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« La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe

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« La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe Empty
MessageSujet: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 9:34


La Russie. Terre des montagnes enneigées, vallées de l’enfer pour certains, merveilles de la nature pour d’autres. Le pays du froid et des nomades. D’une culture ancestrale qui demeure malgré la pauvreté du peuple. Voilà le pays dans lequel un petit garçon à moitié russe avait grandi. Une terre ravagée par la souffrance des miséreux. Il était né dans ce petit appartement miteux, deux pièces tout au plus. Pas une décoration si ce n’est la moisissure sur les murs, les cafards qui se promenaient comme un rien sur le plancher, les rats qui cherchaient un refuge plus chaud que la neige qui n’en finissait plus de tomber au dehors. Une seule fenêtre, une seule ampoule, dans la cuisine. Là où l’enfant passait la plupart de son temps. L’autre pièce, c’était la chambre. Celle de sa mère, et la sienne. Il n’y avait le droit que pour dormir, très tard dans la nuit ou plutôt, tôt dans la matinée, lorsque l’homme ressortait en remontant sa braguette, un sourire goguenard sur les lèvres d’avoir fait crié plusieurs fois sa maîtresse d’une nuit. Là, il s’arrêtait et observait le petit bonhomme, inconscient de la haine qui l’animait malgré son jeune âge, glissant sa main encore moite dans ses boucles blondes. Lui avait toujours tendance à reculer, ce qui les faisait toujours rire. Et ils s’en allaient comme ils étaient venus. C’est à ce moment-là qu’elle, la mère, ouvrait la porte de la chambre, pour faire entrer le petit, dégoûté à l’idée de dormir dans ses draps fertiles, mais heureux de retrouver les bras de celle qui l’aimait tellement qu’elle en avait fini par dénigrer son corps de femme, pour celui de son enfant. Souvent, il pleurait, en silence, mordant très fort dans son pouce pour éviter de la réveiller. Il aimait la regarder dormir. Elle était si belle quand ses traits n’étaient pas rongés par la faim, l’angoisse, ou la colère. Elle lui avait toujours fait peur quant elle se mettait en colère. Au début en tous cas, parce qu’il avait fini par comprendre la raison de son mal. Au début, il pleurait, chagriné d’être frappé pour ce petit bout de pain qu’il avait volé parce qu’il avait faim. Elle, lui criait qu’il aurait dû lui demander avant de tout engloutir. Lui ne comprenait pas. Et puis, le temps passa. Et sa main, voleuse, avait perdu ses talents d’autrefois. L’enfant culpabilisait toujours de la voir pleurer. Malgré la douleur des coups qu’elle lui portait sur le moment, il l’aimait, sa maman. Il aurait tout fait pour éviter de la décevoir, encore. Voilà pourquoi, lorsqu’il avait trop faim, il allait chercher de quoi manger dans la rue, loin de cet appartement sordide, loin de celle pour qui il aurait donné jusqu’à sa vie. Souvent, il faisait des rencontres. Des individus que le commun des mortels ignorait avec gravité. La misère existe, mais on n’en parle pas. C’est mieux, ça permet de ne pas y penser, de ne pas se sentir coupable. Mais que pouvait-il y faire, lui, l’enfant des rues ? Ces rencontres, c’était elles. Ses « femmes » comme il les appelait à l’époque. Surnom qu’il avait entendu donner par l’un de ces hommes, le même type d’hommes qui prenaient sa mère tous les soirs. Avec le temps, il avait appris à se faire accepter par ses femmes. A devenir le ‘bout de frimousse’, comme elles l’appelaient. Il perdit son innocence avec l’une d’entre elles, un soir de juin. Elle avait 34 ans. Il en avait 13. C’était bon, salé, intense. Depuis ce jour, il les voyait souvent, ses femmes. Mais moins qu’avant. Il avait peur de devenir comme ces monstres qui la culbutaient, elle, celle qui lui avait donné le sein. Plus jamais il ne toucha de prostituées. Mais voilà qu’un jour, maman est partie. Sans un mot, sans dernier baiser. A sa place, dans la cuisine, se trouvait une autre femme. Chaleureuse, imposante, et qui n’était surtout pas rousse. Lui, il aimait les rousses. Qu’importe, au bout de quelques mois, il se retrouva dans cette famille. « SA » famille. La nouvelle. Celle qui l’aimerait comme ‘ta maman’ n’avait pas su le faire. Ne dîtes jamais du mal d’une mère à un fils. Vous le regretterez amèrement. Combien de fois avait-il fugué, combien de fois avait-il pleuré de se découvrir aussi faible à l’idée d’aller encore plus loin, de mourir pour de bon, de la retrouver elle et de ne plus jamais revenir. Mais que pouvait un enfant de 16 ans dans ce pays où la loi du Talion fait bonne mesure ? Nothing. Et c’est alors que tout espoir semblait perdu, qu’il apprit la nouvelle. Un père. Le sien. Celui qui n’avait soit disant, jamais existé aux yeux de sa mère défunte. Est-ce vrai ? Où encore des mensonges ? Il devait en avoir le cœur net. Les Etats-Unis furent sa terre d’accueil pendant presque un an. Un an durant lequel il se découvrit une vraie famille, l’envie de vivre, la liberté. L’un de ces rares bonheurs qu’il eut tôt fait d’oublier en retrouvant sa patrie. C’était il y a deux semaines.

Aux environs d’une heure du matin. Hôpital de Bogotol. Russie.

« Prosit syuda. » traduction : posez-le ici. soupira le médecin. Le quinzième ‘corps’ la journée qu’on lui ramenait de la prison de Bogotol. Il n’y avait plus de place, toutes les chambres, tous les couloirs étaient pleins. On avait même du mal à circuler. Tous, médecins, infirmières, ambulanciers tentaient de soigner les plus urgents, ou les moins touchés. Pour les autres, ils étaient condamnés à une mort plus lente, tout aussi douloureuse que celle qui l’aurait guetté en prison, ou dans la rue. Personne ne venait jamais réclamé les cadavres des pauvres. Personne n’en avait que faire des gens sans le sou. « Smert ? » traduction : Mort ? Non, peu de ces hommes, femmes et enfants était physiquement et cliniquement morts. Certains auraient même pu guérir s’ils avaient reçu les traitements appropriés. Si on les avait soignés à temps. Hélas, la guerre civile faisait rage en Russie. Dans toutes les villes, le peuple criait son mécontentement. Il faisait trop faim, la famine les tuait tous, les uns après les autres, et le gouvernement russe ne bougeait pas le petit doigt, assis au chaud, se remplissant les poches des taxes, insensible aux tourments des ‘petites gens’. Voilà l’enfer dans lequel était retourné vivre un jeune étudiant russe. Benedikt. A peine ses pieds avaient-ils foulé le sol de sa mère patrie, qu’il avait dû se battre pour survivre et sauver sa peau. Dans un monde aussi rude, nul n’est à l’abri. Même les enfants sont meurtris, déchirés entre l’enfance, le temps de l’innocence, et la vieillesse, parce qu’ils avaient grandi trop vite. Parce qu’ils n’avaient pas le choix. Cette réalité, les journalistes en parlaient parfois, mais peu de monde osait hausser le ton face à la superpuissance russe. Alors, chacun devait se débrouiller. Les forts se faisaient une place, les faibles s’écrasaient. Et lui, quelle était sa place parmi ces gens ? « Net. » traduction : non Les gardiens étaient repartis, apparemment déçus. Les lois obligeaient un gardien à conduire un détenu à l’hôpital, lorsqu’il était trop souffrant pour pouvoir se lever et servir de passe-temps souffre douleur. Ce que les lois ignoraient en revanche, c’est que parfois la souffrance se rapprochait davantage de la mort que de la vie.

