James & Chanel

Des tonnes de sacs sous les bras, j’arpente les rues de San Francisco à la recherche de LA paire de ballerines Repetto que j’ai vue la semaine dernière dans ce foutu magasine. Ereintée, j’abandonne, nous jetant, ma nouvelle garde-robe et moi, sur le premier banc qui se présente à moi. Fermant les yeux, je soupire de soulagement. D’accord… peut être ai-je un peu craquée en achetant toutes ces fringues. Mais pour ma défense je les aies vues me faire les yeux doux, promis ! Je souris face à cette pensée absolument puérile. Je suis peut être une bosseuse hors-normes j’adore les fringues et ça faisait tellement longtemps que je ne m’étais pas accordée une après-midi de « repos ». Je relève la tête et mes yeux se posent sur un Starbuck, finalement la chance ne m’a pas totalement quitté. Je ramasse ma douzaine de sacs et traverse la rue en direction du paradis caféiné.
En entrant je respire l’odeur des boissons, de la crème et des pâtisseries. « Un mocca grande s’il vous plait ». Le caissier me demande mon prénom en me faisant un sourire tellement resplendissant que j’en cligne des yeux. Abus de Colgate droit devant. Je le snobe en retour et répond lentement « Chanel ». Evitant de croiser son regard, je le règle et récupère mon café. Trempant mes lèvres dans le breuvage, je grimace : ça manque terriblement de sucre. Me frayant un passage parmi les quelques personnes présentent dans le starbuck avec tous mes sacs, je me retourne brusquement en sentant mon pied écraser une chaussure et rentre la tête dans le torse d’un grand brun. BAM. Chute inévitable et tout ce qui s’en suit, je me retrouve nageant dans mon mocca crème, chemise complètement foutue et tous mes sacs éparpillés autour de moi. Un rire nerveux monte dans ma gorge en apercevant tous ces yeux moqueurs posés sur moi. Même le serveur semble rigoler intérieurement. Mauvais karma, ça m’apprendra à snober colgate boy. Je déglutis difficilement et mon regard se pose sur les chaussures de la personne sur qui j’ai trébuché, remontant doucement jusqu’au visage, mon cœur s’emballe. James, évidemment. Comme si tomber dans une mare de café n’était pas assez embarrassant, il fallait que je tombe devant le beau et mystérieux James. Finalement la poisse est toujours avec moi. Je sens mes joues devenirs rouges tandis que je bégaye, essayant de trouver mes mots pour m’excuser. « Désolé James ». Mes yeux s’ouvrent plus gros que des soucoupes et je m’entends répéter James. Il ne me connaît pas et je viens de dire son prénom devant lui, on ne s’est jamais parlé une seule fois et je viens presque de lui avouer que je suis complètement folle de lui au point de presque tout connaître de lui. Je me gifle mentalement. Bien sur que non il ne va rien croire du tout puisque j’ai juste dit son prénom. Pas de quoi en faire tout un plat, je dirais qu’une de mes amies m’a parlée de lui, ou autre chose. Je soupire et tente un sourire timide mais détourne les yeux un quart de seconde plus tard, gênée de croiser son regard. Ridicule.

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James & Chanel

« Tu fais bien de t’excuser… ». Je mets un certain temps avant de réagir, encore à moitié sonnée par le choc de la chute et surtout par le choc de le voir. Niaise. Est-il sérieux ? Vu le ton léger j’opterai pour non mais ma perspicacité à extrêmement tendance à me jouer des tours en ce moment, mieux vaut ne pas s’y fier. Je reste donc impassible, dans la même position que depuis presque une minute, autant ne pas lui sourire franchement s’il vient de me manquer de respect, je passe déjà pour une imbécile pleine de café alors autant ne pas en rajouter une couche en faisant l’imbécile pleine de café qui ne comprend même pas qu’on lui manque de respect. « Chanel ? ». Mes yeux le transpercent au point ou je dois me retenir de ne pas l’abîmer. Ai-je bien entendue ? Il vient de prononcer mon prénom, donc il me connaît ? Donc il m’a déjà remarqué ? Impossible aucun de nos maigres amis en communs n’aurait pu lui parler de moi, et inversement. Je suis tellement invisible, d’apparence naïve et posée que personne n’aurais pu me mentionner dans une conversation. Même les profs de certains cours m’oublient parfois alors c’est pour dire… Je me redonne une gifle mentalement. On s’écarte du sujet principal. Je me résonne mentalement, pour ce qui est de mon prénom, il a dû tout simplement le lire sur mon gobelet, pas de quoi en faire toute une histoire. Il me tend la main pour m’aider à me relever et je m’autorise un sourire poli m’efforçant de ne pas noter sa peau chaude, sa barbe naissante et surtout ses grosses cernes qui témoignent du soirée assez mouvementée, me rappelant ma propre soirée assez désastreuse pour une étudiante de mon âge. Prenant le temps de m’épousseter du plat de la main sans même me rendre compte que mon geste ne sert strictement à rien je jette un coup d’œil au serveur qui rit toujours de ma chute et l’envie me prend soudainement de lui coller ma main sur la figure mais je me contente de respirer et de me concentrer sur mes sacs et les affaires qu’ils contiennent. Dieu merci rien n’est touché ou abîmer, mais en fait ça n’a plus tellement d’importance. Ce qui est important c’est que je sois actuellement dégoulinante, trempée jusqu’aux os, brûlée et collée devant la seule personne qui m’intéresse (un tant soit peu) dans cette ville. Bien, vraiment très bien Chanel. Quelle réussite. J’attrape machinalement le café que me tend le serveur, le remerciant du bout des lèvres et son sourire colgate revient au quart de tour. Ma main va réellement finir par partir s’il continue. Ne me retenant plus de le regarder je lui lance un regard glacial « Ta fini de rester planté là ? ». J’avoue avoir été un peu dure, mais il faut arrêter de me prendre pour une retardée mentale, à croire que j’allais vraiment lui rendre son sourire après ses moqueries. Du grand n’importe quoi. « Ton visage ne me dit rien, et pourtant tu m'as appelé par mon prénom. On se connaît ? ». Aheum, problème. Mes joues s’empourprent. Moi qui croyais qu’il n’avait pas remarqué… Mon cerveau se met à tourner à plein régime, creusant au fond du fond pour trouver une excuse plausible. Mais c’est peine perdue et j’utilise la dernière option qui me reste. « Hum à vrai dire ton prénom est marqué sur ton gobelet... ». Simple, mais efficace. Je tire tout de même un sourire a mi-chemin avec une grimace de gêne me félicitant du nombre de mots enchaînés sans bégayer et surtout de l’assurance que je commence à avoir. Soudain mes jambes flageolent sous la descente de l’adrénaline et je me sens exténuée de cette longue et horrible journée. Tenant tout de même à garder un semblant de dignité et n’étant pas assez bête pour ne pas relancer la conversation (tant qu’on y est autant se jeter à l’eau) je respire un bon coup pour retrouver ma sérénité et lui propose de s’asseoir avec moi calmement, ma grimace se transformant en doux sourire que je réservais habituellement à August, ou mon frère. Finalement il n’est pas si difficile de lui parler normalement même si mes joues rouges et mes mains tremblantes témoignent malgré moi de mon stress à l’idée de s’asseoir ensembles à une table autour d’un café. De toute façon je ne peux ni me ridiculiser plus que ça et en ni effacer mes paroles alors autant rester sûre de soit jusqu’au bout, ou du moins en avoir l’air.

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