Le samedi était mon jour préféré. Pourquoi ? Parce qu'on pouvait faire tout et n'importe quoi le samedi : il nous restait le dimanche pour travailler, donc on ne se pressait pas, on pouvait faire la geek toute la journée sans se sentir coupable, et comme c'était quelque chose que j'adorais faire, eh bien j'adorais le samedi. J'avais passé ma journée à regarder des films romantiques. Je m'étais levée tard, et étais restée en pyjama devant 27 robes et Valentine's Day, puis me rendant compte de l'idiotie de la situation, je m'étais habillée, avais grignoté quelque chose, et m'étais remise sur le canapé de l'appartement que je partageais avec Léandro pour regarder Love Actually et The Notebook. J'étais une vraie loque, et je le savais. Autour de moi, tout le monde était occupé aujourd'hui, si bien que j'étais toute seule, et que personne ne se souciait de ce que je faisais. Du moins c'est ce que je croyais jusqu'à ce que mon portable vibre et me réveille d'un espèce de demi-sommeil. Mon coeur s'accéléra doucement quand je vis le nom de l'expéditeur du message s'afficher : "Ezra". Mon visage laissait toujours apparaître un sourire, quand je découvrais que c'était lui. Il n'y en avait pas deux comme Ezra, c'était comme ça, je ne pouvais pas l'expliquer. Il était mon Anakin Skywalker. Il me proposait une sortie en boîte, et ma tête se mit à faire la tête toute seule. Attrapant ma télécomande, je changeai de chaîne pour mettre sur mtv, et me mis à danser sur la chanson qui passait. "tonight's gonna be a good night" Je lui répondis un peu plus tard, pour lui faire croire que je n'avais pas été si heureuse en recevant son message, et me mis en quête de la robe parfaite.

Quelques heures plus tard, j'attendais presque derrière la porte, habillé de ma toute nouvelle robe noire, à laquelle j'avais assorti des escarpins noirs à semelle rouge. Eh oui, Louboutin. J'avais toujours rêvé d'une paire, et en avais acheté une avec mes économies. J'étais fière de les porter ce soir, et j'espérais qu'Ezra me trouverait à son goût. Il ne fut même pas en retard, et nous partîmes main dans la main, comme à notre habitude. En un rien de temps, nous étions au endup nightclub, et la main de mon Ezra caressa mes cheveux. "Just have fun babe". "Comptes là-dessus, honey." répondis-je, si enjouée qu'on avait l'impression que je chantais. "J'imagine que tu dois avoir soif, n'est ce pas ?" dit-il, tandis que nous étions sur la piste de danse, déjà entraînés par la musique. "Crois-moi oui, mais faut que je fasse gaffe.. Je n'ai plus trop le droit à l'alcool, problème de santé oblige." J'aurais aimé ne pas avoir à lui dire, mais.. "Je sais, je parais tout de suite moins glamour." ajoutai-je en riant. Une fois arrivés devant le bar, j'eus une moue déprimée. Puis je balayai tout d'un geste de la main. Fuck les problèmes. "En fin de compte, non, je voudrais bien quelque chose de fort. On va dire que c'est la dernière fois". Je lui lançai un regard charmeur.

take me to wonderland, take me to wonderland. La musique résonnait dans ma tête et je ne pouvais l'en sortir. Je la ressentais par tous les pores de ma peau, comme à chaque fois qu'une chanson me plaisait vraiment et me mettait en transe. Je n'avais pas besoin d'alcool pour partir en total spleen, ou pour devenir un peu stone parfois : la musique me suffisait amplement. Et ce soir, alors que la main d'Ezra réchauffait la mienne en courant vers la piste de danse, la musique et l'alcool n'étaient pas les seules raisons de mon ivresse passagère : Ezra complétait le cocktail explosif. Il était comme un doux paradis enrobé dans du caramel au beurre salé. Juste une merveille que je ne pouvais pas lâcher, même si ma raison me susurrait parfois de ne pas faire l'idiote et d'arrêter de torturer mes sens avec les beaux yeux bruns du jumeau de ma meilleure amie. L'un des spotlight engendra un éclat au niveau de son poignet, et je vis avec un doux sourire qu'il portait toujours ce bracelet. Je le voyais souvent avec, et l'idée qu'il puisse le garder en souvenir de notre moment hors du temps me bouleversait totalement. J'avais soudain l'impression d'être très importante, de faire partie intégrante de sa vie, comme lui faisait partie de la mienne. Je souris doucement à la vue de nos deux mains liées, portant chacune le prénom de l'autre sur un petit morceau de métal. On aurait dit un vrai couple, comme à chaque fois que Belammée n'était pas dans les parages pour constater le feu qui incendiait nos corps en présence de l'autre. Je mis mes mains autour de son cou et le regardai avec un sourire amusé. Je vis l'une de ses fossettes se creuser et j'eus envie de lever les yeux au ciel. Dieu qu'il était sexy. Prise d'une envie incontrôlable de me rapprocher de lui, je m'avançai, doucement, sans peur qu'il prenne ça pour un comportement déplacé. Oh non, rien n'était déplacé entre nous. Tout semblait si naturel que les choses en étaient dix mille fois plus belle. Et puis alors que je ne m'y attendais qu'à moitié, il attrapa mes lèvres et m'offrit l'un de ses baisers légendaires qui bouleverseraient même un thermos à café. Il avait un don fou. Du moins, il me faisait un effet merveilleux, à moi. Peut-être étais-ce dû à notre proximité, à notre complicité, ou plus encore. Mais je ne voulais pas y penser, et alors que les deux verres suivants, qui ne seraient certainement pas les derniers, enflammaient ma gorge, j'eus une envie furieuse de le faire mien, ce soir. J'avais envie qu'il soit à moi, et rien qu'à moi. Mettant ma main dans ses cheveux bruns, je ne pus réprimer une énième envie pressante de l'embrasser et de le sentir plus près de moi que jamais. "Je vais passer pour une folle si je te dis que là, tout de suite, j'ai envie de te bouffer tout cru ?" lui dis-je d'un air malicieux. L'alcool me faisait me dérider complètement. Je n'avais pas touché à une goutte depuis un bail, le contre-coup me rendait encore plus folle. Et Ezra aurait du savoir qu'une Rosie un peu émêchée est une Rosie très, très câline. Voire insistante.

