SAN FRANCISCO / FLASHBACK ► « Arrête je te dis. Tu vas te faire mal ! T’es vraiment idiot quand tu t’y mets. » « Fais pas ta sainte ni touche et viens. » « Non. Je ne sauterais pas. T’as vu l’état de l’eau ? C’est dégueulasse. Moi je ne nagerais pas dans cet étang. Si ça se trouve y a des cadavres dans ce truc. Ca me dégoute. » « En attendant, je t’ai proposé d’aller à la piscine mais tu ne voulais pas te mettre en maillot de bain devant tout le monde alors saute là-dedans et fais pas chier sinon moi je rentre. » « CA VA CA VA. Laisse-moi du temps et arrête de me regarder comme ça. J’ai l’impression que tu fixes ma poitrine depuis tout à l’heure. » « Ce n’est pas qu’une impression. » « T’es vraiment un salaud putain. » J’ai sauté dans l’eau sans hésiter et je me suis agrippée à son cou pour le couler. Sans succès. « Fais attention au cadavre. » « C’est le tiens qu’on va retrouver dans le fond de ce lac si tu continues. Tu fais chier. » Danahiel a toujours eu le don de se mettre en danger. Même à cette époque il le faisait. Nous étions jeunes et insouciants mais il l’était bien plus que la moyenne. Sa vie était rythmée par les mauvais choix qu’il faisait et les actions qui le mettaient en péril, mais ça, il n’en avait rien à faire. Marche ou crève comme il disait si bien. Quelle connerie. Qu’y a-t-il de bien à mettre sa vie en danger ? N’aimait-il pas assez la vie pour voir qu’elle a de la valeur ? J’ai toujours pensé qu’il fallait être idiot pour ne pas l’apprécier à sa juste valeur et il était stupide de faire toutes ces choses qui pouvaient le mettre en danger. Il ne faisait aucun effort pour être vivant. C’était sa façon à lui d’en profiter. Il était jeune et insouciant et je crois que c’est sa stupidité qui m’a toujours séduite. La vie parait si peu à ses côtés et pourtant, au fond de moi, je sais qu’il n’y a rien de plus précieux. « Allez viens, rentrons, il fait froid. »

SAN FRANCISCO / 6 JANVIER 2013 ► Remember those posters that said, Today is the first day of the rest of your life? Well, that’s true of every day except one. The day that you die. Je regardais par la fenêtre et j’admirais la pluie qui tombait dans les rues de San Francisco. Les rues étaient calmes, on voyait passer quelques personnes bravant le vent, les goûtes de pluie et le froid hivernal. La pièce où je me trouvais était tout aussi glaciale que l’extérieur. Elle semblait sans vie et cette pensée me pinça le cœur. Je sentais en moi comme une brise de mélancolie qui me saisissait jusqu’à la chair, ne laissant en moi qu’un terrible sentiment de peine. C’était ça alors la mort, c’est à ça que cela ressemblait. L’avoir sous mes yeux, lui parler et ne recevoir aucune réponse. Je me suis toujours demandé qu’est-ce qu’on pouvait ressentir dans ces moments-là. Je me le demande toujours. Vide de toute émotion, je ne ressentais rien. Aucune culpabilité, pas de joie. Rien. Seule la mélancolie et la tristesse m’habitaient mais ce sont de drôle de sensation car si ce sont des sentiments, ils laissent en vous comme un vide. Audrey Hepburn appelait ça les ‘’mean reds’’. Elle expliquait que ce n’était en rien du blues. C’est semblable à l’enfer, le feu et le diable. Nous n’avons pas la sensation de pouvoir se relever. On n’imagine pas pouvoir le faire un jour de nouveau. C’est comme être enchainer à un poteau et ne plus pouvoir s’en détacher. La seule chose qui la sauvait c’était d’aller prendre son petit déjeuner et le manger devant la boutique de Tiffany. C’était ça son remède contre cette douleur insoutenable. Mais moi, que me restait-il ? Il était allongé devant moi, sur son lit d’hôpital depuis maintenant 6 jours et il ne réagissait pas. Danahiel était profondément endormit et semblait fuir la vie. Il ne se battait pas, il ne faisait