To believe I walk alone is a lie that I've been told.

weyna & adam

Adam jeta son sac sur son épaule, avant de foudroyer d'un regard noir quiconque aurait l'audace de laisser un sourire amusé se dessiner sur son visage. Encore un peu, et il allait mordre. Il allait finir par garder des rides d'expression tracées sur le front avant l'âge, à force de froncer les sourcils la moitié du temps. Se dirigeant vers la sortie de la salle alors que le cours de dessin venait de prendre fin, il ne prit tout d'abord pas la peine d'attendre son binôme. Il fallait dire qu'il s'attendait à ce qu'elle se lâche suite à ce qui venait de se produire, quitte à en rajouter une couche. Peut être aurait-il fait la même chose si la situation avait été inversée. Seulement voilà, il n'avait pas envie d'être la cible de ses piques, pas aujourd'hui. Parce qu'il n'avait pas envie de s'expliquer, d'ailleurs, ça ne regardait personne mis à part lui même. Ses grandes enjambées commencèrent à ralentir, à mesure que son calme lui revenait. Le sigma jeta un bref regard en biais sur sa droite, histoire de vérifier qu'elle l'avait bien suivi. Cela faisait déjà six mois, et pourtant leur premier travail ensemble lui semblait remonter à la veille, tant tout était encore frais dans sa mémoire. Il se revoyait encore arriver dans la salle d'art plastique derrière Weyna, tous deux tendus comme des strings. Aujourd'hui leur devoir était bien différent de leurs portraits. La consigne que le professeur leur avait donné était claire, réaliser une représentation décalée, et visiblement il savait bien de quoi il parlait ! Il s'agissait de réaliser une grande toile avec pour figure principale : son binôme. Évidemment, Adam se retrouvait pour la troisième fois affilié à Weyna, ce qui au fond n'était pas pour lui déplaire. Il avait eu quelques autres partenaires, mais c'était véritablement avec elle qu'il travaillait le mieux. Tous deux avaient plus ou moins la même perception de l'art, ce qui rendait intéressant leur collaboration. L'épisode des portraits leur avait apporté à tous deux d'excellentes appréciations et de bonnes notes dans leur dossier, étant les seuls étudiants à avoir su capter l'essence même de l'autre, rendant leurs tableaux plus vivants.

Mais la consigne du jour ne s'arrêtait pas à une simple représentation l'un de l'autre, puisqu'il fallait que la scène prenne place dans un lieu en décalage complet avec le personnage qu'ils incarneraient. De manière un peu simpliste, il aurait pu s'agir par exemple d'une fille accoutrée de manière indécente dans une église - exemple qui d'ailleurs, aurait pu parfaitement convenir à certaines greluches de leur promotion, sans qu'elles n'aient à faire beaucoup d'effort au niveau du déguisement. Après leur avoir projeté quelques tableaux à l'image de l'exercice qu'il leur demandait d'effectuer, leur professeur avait conclu par un "Surprenez moi !", qui faisait bien monter la pression chez chacun des étudiants. En effet, après un semestre passé avec ce professeur, chacun avait bien compris qu'il était très exigeant envers ses élèves, et qu'il faudrait non seulement être très bon, mais également original pour se démarquer à ses yeux. C'était un homme ayant passé la cinquantaine, doté d'un certain charisme, et auquel la moustache grisonnante qui tortillait sur ses joues creuses ajoutait une bonne dizaine d'années. Sa prestance n'était plus à démontrer, et sa maîtrise artistique imposait le respect. C'était quelqu'un qu'Adam avait appris à apprécier. Jusqu'à ce jour. Cela faisait quoi, deux semaines, peut être bien trois ? Adam perdait la notion du temps. Mais passons, ce n'était qu'un détail. Il y avait quelques temps donc que le jeune homme avait commencé à attirer les regards lorsqu'il se présentait en cours. Au départ, ce n'était qu'un oeil au beurre noir, puis quelques jours plus tard, la lèvre fendue. Un bleu sous la mâchoire, et la semaine suivante, un oeil oedématié. Autant Adam se contrefoutait bien qu'on se pose des questions sur ce qu'on lui arrivait, autant voir quelqu'un en formuler une à voix haute le mettait hors de lui. Lui qui avait porté son masque de monsieur parfait des années durant, voilà que s'afficher le visage ravagé par les coups ne lui importait que peu. Bien des choses avaient changé depuis ces derniers mois, à commencer par son licenciement de l'Absinthe Bar. Ses absences à répétition qui avaient suivi la mort de Laurynn justifiaient assez bien la décision du patron. Et lorsque ce dernier avait finalement accepté de lui laisser une dernière chance en assurant le service ce soir là, Adam avait quitté son poste au bout d'à peine une minute. Et pour cause, sa soeur était installée derrière le bar lorsqu'il avait regagné la salle. Soeur qu'il n'avait plus revue depuis presque trois ans, ce pourquoi ils étaient rapidement sortis du bar, la porte se refermant derrière lui une dernière fois.

