Une mission d’infiltration. Une tâche de la plus haute importance. Elle se devait de prendre soin de cette affaire. Ange gardien auto-nommé, elle avait prit soin peaufiner les moindres détails. Le hasard n’offrait aucune garantie. La maîtrise demeurait donc le maître mot de sa vie, de ses méthodes et de sa façon d’agir.

Aussi, la brunette aurait voulu être blonde avec d’immenses yeux bleus pour avoir l’air d’un parfait petit chérubin qui avait grandi trop vite. Au lieu de cela, sa tignasse brune retenait captif le peigne qu’une main malhabile se désespérait de le voir lâcher prise. Pourquoi  est-ce qu’on lui avait offert une crinière de loin en cadeau de naissance ? Finalement coiffé et les cheveux lissés s’accordaient avec une tenue classique. Un jean, un haut uni et une paire de basket. C’est ainsi qu’elle se présenta à la porte de Noah Clives, son écrivain préféré. Elle avait dévoré ses livres à une vitesse folle. Une ou deux heures en réalité. Qu’importe. Autre chose était sûre, elle devait faire bonne impression.

Quand la porte s’ouvrit, le plus beau sourire de Faith s’offrit à l’écrivain. Une voix délicatement chantante s’éleva alors.

« Bonjour. » Non, que Noah se rassure, Faith ne faisait pas partie d’une secte quelconque à la propagande trop agressive. « Je suis Faith Rosebury, enchantée.  Je suis étudiante en chimie à la faculté de Berkeley. Je travaille  au musée d’art moderne en centre ville. J’ai 21 ans et j’ai toutes mes dents.  J’ai passé ma visite médicale, tout va bien.  Techniquement, je suis parfaite. » Ah, la modestie, je vous jure.  Et voilà qu’elle plaçait son carnet médical entre les mains de Noah. Tout était parfait. Faith Rosebury, née à Salem. Santé normale, maladies infantiles toutes eut et pas la moindre trace de traitement ou de signe de maladie psychiatrique. Quoi la suite laissait un doute sur le sujet. « Je suis votre ange gardien. » Encore mieux !

Et avec tout ça, il devait se rassurer ? Le mot était trop vite dit. Le propos de la jeune russe sonnait dans un anglais parfait et pourtant. Si la langue pouvait avoir l’air familier et rapidement assimilé, l’idée et le sens qu’ils comportaient prêtaient à la panique. Une folle ! Et puisque la brune remarquait un petit trou entre la porte et Noah, la tête se glissa aussi entre et une brune totalement inconnue finissait dans l’entrée. Heureusement qu’il avait les mains prises par le carnet qu’elle lui avait tendu.

« Ouah ! Elle est belle votre maison. »

Un calepin sorti de nulle part accompagné de son fidèle stylo. Si l’apparence supposait une forme de tranquillité, de sureté et de confiance en soi, l’intérieur demeurait tout autre. Un petit être, dans un coin de sa tête, dansait la bamboula, danse de la joie attitrée. Elle avait parlé à Noah !! NOAH ! Son écrivain préféré et maintenant, elle était chez lui. Un autre bonhomme se rongeait les ongles en se demandant à quel moment Noah allait appeler les flics.

« Vous en faite pas, je suis meilleure que Joséphine ! » Mais puisque Noah semblait plus sur le point de la mettre dehors que de rire de sa blague, la jeune étudiante jugea opportun de lui expliquer qui était Joséphine. « Joséphine… c’est un film en France. Vous avez bien vécu en France, non ?... C’est de l’humour. »

Finalement, le pouce appuya sur le sommet du stylo alors qu’elle prenait note.

« Revoir le sens de l’humour de Noah. » Marmonna-t-elle dans sa barbe.

A croire qu’elle était en visite officielle, prête à revoir tout  dans son ensemble. Le regard couru sur Noah, comme pour analyser le moindre détail qui prouverait une défaillance chez le propriétaire des lieux. Les cernes sous ses yeux….

« Vous avez une petite mine. » Affirma-t-elle d’un air soucieux. « Comme si vous alliez pondre un œuf… un très gros. Même si je suppose que théoriquement c’est impossible. Vous êtes constipé ? »

Oui, oui, elle allait prendre des notes pour ça aussi. Ah moins qu’elle ne teste encore son humour. En réalité, d’autres questions la perturbaient. Pourquoi ne dormait-il pas ? Les enfants ? Le travail ? Ou était sa copine ? Bien, maintenant qu’elle lui avait coupé la parole, qu’elle s’était incrustée chez lui et qu’il semblait sur le point de pondre un œuf, un petit blanc lui signalait qu’elle était prête à l’écouter.