aucun effort. Il n’en a jamais fait. Je ne lui avais pas adressé la parole une seule fois. Je restais assise dans cette chambre, près de lui, je le regardais et je ne disais rien. Je mangeais à peine, je dormais peu et je passais presque toutes mes journées ici, auprès de lui, rentrant pour simplement souffler, prendre une douche et après ça, je revenais. Je n’avais prévenu personne de mon retour. Personne ne savait que j’étais revenue à San Francisco. Je voulais simplement qu’il se réveille et qu’il retourne massacrer sa vie comme il l’a toujours fait et qu’il me laisse tranquille, qui me laisse vivre la mienne. J’essayais de me recoller, rassembler les morceaux de mon pauvre cœur brisé mais il était là, toujours là à me rappeler qu’il existe et il n’avait rien trouvé de mieux pour me faire revenir : un accident. Il a toujours eu un don pour faire des entrées spectaculaire dans ma vie. Il m’a sauvé une première fois et quand je ne m’y attendais pas, il a recommencé. Aujourd’hui, c’est lui qui semble vouloir être sauvé. Je me retournais vers lui, détachant mon regard de la rue et je le fixais, sans un mot. Je suis venue m’assoir auprès de lui comme je le faisais depuis des jours et je restais là à le regarder et je le maudissais d’être aussi imprudent car si je ressentais une profonde peine quand je le voyais, je ne pouvais mettre de côté tous ces sentiments que j’ai pour lui et qui ne sont jamais réellement partit. Après plus d’un mois loin de sa présence, je me sentais encore faillir à côté de Danahiel. Un tel amour ne s’en va jamais vraiment. Il s’estompe avec le temps, ces sentiments changent mais ne disparaissent jamais vraiment. Je lui avais pardonné verbalement dans une lettre que je lui avais envoyée mais mon cœur ne l’avait pas totalement fait et je saignais encore de l’intérieur en le regardant allongé sur son lit. Il semblait presque paisible ici. Son visage n’avait jamais été aussi doux et si simple. Il était calme et semblait dormir dans la plus grande paix. Il réussissait presque à me faire croire qu’il était bien mieux comme ça. Mon but premier était pourtant qu’il se réveille et après ça, j’allais repartir, j’allais poursuivre ma vie et tenter de me reconstruire sans lui comme je le faisais depuis plusieurs semaines. J’ai alors prit sa main pour la première depuis des semaines et je les porté à ma bouche pour l’embrasser. Je semblais faire ça tout naturellement, comme si je le faisais depuis toujours mais au plus profond de moi, je ne faisais que jouer avec mes blessures internes. Sentiments incontrôlable que je ne voulais pas m’avouer totalement, ils provoquèrent des larmes que je n’ai pas su arrêter. Sa main sans vie, dans les miennes, je la collais contre ma bouche et je l’embrassais, priant le ciel pour qu’il se réveille un jour. Je le fixais, resserrant mon étreinte. Ma voix tremblait et les mots en sortaient sous forme de foutoir mais le cœur y était. « Réveille toi.. RÉVEILLE-TOI. C’est tout ce que tu as trouvé pour me faire revenir ? Te jeter sous une voiture ? Ça a marché. T’es content ? Alors réveille-toi. T’as toujours tout fait pour me gâcher la vie. Je commençais petit à petit à me reconstruire et toi t’as rien trouvé de mieux que de faire le con. C’est tout ce que tu sais faire Danahiel. Tu ne comprends pas que si je veux aller mieux je dois être loin de toi ? Tu cherches quoi ? A me faire revenir ? Je lui là.. Je suis juste là, près de toi, et je te serre la main comme si ma vie en dépendait parce que si tu ne te réveilles pas je n’aurais personne à détesté, je ne pourrais me détester que moi-même et il me restera quoi à la fin ? Rien. Réveille-toi bon sang.. » Parce qu’au fond, je l’aimais autant que je le détestais et ça a toujours été comme ça. Story of my life.