Et voila, je vivais enfin une relation pleinement épanouie et ouverte avec Jordane après tous ces jours et toutes ces semaines de galère amoureuse. Je m'étais posé la question 100 fois de savoir si notre amour était même possible à la vue de notre amitié naissante. Je l'avais envisagé des tas de fois sous plusieurs angles différents mais finalement, la seule chose qui faisait office de conclusion était ma volonté profonde de l'avoir dans mes bras à chaque heure et à chaque seconde de la journée. Le bal de noël avait été pour moi un bon tremplin pour lui avouer mon amour et aujourd'hui que c'était fait, je me sentais libéré d'un poids et comme sur un petit nuage, nous ne nous disputions jamais, la seule chose qui prédominait était le rire, les longues soirées à discuter tous les deux et le sexe, trois ingrédients parfaits pour une relation saine. Malgré tout je n'oubliais pas mon deuxième objectif principal qui était de me remettre à prendre mes cours au sérieux, pour ce faire j'avais décidé de m'investir un peu plus dans la vie universitaire en participant à l'échange universitaire qui avait lieu entre Berkeley et Oxford. Ayant déja été élève dans la célèbre institution anglaise pendant un an, je me sentais presque comme l'un d'entre eux sans même traverser l'Atlantique. J'avais donné rendez vous à ma correspondante dans un petit restaurant que je connaissais et qui n'était pas mauvais du tout, je ne connaissais pas son prénom ni son nom, cela faisait parti du mystère que la fac entretenait sur ces fameux British.

Jordane était toujours sous la douche tandis que je commençais déja à m'habiller, je ne voulais pas arriver en retard et faire mauvaise impression car même s'il s'agissait de jeunes de notre âge, ils n'avaient pas forcément la même approche que nous, jeunes américains pour ce qui est de la politesse et du savoir-vivre. J’avais mis quelque chose de simple, une chemise sur un jean accompagné d’un gilet et de ma veste de cuir avec moumoute à l’intérieur qui me tenait bien chaud par ces températures glaciales. Le printemps se rapprochait peu à peu et j’étais déjà enthousiaste à l’idée de pouvoir emmener ma petite amie a la fête foraine, faire des pique-nique dans le parc et d’autre choses que l’on ne peut faire que lorsqu’on est en couple et amoureux. Prenant un temps considérable à refaire la moitié des albums de ses chanteurs préférés tout en laissant la douche couler, je ne pris pas la peine d’attendre que mademoiselle sorte et entra dans la salle de bain directement pour lui donner un baiser des plus langoureux avant de la laisser sur sa faim pour aller retrouver une autre fille. Comme c’était amusant lorsqu’on y pense, je laissais ma copine pour aller voir une petite anglaise et elle ne pouvait même pas s’y opposer car c’était « purement professionnel » si on peut dire les choses ainsi. Je pris ensuite le chemin du parking et montais dans ma voiture sans plus attendre et pris la route du restaurant m’amusant à imaginer la tête de la fille en question. Etait-elle moche, grosse, rousse, poilue ? Ces images qui défilaient dans mon esprit me faisait rire comme un idiot provoquant le regard dédaigneux de l’homme qui attendait à mes côté au feu rouge. Je repris mon sérieux un instant avant de scruter les alentours, cherchant une place où me garer, tout ce que je savais c’est que celle qui m’attendait été sensée porter une veste rouge pour que je puisse la reconnaître immédiatement. J’avais trouvé ça drôle de lui donner la couleur la plus voyante du monde pour signe distinctif, au moins si elle était inutile et sans conversation je pourrais toujours blaguer la dessus, sait-on jamais.

Poussant la porte du restaurant, un visage familier se présenta immédiatement à moi. Elle était là, la petite brune que je connaissais trop bien malheureusement, sur tous les étudiants qui se trouvaient dans ce programme, il avait fallu que ce soit elle qui se présente à moi. J’hésitais un instant à rebrousser chemin avant de finalement m’avancer vers elle un sourire nerveux planté sur les lèvres. Eh bien le monde est petit, je ne pensais plus jamais te revoir après avoir quitté Oxford ! Je m’asseyais face à elle poser mes mains sur la table, jouant négligemment avec la serviette qui se trouvait là. Je sais ça doit te paraître bizarre à toi aussi… dis-moi un peu comment ça se passe pour toi ? Je serai ravi de te faire faire un tour de l’université si tu n’as pas encore découvert les richesses de notre campus. Je laissais un silence s’installer avant de finalement dire ce qui me paraissait le plus évident dans cette situation. Tu m’as manqué tu sais depuis que je suis rentré, cela fait maintenant 3 ans mais c’est comme si c’était hier. Je riais de cette situation plutôt incongru me rappelant immédiatement que j’avais une petite amie désormais, que j’étais heureux et que je ne pouvais pas décemment me laisser distraire de cette façon. J’allais devoir affronter mon passé et ce n’était pas une mince affaire.

