Reprise des cours à Berkeley pour Kilian. C'était un peu comme revenir à la maison après une longue absence. Son séjour en France et la poursuite de ses études là-bas l'avaient enrichi, il se sentait cette fois prêt à affronter la vie à la fac' en présence de son paternel. Du moins celui dont le nom était inscrit à la case "Père" de son livret de famille, ne mettons pas la charrue avant les boeufs. Pourquoi fuir la Californie au cours de ce fameux mois de mars, l'an dernier ? Parce que Salaun senior avait réussi à se faire embaucher comme prof de théâtre dans l'optique, entre autres, de renouer avec Salaun junior. Bad move. Véritable tête de mule et blessé par son abandon pur et simple, Kilian n'était pas prêt à accorder de l'attention à ses explications et encore moins de lui pardonner. Dans le doute et pour s'épargner des nuits entières à psychoter sur chaque cours de théâtre, le breton avait décidé de se tirer, tout simplement.
Aujourd'hui, les choses étaient différentes. Prêt à ignorer son paternel ou bien à l'enfoncer à chaque fois qu'il lui prendrait l'envie de lui adresser la parole - pourquoi pas même en plein cours pour lui infliger une honte monumentale - Kilian ne craignait plus de se retrouver en sa présence. Mieux, ça l'amusait. Plus il ramait et plus le jeune homme prenait son pied. Quoiqu'il en soit, il comptait bien ne pas se laisser distraire par ce genre de choses : ses études étaient bien trop importantes à ses yeux pour qu'il accepte la moindre remise en question. A la différence d'un paquet d'autres étudiants, il ne roulait pas spécialement sur l'or et voulait rentabiliser chaque dollar qu'il avait versé pour rentrer ici.

Le beau brun avait rattrapé entre autres l'équivalent de dix mois de fêtes en tous genres en à peine une semaine à son retour. Traîné dans tous les bars de la ville, Kilian avait enchaîné les before, les after, la totale... de quoi montrer quelques signes de fatigue à certains moments. Tenez, par exemple : assis sur une chaise pendant deux heures, c'était le meilleur moyen pour lui de capituler à l'encontre de la fatigue qui remportait apparemment bataille sur bataille dans son corps et son esprit. Ce qu'il faut savoir quand on étudie le cinéma et le théâtre, c'est qu'on reste très souvent assis dans une salle sombre à regarder des vidéos en pagaille et parfois même sans faire de pause, le prof faisant ses commentaires en même temps que la représentation se poursuivait sur l'écran. Un bruit de fond, une salle obscure, une position confortable si possible et une table pour s'accouder... On ne vous fait pas de schéma, c'est quand même un endroit formidable pour pioncer en paix sans que ça se remarque réellement. Puis comme Kilian était un comédien exemplaire, cela faisait maintenant une bonne semaine qu'il faisait gober à ses profs qu'il ne s'était pas remis du décalage horaire France/Californie. Ca fait tout de suite plus sérieux que "Je picole avec mes potes pour rattraper le temps perdu et mon corps a parfois un peu de mal à suivre".

Au terme d'un cours où pendant près d'une heure et demi, les élèves avaient donc visionné une vidéo, une représentation de Macbeth version contemporaine, le jeune homme s'était réveillé doucement peu avant la fin de l'heure. Ni vu ni connu, tout le monde n'y avait vu que du feu. Vivement que ce train d'enfer soit terminé, qu'il arrive à avoir les yeux en face des trous pendant les cours. Il rangea tranquillement ses affaires et se leva en baillant à s'en décrocher la mâchoire... sur son chemin, il percuta une personne et sentit un livre lui tomber sur le pied. Étouffant un juron, Kilian fronça les sourcils. "Désolé, j'ai pas fais attention." s'excusa-t-il en se penchant pour ramasser le bouquin et le rendre à son propriétaire... ou plutôt sa propriétaire. Tout sourire, brune, avenante et séduisante, il faut le reconnaître. Certes, Kilian n'était pas d'un naturel abordable, mais étant fautif dans cette histoire, il s'arrangea pour faire passer la pilule un peu mieux. "C'est ce cours vidéo, ça m'a assommé et faut le temps que j'arrive à faire le point." lui glissa-t-il avec un léger sourire en se massant la nuque avant de sortir de la salle en compagnie de la jeune femme.

