Clélia & Nastassia .

« Un autre verre s'il vous plait ! » Le serveur me regarda avec un sourire amusé. « Toujours du même brevage ? » « Toujours. » Je lui rendis son sourire. Il ne devait pas en voir beaucoup des jeunes femmes s'enfilant plusieurs verres de vodka en affilé. Le pire, c'est que j'la tenais bien moi, la vodka. J'étais juste un peu tarée après. Mais bon, l'effet recherché en buvant de l'alcool, c'est bien ça non ? Et puis de toute manière, boire, je n'avais que ça à faire... Me tournant pour regarder la piste de danse, je soupirai. Ça faisait un quart d'heure que j'avais envie d'hurler "PUTAIN MAIS C'EST QUOI CETTE AMBIANCE POURRIE ?". En effet, dès mon arrivée j'avais remarqué le peu d'activité des personnes présentes dans la salle. Dans une boîte telle que le Lexigton Club, on était habitué à ce que ça bouge, à ce que ça boive et à ce que ça danse dans tous les coins. La boite la plus branchée du moment sans ambiance, WTF ? Et pourtant, c'était bien le cas de cette soirée. J'étais là depuis maintenant une demie heure et la salle ne chauffait toujours pas. En même temps, les DJ's ne faisaient pas non plus grand chose pour redonner un peu de vivant à la pièce. Les musiques s'enchainaient, mais voir des personnes blasées aux platines ne donnaient pas vraiment le moral. Et moi, ça m’agaçait de voir une boite avec une ambiance aussi molle. Le froid avait engourdi les gens ou quoi ? J'avais passé quasiment toutes mes plus belles soirées au Lexigton. J'avais découvert la boite à mon arrivée à San Fransisco et je n'avais cessé de la plébisciter depuis. Pour danser et se déchainer, de toute manière, y avait pas mieux comme endroit. Dans mon cas, j'avoue qu'en débarquant aux USA, le nombre de boites de nuit m'avait un peu perturbé. Tant de concurrence, et moi, j'étais censé faire comment pour choisir ? D'autant que j'étais à ce moment là encore peu habitué à l'univers de la nuit; je n'avais commencé à connaitre the world after midnight qu'en arrivant à Paris. J'avais alors fait la découverte de ces merveilleuses pistes de danse et y avait de suite pris gout. Mais quand l'échange Sorbonne-Berkeley eu lieu, je n'étais encore qu'une novice pour repérer les meilleures boites de nuit. Finalement, on m'avait vite conseillé le Lexigton. Et j'avais bien choisi mes conseillers. En effet ma première soirée là bas fut tellement réussi que j'y revins le jour d'après. Et le week-end suivant. Et ainsi de suite. Depuis, la boite était devenue mon endroit de prédilection pour faire la fête. Entre amis, ou parfois seule, comme c'était le cas ce soir. Car ce n'était pas en arrivant seule qu'on s'amusait le moins; repartir avec quelqu'un n'était d'ailleurs pas rare dans ce genre d'endroit. Bref, dans tous les cas, s'amuser était aussi simple que de dire bonjour dans cette boite. Enfin bon, il y avait des exceptions à tout, et cette soirée en était la preuve. Aujourd'hui, le Lexigton était quand même mal barré pour nous vendre du rêve et de l'amusement. Je reposai brutalement mon verre sur la table. Il n'y avait maintenant presque plus personne sur la piste de danse. De pire en pire. Je décidai d'attendre encore un peu puis de partir si l'ambiance ne s'arrangeait pas. Je n'allais quand même pas gâcher ma soirée à m'enfiler de la vodka toute seule ! Même si malgré tout, la vodka était un très bon compagnon.

Peut-être cinq ou dix minutes plus tard -j'avais un peu perdu la notion du temps-, je sentais que je commençais à être bourrée. La tête me tournait légèrement mais je n'avais cependant pas mal au cœur ou à la tête. C'était déjà ça. Apparemment, Madame Chance avait décidé de ne pas m'offrir aujourd'hui les mauvais côtés de l'ivresse. Je ne fis malgré tout pas la bêtise de commander un autre verre, je savais que la vodka était bien en train d'agir sur mon organisme même si elle ne se faisait pas sentir par une envie de ressortir tout mon repas du midi. Réflexion faite, avec le nombre de verres que j'avais bu ce soir, il n'était peut-être pas raisonnable de partir tout de suite. Ou alors fallait que j'appelle un taxi. De toute façon, je réalisai que j'avais maintenant la flemme de bouger. Bah, rien ne pressait, je pouvais rester. Après tout, attendre sur mon tabouret que la flemme me quitte était un très bon programme aussi. Haha. J'appuyai ma tête sur mon bras lui-même posé sur le comptoir du bar et remarquai soudain la présence d'une jeune femme blonde à mes côtés. Était-elle là depuis le début ? A vrai dire, je n'en savais rien. Je savais seulement que j'avais une subite envie de faire la conversation. De toute manière, à voir son air blasé, elle avait l'air de s'ennuyer ferme elle aussi. Un brin de causette n'allait pas être bénéfique qu'à moi. « Super soirée ein ? » Avec le ton que j'avais employé, je savais qu'elle percevrait l'ironie de ma phrase. « Puisqu'on est là à poireauter, autant parler. Tu t'appelles .. ? » La soirée était pourrie. Mais avec un peu de chance, j'allais pouvoir sauver un peu la mise en papotant avec ma voisine.

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