Allongé sur le matelas immaculé, le jeune russe avait gardé les yeux fermés, attendant que les trois hommes repartent dans l’enfer d’où on l’avait extirpé, pour observer la neige à travers la fenêtre vitrée. Il devait faire froid au dehors. De gros flocons tambourinaient contre les vitres, menaçant à tous instants de s’engouffre dans la chambre mortuaire, pour achever la vie qui le quittait déjà. Il était à bout de souffle. Deux jours auparavant, il se souvenait de cette petite fille qu’il avait arrachée aux mains de ces soldats. De leur colère lorsqu’il s’était déchaîné sur l’un d’eux qui refusait de lâcher prise. Et ensuite, le trou noir. Il avait été emmené de force dans l’une des prisons les plus gardées de Russie. Là-bas, il avait servi de cobaye. Là-bas, il avait affronté la mort. Et aujourd’hui, étendu sous ses draps, son cœur s’éteignait peu à peu. Il avait mal d’avoir fait souffrir les siens. Il aurait aimé leur dire adieu. Tant de mots qu’il n’avait osé prononcés, le souvenir d’un frère et d’un père qui revenait sans cesse le hanter… Lorsqu’on l’avait emmené ici, il était à moitié nu. Le torse déchiqueté par les flagellations, punition courante pour non-respect de l’autorité en Russie. De larges marques faisaient gonfler sa peau, certaines avaient commencé leur lente décomposition. Il avait l’impression de déjà sentir l’odeur du cadavre. L’odeur de la pourriture. Ses jambes n’étaient pas mieux loties. Il ne parvenait même plus à les bouger. Trop lourdes, trop usées.
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« La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe Empty
MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 11:28



Papa, ramènes-moi mon grand frère. Joe, Benedikt m'a sauvé, ramènes-le. Tu es un bon père, il a seulement fait une bêtise, vas le chercher. Voilà ce que j'entendais à longueur de temps. Il s'agissait respectivement de Connor, Noah et Sophie. Voilà maintenant une bonne semaine que l'affaire Taylor était définitivement classée, et pas n'importe comment. Elle s'achève comme elle a commencé : dans la douleur et le sang. Je dormais très mal, ces derniers jours, je ne cessais d'être assailli par ces flashs me montrant Noah dans les pires états qu'on puisse imaginer. Alors, comme d'habitude lorsque les choses allaient mal, je me jetais corps et âme dans le travail, ce qui n'était pas en soi du luxe étant donné la situation catastrophique de la maison d'édition. Je luttais comme un fauve pour conserver ma place parmi les éditeurs les plus reconnus de ce monde, mais à chaque problème réglé, dix autres apparaissaient. Comme une spirale sans fin. Néanmoins, cette fois-ci, même le travail ne m'apportait pas la tranquillité d'esprit temporaire qu'elle me donnait en temps normal. Je n'étais même pas d'une humeur de chien, j'étais juste déconnecté. Gris. Silencieux.
Je mis un moment à m'arracher à la lecture d'un script, alors qu'il devait être une ou deux heures du matin. Ce sont des bruits étouffés et aigus qui me sortirent de mes pensées. Bongo qui devait encore vouloir gratter à la porte pour venir voir Connor, je soupçonnais mon fils de le faire entrer en douce dans sa chambre alors que j'avais formellement interdit la présence d'un animal à l'étage. En fronçant les sourcils, je m'apercevais qu'il ne s'agissait pas des habituels gémissements plaintifs du berger allemand. Je quittais donc ma chambre pour aller devant celle de Connor. Une fois la porte ouverte, je le vis recroquevillé dans son lit, me tournant le dos et pleurant à chaudes larmes. "Eh bien, mon grand, qu'est-ce qui ne va pas ?" Je me montrais étonnamment plus affectueux avec lui ces derniers temps. Pas en public, je gardais tout de même une distance de mise, style Shark oblige. Mais le voir ainsi tourmenté me faisait mal. Je découvrais, depuis le procès, ce qu'être parent signifiait réellement... ce qui, en soi, m'engageait à remettre en question un certain nombre de principes. "J... j-je... j..." bégaya l'enfant en serrant davantage sa couette contre lui. Je m'asseyais au bord du lit pour passer ma main dans ses courts cheveux blonds afin de le rassurer un peu. "Je veux... B... Beni... il me.... m-manque..." Je fronçais un peu les sourcils en chassant ses larmes du revers de ma main. "Tu n'es plus fâché contre lui ?" Connor secoua vigoureusement la tête pour m'indiquer que non. Il me répétait sans arrêt qu'il avait aidé Noah, qu'il lui avait rendu son oncle que de méchantes personnes avaient voulu lui prendre... Et que ça, ça pardonnait tous les écarts possibles. Plus le temps passait et plus je devais reconnaitre que je tombais d'accord avec mon fils cadet. Mes hommes m'avaient également expliqué que s'ils avaient réussi à localiser Noah, c'était majoritairement grâce aux informations transmises par Benedikt qui était remonté jusqu'aux ravisseurs. Troublé, je n'avais rien dit. Mais je n'en étais pas moins songeur. Qu'importe qu'il m'ait mis en prison temporairement. Au fond, c'était peu de choses par rapport à ce qu'il avait fait pour rectifier le tir. Finalement, je prenais Connor sur mes genoux et le regardais avec un léger sourire sur les lèvres. "Tu veux que je te ramène ton frère, alors ? - Oui, ouiiiii, ouiiiii !! - A une condition. Que tu lui fasses un beau cadeau pour son retour. Je le ramène dans deux jours, d'accord ?" Connor me sauta au cou et m'infligea une dizaine de bisous auxquels j'émis un grognement significatif... Les démonstrations d'affection, quelle hérésie pour un Shark.

Le lendemain, je venais prendre quelques affaires dans mon bureau, ma valise était déjà prête. "Joe, tu ne peux pas partir comme ça, pas maintenant, enfin !! - Mon fils est en Russie, je dois aller le ramener ici. - Mais voyons, on va couler si ça continue, on a tous besoin de toi ici si on ne veut pas se faire souffler d'autres contrats ! - Tout ne tourne pas toujours autour du business, Marc." Clac. Un sifflement puis un bruit sec résonnèrent dans mon bureau. Marc venait ni plus ni moins de me gifler, j'en avais la joue encore rouge. Furieux, je le regardais droit dans les yeux tandis qu'il baissait son regard en se demandant s'il pouvait ramper pour se faire pardonner. Un silence d'environ trente secondes pesa dans la pièce, trente secondes pendant lesquelles mon assistant suait par tous les pores. Finalement, je pris la parole sans quitter la sévérité de mon attitude. "Je vais laisser courir cet incident, car nous savons tous les deux que je la méritais." Avec dignité, je mis mes lunettes noires sur le nez. Oui, quand même, Marc avait agi dans mon intérêt : si je venais à proférer de pareilles idioties, c'est que le monde ne tourne plus rond. "Je reviens après-demain. D'ici là, arranges-toi pour que les choses se passent le mieux possible. Tu voulais plus de responsabilités ? Profites-en." Sans me retourner, je quittais le bureau pour ensuite rejoindre l'ascenseur et ma voiture. Direction l'aéroport dans lequel j'avais fait affréter un jet privé à mes frais. De quoi se nourrir, soins médicaux les plus efficaces du pays... Je connaissais la Russie, et pas seulement pour sa capitale, ses grosses fortunes et son climat. Si Benedikt était retourné là-bas, nul doute qu'il ne paradait pas dans les riches rues de Moscou.

Le soir-même, à Bogotol.