Nous étions venus passer une soirée au Endup Nightclub. Enfin, du moins, c'était ce que je croyais avant que son odeur m'enivre de nouveau et que je cherche ses lèvres avec une fougue de plus en plus incontrôlable. Je ne savais même pas comment on en était arrivés là. Pendant des jours, je m'étais sermonnée : il fallait que j'arrête de jouer trop souvent à ces jeux-là, quand bien même ils m'animaient et étaient l'une des raisons qui me sortaient du lit le matin. Car à trop jouer on se brûle. Mais avec Ezra, je ne brûlais plus seulement. Je me consumais, tel un phénix signant sa mort en un tas de cendre, pour en renaîtres quelques minutes plus tard. Il y avait cette citation que j'aimais tant, et qui trottait dans ma tête à chaque fois que cette ivresse me prenait et m'emprisonnait pour des heures entières : "Cette nuit-là, j'ai pris 3 grammes d'amour dans le sang, et je ne m'en suis jamais remise." Ce n'était peut-être pas de l'amour, mais ça y ressemblait beaucoup. C'était comme se piquer avec quelque chose de beaucoup plus fort que tout ce qui circulait dans les ruelles sombres de San Francisco. C'était quelque chose de magique qui n'appartenait qu'à moi, et qu'aucune autre fille n'avait le droit de ressentir, sous peine d'être anéantie à coups de talons. Ezra était à moi et rien qu'à moi, personne n'avait le droit de ressentir la même chose, personne. Et puis sans que j'ai vraiment conscience de ce qui se passait, ma vue étant brouillée par mon cocktail magique, Ezra me tira dehors et sa main caressa une nouvelle fois ses cheveux. A quelques milimètres de moi, il murmura : "Ce soir, je te veux rien que pour moi mon coeur.", ce qui m'arracha un sourire et lui offrit un nouveau baiser. J'étais une fille comme les autres, sensible à ce genre de choses, et cette sincérité qu'il avait dans les yeux me donnait envie de sauter partout de bonheur. J'avais compris son idée, et n'avait qu'une hâte, rentrer. Bela n'était pas là, parce qu'elle restait chez Charlie toute la nuit. Cela faisait plusieurs soirées de suite que je me retrouvais seule. Je savais qu'elle allait bientôt emménager de nouveau avec son mari, mais elle ne l'avait pas encore fait. Et puis il n'y avait aucune raison qu'elle débarque à l'improviste ce soir. Ezra m'aggripa par la taille et m'emmena jusqu'à la voiture. Le trajet me parut plus long que jamais, j'attendais de voir la maison, à l'angle d'une rue, pour me réjouir de ma chance. Ma main posée sur sa jambe, mon esprit incapable de m'interdire d'embrasser sa joue à multiples reprises, le sourire ne me quittait pas. Arrivés au pas de la porte, après avoir ouvert en un coup de clé bien maîtrisé, je me retournai vers lui, et nos regards restèrent fixés l'un dans l'autre pendant une bonne vingtaine de secondes avant que je craque, et lui saute au cou. Enroulant mes jambes autour de sa taille, je l'embrassai sans imaginer pouvoir arrêter un jour.

