Journée de merde. D’abord, ce con à lunette qui me renverse son café dessus alors que j’étais déjà à la bourre, puis ce chauffard qui a failli me foncer dedans et enfin cette conne d’esthéticienne était en retard pour mon rendez-vous. J’avais besoin de m’amuser un peu pour relever le niveau de ce jour pourri. Quoi de mieux qu’appeler Jordane ? La belle rousse Iota était devenue mon amie lors de la rentrée. Croisée au détour d’un couloir, on a tout de suite accroché. Un regard pour nous comprendre, voilà ce qui résume cette relation. Cette entente où tout est permis, c’est moi qui la pousse à son paroxysme. J’ai vu en elle cette faille, une fissure dont je ne connais pas la cause, mais en la titillant, j’ai vu la petite flamme, celle de l’adrénaline. C’est là que tout a commencé. Je lui ai lancé un défi et à chaque fois, la difficulté augmente. Je ne savais pas encore quoi imaginer pour nous amuser, mais ça ne saurait tarder. « Jordane, ce soir à l’Endup Nightclub, je t’attendrai au bar vers 23h00. Kiss, kiss. » Je raccrochai immédiatement et passai le reste de ma journée à fumer des clopes en prenant le soleil sur notre terrasse en maillot de bain noir. « Lennon, tu viens me mettre de la crème solaire ? Je vais finir comme une écrevisse et je n’ai pas envie. » Lunettes noires sur le nez, j’attendis que mon chère et tendre colocataire daigne venir me masser le corps. « Len, dépêche ! Plus tu mets de temps, moins la gâterie sera intéressante. » Et oui, je pouvais me montrer généreuse, mais je pouvais aussi être une vraie garce. Le jeune homme obtempéra. « Mon grand, mon beau, mon sexy Lennon, tu masses tellement bien. », dis-je alors que le jeune homme passait ses mains grasses sur mon corps fin. Je me tournai vers mon colocataire. « Merci. Peut-être tantôt pour le reste. » Je fis la crêpe jusque 18h00. Malgré le soin qu’avait étalé le jeune gamma sur mon corps, j’avais attrapé quelques rougeurs surtout au niveau des pieds. Ce soir, je ne mettrai sûrement pas des chaussures avec des lanières. C’est ce que je fis d’ailleurs. Je choisis une paire d’escarpins noirs avec lesquels je mis une robe bustier en cuir. Je mis un effet de décoiffé dans mes cheveux blonds et je me maquillai. Vers 22h30, je sortis de l’appartement. J’en grillai une entre mon point de départ et le club. J’entrai sans encombre et m’installai au bar. Commandant un martini blanc, j’aguichai le barman en attendant mon amie. Soudain, je la vis passer la porte d’entrée. Un sourire étira mes lèvres. Je fis signe à la belle rousse et cette dernière vint me rejoindre. « Jordane ! Je savais que tu viendrais, tu viens toujours de toute façon. » Pas de bise, un sourire suffisait. Je l’invitai à s’asseoir et appelai mon nouvel ami, Craig. « Commande ce que tu veux, il te l’offre. » Il fronça les sourcils. « Oui, oui, il te l’offre sinon il n’aura pas ce que je lui ai promis. » Garce un jour, garce toujours.

J’aimais séduire les hommes, les entourlouper pour qu’ils finissent dans mon lit. En général, aucun ne résistait et c’était du pur plaisir que de voir que peu d’êtres masculins contrecarraient mes plans. D’habitude, je m’attachais à attraper dans mes filets un mâle plein aux as, mais cette fois-ci – à défaut de trouver un crésus potable parmi les fêtards –, j’avais jeté mon dévolu sur le barman. Craig était exactement le gars qui allait me payer toutes mes consommations, mais aussi celles que je voudrais qu’il paye, c’est-à-dire ce que Jordane allait boire. J’avais conclu avec lui un petit marché bien alléchant, il devrait difficilement résister. « T’ai-je déjà fait faux-bond depuis que nous nous sommes rencontrés darling ? », me répondit la jeune femme tout en s’asseyant. « Je n’ai pas de souvenirs d’une fois où tu m’as laissée seule quand je te l’ai demandé. » On sentait qu’elle essayait de cacher son accent. Au contraire, je ne tentais pas de dissimuler le mien même si l’Angleterre ne me rappelait pas de très bons souvenirs. Mon amie commanda alors un Cosmopolitan à mon ami barman ajoutant un geste de drague qui n’avait pas l’air de déplaire à l’homme. Faire la fête ce soir, autre part qu’ici, mon amie avait tapé dans le mile. « Libre, je profite de ma jeunesse. Je n’ai que 23 ans, j’ai encore le temps de me caser. » Je ne désapprouvais pas le choix de la Iota d’être en couple, je trouvais juste cela un peu inutile. Elle avait toute la vie devant elle et la belle s’encombrait déjà d’un homme alors que si elle était célibataire, elle en aurait plus d’une dizaine à ses pieds. Enfin, tout le monde fait comme il veut. Craig arriva et déposa le cocktail de Jordane. Je souris à de ce dernier tout en l’embrassant dans le vide. « Tu es un bon garçon, Craig. » « Si j’me fais prendre, tu vas connaitre ta douleur, Blondie. » Je roulai des yeux. « Ca n’arrivera pas, crois-moi ! » « J’y compte bien. » Je soufflai. « J’ai eu quelques histoires avec le patron, il me doit un service donc si je lui demande, il le fera. » lançais-je alors que le barman était déjà parti s’occuper du reste de ses clients. Je reportai mon attention sur l’étudiante. Elle nous invita à trinquer à ses vacances qu’elle qualifia de bien méritée. « Bonne idée ! Cheer ! » Les verres s’entrechoquèrent en un tintement étouffé. « D’ailleurs, en parlant de vacances, qu’as-tu prévu pour ces deux mois sans cours ? Parce que si tu ne fais rien, il y a quelques petites expériences à tenter à plusieurs endroits du pays, mais aussi au Mexique. Si ça te tente… » Et oui, j’avais déjà repéré quelques adresses au cas où je devais emmener la blonde en voyage. Ce ne serait sûrement pas le cas, car elle préfèrerait sûrement rester avec Roman. C’était compréhensible, son homme passait sûrement avant des vacances entre copines à se lancer des défis plus audacieux les uns que les autres. D’ailleurs, en parlant de défi… « J’me suis mise le barman dans la poche donc on aura des boissons gratuites toute la soirée. Malgré tout, l’homme là-bas, à trois sièges de nous, m’a l’air bien seul. Tu ne voudrais pas lui soutirer deux verres pour deux pauvres petites assoiffées que nous sommes ? » Clin d’œil. C’est parti, ma belle !