Quel froid... Dieu merci, je n'étais pas non plus une petite nature. Il fait moins froid en Angleterre, mais le climat n'est pas reconnu pour sa clémence non plus. Emmitouflé dans un épais manteau surmonté d'une écharpe, je traversais la neige avec une escorte de cinq hommes. Cinq colosses, hommes de main, veillant à ce que nul ne vienne m'importuner durant mes recherches. Je partais seul pour aller chercher Benedikt, mais ces braves gaillards assuraient ma sécurité. Et ils auraient tôt fait d'assurer celle de mon fils lorsque j'aurais mis la main sur lui. Je commençais donc par les lieux habituels. Puis par la prison, dans laquelle on m'annonçait qu'un détenu ressemblant comme deux gouttes d'eau à Benedikt avait été transporté à l'hôpital pour des soins en urgence. Je me rendis donc dans l'établissement à une heure très tardive, l'un des médecins voulut même me retenir. "Mon fils Benedikt se trouve ici, je le ramène avec moi. - Monsieur, il n'est pas en état de... - J'ai une équipe de spécialistes américains avec moi et assez de pouvoir pour briser votre carrière. Ne m'obligez pas à mettre vos patients dans l'embarras car vous aurez eu l'audace de me tenir tête." lançais-je avec une politesse et une froideur incroyables. Le médecin fronça les sourcils, voyant que je n'étais pas un homme à prendre à la légère. Je viens d'un milieu défavorisé, certes, mais j'ai su faire mon chemin jusqu'au sommet... alors ce n'est pas moi qui vais être intimidé si facilement. Le médecin bredouilla le numéro de la pièce où Benedikt se trouvait avant de s'écarter pour me laisser passer avec mon équipe et mes gardes du corps.

Je toquais à la porte pour rentrer, sans même attendre d'autorisation. C'est là que je le vis. Allongé sur ce lit, dans un piteux état qui me serra la gorge comme lorsque j'avais récupéré Noah. "Oh God..." murmurais-je. J'avais haï cet enfant, je l'avais haï pour ce qu'il avait fait. Mais il s'agissait de la chair de ma chair. Je m'apercevais aujourd'hui qu'un regard de sa part me rappelait à une certaine responsabilité à laquelle je ne pouvais plus tourner le dos. Je m'approchais de lui doucement puis le regardais. Sans sourire. Mais pour une fois, mon visage ne trahissait aucune insensibilité. Au contraire. "Occupez-vous de lui." ordonnais-je aux deux médecins qui m'avaient accompagné, les autres étant encore dans le jet. Je m'asseyais sur une chaise près de la tête de Benedikt puis l'observais en laissant les médecins procéder à leur examen sans doute plus poussé que celui des Russes. "Bonsoir, Benedikt. Rassures-toi, je ne suis pas là pour te faire du mal." Cela pouvait paraitre étrange venant d'un père, de dire ça à son fils, mais dans notre situation, il était important de le préciser. "Que t'est-il arrivé ?"
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« La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe Empty
MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 12:28


Serrant les draps contre son torse, Beni tentait de trouver le sommeil depuis bientôt une heure. Mais le froid était tel qu’il ne pouvait fermer les yeux, tout juste se reposer après les blessures qu’on lui avait infligées, sans nul regret. Il avait perdu du poids depuis qu’il était en Russie. Une dizaine de kilos environ. C’est beaucoup en deux semaines. Son visage était fatigué, ses traits tiraillés par l’épuisement, tant physique que psychologique. Ses yeux gardaient les traces de ses nuits blanches, passées à chercher un abri où se terrer. Mais c’était surtout la faim et la déshydratation qui avaient raison de son corps, petit à petit. Depuis quand n’avait-il pas mangé, ni bu ? Trop longtemps pour s’en rappeler. Les paupières closes, un bruit près de la porte le tira aussitôt de sa torpeur. Sans doute le médecin qui repassait pour voir s’il n’était pas encore mort. Quelle délicate attention. Et puis, il eut un silence. Un profond malaise. Il avait l’impression qu’on l’observait trop longuement. Peut-être les gardiens qui étaient venus finir leur sinistre besogne.

« J…Joe ? » Non, ce n’était pas les gardiens. Ni même le médecin. C’était … lui. Cet homme qu’il avait prétendu haïr pendant toutes ces années. Cet homme qu’il avait envoyé en prison, cet homme qui lui manquait et qui avait juré sa perte. Son père. Pour un peu, il croyait rêver. La grande faucheuse a un sens de l’humour tout à fait particulier. Mais non. Lorsqu’il entendit le son de sa voix, il comprit que ce n’était pas un rêve, ni un cauchemar d’ailleurs. La réalité le frappait de plein fouet, et il n’avait rien pour se défendre. Il n’avait même plus la force ni le courage de se lever. Joe pouvait faire de lui ce que bon lui semblerait, cela ne changerait plus rien désormais. Et il s’approchait. Lentement, tel l’animal prudent, et sanguinaire des océans. « Non… non, s’il te plait … ne… » Malgré la douleur, l’être humain a l’instinct de survie. Benedikt avait peur, très peur, il osait l’admettre, de cet homme qui contournait son lit. Et ces hommes, qui étaient-ils ? Etaient-ils venus le retenir pendant que Joe s’amusait à lui faire payer ses crimes ? Dans le regard de l’étudiant, on ne distinguait plus que l’espoir que tout s’achève, l’espoir de ne plus souffrir. Il s’était retourné sur son lit, fixant l’éditeur avec une panique incontrôlable. Sa respiration devenait rapide et saccadée. Il en pleurait presque d’être aussi pitoyable comparé à l’homme qu’il était par le passé. « …Ne….n…ne me frappe pas…. ne… ne me… frappe….p..pas…. » Les larmes roulaient déjà sur ses joues. Là, en cet instant, dans cette chambre d’hôpital sans lumière, on avait l’impression d’un enfant, à peine plus de quatre ans, effrayé au point de retenir ses draps entre ses mains, et d’essayer de sortir du lit pour courir aussi loin que possible, fuir avant que les coups ne pleuvent. Il était tombé du lit, parce que ses jambes refusaient toujours de lui obéir. Ses mains cachaient son visage, cherchaient à protéger le plus de peau possible de la punition paternelle. Les jambes recroquevillées contre son torse, Benedikt était appuyé dans un coin du mur, et ne bougeait plus. Il tremblait de tous ses membres. Sa blouse d’hôpital ne couvrait que le haut de son corps, ses jambes elles, étaient bien visibles. Les seules qui n’avaient pas trop souffert de son séjour derrière les barreaux, mais qui, au vu de leur maigreur, témoignaient de son état de santé alarmant.

Pourquoi se montrait-il aussi doux tout à coup ? Joe n’avait jamais utilisé cette voix envers lui. Seulement pour Connor et encore, lorsqu’il était de bonne humeur. Sur le moment, le Russe en vint à énumérer les fois où son père avait fait preuve de tendresse à son égard. Il n’en dénombra aucune, si ce n’était leur première rencontre. Lorsqu’il l’avait fait mettre en prison, qu’il avait été maltraité, et qu’il lui avait proposé de l’argent. Il se comparait à son petit frère, et n’avait jamais été surpris de la froideur dont Joe faisait preuve envers son fils aîné. Alors, pourquoi retourner sa veste aujourd’hui ? Parce qu’il était mourant ? Non, le grand requin blanc ne s’embarrassait jamais de sentiments, ni de la moindre émotion. Il l’avait toujours dit. Benedikt avait mal agi, il était normal que Joe lui en veuille. Aussi, il n’y avait qu’une seule raison qui le poussait à se montrer moins brutal envers lui. C’était un piège. La seule explication qu’il avait trouvée pour comprendre l’attitude de son père. Il voulait le ramener aux Etats-Unis pour lui faire payer sans que le gouvernement russe ne puisse s’en mêler. « Ne fais pas semblant … je sais pourquoi tu es là …tu …. tu es venu pour …. pour me tuer, n’est-ce pas ? » C’était la troisième fois qu’il regardait la porte de sortie. Peut-être que si l’un de ces hommes s’écartait un peu, il pourrait courir et … Non, oublie ça. Tu es trop faible, et pas suffisamment rapide. « Je … je suis désolé. Je suis désolé pour tout. Je suis désolé pour Connor et pour Noah. Je voulais pas que tu sois enfermé. Je voulais pas qu’il se fasse enlever. Je te demande pardon. S’il te plait … ne me frappe pas. Je purgerai ma peine aux Etats-Unis, ou en Russie, je te le promets. Mais ne …me frappez plus … » De nouvelles larmes, et son regard qui suppliait son père de l’épargner. Au début, c’était lui à qui il s’adressait. Maintenant, il parlait au nom de tous ses tortionnaires. Tous ceux qui l’avaient violenté, plus jeune jusqu’à aujourd’hui. Il arrive un moment où la douleur est telle qu’on ne peut plus la supporter. « NONN ! Ne me … ne … NE ME TOUCHEZ PAS ! » Enfin, il avait eu la force de les repousser. Ces hommes qu’il ne connaissait pas. Deux d’entre eux avaient fait quelques pas dans sa direction, sous les ordres de Joe. Il avait eu la force d’attraper l’une des seringues abandonnée sur la table de chevet, et de les menacer, les yeux agrandis par la peur. Que pouvait-il faire avec une petite seringue ? Pas grand-chose. Son cœur battait de plus en plus fort. Il fallait qu’il sorte d’ici. « Laisse… laissez-moi… laissez-moi passer …. » Il s’adressait maintenant aux hommes qui gardaient la porte d’entrée. Il avait du mal à marcher, du mal à respirer, mal partout. D’ailleurs, quelques secondes seulement après qu’il se soit levé, une quinte de toux brutale l’obligea à baisser sa garde. Assez pour que l’on puisse l’empêcher de fuir. Une toux grasse, pesante, qu’il retenait d’une main, tandis que l’autre cherchait un meuble sur lequel s’appuyer. En retirant sa main, plus tard, sa paume avait pris une teinte plus foncée. Du sang. Il crachait du sang. A peine son regard croisa celui de son père, qu’il s’effondra alors sur le sol glacé, les yeux grands ouverts et le teint livide.
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MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 14:29