Depuis, tout s'était enchaîné très rapidement dans sa vie. Les bleus, les plaies, les côtes fêlées, tout cela était devenu son pain quotidien, les conditions à accepter sans broncher lorsque l'on gagnait sa vie à la manière du jeune homme. M. Astriel, si vous pouviez éviter de vous prendre une porte en pleine figure à chaque coin de couloir, ça pourrait vous éviter bien des ennuis. Le ton avait été sévère, cassant. En deux minutes le plaisir qu'avait Adam à suivre le cours s'était retrouvé brisé, avec autant de facilité que le prof aurait craqué une brindille entre ses doigts. Son regard s'était assombri lorsque les rires s'étaient élevés, trouvant visiblement très drôle l'image du garçon se bouffant une porte en pleine gueule. Mlle Edwards, je vous l'assigne en binôme, tout un travail dans les nuances de violet s'offre à vous ! Instinctivement, Adam porta une main à sa tempe, grimaçant au contact de ses doigts sur l'hématome. Sa mâchoire se serra sans même qu'il n'ose regarder la jeune femme, qui aurait certainement des choses à redire sur lui d'ici quelques minutes. C'est ainsi qu'il avait rapidement filé à la fin du cours, et qu'il se dirigeait désormais vers le domaine des Sigmas. Il avait dans l'idée de commencer de suite, comme les fois précédentes, et quel meilleur endroit que le pavillon des artistes pour dénicher des costumes. Des idées de mise en scène parcouraient son esprit, mais jamais assez originales à son goût. Quand enfin il accepta de tenir compte de la présence de Weyna, ce fut sans lui faire face, et en marmonnant à moitié.


« J'espère que tu t'es bien marrée. » A vrai dire, il ne savait même pas si elle avait pris part à l'épisode de moquerie de tout à l'heure, et il s'agissait pour le moment de tâter le terrain. Ils arrivaient dans la réserve du théâtre, où une multitude de portants soutenait tant des costumes modernes que des lourdes robes anciennes. Ils auraient de quoi faire, et trouveraient forcément leur bonheur dans le joyeux bordel qui envahissait la pièce. En s'approchant d'un portant recouvert de robes hideuses faisant gouvernantes coincées du cul, Adam se tourna face à la reine renfrognée, un sourire narquois étirant ses lèvres alors qu'il reprenait la parole. « Tu ne m'avais pas dit que tu gardais ton dressing ici ! »

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Une nouvelle réplique acérée se formait dans sa bouche alors que ses yeux tombaient sur une perruque à la Marie Antoinette, prêt à la chambrer une fois de plus, quand il sentit l'étau de ses mains se refermer sur son avant bras. Ses efforts pour le faire bouger le faisaient toujours autant sourire intérieurement, et il se tournait volontairement vers elle, allant la féliciter pour la force de ses biceps... quand elle le devança, prenant la parole dans une phrase qu'il n'aurait jamais pensé la voir prononcer. La surprise se lut clairement sur le visage d'Adam. Déjà, il était surpris qu'elle s'interroge à son sujet, bien que si la situation avait été inversée, il aurait certainement agit de la même manière. Ensuite, sa manière de le toiser montrait bien qu'elle était sérieuse, et qu'elle attendait une réponse. Réponse qu'il n'était pas enclin à lui donner. Si elle réagissait déjà de la sorte face à quelques blessures, il n'imaginait même pas ce qui allait se passer si elle connaissait le fin mot de l'histoire. C'était un secret qu'Adam avait gardé pour lui, mis à part Jax qui était plus ou moins au courant, bien qu'il n'en soit pas persuadé. Tout avait commencé il y avait quelques semaines. Adam reprenait tout juste des nouvelles des personnes qui avaient tenté de le joindre pendant sa phase d'hibernation post-Laurynn. A commencer par Astor, puis par son meilleur ami.

