Une tasse de thé à la menthe entre les mains, Maria appréciait les rayons du soleil ayant fait sa réapparition depuis quelques jours déjà sur la Californie après un hiver relativement frais malgré la région. Appuyée contre le rebord de sa fenêtre de cuisine, elle appréciait du mieux possible cet instant de calme qu’on lui offrait. Les enfants étaient au centre de loisirs pour la journée, et comme nous étions samedi, elle n’avait pas besoin de se rendre à l’université avant lundi matin. Quel bonheur ! Souriant à cette simple mais bienfaisante idée, la brunette prit une profonde inspiration, bien décidée à profiter au mieux de cette journée. Adieu tracas, angoisse et petits soucis de la vie quotidienne. Enfin Maria allait pouvoir penser à autre chose qu’aux étudiants, à la paperasse remplissant son bureau, les enseignants. Plus exactement, un enseignant en particulier. William Clives. Ce nouvel enseignant fraîchement arrivé d’Oxford, où il enseignait l’Histoire.

Le charisme de cet homme l’avait chamboulé. Ni plus ni moins. Il l’avait d’ailleurs totalement retourné lorsqu’elle y réfléchissait bien. Son manque de tact, son autorité à peine dissimulée et son franc parlé avaient eu raison du bon sens de la brunette qui était depuis quelques perturbée par la présence de cet individu dans sa vie. Enfin, dans sa vie professionnelle, entendons-nous bien. Car il était absolument hors de question qu’elle ne l’inclut dans sa sphère privée. Bien qu’en y repensant à deux fois, elle se demandait si le fait de l’avoir invité à boire un verre chez elle n’allait pas à l’encontre de ses intentions de base. Il était entré chez elle, avait vu où elle vivait et même – au vu de cette facilité qu’il avait de lire en chaque personne qu’il croisait – avait-il certainement bien cerné la personne qu’elle pouvait être et ce, en dehors du travail. Quelle erreur n’avait-elle pas commise bon sang…

« Reprends-toi bon dieu ! » Maugréa-t-elle contre elle-même alors qu’une brise légère la fit frissonner.

Posant ensuite sa tasse à présent vide dans l’évier, la brunette allait pour se diriger vers l’escalier qui la mènerait jusqu’à sa chambre à coucher, Maria fut stoppée net dans sa lancée lorsqu’on sonna à la porte. Surprise qu’on puisse lui rendre visite un samedi, elle se rendit cependant jusqu’à l’entrée où elle ouvrit un peu trop brusquement la porte, faisant ainsi sursauter la personne cherchant à la voir. Aengus. Mon dieu, Maria était réellement à l’ouest ces temps-ci. Samedi. Nous étions samedi. Jour où Aengus était censée arrivée pour rester chez elle quelques temps après que la jeune femme ait traversé une période difficile dont elle ne préférait pas parler pour le moment. Ce que Maria pouvait tout à fait comprendre.

« Gus, entre, je t’en prie ! »

Elle déposa une bise sur le front de la jeune femme avant de la laisser entrer pour ensuite refermer la porte derrière elle. Terminée la journée en solitaire.

Devant cette porte, Aengus se recoiffa une dizaine de fois. Malheureusement, Edward ne serait pas là lui avait on assuré. Néanmoins, Maria se chargerait de l’accueillir. Pour Aengus, les noms sonnaient étranges. Si elle tentait de garder secret sa perte de mémoire, les efforts qu’elle fournissait pour ne rien laisser paraitre semblaient parfois trop important pour elle. Néanmoins, elle se refusait à leur avouer sa faiblesse. La panique l’envahissait en s’imaginant leur réaction face à cette nouvelle. Elle préférait le silence.

Finalement, elle prit son courage à deux mains pour frapper à la porte. Lorsque Maria apparu face à elle, Aengus lui sourit. C’était toujours un plaisir de voir un visage connu. Depuis leur dernière rencontre, Aengus avait reprit un peu espoir. Cette femme n’éveillait en elle aucune rancœur, aucune haine contrairement à d’autres personnes qu’elle avait eut l’occasion de croiser. C’était le cas de sa cousine par exemple. La blondinette espérait donc avoir retrouvé une amie, une vraie. Elle ne s’était pas trompée puisque Maria lui avait proposé de venir un temps chez elle. Une offre généreuse qui avait d’abord mit Aengus mal à l’aise mais qui ne pouvait se refuser. Ou aurait elle été ? Une bise sur son front la fit instantanément rougir. Les marques d’affections la dérangeaient. Habituellement, elle raffolait de ces marques de tendresse et elle était la première en donner en retour. Néanmoins, depuis son accident, la demoiselle se sentait si sale qu’elle ne supportait plus le moindre contact. Malgré tout, elle embrassa la joue de Maria pour la saluer à son tour.

« Je ne te réveille pas j’espère ! » Demanda une voix douce dans un léger sourire.

Aengus avait quitté l’hôpital tôt ce matin mais elle avait flâné à droite à gauche en se demandant si elle devait apporter quelque chose à Maria. Malheureusement, elle n’avait rien, pas un centime pour acheter quelque chose. Finalement, lorsque Maria lui laissa le passage libre, l’étudiante passa le pas de la porte. Un effort important fut fourni pour ne pas détailler la maison sous toutes les coutures. Elle était censée y être déjà venue !