Voir mon fils, un Shark, dans un tel état fit monter en moins une colère des plus incroyables. L'une de ces colères qui vous chauffe le sang et qui vous donne envie d'hurler votre rage. C'était viscéral. Je n'étais pas le père le plus affectueux ou compétent qui soit, mais malgré la haine que m'avait longtemps inspiré Benedikt, je ne pouvait pas m'empêcher d'éprouver le besoin de veiller à sa santé physique et morale. Le voir dans un si piteux état, amaigri voire même osseux, me retournait l'estomac. Comment ai-je pu souhaiter le placer moi-même dans un tel état ? Etait-ce de la sentimentalité ? Non. J'aurais mis ça spontanément sur le compte de l'instinct. Un instinct protecteur surdéveloppé chez moi, mais avec seulement une rare poignée d'individus. J'essayais de m'approcher un peu de lui pour prendre de ses nouvelles et le rassurer, mais sans succès. Il était terrifié. A ses yeux, je devais sans doute être une sorte d'ultime bourreau venu mettre un terme à la vie d'un condamné qu'il s'était juré d'exécuter de ses mains. Le prédateur ayant laissé sa proie se débattre seule pour ensuite venir porter le coup de grâce. A une certaine époque et suite à certains faits, cette version de l'histoire aurait pris tout son sens. Mais je m'y refusais aujourd'hui. Je n'étais pas là pour lui faire du mal, je ne le désirais plus. Il avait suffi de plusieurs actes particuliers de sa part et d'une vision aussi morbide de sa santé pour me faire passer l'envie de me venger. De toutes manières, j'avais déjà éradiqué la source réelle de mon désir de vengeance. La famille Taylor s'était éteinte. "Benedikt, je ne vais pas te frapper... mais non, enfin, je ne suis pas là pour te tuer. Ecoutes-moi..." murmurais-je en essayant de poser ma main sur sa tête. Rien à faire, il ne me croyait pas. J'avais l'impression d'avoir un enfant farouche, terrorisé et affamé face à moi. Comme si la Folie avec un "f" majuscule s'était emparée du corps de mon fils pour le faire agir d'une façon dangereuse et irrationnelle. Je paraissais calme, mais je n'en étais pas moins blessé. Le regard qu'il m'adressait me faisait peur, je devais bien le reconnaitre. Peur car je me sentais complètement désemparé. Le Russe tentait par tous les moyens de s'éloigner de moi, quitte à se blesse, comme si je lui inspirais la plus grande peur de toute son existence. Dans un sens, j'avais tout fait pour... et aujourd'hui, je devais défaire ce carcan de terreur si je souhaitais l'approcher sans heurt. J'étais incapable de savoir quoi lui dire ou quoi faire pour qu'il m'écoute, qu'il ne se brusque pas. Il était en état de choc. Un rien pourrait le déstabiliser de façon trop grave.

Je me levais pour essayer de m'approcher de lui le plus calmement possible, levant mes mains en signe de reddition. "Je ne te veux aucun mal, Beni, il faut me croire... s'il te plait..." Il plaçait ses bras meurtris de manière à se défendre, comme si j'allais le violenter. "Attention, tu vas finir par te blesser... Beni, écoutes-moi..." C'était la première fois que je l'appelais par son surnom, une habitude qu'avait pris son petit frère et que je venais d'adopter sans m'en rendre compte. Malgré mes ordres, les médecins ne purent pas avancer et n'eurent même pas le temps de faire quoique ce soit : secoué par une violente toux, je n'eus même pas le temps de m'arrêter sur cette tache de sang qui couvrait sa main qu'il s'effondra au sol dans une attitude sortie droit des films d'épouvante. "Damnit ! What the hell are you waiting for ?! Do something !" criais-je avec colère. Les médecins se précipitèrent et l'un d'eux sortit une seringue de l'intérieur de sa blouse pour injecter un sédatif à Benedikt. Dans le doute, il ne se réveillerait pas dans l'immédiat et son corps ne subirait aucune convulsion. Aidés d'un brancard, ils le sortirent de l'hôpital au pas de course, slalomant entre les autres patients. Nous entrâmes dans la camionnette qui fonça jusqu'à l'endroit où le jet s'était posé. Sur le chemin, les médecins diagnostiquèrent plusieurs problèmes qu'ils commencèrent à régler de façon urgente. A commencer par la régulation de la température de son corps : enveloppé dans des couvertures de secours de la tête jusqu'aux pieds, le froid ne mordrait plus sa chair meurtrie. Ils profitèrent également de son sommeil forcé pour désinfecter très efficacement une bonne partie de ses plaies et ce, sous mon regard outré. Les marques sur son corps firent remonter une rage incroyable. Si seulement je tenais l'identité des auteurs de ces sévices, je jure qu'ils auraient passé un aussi mauvais quart d'heure que le frère de Norah.