Ce dernier n'avait pas été ravi d'avoir été évincé par le sigma, et ce soir là, lors de leurs retrouvailles, le ton était rapidement monté. Tous deux avaient toujours eu des caractères très forts, et même s'ils s'entendaient à merveille, parfois cela faisait des étincelles. Au fond, chacun savait parfaitement qu'ils s'étaient manqués, mais leur fierté respective n'entendait pas les laisser se retrouver sans que leurs esprits ne s'échauffent un peu. Mais ils avaient bien rapidement dû laisser leur animosité de côté, puisqu'un groupe de types louches transpirant la testostérone avait commencé à venir les chercher. En temps normal, Adam aurait certainement adressé un sourire moqueur à Jax en les désignant, sachant qu'ils venaient se frotter aux mauvaises personnes. Mais ce soir là, ils étaient à cinq contre eux. Les coups s'étaient abattus pendant une dizaine de minutes. Certes, les deux amis avaient compris qu'ils allaient se prendre une raclée, mais ne comptaient pas leur faciliter la tâche. Encore sonné et gonflé à bloc d'adrénaline, Adam avait cru rêver lorsqu'un des colosses les avait félicité une fois la rixe terminée. Rapidement, ils avaient compris que tout cela n'était pas qu'un jeu pour eux, mais bel et bien un test. Un entretien d'embauche même. Un des types avait remis un papier à Adam, et celui ci avait réalisé qu'il s'agissait d'une véritable carte de visite. Mais qu'est ce que c'était que ces tarés ? Il l'avait fourrée au fond de sa poche, alors que le groupe s'en allait comme il était venu. Jax et lui n'avaient plus reparlé de cet incident. En rentrant chez lui, Adam avait ressorti la carte de sa poche, et s'était un peu plus attardé dessus. Un numéro de téléphone, et l'adresse d'un entrepôt, désaffecté dans sa mémoire. Tout cela sentait mauvais. Pourtant, le lendemain soir, Adam s'était rendu dans le dit entrepôt.

Non, décidément, il ne pouvait vraiment pas lui raconter tout ça. Et il n'en voyait pas l'intérêt. Ce n'était pas comme s'il avait besoin d'aide, pour lui, il maîtrisait la situation. Bref. Weyna semblait se raviser, même s'il sentait l'amertume dans son ton. Ce n'était pourtant pas une manière pour lui de la rejeter, c'était simplement sa manière d'être. Et pourtant, il ne voulait pas qu'elle ait cette impression. Elle avait fait un pas vers lui, et il ne pouvait pas dire que ça ne lui faisait pas plaisir. Et même si elle semblait regretter d'avoir exprimé de l'intérêt à son égard, il savait qu'au fond ça devait la faire chier de voir la manière dont la situation tournait. Seulement, entendre murmurer dans son dos pour ensuite les voir presque frôler les murs pour l'éviter le faisait doucement rire. Il suffisait d'un regard assassin de sa part pour que les langues de pute se pissent dessus. Weyna lui fourra soudain un costume dans les bras, et il baissa les yeux pour analyser ce qu'elle avait choisi. Boarf, ç'aurait pu être pire. Le sigma l'observa aller s'asseoir plus loin, tout en le fixant. Ok, si elle comptait le regarder se changer, elle allait avoir de nouvelles surprises. Le jeune homme soupira, tout en lui tournant le dos pour ôter son T shirt, qu'il posa dans un coin. Ses omoplates étaient striées d'hématome de toutes les couleurs, et il préférait ne pas affronter son regard tout de suite. C'était étrange, mais tout cela le mettait mal à l'aise. Comme s'il avait des comptes à lui rendre. Il n'avait pas l'habitude que l'on s'inquiète pour lui, tout cela était nouveau. Il ne savait pas s'il devait la rassurer bêtement. Retirant son jean pour enfiler le costume le plus rapidement possible, ce dernier commença à coincer au niveau des jambes. Il ne semblait pas conçu pour être aussi près du corps, et Adam commença à grogner en se contorsionnant pour que le tissu s'étire un maximum.

