La pendule de la salle de sport indiquait dix-huit heures quand Armand en franchit les portes, son sac se balançant sur son épaule au rythme de ses pas rapides. Vêtu d’une tenue de sport, il laissa ses affaires sur un banc non loin d’un sac de boxe libre et ressortit presqu’aussitôt faire trois fois le tour du parking en courant. L’expérience lui avait appris que l’échauffement était aussi important que l’exercice en lui-même, et la salle n’était pas assez grande pour qu’il puisse courir sans déranger les autres sportifs qui s’entraînaient là. Sa course dura une demi-heure, avant qu’il n’entre de nouveau pour s’installer aux haltères. Le gérant de la salle de sport passa devant lui et agita la main pour le saluer. Armand était devenu un habitué, à force de fréquenter cette salle quotidiennement depuis son arrivée. Enfin, presque quotidiennement : parfois son travail l’empêchait de s’y rendre et il devait se contenter de jogging dans le par cet d’abdos chez lui, au calme de son studio. Mais ça n’était pas assez pour ce presque gladiateur incapable de trouver le sommeil ou la paix tant qu’il n’avait pas suffisamment épuisé son corps trop habitué à l’action. La salle de sport, et en particulier le dojo et la salle de boxe, étaient bien plus appropriés.
Lorsqu’il se releva des haltères, il sentit avec satisfaction cette tension dans ses muscles qu’il connaissait si bien et avait appris à apprivoiser. La sueur commençait –oui, commençait seulement- à perler sur son front. Il passa cinq petites minutes à s’étirer et alla vers le punching-ball libre.

« Me le décroche pas cette fois Clives ! » lança le propriétaire qui repassait par là pour s’assurer que l’objet était bien accroché.
« Je ferai de mon mieux. Du monde cette semaine ? » demanda Armand.
« Pas plus que d’habitude. Par contre je crois qu’il y a quelqu’un qui pourrait t’intéresser, regarde par là-bas. »

Suivant le regard du propriétaire, Armand repéra un type d’à peu près son âge, mais plus grand et plus mince, les cheveux plus éclaircis peut-être, au regard bleu perçant. Comme lui, il avait une tenue de sport et s’escrimait contre un punching-ball. Armand comprit aussitôt pourquoi le propriétaire avait attiré son attention sur lui : il était manifestement encore débutant, mais ses coups précis et puissants étaient ceux de quelqu’un qui avait déjà une certaine expérience en la matière. Peut-être avait-il pratiqué un autre sport de combat avant de passer à la boxe ? Intéressant. Armand hocha brièvement la tête en direction du propriétaire, qui s’éloigna, et alla chercher deux paires de gants de boxe dans le placard. Ensuite, il s’approcha à pas lents de ce drôle de type qui avait éveillé son intérêt. Arrivé à sa hauteur, il s’adossa à un pilier et le regarda frapper encore quelques instants, observant son jeu de jambe, le mouvement de ses bras, la position de ses poignets, ses poings, sa respiration saccadée. Décidément, ce type était peut-être encore un novice, mais il se débrouillait sacrément bien. Armand se redressa et le salua d’un mouvement de tête.

« Salut mon vieux… Dis donc, ça fait quelques minutes que je te regarde faire, tu te débrouilles pas mal… Qu’est-ce que tu dirais de passer au niveau supérieur et de monter sur le ring ? J’ai besoin d’un partenaire. » demanda-t-il en lui tendant une paire de gants en guise d’invitation.

« Au fait, je m’appelle Armand. Bienvenue au club du sang et de la sueur. » ajouta-t-il avec une ébauche de sourire au coin des lèvres.

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