Une fois dans l'avion, j'ordonnais qu'on ne décolle pas. Pas sans le consentement de Benedikt, et pour cela, j'attendrais qu'il soit réveillé. Pendant son sommeil, les médecins l'avaient placé sous perfusion afin de lui redonner de l'énergie le temps qu'il puisse se nourrir par lui-même. Les plaies les plus graves étaient pansées et traitées, il fallait maintenant attendre que les produits fassent effet avant de faire quoique ce soit d'autre. Il faisait bon dans la cabine, une chaleur acceptable qui ne provoquerait pas un choc thermique au corps froid de Benedikt. Vu l'environnement bien plus viable de l'appareil, il ne tarderait pas à sentir au moins une légère amélioration.
J'attendais. Sagement et silencieusement. J'étais assis à bonne distance de lui, nous étions seuls. Je ne quittais pas le lit confortable dans lequel il se trouvait, attentif à chaque mouvement de son corps, à sa respiration, ainsi qu'au moniteur auquel les médecins l'avaient relié. J'avais dépensé une vraie fortune pour pouvoir obtenir ces soins, mais la vie d'un Shark n'a pas de prix. Bras croisés et visage fermé, je guettais les mimiques de son visage, il semblait rêver. Jusqu'à ce qu'il ouvre enfin les yeux, très lentement. "Benedikt ? Je suis là, doucement, mon garçon..." Je ne l'avais appelé que très rarement de cette manière. Une fois ou deux à peine. Rapidement, je levais les mains pour signifier que je ne lui voulais aucun mal. "N'aies pas peur, je ne vais ni te frapper, ni te faire du mal, ni même te tuer ou t'enfermer. Je voulais simplement te retrouver pour discuter." Ma voix était posée, rassurante sans en faire trop afin qu'il ne puisse pas imaginer que je le mène en bateau. "Nous sommes dans un jet privé, à une vingtaine de kilomètres de Bogotol. Quelques médecins venus avec moi se sont occupés de tes blessures les plus graves. Tu es sous perfusion, le temps que ton organisme récupère des forces, et il semblerait que tu en aies besoin. Il y a aussi de l'eau à côté de toi si jamais tu as soif." Je le regardais avec une certaine franchise mais aucune animosité. En réalité, je l'observais plutôt avec une étrange inquiétude. La même que j'avais lorsque Connor était malade. Une inquiétude mesurée mais bel et bien présente. "Je ne te forcerais pas à rester, je ne suis pas là pour t'obliger à quoique ce soit. Je souhaiterais simplement que tu m'écoutes, que nous puissions parler tous les deux. S'il te plait." Depuis quand implorais-je la bonne volonté de mon fils aîné ? Depuis jamais. C'était la première fois, et je voulais qu'il comprenne que je ne lui voulais pas le moindre mal. "Je jure sur la tête de Connor que je ne chercherais pas à te faire le moindre mal." Avec ce que j'avais avoué au procès, j'espérais que ce gage de confiance serait suffisant.
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MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 15:07


Il faisait chaud. Une douce chaleur, de celle qui réchauffait le corps et esprit sans vous étouffer. Il faisait bon. Depuis combien de temps n’avait-il pas connu cet été ? On était en hiver, pourtant, alors pourquoi … Ses yeux s’ouvraient, tout doucement. Il était dans une sorte de boîte. Le plafond était différent de celui de l’hôpital. Plus arrondi. Etrange. Une odeur de neuf flottait dans l’air, à la différence de sa chambre qui sentait l’eau de javel et l’antiseptique, comme dans toutes les chambres d’hôpital. Il avait mal au crâne, mal aux yeux. La lumière lui brûlait les rétines. Mais c’était surtout de voir son visage qui l’effrayait toujours. Pourtant, il n’avait pas bougé d’un pouce. Juste regardé, avec l’impression que sa vie ne tenait plus qu’à un fil. La bouche fermée, il attendit que son père parle le premier. Pourquoi n’était-il pas encore mort ? Il était pourtant inconscient tout à l’heure, ç’aurait été si facile de faire passer ça pour un accident. Il y a tellement de cadavres en Russie, personne n’aurait fait le rapprochement entre le débarquement d’un britannique, et la disparition d’un jeune russe. Et ce mot ‘mon garçon’… ses yeux s’ouvrirent davantage. Sans le dire, sans le montrer, il était touché à sa manière d’être considéré comme un enfant. Celui de son père. Et non plus comme celui qui aurait pu coucher dans la niche du chien. Tu te rappelles, Joe ? Lorsque je suis venu te rendre visite, avec Léonie. C’est ce que tu m’as dit. Que j’avais les pattes sales. Je n’ai pas changé, tu sais. Je suis même plus sale encore aujourd’hui, que je ne l’ai jamais été. « Discuter, pourquoi ? » gémit le garçon sans le lâcher des yeux. Et discuter de quoi, au juste ? De comment il allait finir ? de ‘tu préfères la prison usa ou russe, mon garçon ?’, du temps qu’il fait ? De quoi pouvaient-ils bien discuter, alors que Joe lui avait fait clairement comprendre qu’il ne voulait plus jamais avoir affaire à lui, au tribunal. Ca non plus, il ne l’avait pas oublié. « De l’eau ? » Cette fois, il se releva. Malgré la douleur de ses membres, péniblement, Benedikt avait attrapé la bouteille, buvant….encore et encore, jusqu’à ce qu’il ne reste plus une goutte. De fines gouttelettes étaient restées accrochées à la commissure de ses lèvres, qu’il s’empressa d’essuyer avec le dos de sa main, gêné par sa soif. Honteux d’avoir l’air si misérable devant un homme pour qui faiblesse, rimait avec pauvreté, ou rebus de la société. Sans le remercier, même si l’intention était là, il reposa la bouteille là où il l’avait trouvé, baissant les yeux sur le drap qui recouvrait en partie son corps. Il sentait son regard sur ses épaules, mais préférait s’en éloigner, lui échapper, par peur de devoir parler … s’expliquer. Souffrir, encore. C’était la deuxième fois que Joe parlait de son ‘envie’ de ‘discuter’. Sans poursuivre. Comme s’il attendait son autorisation. A quoi bon, il n’était rien. Il ne l’avait jamais été. Pourtant, ce ‘s’il te plait’, l’incita à relever les yeux, et à les poser sur son père. Triste et encore fragilisé par ses blessures, mais enfin décidé à l’écouter, à comprendre. « Je suis désolé pour tout. Pardon. » commença t-il alors dans un murmure. Il ne savait pas si c’était là ce que Joe attendait : des excuses, mais il fallait qu’il sache combien il regrettait. Même si c’était trop tard, même s’il avait tout perdu par sa bêtise. « Je voulais juste… défendre l’honneur de ma mère. Qu’elle soit …. fière de moi… » Non, il n’allait pas encore pleurer. Pas devant lui. Dieu qu’il détestait se sentir aussi pitoyable. Ne pas pouvoir contenir ses larmes devant un homme aussi dénué d’émotions, qui en avait même fait sa devise. Pire que de la honte, c’était … une manière de s’éloigner un peu plus de celui qu’il avait, au fond, toujours admiré. « Pourquoi tu es ici ? Pourquoi tu es venu me voir si c’est pas pour me tuer ? Je vous ai fait tous souffrir, tu es obligé de me détester ! » avait-il soupiré au bout de quelques minutes de silence. Non, il ne comprenait pas ce qui l’avait poussé à venir en Russie. Pour lui, en tous cas. Il ne le méritait pas. Voilà pour quelle raison il était en colère. La colère d'un petit garçon.
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MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 16:38



Je le regardais se jeter sur la bouteille comme si sa vie en dépendait... et sans doute était-ce le cas. Je sentais une nouvelle douleur étreindre ma gorge. Est-ce que Benedikt comprenait la portée de ma colère lorsque j'avais appris que j'avais un fils qui n'avait ni mangé à sa faim ni bu à sa soif ? Est-ce qu'il me croyait, maintenant ? A l'époque, je me serais saigné pour qu'il ait la vie qu'un Shark mérite. Ni plus ni moins. Pas un nanti avec une cuillère d'argent dans la bouche, mais certainement pas un crève-la-dalle. J'aurais eu de l'ambition professionnelle non pas pour réussir ma seule carrière, mais également pour offrir ce qu'il y a de meilleur à mon enfant. Aujourd'hui, une bouteille d'eau semblait lui permettre de survivre... je trouvais cette vision effroyable. Effroyable et blessante. Qu'on ne s'étonne plus de la haine que je pourrais nourrir à l'encontre de la mère de Benedikt. Je veillais à ce qu'il ne boive pas trop vite et qu'il finisse par s'étrangler sans le faire exprès. C'est étrange, voilà que je me mettais à avoir les mêmes réflexes avec lui qu'avec Connor ou même Noah.
Silencieux une fois encore, je le laissais s'exprimer. S'excuser. Je ne souriais pas ni ne montrait aucune approbation de ce comportement, mais j'étais touché. Qu'il reconnaisse la portée de ses actes et de cette erreur me garantissait qu'il avait au moins retenu la leçon. Il avait le potentiel d'être le digne fils de Joe Shark, mais il lui manquait l'expérience pour savoir comment enfoncer une personne sans toucher à son entourage. Pour l'heure, je ne souhaitais pas l'entraîner à devenir un insensible manipulateur tel que je le suis, je voulais avoir une conversation avec mon fils. Benedikt, juste Benedikt. Je finissais par hocher la tête afin de lui faire comprendre que j'acceptais ses excuses. Même si, au fond, il s'était déjà fait pardonner sans avoir l'air de s'en apercevoir.