« Putain, c'est du taille douze ans ou quoi ! T'as rien de plus grand ? » Il finit par se tourner vers elle, faisant en même temps face à un miroir, et ouvrant d'énormes yeux. « C'est quoi cette merde... » L'espèce de combinaison était impossible à fermer, et il ne pouvait bouger d'un poil sous peine de la craquer. Le bas du pantalon lui arrivait à mi-mollets, et en baissant les yeux il plaqua instinctivement ses deux mains devant ses parties intimes, inévitablement moulées par le tissu synthétique. « Ok, on dirait un patineur artistique dans un film porno. » Adam grognait de plus belle, n'osant même pas la regarder car la situation s'avérait comique une fois de plus à ses dépens. Comme si le destin prenait un malin plaisir à forger des souvenirs insolites du jeune homme dans la tête de Weyna. La natation synchronisée et la danse du pingouin ne suffisaient pas, visiblement. Le jeune homme balaya la pièce du regard, en attendant que la jeune femme lui file un autre costume plus adapté à sa morphologie. Il cherchait quelque chose qui imposerait le contraste avec le lieu qu'il avait en tête. En trouvant son bonheur, il empoigna une longue robe vermillon à paillettes, ainsi qu'un long manteau de fourrure, qu'il jeta en direction de la jeune femme, un sourire aux lèvres. Voilà qui ferait l'affaire. « Tu devrais te sentir à l'aise là dedans, reine renfrognée ! » En farfouillant bien, toujours dans son costume prêt à se déchirer en deux et qui lui rentrait dans l'arrière train, il fallait le dire, Adam dénicha un long porte cigarette qu'il alla mettre dans son sac. Il se tourna ensuite face à elle, tout en tentant tant bien que mal de retirer son costume qui lui collait à la peau.

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Les rires de Weyna emplissaient la pièce, venant faire ricochet contre les murs entre deux phrases marmonées par Adam. Le flash de son portable était juste la cerise sur le gâteau, le détail qui lui rappellerait à chaque pique qu’il lui lancerait qu’elle avait sur elle de quoi signer son arrêt de mort, si l’envie lui prenait de la poster sur internet. Il faudrait à l’occasion qu’il se constitue un stock de dossiers la concernant, de manière à assurer ses arrières si la guerre venait à se déclarer. Sautillant à cloche pied sur sa cheville valide, tandis qu’il tirait désespérément entre ses mains le bas de la combinaison pour en extirper son autre pied, Adam était en train de dégommer ce qui se trouvait à proximité, tanguant de gauche à droite en rentrant dans les portants, les cintres s’entrechoquant dans un cliquetis agaçant. Lorsqu’il lâcha finalement l’affaire, préférant attendre que son acolyte daigne enfin venir l’aider, il se rendit compte qu’elle était désormais en sous vêtement, s’affairant à enfiler la longue robe qu’il lui avait remise un instant auparavant. Elle lui tournait alors le dos, et il préféra détourner vivement le regard, non pas que ce qu’il voyait lui déplaisait au point de lui cramer la rétine, loin de là… simplement parce qu’il n’avait pas envie de la gêner, ni de se prendre une demi-douzaine de remarques comme quoi il n’était qu’un pervers. En effet, Adam avait rapidement cerné l’animosité que Weyna entretenait à l’égard de la plupart des hommes, et il ne l’avait pas laissée le placer dans la même catégorie pour le moment. L’Astriel préféra donc se remettre au travail, et par là s’entendait bien évidemment essayer de quitter sa prison synthétique, qui commençait d’ailleurs à lui donner la sensation de porter des bas de contention de grand-mère.

