Je veux que tu me pardonnes pour être parti trop longtemps, comme ci rien n'avait d'importance.

Seul dans une rue abandonnée, le regard vide, fuyant. Taj était debout en plein milieu, fixant l'horizon. Il attendait quelqu'un, quelque chose ? Intrigué par des détails, il scrutait les alentours comme pour graver ce moment dans sa mémoire. Ses jambes commencèrent à avancer toutes seules. Il n'avait plus le contrôle de son corps et là, ce n'était pas sa bipolarité qui agissait à sa place. Non, il était calme, quoiqu'un peu stressé, une chose l'attiré par là. Pas un bruit, pas une personne, rien. Le vide total. Des maisons qui semblaient abandonnés, jamais il n'avait mis les pieds dans un tel endroit auparavant. A chaque pas, il sentait les vibrations lui remonter dans tout le corps. Cette sensation d'être lourd mais en même temps de toucher la liberté. C'était étrange. Anormal. Taj continuait à avancer, c'était son but, il ne pouvait pas faire autrement. Le couloir de la mort. La sentence méritée, il ne pouvait plus y échapper. La pression commençait à monter en lui, il avait peur. Quelque chose apparu au loin, ce fut d'abord flou puis on pouvait distinguer une estrade. Plus il s'y rapprochait plus il savait. La pendaison. La seule chose qui pourrait le sortir de son enfer. La mort était le seul moyen pour lui d'être libre. Un cri, Taj tourna la tête, il vit sa mère choquée de voir son fils marcher, puis de l'autre côté, son père. Au fur et à mesure qu'il avançait, il voyait les personnes qui avaient marqué sa vie. Rapidement une foule de forma de par et d'autre du jeune homme, tous plus choqués les uns que les autres. C'était l'heure de son jugement. Le beau brun ne pleurait pas, il avait déjà vécu ça. Toutes les insultes en sa direction, les regards accusateurs, il avait honte. Une fois devant l'estrade, Taj monta les marches. Doucement, sans un bruit, les personnes avaient disparu, il n'osait pas regarder en arrière. Se plaçant au milieu du plancher, une corde l'attendait. Il se plaça devant et passa sa tête à travers. C'était la fin, la fin d'une vie de cavale, de paranoïa. Melody, sortie de nulle part, se mit devant lui et le regarda tendrement. Sans un mot, elle vint capturer ses lèvres. Ils échangèrent un baiser des plus passionnés. Le rythme cardiaque du jeune homme s'accélérait. Melody se recula et murmura quelque chose d'incompréhensible. Taj voulait parler mais aucun son ne sortait de sa bouche. D'un geste franc, la brunette fit un signe de la main. Le plancher s'écarta en deux sous ses pieds et la corde se tendit d'un bruit sourd.
Le réveil fut brutal pour Taj. Il était tombé par terre, remuant tellement. Son coeur battait vide, il était essoufflé. Ce n'était pas la première fois qu'il faisait ce rêve mais à chaque fois, il le vivait assez mal. Il se releva difficilement, il était en transe. Doucement il s'appuya sur le mur pour éviter de tomber. Le noir complet, il ne voyait rien, il ignorait l'heure mais surtout l'endroit où il pouvait bien être. Voyant le réveil qui affichait 22h30, il mit un temps avant de réaliser. En direction de la salle de bain, il se passa un peu d'eau sur le visage, n'osant à peine se regarder dans un miroir. Depuis combien de temps Taj ne s'était pas regardé dans un miroir ? Hormis pour se coiffer le matin, il n'avait jamais prit la peine de se regarder dans les yeux et d'affronter son regard de tuer. La dernière fois qu'il avait osé se regarder dans les yeux, il avait brisé le miroir et s'était ouvert la main. Reprenant petit à petit sa respiration, Taj commençait à se calmer. Il ne pouvait pas rester là. Il avait besoin d'air frais, de se changer les idées. Enfilant un jean et un pull, il claqua la porte. 22h30 ! La nuit était terminée pour lui. Il s'était endormi vers sept heures et pourtant, la nuit était finie. En plus de devoir vivre avec un jumeau maléfique, le jeune homme devait affronter des nuits de solitude, entre insomnie et le passé qui se manifestait. Le pauvre, quand sera-t-il en paix ? Probablement jamais. La première chose qu'il fit une fois dehors ne fut pas difficile à deviner. Taj sortit une clope qu'il amena rapidement à sa bouche. Fumer était devenu son seul échappatoire. Et oui, il se contentait de ce qu'il pouvait. Seul, il marcha une bonne vingtaine de minute avant de se retrouver près d'un dortoir. C'était la première fois qu'il venait là, ses pas l'avaient conduit ici. Le pauvre, on aurait dit une épave à marcher le regard vide. Il jeta sa cigarette, enfin sa troisième cigarette et entra dans le bâtiment. C'était ça, il avait vu de la lumière alors il était entré. Peut-être avait-il confondu avec son propre bâtiment. Bref, il comprit rapidement qu'il n'était pas au bon endroit, il comptait faire demi-tour avant de voir une chose assez intéressante. Taj s'avança vers le mur et vit une sorte de liste avec les noms des étudiants qui logeaient ici. Un petit sourire amusé se dessina sur son visage quand il vit marqué Bailee Howkins. Le jeune homme serait bien allé l'ennuyer juste pour le plaisir mais il fut intrigué par le nom écrit juste à côté, Marley Boyd, son sourire disparu aussitôt. Que pouvait-elle bien faire ici ? La même chose que lui, une fois de plus ? Ce n'était pas possible. Déjà qu'il était tombé sur Pi il y a quelques jours, voilà que maintenant c'était au tour de Marley. C'était une bonne chance dans un sens car cette nana là était pour le moins unique. En sa présence le Taj incontrôlable se transformait en le petit Camille calme et adorable. Elle avait des pouvoirs magiques cette fille, ce n'était pas possible autrement. Allait-il monter jusqu'à sa chambre ? Certainement. Taj n'était pas du genre à se poser vingt miles questions. Il agissait et réfléchissait ensuite. Une nana passa juste à côté de lui. Taj lui aurait bien attrapé le bras pour l’interpeller mais il valait mieux éviter les contacts non prévus.

- Hé, excuse moi, dit-il poliment. Tu connais Marley ? Au premier abord, elle fronça les sourcils et lui fit un signe affirmatif de la tête. Taj faisait si peur que ça ? Quel étage ? demanda-t-il, calmement.

Hésitant un instant, la blondinette lui indiqua alors l'étage, elle ne semblait pas rassurer. Ok, il avait peut-être une tête de déterré mais quand même. Une fois au niveau 2, il se dirigea vers la porte en question. Aussi étrange que ça puisse paraître, Taj semblait serein, il avait ce petit sourire sincère sur son visage. Il allait la revoir, chose qu'il pensait ne jamais arriver. D'un geste sur de lui, il tapa à la porte.