J'attendais un petit moment encore, le regardant avec attention pour m'assurer qu'il était bel et bien éveillé et disposé à m'écouter. "Oui, j'aurais pu avoir toutes les raisons de te haïr." lâchais-je sur un ton très simple, ni agressif ni mauvais. Ce n'était qu'un constat. Puis je me décidais enfin à le regarder droit dans les yeux avec un léger sourire en coin. Subtil, à peine marqué. "Mais figures-toi qu'à San Francisco, il y a une petite tête blonde qui me réclame son grand frère jour et nuit... et pour ma santé mentale, j'ai fini par céder." L'humour anglais. Particulier. C'était pour le mettre en confiance : lui parler de Connor en lui faisant comprendre qu'il lui avait déjà pardonné allait sans doute le disposer à l'écouter avec plus d'attention. Par ailleurs, pudique par nature, je ne voulais pas parler de mes propres sentiments d'abord. British, please. "Benedikt, tu réalises ce que tu as fait ? Tu as sauvé ton oncle. Si tu n'étais pas intervenu, nous ne l'aurions peut-être jamais retrouvé. Ou pas en vie, en tout cas. A l'heure où je te parle, il est sain et sauf avec sa famille. Et c'est parce qu'il manque une personne à cet écoeurant tableau familial que je suis ici." Deuxième touche d'humour anglais. Tout le monde sait à quel point j'apprécie la famille tant qu'elle me fiche la paix. Mais avant tout, j'incluais volontairement Benedikt dans la famille, et sans chercher à minimiser son rôle ou à le rabaisser. Je me levais de mon siège pour approcher de lui et m'asseoir au bord de son lit en veillant à ne pas lui faire mal. "Tu as voulu venger ta mère, je peux le concevoir. Mais pour te rattraper, tu as sauvé celui que je considère comme un frère. Tu as permis à l'oncle de ton petit frère de rentrer chez lui sain et sauf. Le seul qui t'en veut encore chez les Shark, c'est toi-même." Je fis un sourire un peu plus affirmé avant de regarder ailleurs, légèrement gêné. "Je n'ai pas été irréprochable non plus." murmurais-je, tout en veillant à ce que le Russe m'entende. J'approchais un plateau sur roulettes dans lequel il y avait plusieurs victuailles pour calmer sa faim. Que des choses équilibrées. "Tiens, sers-toi. Et manges doucement, si tu manges en trop grande quantité, ça va te rendre malade." Pour l'instant, je préférais le laisser réagir sur ce que je venais de dire avant d'en rajouter et de me confier également. Il n'était pas habitué à ce que je lui parle avec autant de sincérité et de... douceur. C'est le terme. Je ne m'étais pas ramolli, loin de là. Je m'adressais à lui comme à un fils, pas comme un étranger.
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MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 17:38


Attentif, il l’était. Mais sa peur de voir Joe changer d’avis n’avait pas disparu. Il n’avait pas confiance. Pourquoi ? Pourquoi malgré tout ce réconfort, alors que son père l’avait fait monté à bord de cet avion, loin de Bogotol, craignait-il toujours qu’il le frappe ? Parce qu’il avait été habitué à la violence depuis son enfance. Parce qu’il n’avait que ça. Comme Joe, britannique, ne pouvait vivre sans être blasé ou cynique, ne montrer aucune émotion sous peine de passer pour ‘faible’, Benedikt lui avait besoin de cette peur. Elle lui permettait de se méfier de tout, et de tout le monde. De ne jamais baisser la garde. De ne plus avoir mal. Plus autant qu’autrefois. Et puis, il y avait ses souvenirs. Toutes ces choses que Joe avait dites. Oh, il ne lui en voulait pas. Il était même plutôt d’accord avec lui, mais c’était en raison de la haine de son père par le passé qu’il l’effrayait aujourd’hui ; Au tribunal, il avait lu dans le regard de l’éditeur une colère plus noire encore que toutes celles qu’il avait déjà croisées par le passé. Un regard qui l’avait tétanisé, l’obligeant à quitter le pays. Il avait beau faire le fier, faire croire qu’il était fort et malin, ce n’était rien de plus qu’un enfant perdu au milieu du désert. Il n’avait rien, ni personne. Du moins, jusqu’à ces deux semaines. Jusqu’à ce qu’il fiche tout par terre. Joe l’avait traité de tous les noms. De ‘chien’, en passant par de la ‘vermine’ lorsqu’il était allé chercher Connor au centre aéré, en le jugeant avec une indifférence prouvant à quel point il le méprisait lorsqu’il était venu avec Léonie. Une chose que Benedikt n’avait jamais pu oublier, et qui, en dépit de la rage qu’il avait contenue à ce moment-là, l’avait blessé au plus profond de son être. Il l’avait chassé de la maison. Tel l’animal que l’on renvoie à sa niche. Il lui avait clairement fait comprendre que Connor n’avait plus de frère désormais, qu’il allait s’arranger pour le renvoyer au pays. Et il avait réussi.

Repliant ses jambes, Benedikt n’avait toujours pas levé les yeux. Il préférait jouer avec ses doigts, plutôt que de croiser le regard de Joe. Moins de risque d’y lire de la déception ou un quelconque sentiment qu’il aurait du mal à comprendre. C’était ça son problème. Joe lui, cachait ses sentiments. Benedikt de son côté, parce qu’il n’avait jamais vraiment connu l’amour d’un père ou d’une mère, ne savait pas les différencier les uns des autres. L’affection qu’une fille lui procurait, il y répondait souvent par la négative, préférant fuir plutôt que d’avoir à se remettre en cause. D’ailleurs, c’était pour ça qu’il avait repoussé Léonie la fois où elle avait passé une main sur son torse. Il n’aimait pas qu’on le touche. Non, ce n’était pas qu’il n’aimait pas ça. C’était surtout qu’il ne savait pas comment réagir. Qu’il avait peur de se laisser transporter, et d’être déçu, ou pire, de souffrir comme il avait souffert lorsque sa mère était partie. « Connor ? Co…Connor t’a parlé de moi, c’est vrai ? » Tout à coup, son visage s’était illuminé d’un grand sourire, sans qu’il ne puisse s’en empêcher. On aurait dit un enfant face au Père Noël. Ce que son petit frère l’avait manqué. Mais, plus il y pensait, plus les mots de Joe résonnait dans son esprit. C’était de l’humour. L’humour britannique. Et s’il y avait une part de vérité ? Et si Joe, pour ne plus entendre les jérémiades de son fils, n’était venu, que pour lui ? Le père n’en avait pas encore conscience, comme Benedikt n’avait conscience qu’il avait déjà obtenu son pardon, mais il avait besoin de lui. Pas comme un adulte, pas comme un ami. Il voulait … un père. Mais ça, il se trouvait dans l’incapacité totale de l’admettre. Parce que Joe lui rirait au nez. Parce que Joe n’avait jamais été d’une grande sensibilité. Et parce que lui-même savait que cet amour, il devait le mériter. « Je ne suis pas … de la famille. » murmura t-il en déglutissant. « Je n’ai pas sauvé Noah. C’est de ma faute s’ils l’ont emmené. Tout allait très bien avant que je vienne aux Etats-Unis. Je n’aurais jamais dû …. Si je ne t’avais pas fait emprisonner, rien de tout ça ne serait arrivé. » Il ajoute encore, plus malheureux que jamais. « Il doit m’en vouloir. Ils doivent tous … me détester. Même Connor. Tu dis ça pour me rassurer mais … je n’ai pas oublié son regard ce jour-là. Je veux plus jamais être regardé comme ça. » Sa voix tremblotait. Il tenait bon. Il devait être fort. « Il me manque tellement. » avoua t-il pourtant sur le bout des lèvres en contractant des mâchoires pour ne pas craquer.

