Le bar était bondé et malgré moi, je fus pris dans l’ambiance. Il ne m’en fallait pas beaucoup pour me fondre dans la masse et apprécier ce brouhaha qui composait l’environnement ambiant de ce bar. Entre les conversations des clients qui devaient toujours plus la voix pour se faire entendre, les cris excités des supporters ou ceux dépités des adversaires, je tentais de me frayer un chemin. En tous les cas, cette occupation sonore me plaisait et me réconforter. Il faut dire que j’étais quelqu’un de plutôt sociable et j’avais besoin de contact humain pour survivre mais malheureusement pour moi, les vacances approchant, peu à peu mes camarades retournaient dans leurs familles respectives. Moi-même, je devrais bientôt plier bagages mais je n’étais pas pressé pour un sou. Des fois, je pensais qu’il me tardait de réellement prendre mon envol pour ne plus avoir à subir les remarques blessantes ou autres insinuations. Je crois même que mon père me pense homosexuel rien qu’au souvenir de ses dernières paroles aux vacances précédentes. Il faut dire que contrairement à mon frère, je n’ai jamais ramené de copines à la maison. Merci bien mais je n’avais vraiment pas envie de me choper la honte ! Oui, ma famille me faisait honte du moins les hommes de ma famille. Certes, j’avais la chance de les avoir contrairement à d’autres personnes mais je m’en passerai bien. Je secouais la tête pour m’ôter ses pensées de mon esprit mais rien n’y faisait. C’était toujours le même cirque à l’approche des retrouvailles. Je ne pouvais pas m’empêcher de redouter celles-ci tout en ayant ce goût amer dans la bouche d’être le vilain petit canard. C’était quand même fort de penser que j’étais mis au rebus de la famille simplement parce que j’avais l’ambition de faire des études et de ne pas finir dans le garage de mon père à réparer des voitures. J’aimais bien la mécanique étant fan de motos et autres bolides seulement, j’aspirais à autre chose pour mon futur. Quel mal pouvait-il y avoir à cela ? Alors présenter une petite-amie qui poursuivrait un autre but que de devenir femme au foyer au service de son époux mécano serait de la pure folie.

Heureusement que ma mère était là pour moi sinon j’aurais coupé les ponts depuis bien des années. Je ne comprenais pas pourquoi elle restait avec mon père. Elle était intelligente, talentueuse dans son domaine alors pourquoi ne pas se libérer de ses chaines ?! Elle me répondait à chaque fois qu’elle l’aimait malgré ses défauts. Pouvait-on vraiment aimer une personne à ce point pour être aveugle vis-à-vis de nos propres souffrances ?! Non, je ne désirais décidément pas les mêmes choses que les membres de ma propre famille. Allez, une bonne bière pour me changer les idées, un match de football américain et ma soirée ne serait peut-être pas totalement fichue. J’en étais donc là dans mes réflexions quand une femme prit place à mes côtés. Par politesse, je la saluai puis retourna à mon match jusqu’à ce qu’elle m’interpelle. Apparemment, elle m’avait reconnu mais j’avais beau fouiller dans ma mémoire, rien ne me venait. « Tu es sûre que tu me confonds pas avec quelqu’un d’autre ? » lui demandais-je un peu incrédule. Pourtant alors même que je lui posais cette question, son visage me disait quelque chose comme un souvenir lointain. Je fronçais un peu les sourcils sous la concentration avant de me détendre en entendant sa dernière réflexion. « J’avoue qu’en temps normal, j’ai une très bonne mémoire des visages » commençais-je avant de me demander si elle n’était pas une des rares femmes avec qui j’avais couché sous l’emprise de l’alcool. Je n’en étais pas fier mais cela arrivait de temps en temps puis mon regard fut attiré par son sourire. Je ne sais pas pourquoi mais je me sentis presque obligé de remporter ce défi comme si cette femme éveillait comme jamais mon côté compétiteur. Or, la dernière à avoir réussi ce tour de main était une gamine.. « La fille du guitariste ? » demandais-je alors comme si je n’y croyais pas.