Un juron retentit soudain, et il eut à peine le temps de relever les yeux que déjà la reine renfrognée s’envolait dans sa direction. S’il avait pu, c’était à ce moment précis qu’il aurait aimé enclencher un ralenti de cinéma avec une télécommande imaginaire. Weyna avait littéralement décollé dans les airs, la robe rouge virevoltant dans son dos, tandis que ses yeux se fermaient dans l’appréhension de la chute. Un genre de wonderwoman en tenue de soirée, et il en aurait bien ri s’il n’avait pas été dans la trajectoire direct du missile métisse qui fusait vers lui. Comme prédestiné à lui servir de matelas, c’est presque résigné qu’il resta immobile. L’inévitable se produit alors, et dans la collision tous deux furent projetés au sol, Adam amortissant la chute de la belle tandis que l’impact du parquet venait réveiller son dos endolori. Une grimace tordit sa bouche, qu’il effaça bien rapidement. Par chance, Weyna semblait tellement surprise et embarrassée par leur position qu’elle n’y prêterait certainement aucune attention. Il fallait dire que lui-même était assez perturbé, et la trouver ainsi positionnée sur lui vint rappeler à sa mémoire le souvenir d’une scène similaire quelques mois plus tôt, lors de leur fameuse soirée sur la plage. C’était le genre d’image qui lui était sortie de la tête en même temps que son corps terminait de métaboliser l’alcool, l’image de Weyna se jetant sur lui et atterrissant à peu de choses près dans cette même position, avant de s’endormir net. « Si tu prends l’habitude de te jeter sur moi comme ça, j’vais finir par porter plainte pour harcèlement tu sais. »

Adam se releva à sa suite, en rejetant ses cheveux bruns en arrière à la l’oréal, en mode j’me la pète, en mode t’es roméo où tu l’es pas… avant de dégainer son habituel sourire narquois à l’adresse de la jeune femme. En à peine cinq minutes, grâce à son aide, le costume de patineur exhibitionniste quittait enfin son corps, et le jeune homme en profita pour se dégourdir les jambes. Ah, une fermeture éclair. Ok, pour le coup il allait fermer sa gueule. De nouveau exaspérée, Weyna finit par lui tourner le dos en lui aboyant de fermer sa robe. Le sigma jeta discrètement le costume derrière lui en espérant qu’elle allait finir par l’oublier, avant de s’approcher d’elle. Baissant les yeux vers la fermeture, il commença à la remonter dans son dos, la robe suivant parfaitement la courbure de son échine. Jusqu’à ce qu’elle se bloque. Bien évidemment. Se mordant la lèvre inférieure en se penchant pour analyser le problème, Adam commença à la secouer dans tous les sens pour la décoincer, oubliant presque que le robe n’était pas sur un vulgaire portant mais bel et bien sur une personne en chair et en os. « Hop là, désolé Weyna, » finit-il par lâcher en remarquant enfin qu’il secouait la jeune femme comme un prunier, et il se mit à rire en essayant d’être discret. « Laisse tomber la neige, c’est coincé. » Et voilà qu’il riait de plus belle, fier de sa connerie, en profitant pour lui glisser une expression tout droit issue du vocabulaire weynaiesque, dont il s’était souvent moqué au cours de l’année.

Pourtant, il ne semblait pas prêt à lâcher l’affaire, comme si le fait qu’une fermeture éclair lui résiste était intolérable. Il tenait donc fermement la sigma par la taille pour l’empêcher de bouger, tout en essayant toujours de réparer sa connerie, comme si sa vie en dépendait. C’est ce moment que choisirent deux autres sigmas pour faire irruption dans la pièce, se figeant sur le seuil en tombant face à eux. La scène était plus que curieuse, il fallait l’avouer. Entre Weyna debout dans sa robe, et Adam en simple boxer plié en deux, le visage à dix centimètres de la fermeture éclair, avec un air de psychopathe sur le visage, les deux étudiants semblèrent prendre peur, et rebroussèrent immédiatement chemin. « Génial, ‘manquait plus que ça putain. » Après une bonne dizaine de minutes, il parvint enfin à remettre la tirette dans les rails, fermant enfin le dos de la robe, encore un peu et il en aurait fait une danse de la victoire. Il préféra s’écarter rapidement de la jeune femme, se doutant que sa réaction n’allait pas être des plus sympathiques. Docilement, comme un animal que l’on viendrait de gronder, Adam retourna se saisir de son affreux costume et l’enfila sans demander son reste. . « Voilà, maintenant que j’suis ridicule, on va se détendre. » Ouais, il faisait dans le préventif à cette heure-ci. Le jeune homme s’empara de ses quelques affaires, attendant que sa partenaire soit prête, pour qu'ils puissent ensuite partir dessiner. Il ne savait pas si la séquence costumes était le seul élément insolite de la journée, ou si ce ne serait que le premier d'une longue lignée...