Joe s’était levé, pour se rapprocher. Une réaction qu’il n’attendait sûrement pas fut celle de son fils aîné, toujours méfiant, qui avait instinctivement reculé et l’avait observé en silence, le regard toujours à demi effrayé. Que se serait-il passé ? Non, il ne l’aurait pas frappé. Il ne l’avait pas fait jusqu’ici, ce n’était pas maintenant que ça allait commencer. Qu’est-ce que tu en sais ? Si ça se trouve, il attend juste le moment propice… Toute cette nourriture. Et lui qui mourrait de faim. Sans écouter un mot de plus, Benedikt avait attrapé une assiette, ses couverts, et commencé à manger. Un peu trop rapidement sans doute, puisque son père lui conseilla aussitôt de ralentir l’allure. Il était pathétique. En plus de ne pas le remercier, il mangeait comme si sa vie en dépendait. Une semaine qu’il n’avait pas avalé de la viande ou du riz. Juste quelques bouchées de pain qu’il volait ici et là. En Russie, le vol est un crime sévèrement puni. D’où les cicatrices qu’il avait gardé dans le dos, des années auparavant. A ce propos, un doute l’avait assailli. En passant une main sur son torse, il toucha la surface douce de la laine. Un pull qu’on lui avait enfilé pour lui tenir chaud. Mais alors, cela signifiait que Joe avait vu ses … Non, pas forcément. Celles qu’il avait sur le torse, les plus récentes. Pour les autres, il n’avait sûrement rien remarqué. Surtout que la plupart de ses anciennes blessures étaient maintenant masquées par ses nombreux tatouages. Tant mieux, il n’avait pas envie que l’Anglais l’observe comme une bête curieuse, ou pire … qu’il le prenne en pitié. Sa fierté avait suffisamment été mise à l’épreuve aujourd’hui.

Arrivé au steak, après avoir mâché plusieurs morceaux, Benedikt les avait tous recraché dans son assiette. Conscient du regard de son père, sans doute surpris par sa réaction peu convenable, il baissa les yeux, honteux. Mais pas question de lui dire la vérité. Encore une fois, il voulait qu’on le croit fort. Il avait besoin de se sentir ‘libre’ de tous sentiments. Au fond, il essayait tout bonnement d’agir comme son père. De lui ressembler. Et peut-être que comme ça, il finirait par l’aimer ? « Je…j’ai plus faim, merci. » Les morceaux n’étaient pourtant pas très épais, mais mâcher le fatiguait. Et n’en parlons pas de sa gorge encore douloureuse. « Pardon, je sais qu’on ne crache pas dans l’assiette … je suis désolé. » Combien de fois allait-il encore s’excuser ? Autant de fois qu’il le fallait. Il ne l’avait jamais fait auparavant. C’était peut-être ça son problème au fond. L’orgueil. « Pourquoi tu veux me ramener avec toi ? » Pour Connor, oui, ça il avait compris. Mais peut-être attendait-il une autre réponse. Une réponse qui ne viendrait sûrement jamais de lui-même, d’ailleurs. Ne rêve pas, Benedikt. Tu es trop vieux maintenant pour jouer les petits garçons russes.
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MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 19:10



"Il parle de toi constamment, ces derniers jours. C'est simple, j'ai l'impression de dialoguer avec un disque rayé." marmonnais-je avec un air exaspéré. Depuis que Connor avait appris que Benedikt avait permis de récupérer Noah de ses ravisseurs, le Russe était à nouveau rentré dans les bonnes grâces de l'enfant. C'est ce qu'il y a de bien avec Connor : il reste rarement fâché à vie. Sauf lorsqu'on touchait à ses proches. Dans sa tête, le fait qu'il ait envoyé son père en prison, mais qu'il ait en contrepartie sauvé Noah, cela faisait que tout s'annulait pour revenir à la normale. On remerciera Sophie pour lui avoir transmis ce trait de caractère si particulier. J'avais laissé mon fils s'exprimer avant qu'il ne se jette sur la nourriture, celui-ci doutant sérieusement de la véracité de mes propos. Aurais-je poussé l'humiliation jusqu'à lui faire croire que tout le monde l'aimait juste pour qu'il revienne et se fasse rejeter suite à ses faux espoirs ? Oui, d'accord, j'étais vicieux et j'aurais pu le faire... mais je disais la vérité. La stricte vérité. Le fait de voir son visage tordu par l'effort pour s'empêcher de pleurer me fit chaud au coeur. Pourquoi ? Parce que malgré son envie, il restait fort. Un Shark pur et dur. Moitié Britannique moitié Russe, il fallait s'y attendre. Je songeais déjà à le laisser un moment seul pour qu'il puisse évacuer cette pression sans crainte d'être observé. Je ne me serais pas moqué de lui après les sévices qu'il avait enduré, mais je savais qu'il se retiendrait aussi longtemps que je serais dans le secteur.
Je l'observais attentivement en train de manger comme un véritable estomac sur pattes. Au moins, la faim lui donnait un appétit et non un dégoût de la nourriture. Sucres lents, protéines, glucides, lipides, etc... Tout avait été prévu pour que ce ne soit pas un repas "fourre-tout" mais plutôt un repas qui puisse rassasier son organisme affaibli. "Tu es un Shark. Excuses-toi avec modération, cela va finir par devenir gênant." lui fis-je remarquer en arquant un sourcil d'une manière à la fois snob et amusée, typiquement britannique. Benedikt avait l'air tellement confus qu'il s'excusait pour un oui comme pour un non depuis qu'il se trouvait devant moi. Lui faire comprendre qu'il était pardonné - et même sollicité - par les siens ne serait sans doute pas une mince affaire.

Ayant un petit creux également, je me permettais de prendre une pâtisserie qui trainait. Non, il n'y avait pas de Noah Clives dans le secteur pour me faire remarquer que je devrais plutôt prendre un fruit, alors profitons-en. Eclair au chocolat. Je m'employais enfin à lui répondre le plus naturellement possible. "J'ai réussi à maquiller ce meurtre et j'admets m'être plutôt bien débrouillé... mais tu penses sincèrement que la famille de Norah aurait si facilement lâché le morceau ? Que j'étais infaillible ? Le fait que tu t'en mêles n'a fait qu'accélérer l'inévitable. Pourquoi crois-tu que je m'en sois si bien sorti ? J'avais prévu ma chute. Je ne savais seulement pas quand elle se produirait." J'étais le plus honnête possible. Rares sont les criminels infaillibles, il faut seulement savoir s'en sortir en anticipant de se faire attraper. "Connor a été choqué et en colère, mais tu lui as rendu son oncle. Et tu m'as rendu mon frère. Ce sont des raisons plus que suffisantes de ne plus t'en vouloir." Je terminais enfin mon éclair au chocolat avec un léger soupir de satisfaction avant de regarder mon fils avec un peu plus d'insistance. Voilà, on y est. Il voulait entendre quelque chose de ma part. Et j'avais besoin de lui parler franchement. Belle coïncidence, n'est-ce pas ?
Je m'asseyais donc un peu plus confortablement puis le fixais dans les yeux avec douceur et franchise. "Je souhaite te ramener car il est hors de question que mon fils aîné vive dans la misère à l'autre bout du monde." J'émis un léger soupir, faisant courir mon regard sur son visage. Je n'osais pas poser ma main sur sa tête, de peur qu'il se retire avec un sursaut de panique. "Je t'ai traité de façon odieuse, mon garçon, et je m'en excuse. Tu débarques dans mon bureau, m'annonçant que tu es mon fils, que tu veux m'extorquer des fonds et tu me menaces. J'ai pris peur et j'ai été piqué dans mon ego. Je ne rejette pas la faute sur toi, mais j'essaie de t'expliquer mon comportement. Suite à cela, je ne t'ai jamais vu autrement que comme une menace... au lieu de te considérer de cette manière, j'aurais plutôt dû te considérer comme un fils. Essayer d'apprendre à te connaitre au lieu de te repousser." Je laissais vagabonder mon regard devant moi, décidé à parler à coeur ouvert. Cela n'arriverait pas tous les jours, mais nous avions tous deux besoin de franchise. "Je ne suis déjà pas un père très... affectueux avec Connor, je ne risquais pas de l'être avec toi. Mais tu as eu une bonne influence dans nos vies. Je n'ai jamais vu Connor aussi heureux depuis que tu t'es présenté à lui, Noah est ravi de pouvoir jouer au tonton surprotecteur, et ta cousine... ma foi... à part te dire que je compatis, je ne saurais quoi dire de plus." Un sourire étrange s'était dessiné sur mon visage tandis que je regardais Benedikt. Un sourire presque complice. J'étais un peu gêné, je n'avais vraiment pas l'habitude de parler en tant que père. J'étais un peu moins assuré, plus maladroit, sans doute. Au moins, je ne jouais pas un rôle.
Je le regardais avec un peu plus de tendresse, comme lorsque je cherchais à rassurer Connor. "J'aimerai que tu pardonnes ma conduite. Je souhaiterai vraiment que tu me donnes une chance d'être un père pour toi."
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« La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe Empty
MessageSujet: Re: « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe « La vie des morts est de survivre dans l'esprit des vivants. » || Joe EmptyDim 14 Oct - 20:06