Au premier abord, Kilian était souvent jugé comme l'archétype du brun ténébreux qu'on fait mieux d'éviter de chatouiller ou ne serait-ce que regarder. Inabordable, pas spécialement sociable... c'était une image qu'on lui avait collée, renforcée depuis que Logan enseignait ici. La quintessence de la mauvaise humeur était particulièrement bien représentée à Berkeley grâce à Salaun père & fils. Au fond, c'était loin d'être une étiquette qui dérangeait l'étudiant dans la mesure où cela lui épargnait les relations superficielles ou les interminables moments de solitude en compagnie d'un troupeau de boulets qui vous tombent dessus sans prévenir. Il n'était pas spécialement méchant par nature, mais il aimait que les gens se le figurent : seuls les plus adroits, perspicaces ou méritants savaient gratter la surface pour deviner qui il était réellement.
Cependant, à la sortie de ce cours, le beau brun n'avait pas tout à fait envie d'être aussi froid et distant que d'ordinaire. Après tout, c'était lui qui était rentré en plein dans sa collègue : il se voyait mal l'envoyer bouler après ça. Par ailleurs, elle semblait toute aussi désolée, dans un sens. On pouvait dire ce qu'on voulait de Kilian, mais il était quelqu'un de très respectueux par nature même si ses airs bougons cachent souvent cette facette de sa personnalité. En regardant la jeune femme de plus près, il se souvint que c'était elle qui était arrivée un peu à la bourre au début du cours. Cependant, elle n'avait pas l'air de prendre ses études par-dessus la jambe pour autant : elle s'était installée dans les rangs les plus proches du prof et avait semblé attentive jusqu'au bout.

En prime, ses paroles confirmaient la pensée de Kilian à ce sujet. Il laissa un infime sourire gagner ses lèvres lorsqu'elle fit allusion à un tout autre genre de film. "Walt Disney... c'est quoi cette manie qu'ont les gens d'adorer les dessins animés ?" ironisa-t-il avec un brin de taquinerie dans la voix. Soudain, il pencha la tête sur le côté comme pour mimer de confier un secret à son interlocutrice. "J'avoue que j'ai un gros faible pour Aladdin... et toi ?" glissa-t-il avec un petit sourire. Effectivement, il cachait encore très habilement sa part enfantine et celle-ci savait se satisfaire avec les plus grands classiques de Disney. Ca peut paraître vieux jeu, mais à l'heure d'aujourd'hui, il lui semblait qu'aucun dessin animé ne pouvait se permettre de rivaliser avec ces petits chefs-d’œuvre. Les producteurs auront beau mettre tous les effets spéciaux qu'ils voudront, tous les héros bodybuildés prêts à sauver la sublissime fille en détresse remarquablement nunuche, cela n'égalera pas l'ambiance d'un Disney.
Le fils Salaun sortit donc de la salle en bonne compagnie, bien loin de se figurer pour l'instant les réelles motivations de la sympathie qu'avait la jeune femme à son égard. "Au fait, je m'appelle Kilian." Oui, quand même... c'est un peu plus chiant à retenir que "truc", "machin" ou "beau gosse", mais ça fait toujours mieux dans un échange de bons procédés. "En tout cas, je retiens que la prochaine fois, je ferai mieux de me mettre à côté de toi si je veux rester éveillé." Kilian avait un excellent niveau et se trouvait être un bosseur acharné, sans quoi il ne suivrait pas deux cursus avec autant de brio. Mais là, il allait lui falloir au moins ce week-end pour se remettre de ses soirées de folie. Puis fréquenter une fille charmante et studieuse à la fois ne lui ferait pas de mal pendant ces cours, ça l'aiderait à se remettre dans le bain.

Le Sigma braqua son regard bleu azur dans celui de la jolie brune et fronça très légèrement les sourcils. "Tu veux que je t'offre un café ? A moins que tu aies un cours ou autre chose de prévu." Galant et bien élevé, comme quoi la mauvaise humeur ne fait pas le Salaun. Par ailleurs, Kilian était d'un naturel très perspicace et observateur : sa collègue n'avait pas l'air d'être en très grande forme malgré ses beaux sourires et ses airs sensiblement séducteurs. Après tout, s'ils pouvaient passer un bon moment tous les deux, ce serait une façon plus agréable de se faire pardonner.