Je venais à peine d'arriver et la jeune fille m'accablait déjà de détails complètement futiles sur sa vie comme si nous ne nous étions jamais quitté. J'étais comme qui dirait choqué par son attitude et son aisance face à moi tandis que j'étais en train de me demander si je ne devrais pas tout simplement courir vers la porte et essayer de l'éviter pour le reste de l'année. Je vois que tu as eu un planning chargé ces derniers temps, mais je ne suis pas vraiment surpris que ton père se soit mit dans le pétrin, il a toujours vécu comme si l'argent été illimités, comme toute ta famille d'ailleurs. Ca fait du bien de voir qu'au moins toi tu as gardé les pieds sur terre. Je lui fis un sourire encourageant tandis que j'essayais d'imaginer à quel point cela devait etre compliqué pour elle de devoir veiller sur toute sa famille, étant la seule à avoir sagement économisé son argent. Je me sentais comme obligé de lui venir en aide, elle débarquait ici ne connaissant personne et après tout c'était mon rôle d'être là pour mon ou ma correspondante qui qu'il ou elle soit. Je prévoyais déja de lui faire visiter la ville et de lui montrer la vie à l'américaine qui était 10 fois plus libérale que celle dont elle avait eu l'habitude en Angleterre, nous serions à nouveau réunis comme avant, mais tout cela restait évidemment en suspens car la première chose que je devais faire maintenant, c'était de prévenir Jordane que mon ex venait d'arriver à la fac et qu'en plus j'allais devoir passer du temps avec elle dans le cadre de l'échange. Tu sais, si tu as besoin de quoi que ce soit je suis là, que ce soit te faire visiter San Francisco ou même te présenter des gens. Lorsqu'on est nouveau ça peut faire un peu peur de se retrouvé plongé dans cette marre de requins sans savoir qui est un enfoiré fini et qui ne l'est pas. Je lui fis un petit clin d'oeil complice, car bien que je n'étais plus autorisé à la draguer, je ne pouvais m'empêcher de le faire, je me mis à me détester un instant pour l'attitude que j'avais, ce n'était pas du tout loyal envers ma copine et je devais rectifier le tire au plus vite. Je commandais un milkshake à la serveuse qui passait là, laissant Alexie faire son choix. Evidemment c'est moi qui invitait, même si ce n'était pas un rendez-vous galant je me sentais obligé de payer pour la jeune fille, simple courtoisie.

Mon coeur s'arrêta de battre un instant lorsqu'elle me confessa que je lui manquais moi aussi. Je commençais à regretter d'avoir même eu l'idée de lui dire cela, tant c'était inapproprié. Elle m'avait manqué pendant longtemps mais j'avais fini par mettre cette période de côté pour pouvoir avancer dans ma vie, dans mes études, sans repartir en arrière. Mes nouvelles résolutions étaient de tourner les yeux vers l'avenir et de laisser le passé là où il était, malheureusement celui-ci finit toujours par vous rattraper un jour ou l'autre, la preuve. Je ne sais pas quoi te dire, je ne voulais pas nous donner de faux espoirs... Tu sais lorsqu'on était ensemble c'était vraiment génial, on s'entendait parfaitement, on était un peu le petit couple parfait qui ne se dispute que pour savoir quel film nous allions regarder. Malheureusement lorsque je suis arrivé ici, j'ai du me dépêcher d'entrer dans le moule et je ne pouvais pas me permettre de repenser à une période, aussi heureuse fut-elle, qui était alors révolue. Je baissais la tête dans le milkshake qui venait d'arriver devant moi et en pris une gorgée pour me donner un peu de courage. Et aujourd'hui j'ai à nouveau une petite amie, je ne voudrais pas qu'elle se fasse des idées à notre sujet, même si tu tiendras toujours une place essentielle dans ma vie, tu m'as aidé à me remettre de ma cure de désintoxication, j'ai pu retrouver une vie normale grâce à toi et je ne t'en remercierai jamais assez... mais... enfin... j'espère que tu comprends... je lui fis un sourire en coin espérant avoir été convainquant. Il fallait qu'elle arrête de me faire ses yeux doux, c'était évident qu'elle me faisait toujours secrètement craquer mais je ne l'aurais jamais admis même sous la torture.