En partant à cette soirée, je ne m'attendais pas à finir là où je me trouvais en me réveillant. Du moins pas dans ces conditions. Avec Ezra, tout était improvisé, mais nous avions des limites que nous ne franchissions que très rarement. Lorsque nous sommes montés dans cette voiture, que nous avons monté les escaliers de la Milky Way Residence, et fermé la porte derrière nous, je n'étais pas encore très sûre de la tournure qu'allaient prendre les évènements, bien que ça ait été évident. Mais je n'avais pu résister aux grands yeux noirs du frère de ma meilleure amie trop longtemps. Il n'y avait que peu de mots, car les regards suffisaient. Tous mes sens étaient mis à l'épreuve, troublés par le chamboulement total qui s'opérait dans mon esprit et contaminait tout mon corps. J'avais eu quelques amants avant Ezra. Rien de sérieux. A vrai dire, j'avais été longtemps fâchée avec le sexe. La raison était évidente, mais je préférais ne pas en parler, d'ailleurs, Ezra ignorait tout. Il avait toujours été là involontairement. Après Elliott, je l'avais rencontré par hasard, et le temps d'une nuit, il avait fait ressurgir quelque chose que j'avais complètement enfoui, des sentiments que j'avais complètement oubliés, que j'avais fini par croire iréels. Et puis il était reparti, et j'avais réussi à me reconstruire, grâce à lui, sans qu'il le sache. Et puis il était réapparu alors que j'avais besoin de quelqu'un pour m'aider, pour me sauver dans le tourbillon infernal des histoires de famille et du diabète. Et dire qu'il ne savait rien de tout cela. Je ne me voyais pas lui raconter, il aurait été du genre à comprendre trop vite qu'il était un peu plus important pour moi que je l'étais pour lui. Il était littéralement devenu le remède à tout, et c'était exactement ce qu'il ne fallait pas qu'il découvre. Nous avions rarement passé des nuits ensemble. Enfin, de vraies nuits ensemble, si vous voyez ce que j'entends par-là. Peut-être parce qu'on avait peur de ce que ça impliquait, ou allait changer entre nous. Mais avec chance, tout se rétablissait toujours, et je ne pouvais pas dire non à son corps, à ses mains, à ses cheveux. Il m'avait fait découvrir qu'il y avait beaucoup plus que ce qu'on m'avait déjà appris. Il était génial, c'est tout. Et par-là, j'entends bon coup, héhé.

Ses mains parcouraient mes cheveux dans ce qui me semblait être un mélange de douceur et d'empressement. Nous arrivâmes en un rien de temps dans ma chambre. Sur le plancher, des vêtements étaient éparpillés, restes de ma difficulté à me décider pour une tenue ce soir. Quelques paires d'escarpins jonchaient le sol. Je me demandai si un garçon pouvait trouver ça sexy ou si, au contraire, cela relevait du pathétique à leurs yeux. Mais bon, Ezra s'en foutait, Ezra n'avait d'yeux que pour moi ce soir, et je ne pouvais m'empêcher de sourire entre ses baisers. Il me déposa avec la plus grande délicatesse sur les draps rose pâle, et je lui ôtai son tee-shirt avec empressement. Sa peau était brûlante, et j'avais envie de dire que c'était bon signe. Et puis il entreprit d'enlever ma robe noire. Ses yeux parcourirent mon corps, et alors qu'il souriait, je l'attirai à moi avec un regard malicieux.

Un mouvement sur mon visage me réveilla. J'ouvris les yeux doucement, tentant de m'habituer à la lumière. Réveilles toi la belle au bois dormant, même si t'es belle toute nue. Comme je regarde tes fesses, comme je regarde tes fesses. fit une voix que j'aimais. Mon coeur se mit immédiatement à battre la chamade, et malgré que je ne sois pas tout à fait réveillée encore, une sourire s'étira sur mon visage. Je ne mis pas longtemps à rassembler mes souvenirs : la boîte, les verres, la maison, la nuit. C'était toujours une vraie surprise de me réveiller à côté d'Ezra. Il y avait toujours ce petit moment durant lequel je me demandais si j'étais dans un rêve ou si tout cela avait dépassé l'inconscient. L'idée que ce matin soit réel me donnait envie de chanter. Je m'apprêtais à me blottir contre mon amant, quand j'entendis la porte claquer à quelques mètres de la chambre. MAIS QU'EST-CE QU'ELLE FOUTAIT LA ? Bela n'était pas censée rentrer si tôt ! Il était midi, d'accord, mais tout de même.. Un vent de panique me raidit et avec un baiser discret sur les lèvres d'Ezra, je me levai, m'enroulai dans la couette, et allait me poster prêt de la porte : "Belaaaaaaaaaa ?" appelai-je. Il n'y eut pas de réponse tout de suite. J'entendis des pas près de ma porte, avant que la voix s'élève. "Nan, c'est moi Rosinette".

MERDOUILLE. Mes yeux sortirent presque de leurs orbites. Merdouille de chez merdouille, Léandro, mon cousin et accessoirement meilleur ami, avait décidé de venir me faire une petite visite. Il n'était pas au courant de mes petites ambiguités avec le beau Canterburry. Je me retournai vers Ezra, et il eut un moment de flottement. EH MERDE.