Kilian n'avait pu réprimer un léger sourire en coin en entendant Camélia se vanter d'être une source d'inspiration, ne serait-ce qu'en terme de Disney De toute évidence, elle avait une très haute opinion d'elle-même ce qui en certains cas n'était pas forcément un défaut. Pourquoi ? Parce qu'à ses yeux, mieux valait avoir parfois un peu trop de caractère que pas assez. Lui-même avec une personnalité très particulière mais il n'était pas du genre à trop se la raconter : l'humilité, c'était déjà un peu plus son rayon. A la rigueur, quand il commençait à se la jouer prétentieux, c'était dans l'unique but de déconner. Il préféra ne rien répondre, hormis un petit haussement de sourcils avant qu'ils se dirigent ensemble en direction de la cafétéria. Allez savoir pourquoi, mais le beau brun jugea bon de retenir entre autres que l'Epsilon appréciait beaucoup Aladdin et en particulier la fameuse chanson du Génie, Prince Ali. Il ne savait pas pourquoi mais dès qu'une femme - ou un homme - lui donnait quelque chose susceptible de la ou le faire craquer, il le notait dans un coin de sa tête, dans la section "Au cas où ça pourrait être utile".
"C'est joli, comme prénom." Et un compliment, en prime ? C'est Noël ? Deux fois en quelques semaines à peine ? Non, ne rêvons pas. Salaun n'était pas spécialement du genre à se montrer sympathique, mais pour le moment l'étudiante lui semblait très charmante, au-delà de son physique. Puis il était en partie honnête, ce prénom lui faisait vraiment penser à une fleur, une image qui collait parfaitement avec le visage de la jolie brune. Sa réponse à son invitation eut le don de lui faire naître un sourire taquin et presque un peu moqueur au coin de ses lèvres. "Avec une viennoiserie ? Gourmande et profiteuse, avec ça... Allez, vendu." Mon pauvre Kilian, si seulement tu savais à quel point cette fille-là pouvait être profiteuse, justement.

Une fois rendus à la cafétéria, le breton la laissa s'installer à une table où bon lui semblerait tandis qu'il passait commande. Deux cafés et un pain au chocolat pour la demoiselle. Il emporta tout sur un plateau après avoir payé puis se rendit à la table choisie par Camélia en lui servant le tout. Il s'installa juste en face d'elle et déposa ses mains sur sa tasse bien chaude afin de remédier au froid qui avait mordu ses doigts tout à l'heure... eh oui, en plus d'avoir la tête dans le cirage, il avait oublié ses gants... avec des températures pareilles, ça ne pardonne pas. "Et sinon, ça fait longtemps que tu étudies le théâtre ?" Conversation un peu banale, il faut le dire, mais c'est toujours mieux que ces gens qui se regardent dans le blanc des yeux et n'osent pas rompre un silence gêné qui s'installe malgré tout. Le fils Salaun but une gorgée de café et poussa un petit soupir de contentement. Maintenant, il allait avoir les idées beaucoup plus claires... chose qui, il ne le savait pas encore, ne jouerait peut-être pas en faveur de sa subversive interlocutrice. Elle allait devoir jouer plus serré si elle faisait face à un Kilian plus alerte. "La prochaine fois qu'on s'ennuie à un cours ensemble, on se matera Aladdin sur mon PC portable..." ironisa-t-il avec un petit sourire avant de reposer ses mains sur sa tasse.

Non, décidément Camélia ne semblait pas être une fille qui manque de caractère et de répartie, ça crevait même les yeux. En la voyant si assurée et amusante au sujet de son prénom, on aurait presque pu remarquer l'ombre d'un sourire sur le visage de Kilian. D'ordinaire, il avait une sainte horreur des gens beaucoup trop prétentieux ou sûrs d'eux-mêmes au point que cela en devienne presque maladif, cependant, l'Epsilon arrivait pour le moment à faire taire ce manque d'appréciation de la part du breton vis-à-vis de ce genre de personnalité, tout simplement parce qu'elle restait tout de même charmante. Une fois ses mains bien réchauffées après qu'il les aient déposées un moment autour de sa tasse, il s'accorda une gorgée en retenant une légère grimace. Sans faire la fine bouche, le café de l'université ne valait pas celui d'un Starbuck, mais bon.
Le Sigma arqua un sourcil, preuve de son intérêt vis-à-vis de ce qu'elle disait : une actrice motivée en devenir, pas mal. De toute évidence, elle donnait l'impression d'une jeune femme passionnée par le septième art et c'était quelque chose qu'il respectait beaucoup. Les gens intéressés - dans le bon sens du terme - sont souvent les plus intéressants. "Ca finira bien par venir, après tu peux toujours continuer à écumer les castings jusqu'à ce qu'un professionnel te remarque !" Il fit tourner sa cuillère dans sa tasse sans trop accorder d'importance aux gens qui venaient de passer la porte de la cafétéria. Peu sociable, il l'était jusque dans le peu de considération qu'il apportait aux inconnus à moins qu'on insiste vraiment pour venir le voir, et encore. C'était juste pour éviter d'être importuné par qui que ce soit. "Pareil, depuis tout petit à l'école. Et le jour où mon père voudra me forcer à quoique ce soit, il risque de se retrouver avec un bras en moins. Ou une jambe, ça dépendra de mon humeur." lâcha-t-il d'une voix froide et sarcastique à la fois. Dans un sens, il ne pouvait pas nier que l'environnement familial ne l'avait pas influé : un père et une mère comédiens ainsi que prof de théâtre, ça laisse forcément des marques. Toutefois, il n'avait pas choisi ce cursus par rapport à eux mais plutôt en fonction de ses propres goûts... c'était entre autres ce qui l'avait amené à entamer sa première année en arts appliqués tout en poursuivant sa seconde année en arts du film. L'art en général, c'était une passion. De plus, comment son père aurait pu le forcer à quoique ce soit, lui qui avait préféré partir jouer au parfait petit soldat après avoir lâchement abandonné son fils ?

