« J’ai beau lui répéter, elle ne m’écoute pas. Quand comprendra-t-elle qu’il n’est pas fait pour elle ? »

Bien qu'on fût en février, le soleil brillait sur la Californie et Berkeley n'échappait pas à la règle. Habillée d'un t-shirt blanc, d'une veste Balmain bleu foncé et d'un jean slim, je regagnai ma chambre de confrérie après un rendez-vous chez le médecin qui m'avait confirmé ma grossesse pour y passer l'après-midi quand je me ravisai. Je devais sortir, prendre l'air et voir du monde. Je décidai donc d'aller chercher mon appareil photo et d'aller faire des photos dans les alentours de l'université. Je me dépêchai donc de rentrer. Après quelques fouilles archéologiques sous le tas de vêtements qui s'entassaient sur mon lit, je finis par trouver l'objet tant attendu, bien ranger à sa place dans son étui. Je le troquai donc contre mon sac à main non sans vérifier que j'avais bien mon téléphone portable et mes clés avant de quitter la pièce. Je descendis l'escalier qui menait à la salle commune et me rendit compte que je n'avais pas mangé depuis ce matin. Malheureusement pour moi, je devais me résoudre à aller manger au restaurant universitaire parce que je n'avais pas l'envie de reprendre ma voiture et de retourner en ville avec tout le trafic qu'il y avait. Je me rendis donc au restaurant universitaire où je pris le plat du jour. Seulement, même avec toute la volonté du monde, je n'aurais rien su avaler. Rien que la vue de ces tas de nourritures devant moi me donnait envie de vomir. Je me levai donc et allai jeter le contenu dans la poubelle. Je savais que ce n'était pas bien parce que des petits enfants mourraient de faim dans le monde, mais je ne pouvais décemment pas manger cette nourriture qui, à mon avis, ne pouvait être comestible. Alors que je quittai le restaurant, une jeune femme qui était avec moi en cours m'interpella pour m'interroger sur le devoir qu'on devait rendre la semaine prochaine. Je répondis à toutes interrogations, mais je me rendis vite compte que si je continuais, j'allais faire son devoir à sa place ce qui m'ennuyait fortement déjà que j'avais déjà du mal à boucler le miens. Je terminai donc notre conversation en lui indiquant que j'étais pressée et sortis de l'établissement. Une fois dehors, la brise fraîche me fit sourire. J'eus la soudaine impression que cet après-midi, malgré les évènements de ce matin, allait se passer plutôt bien. Je sortis donc mon appareil de son étui et commença à mitrailler les universitaires, le soleil, la nature, en bref, tout ce qui m'entourait. Je souris. En fait, quand on y réfléchit, la vie, c'est pas si mal que ça. Je marchai vers le parc tout en souriant aux jeunes qui passaient à côté de moi. Sans m'en rendre compte, j'étais déjà arrivé à destination. Je remarquai vite Polly assise contre un arbre, un bouquin dans les mains. Pourquoi n'allais-je pas la rejoindre ? J'haussai les épaules et la rejoignis en trottinant. Je me postai alors devant elle et lui sourit.

Toujours plongé dans un livre à ce que je vois ? Tu lis quoi cette fois-ci ?

Spoiler:

