Il avait perdu la raison. Quand la liberté se fit sentir, Faith ne tînt pas particulièrement à rester près de lui. S'il agonisait au sol ou si elle le croisait en danger, Faith ne bougerait pas une oreille pour venir l'aider. Qu'il crève. Peut être que son cahier avait réussi à assommer les derniers neurones qui lui restaient.Elle n'en savait rien. Mais elle avait assez de personne dangereuse dans son entourage, nul besoin d'en rajouter une supplémentaire. Néanmoins, elle pivotait juste à l’entrée où se tenaient deux étudiants.

« Merci, les gars. » Souffla-t-elle à ces derniers.

Et finalement, elle déguerpissait à toute vitesse. Elle n’appréciait pas ce garçon et il pouvait être sûr qu’elle ne viendrait pas l’encombrer à nouveau. Faith se vengerait, il pouvait en être certain.