Sentant poindre en lui un degré d'agressivité dangereux dès qu'il était question de son géniteur, il se calma en vidant les trois quarts de sa tasse de café. Oui, le café ça excite, mais boire, ça calme alors on va dire que c'est équilibré. Un sourire très diffus se dessina sur ses lèvres lorsqu'il vit le pain au chocolat impitoyablement dévoré par Camélia. "Eh bien, on ne te prêterait pas un tel appétit en te regardant !" plaisanta-t-il sobrement. Pour une femme aussi fine, c'était même surprenant. Mais peut-être avait-elle la chance de faire partie de ces personnes qui peuvent manger à peu près tout ce qui leur chante sans prêter attention aux calories puisqu'elles ne prennent rien. "Non, je ne crois pas être aussi ennuyeux que lui... et estimes-toi heureuse, tu ne l'as que deux fois dans la semaine." Lui, il avait le bonheur et la joie de croiser son visage en se réveillant, en allant à la fac', en revenant de la fac' et en allant se coucher. Keep the smile.
Alors qu'il allait porter sa tasse à ses lèvres, une remarque de la jolie brune le stoppa net dans son élan. Elle n'y allait pas par quatre chemins ! Sourcils froncés dans une mine sérieuse et surprise, il reposa finalement sa tasse sans boire la moindre goutte de café. "Euh... je ne sais pas si on s'est très bien compris." commença-t-il par répondre sur une voix calme quoiqu'un peu hésitante de peur de vexer son interlocutrice. Vu la façon dont elle présentait les choses, il semblerait qu'elle croit que le jeune homme était en train de la draguer. Petit problème d'interprétation, sans doute. "Je voulais juste m'excuser de t'avoir bousculée en te payant un café, tu sais... je suis désolé si tu as compris ça autrement, mais j'essayais simplement d'être sympathique. Et comme ça m'arrive peu souvent, c'est peut-être aussi pour ça qu'on pourrait penser à autre chose."

Un peu embarrassé par la situation, le français se massa la nuque puis posa ses yeux bleu azur dans les siens avec un léger sourire amical. "Ecoutes, tu es attirante comme tu l'as toi-même fait remarquer, c'est pas le souci... mais je n'ai pas spécialement envie de sortir avec quelqu'un en ce moment, désolé. J'essayais d'être "gentil" avec toi, c'est tout." C'est quand même assez gênant de se dire qu'on est un surdoué au niveau scolaire, qu'on est assez bon pour mener sa barque... mais qu'on se retrouve comme démuni pour s'adresser à une femme. Kilian ne manquait pas d'assurance, certainement pas, mais il avait l'impression de marcher sur un champ de mines. Son visage retrouva une mine fermée alors qu'il secouait la tête en soupirant. "C'est embarrassant, 'y a pas à tortiller." maugréa-t-il contre lui-même en terminant sa tasse de café à son tour, prêt à partir si Camélia le prenait mal.