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Patch. Voilà comment perdre toute crédibilité. Adam avait levé les yeux aux ciels, geste récurrent lorsque les deux sigmas se retrouvaient à moins de dix mètres l'un de l'autre. « Jt'ai déjà dit de pas m'appeler comme ça. Surtout que si tu veux mon avis, t'es mal placée pour parler, Cruella. » Il était vrai qu'entre sa robe de soirée, son porte cigarette et son manteau de fourrure, il ne lui manquait plus qu'un coup de spray blanc dans les cheveux pour que le surnom lui aille comme un gant. Très bien, on restait dans la lignée des renfrognées, avec ce nom qu'il se plairait à lui attribuer à l'avenir. Une fois le costume enfilé, il sursauta en entendant un bruit qui s'approchait plus du barrissement de l'éléphant plutôt que du mignon éternuement de fille, selon lui. Oui, Adam avait la rancune facile, et ne comptait pas se radoucir immédiatement. « Bon Dumbo t'accouche, on n'a pas toute la journée. » Aucune pitié, il l'observerait se noyer dans sa morve sans bouger le petit doigt. Et non, il n'éprouvait aucun remord à ces pensées, et encore moins lorsqu'elle déterra un bandeau du fond du coffre, comme si le costume en lui même ne suffisait pas. Le visage d'Adam se décomposa, mais après tout c'était son tableau, et il se plierait à ses exigences. Tout à coup, il regrettait de ne pas l'avoir accoutrée différemment. Obéissant aux ordres du Lieutenant Dumbo à mesure qu'elle le sommait 1) d'approcher, 2) d'arrêter de gigoter, 3) de se baisser, un sourire se mit à poindre malgré sa mauvaise humeur en voyant Weyna une fois de plus contrainte de faire des pieds et des mains pour atteindre sa hauteur. Il s’exécuta, n'ayant même pas le temps de la chambrer puisqu'elle anticipa. Il fallait dire qu'elle commençait à connaître l’énergumène qui se tenait devant elle, presque accroupi pour arriver à sa hauteur (sans exagérer, bien entendu !). En la regardant, Adam se disait que quelque chose manquait dans le personnage qu'il voulait lui faire incarner. Tandis qu'elle retournait une fois de plus le couteau dans la plaie en lui annonçant qu'il commencerait l'exercice, il l'observa partir vers la porte avant de tilter.

« Hep, minute papillon. » Le sigma jeta un regard à gauche, puis à droite, avant de tomber sur une longue boite noire à demi ouverte, laissant entrevoir tout un attirail de maquillage. Il n'avait jamais compris comment les filles s'y retrouvaient avec tous ces produits. Adam lui fit signe d'approcher, tout en se dirigeant vers la boîte, en dégainant au hasard une palette de maquillage et un espèce de tube noir qui ressemblait à une mini brosse à chiotte selon lui. « Encore un petit détail à régler. » Sa manière de contempler les objets qu'il tenait dans ses mains laissa l'espace d'un instant clairement présager qu'il ne savait absolument pas ce qu'il était en train de faire. Mais il se ressaisit, afin de ne pas l'effrayer davantage. Après tout, c'était à son tour de se plier à ses exigences. Il sortit quelques produits avant de se tourner vers elle. « J'ai juste deux trois détails à ajouter, t'inquiète. » Il s'empara d'un gros pinceau, et d'une palette de fard à paupière. La confiance revenait. Après tout, ça ne devait pas être bien différent que de réaliser une peinture. Il n'y avait pas de problèmes, il était en terrain conquis. Ainsi, pendant les cinq minutes suivantes, Adam eut le temps de comprendre son erreur puisque la poudre n'était vraiment pas malléable. Il se servit du vert et du violet pour les paupières, du fard à paupière rose en guise de fard à joue, plutôt très satisfait du résultat. Il tenta ensuite de tracer un trait noir au ras de ses cils, se mordant la lèvre inférieure dans un état de concentration ultime. Enfin, il manqua de l'éborgner lorsqu'il voulut appliquer du mascara, et lui colla du rouge à lèvre vermeil sur les dents. A la fin, le jeune homme qui était resté muet tout le long du maquillage finit par reculer de quelques pas pour admirer son oeuvre. Superbe. Voilà pourquoi il aurait fallu une loi interdisant l'accès aux produits de beauté aux mecs. « On peut y aller !! » Adam la chopa par le creux du coude, se doutant qu'elle allait encore râler si elle se regardait dans une glace. Chose qui tombait plutôt bien, aucun miroir n'était présent dans la salle.

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