« C’est gentil de me recevoir. » Précisa Aengus pour la remercier une fois encore de sa générosité.
Depuis qu’elle avait fini à l’hopital, elle n’avait fait que dépendre de la générosité des autres. Un état qui la laissait mal à l’aise. Elle n’avait pas l’habitude de ne pas être apte à satisfaire ses besoins elle-même. Son tempérament de feu l’avait toujours poussé à revendiquer son indépendance ! Aujourd’hui, elle ne pouvait plus s’offrir ce luxe. Pourtant, plus que jamais son désir d'être utile à quelqu'un se faisait sentir.

« Penses-tu ! Je suis levée depuis longtemps, tu me connais. » Adressant un sourire à la jeune femme alors que cette dernière entrait dans la maison, Maria referma tranquillement la porte d’entrée derrière elle et n’eut aucun mal à apercevoir dans la démarche d’Aengus un pas clairement peu assuré. La journée ne faisait que commencer pour les deux femmes. « C’est gentil de me recevoir. » Maria ne put que sourire en écoutant sa jeune protégée la remercier. « Est-ce que tu veux quelque chose à boire ou à manger ? Je te l’ai dit au téléphone, ici tu es comme chez toi, tu agis comme tel. » Le fait qu’Edward ne soit plus à la maison changeait clairement la donne et Maria ne le savait que trop bien. En vérité, si l’Irlandais avait été là, Aengus se serait peut-être sentie plus à l’aise, Maria n’était pas idiote et le savait pertinemment. Ces deux-là étaient tellement proches que même O’Berkeley passait à côté de bon nombre de leurs ‘délires’ comme disait parfois Aengus. « Je t’ai préparé la chambre d’ami hier après-midi. Je ne te montre pas le chemin, tu connais suffisamment la maison. » Sûre d’elle, la brunette quitta la jeune femme un instant, pensant qu’elle allait sans hésiter se diriger vers la chambre à coucher pour les visiteurs. Pendant ce temps, Maria se rendit à la cuisine où elle pensa faire du café pour elle et sa nouvelle ‘colocataire’.

Mais ce fut sans compter sur sa curiosité que la brunette s’arrêta à l’entrée de la cuisine et se retourna pour apercevoir rapidement Aengus qui n’avait pas bougé d’un millimètre dans l’entrée de la maison. Fronçant les sourcils, Maria se demanda ce à quoi la jeune femme pouvait bien penser présentement. L’accident dont elle avait été victime mais dont O’Berkeley ne savait strictement rien avait sérieusement dû remuer Aengus. C’était certain. La question maintenant était de savoir si elle serait d’accord pour se confier ne serait-ce qu’un peu à Maria. Ainsi, la jeune femme pourrait vider son sac, doucement mais sûrement.

Aengus avait espéré avec bêtise probablement qu’en posant un pied dans cette maison, elle se rappellerait des moindres détails des moments passés ici. La magie n’opéra absolument pas, laissant la blonde pantelante et désorientée. Aussi, elle inspira à pleins poumons comme pour capter au mieux les effluves des souvenirs emprisonnés en ces murs.

« Je veux bien un thé oui, s’il te plait. »

Annonça Aengus dans l’espoir de le boire avec Maria. Pourquoi avait elle choisi le thé ? Elle avait
A l’invitation de Maria, Aengus lui adressa un sourire timide. D’une main sur le mur, elle appuya le bout de son pied contre son talon pour retirer l’une de ses chaussures. Depuis l’opération et son accident, Aengus avait quelques difficultés. En public, elle tentait d’agir continuellement comme si rien n’avait changé mais ici, elle ne tenait pas à tenter le diable. Maria et elle seraient amenées à passer du temps ensemble et le soir ou le matin, l’état d’Aengus laissait à désirer. Impossible pour elle d’utiliser correctement les muscles abdominaux ou même de marcher trop rapidement. Quand la deuxième chaussure fut retirée, elle pivota vers la cuisine d’où elle pouvait entrevoir Maria.

Les dents entamèrent la lèvre inférieure pour ensuite s’avancer lentement en direction d’une pièce au hasard. Avec un peu de chance, elle ouvrirait la bonne porte. Echec, elle venait de tomber sur la salle de bain. Pour se couvrir le pas la porta vers le miroir ou elle replaça quelques mèches de cheveux délavées. Au bout de deux pièces, elle ouvrit ce qui lui sembla être la bonne. Le lit semblait impeccable, tout neuf et la pièce trop rangé pour être la chambre des enfants. Son sac trouva un support quelconque avant qu’elle ne se décide à rejoindre Maria comme si tout était normal. Fouiner un peu ne faisait de mal à personne non ? Elle avait ainsi eu le temps de faire l’état des lieux et de repérer certains points stratégiques !

Avançant dans la cuisine, elle redressa le nez sur Maria pour lui offrir un sourire. Avec plaisir et soulagement, son postérieur trouva un siège. Se fatiguer aussi vite lui semblait lamentable mais que pouvait-elle y faire à présent ? Elle devait s’adapter.

« Tu as prévu des trucs pour ce week end ? Si tu veux je peux garder les enfants le temps que tu sortes un peu ? Ca peut te faire du bien ! Tu dois avoir un planning chargé! Le boulot, la famille... Ou alors journée cocooning ?? »

Autant que Maria profite un peu elle aussi non ?