Le rôle qui change une vie... pour sa part, Kilian n'y croyait pas tellement. C'était plutôt une histoire d'être réaliste : si on s'éclate dans le rôle d'une vie, cela veut implicitement dire que les rôles qui suivront paraîtront bien fades en comparaison. C'est pourquoi, à l'inverse, le Sigma préférait de loin cumuler des rôles qui, à défaut d'être très prestigieux, lui permettaient au moins de gravir les échelons petit à petit et dans des productions où il se sentirait à l'aise. En revanche, il rejoignait très largement Camélia sur les publicités et autres conneries de ce genre. S'il y a bien une façon d'être stigmatisé et catalogué comme "Ooooh, c'est le Monsieur qui fait de la pub pour le PQ triple épaisseur !", merci bien. Sur le sujet de la famille, le Sigma s'abstint de toutes réponses et se contenta de tourner le reste de son café dans sa tasse à l'aide de sa cuillère. Il ne connaissait pas vraiment l'Epsilon et elle était également très loin de le connaître. Partir sur ce sujet houleux et propice aux emportements même de la part d'un homme aussi naturellement posé que lui n'était pas la meilleure façon de lier connaissance. Il n'avait pas envie de parler de ça avec elle et elle n'avait certainement pas envie non plus d'entendre parler des histoires de la famille Salaun. De toutes manières, quand bien même elle le souhaiterait, le breton resterait aussi fermé qu'une huître. "Si tu veux des cours particuliers avec lui, va lui demander... si les bruns tout en muscles avec un caractère de merde te plaisent, c'est l'occasion rêvée." grogna-t-il vaguement.

Par ailleurs, la jeune femme lui paraissait réellement agréable, malgré ce malentendu qui avait plané entre eux. Soyons clairs : s'il n'avait pour l'instant pas trouvé LA perle rare, LA femme par excellence qui pourrait réellement lui faire ressentir quelque chose, il n'en était pas moins un homme qui apprécie la compagnie du sexe opposé, et dans tous les sens du termes. Sans être un séducteur aux mille conquêtes - c'est la qualité, qui prime, pas la quantité - le beau brun ne disait pas non à une petite aventure sans conséquences tant que ce sentiment était respecté. Pas de sentimentalisme, une amitié pourquoi pas, si ça vaut vraiment le coup. Camélia était très certainement une femme qu'il aurait essayé de charmer par la suite : elle avait une personnalité très particulière et un physique où il n'y avait rien à jeter... non, vraiment rien du tout. Au contraire, tout était bon à prendre. Un sourire amusé et un peu gêné se dessina sur ses lèvres. "Non, c'est pas le souci, je me suis déjà fait draguer. Et t'en fais pas pour ça, je suis ravi..." ajouta-t-il avec un air déjà plus séducteur et taquin. Sans se sentir exceptionnel ou même privilégié, c'était toujours bon pour l'ego de se faire ainsi mettre le grappin dessus. "Ce que je ne voulais pas que tu penses, c'est que je t'offrais un café seulement pour te draguer... j'essayais seulement d'être sympa sans arrière-pensée."
Toutefois, maintenant qu'elle avait lancé le sujet sur la table, elle avait l'air d'être ouverte à un certain rapprochement. Attention, Kilian était peut-être un séducteur (un peu comme n'importe quel homme, pas plus qu'un autre) mais il respectait toujours chacune de ses conquêtes. Coucher sans se connaître, très peu pour lui. Traiter une femme comme une moins que rien après avoir profité d'elle, ce n'était pas non plus son genre. D'ailleurs, il répugnait ce genre d'hommes. Mais puisque Camélia ne semblait pas contre l'idée de flirter et pourquoi pas davantage, pourquoi pas. Le breton s'avança un peu plus en déposant un coude sur la table, sourire au coin de la bouche. "Effectivement, t'es pleine de surprises... au moins, tu n'y vas pas par quatre chemins quand tu veux quelque chose." Déterminée ? Oui, on peut le dire. Kilian n'avait d'ailleurs pas idée jusqu'à quel point.

Il leva la main en direction du serveur pour qu'il amène deux autres pains au chocolat. Oui, mine de rien, un Salaun se trimballe toujours avec un estomac qui fait quatre fois la taille de celui d'un humain normalement constitué. C'est pourquoi il mordit avec envie dans la viennoiserie lorsqu'elle arriva sur la table. A ce train-là, ce n'était plus un café mais carrément une gueuleton qu'ils allaient faire. "En tout cas, t'as raison : avec nos appétits respectifs, je pense que je vais d'abord en parler à mon banquier avant de songer à t'inviter à dîner. Désolé, mais je ne roule pas sur l'or..." ajouta-t-il avec un clin d'oeil avant d'enfourner une autre bouchée de pain au chocolat. Dans les faits, il avait pourtant un second compte de plusieurs milliers de dollars... et pourtant, il n'y touchait pas. Pourquoi ? Parce que c'était son père qui le lui avait rempli pendant toutes ces années d'absence et Kilian ne considérait cela que comme de l'argent sale. "Et sinon, ce rôle qui changera ta vie d'actrice, tu le vois comment ? La prochaine princesse qui va faire la nique à Jasmine et Blanche-Neige ou totalement autre chose ?" plaisanta-t-il sur une voix purement taquine.