Les mots que prononçait Joe, son attitude auraient pu le pousser à sourire, même à en rire, si sa crainte ne demeurait pas d’être renvoyée sur le sol russe. Encore que … ils n’avaient pas encore quitté la Russie. Enfin bref, Joe commençait à marquer des points. A avancer, petit à petit, à avoir sa confiance. Et ce n’était pas rien quand on connaissait la méfiance légendaire des Russes à l’égard des étrangers. Pire encore lorsque le Russe en question avait subi des maltraitances, l’empêchant de se confier, ou d’attendre quoique ce soit de bon d’une autre personne. « Oui » soupira l’étudiant en baissant la tête. Il avait encore du mal à concevoir l’idée qu’il puisse réellement un ‘Shark’ comme le disait si bien son paternel. Il ne fallait pas lui en vouloir, ce n’était pas faute d’avoir essayé, durant ces derniers mois. A mesure que Joe parlait, que lui l’écoutait, sa peur s’envolait, comme par magie. Il était plus attentif, moins sur la défensive. Il finissait par y croire, y croire sincèrement à son retour aux Etats-Unis. A retrouver son petit frère. A ne plus mourir de faim ou de soif. Plus jamais. « Tu me ramènes, parce que tu culpabilises ? » Sa question paraissait anodine, mais plus Joe irait sur cette voie, plus il l’y suivrait, jusqu’à pouvoir l’amener à baisser sa garde, si tant est que ce qu’il voulait lui faire dire était ce qui était réellement, et non ce qu’il espérait seulement. Il voulait d’un père. Pas d’un homme qui jouerait les bons samaritains pour se donner bonne conscience. Si tant est qu’il ait besoin d’aide – et il en avait grandement besoin – il aurait pourtant préféré rester dans cet enfer plutôt que d’avoir à affronter la honte au quotidien de savoir que Joe l’avait ramené, pour ne pas se donner mauvaise réputation. Mais ce n’était pas ça. Il s’était trompé. Il avait entendu, sans écouter. Sans doute la fatigue, et ce sédatif qu’on lui avait donné de force qui continuait de faire son effet. Maintenant, il gardait les yeux sur son assiette à moitié pleine, attentif à chaque moi, chaque phrase, analysant tout, ne laissant rien au hasard. Il avait l’impression qu’il était sincère. Qu’il regrettait. Un sourire était même apparu sur son visage lorsqu’il avait évoqué le cas particulier de Sydney. C’est vrai qu’elle était spéciale, cette fille. On l’aimait, ou on la détestait, il n’y avait pas de juste milieu. Benedikt devait admettre que sa joie de vivre et son petit côté excentrique lui avait aussi manqué. Mais hors de question de l’avouer à la principale concernée. Elle avait suffisamment la grosse tête comme ça. Quoiqu’il en soit, c’était bien la première fois, l’unique fois sans doute, que le père se montrait aussi … humain. C’en était presque touchant. Maladroit, et gêné, comme son propre fils qui lui faisait face et refusait d’évaluer son honnêteté à travers son regard. Il avait foi en ce qu’il disait. Parce qu’il avait envie d’y croire. Parce qu’il n’en pouvait plus de Bogotol, parce qu’il ne pouvait plus souffrir. Parce qu’il lui avait manqué. « Ca fait longtemps, que tu es pardonné. » souffla t-il alors avec un sourire triste. Depuis le tribunal, en vérité. C’était à lui de se faire pardonner, et pas le contraire. Mais puisque l’homme semblait convaincu qu’il s’était mal comporté lui aussi, autant être franc et lui dire ce qu’il ressentait.

Ses dernières paroles mirent un terme définitif à la peur qui le prenait au ventre depuis qu’il l’avait retrouvé. Il acquiesca en silence. Son sourire lui, avait disparu, mais seulement parce qu’il était touché par les mots qu’il venait d’entendre. Tant et si bien qu’il avait aussitôt tourné la tête, pour essuyer discrètement quelques larmes qui menaçaient. Ce qu’il pouvait être émotif ces temps-ci ! Et puisque Joe lui avait clairement fait comprendre qu’il n’allait pas s’excuser à tous bouts de champs, il crut bon taire ses sanglots eux aussi, ne parvenant à retrouver la force de croiser à nouveau ce regard émeraude, que lorsqu’il fut certain d’avoir versé la dernière larme. « J’ai mal au ventre. Où sont les toilettes ? » Sans doute le morceau de steak qui avait du mal à passer. Plus tard, enfermé à l’intérieur de la cabine, Benedikt s’observa dans le miroir. God, on aurait dit un cadavre. Le visage émacié, les lèvres sèches, le teint blafard, bizarre que Joe n’ait fait aucun commentaire sur son aspect physique, lui qui avait toujours tendance à se moquer de sa tignasse. Tignasse qui avait besoin d’un bon débroussaillage d’ailleurs. « AAAAaaahhh…. qu’est-ce que …. aaouhh… oh, c’est pas vrai…. ca fait maall….. qu’est-ce qui m’arrive encore … » Il avait l’impression qu’on lui transperçait le ventre à coups de poignards. Douleur plus insupportable encore que les coups de fouets qu’il avait reçu deux jours auparavant. Plié en deux, il eut une nouvelle quinte de toux. Et de nouveau, des gouttes de sang qui tâchaient la paume de sa main. « Génial, je me suis pissé dessus en plus … » Ses jambes étaient mouillées. Le sol aussi, d'ailleurs. Ne manquerait plus qu’on croit qu’il ne savait pas viser la lunette des toilettes, en plus du reste. « …mais … ce… ce n’est pas de…. » L’urine, ce n’était pas censée être jaune, normalement ? La sienne était rouge vif. Comme … le sang qu’il avait sur la main. Et il avait froid tout à coup. Alors que deux secondes plus tôt, la température de l’avion le réchauffait encore. « ….Aahhhh…..J….Joe…. » Pas le temps de crier, son souffle était bloqué dans sa poitrine. Il grimaçait de douleur et se balançait de haut en bas pour essayer de l’amenuiser. « P…Papa….PAPAaa…. » La première fois qu’il appelait son père ‘papa’. Le Benedikt d’autrefois en aurait sûrement fait des cauchemars, mais aujourd’hui, il avait besoin de lui. Maintenant. Appuyé contre le ‘mur’ de la cabine, les jambes repliées contre son ventre, le Russe l’avait appelé une dernière fois, suppliant. Malaxant son ventre, ses reins qui lui faisaient un mal de chien et l’empêchaient de bouger, provoquant nausées, et le faisant suer à grosses gouttes. Il était fiévreux.
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