Le soleil brillait à l'extérieur. De la fenêtre de ma chambre, dans la maison Alpha, j'observais au dehors les oiseaux qui volaient et les étudiants qui allaient et venaient. Ce n'était pas une occupation très amusante mais je ne savais absolument pas quoi faire et l'énergie me manquait. Surement que c'était à cause .. Non. Et mon ventre gargouillait encore une fois. J'avais envie de prendre une ceinture et de le frapper, histoire de le faire taire, mais cela me ferait mal et je n'avais pas spécialement envie de devenir masochiste. Toujours en pyjama, façon sushi, je décidais de me préparer enfin à la journée qui arrivait et de me diriger vers ma garde robe pour choisir les vêtements à prendre aujourd'hui. Je n'avais pas eu cours de la matinée et je n'en avais pas non plus cet après midi car le professeur de droit principal était absent pour une raison inconnue. Le connaissant, il devait avoir la gueule de bois. Moi, au contraire, je ne sortais jamais pour boire avec des amis ou avec des hommes inconnus et je ne me retrouvais donc jamais avec ce mal de tête caractéristique des après-soirées à trop boire. J'étais bien trop timide et complexée pour demander à d'autres personnes de sortir avec moi et puis de toute façon, cela ne m'intéressait pas de me bourrer. Je ne tenais pas bien l'alcool et je trouvais ça dégoutant, trop chaud dans la gorge et pas assez sucré. Je me contentais des jus de fruit habituels et cela m'allait très bien. Ma garde robe était majoritairement remplie de survêtements plus jolis les uns que les autres, ironiquement, mais je décidais aujourd'hui de me faire jolie. Je choisissais un t-shirt avec un ruban doré ainsi qu'une petite jupe noire plissée qui laisserait apparaître mes jambes fines. Je me trouvais grosse mais d'un point de vue extérieur, je ne l'étais pas du tout, ce qui rendait acceptable le fait que je puisse porter ce genre de vêtements. C'était ringard selon la majorité des gens mais j'aimais ça, on allait pas m'obliger à m'habiller d'une manière différente. Je me rendais vers la salle de bain et me douchais, me délectant de l'agréable sensation de l'eau roulant sur mes membres tendus, et je me préparais à sortir. Pas besoin de maquillage, je n'étais pas le genre de femme à cacher ses complexes sous des tonnes de couleurs, je n'avais même pas assez de courage pour le faire. Je m'habillais rapidement et sortais, avec mon sac en bandoulière, et décidais d'aller au parc pour me promener un peu. Arrivée à destination, j'observais les arbres et les gens, baissant la tête dès que l'on me regardait un peu trop, et adressais des sourires aux petits enfants qui couraient partout sans se soucier de la vie. Je regrettais ce temps là, celui où je pouvais être simplement insouciante et où je pouvais faire absolument tout ce que je voulais. Finalement, je m'asseyais près d'un arbre et sortais un livre de droit, pas très passionnant certes mais il fallait bien que j'apprenne mes cours. Plusieurs dizaines de minutes après, j'entendis une voix qui me tirait de mes rêveries.

Toujours plongé dans un livre à ce que je vois ? Tu lis quoi cette fois-ci ?

Je relevais la tête et regardais la personne qui venait de m'adresser la parole. C'était Lou, une jolie blonde que j'enviais terriblement. Elle était si belle ! Et plus que tout, elle avait eu le grand honneur de sortir avec Maël, homme que je convoitais plus que tout au monde .. Pour moi, elle était parfaite. Bon, il y avait le léger détail de la rupture qui ne passait pas trop mais tout ne pouvait pas être comme je le voulais. Je lui adressais un sourire et me relevais pour lui serrer la main.

Un livre de droit .. Rien de très intéressant en somme. Qu'est-ce que tu fais ici ?

Mon regard fut attiré par son appareil photo qu'elle tenait d'une main. Je ne savais absolument pas qu'elle aimait bien faire ce genre de chose, mais après tout, je ne savais pas grand chose de la vie de Lou. Nous n'étions même pas des amies mais juste des connaissances, et lorsque nous nous parlions, c'était souvent pour que Lou me dise que Maël n'était pas un homme pour moi et qu'il ne pensait qu'au sexe.

Les photos .. Je déteste ça. Surtout quand je suis dessus à vrai dire.

Je passais une main dans mes cheveux et me rasseyais, en invitant Lou à faire de même.

Je ne savais pas si j'étais prête pour une nouvelle conversation Lou/Polly. Elles ne finissaient jamais bien et je n'avais pas la tête à me disputer avec quelqu'un, encore moins ces jours-ci où je ne me sentais pas très bien. Mais bon, je n'allai pas lui dire d'aller plus loin et de ne pas me parler, cela ne se faisait pas, et en plus de cela, je n'étais pas sure qu'elle aborderait le sujet tabou. Peut-être qu'elle voulait juste discuter avec moi, comme une personne normale faisait avec une autre. Je n'étais pas très douée pour parler, et même si j'excellais dans les présentation orales en classe de droit, je n'étais pas du tout forte en ce qui concernait les petites discussions entre gens de même âge. Quand il y avait réellement un seul interlocuteur, je ne savais que dire. Mais devant une foule, j'avais toujours une multitude d'idées. J'attendais qu'elle me réponde, avec un sourire sur le visage. Je ne pouvais m'empêcher d'être agréable avec les gens et toujours à ma meilleure forme. Je ne pleurais jamais devant quelqu'un, je ne me montrais jamais sous un jour négatif car j'avais horreur de cela. Alors, quand la jeune femme m'apprit qu'elle voulait discuter avec moi, je ne dis pas non, au contraire. Du moment qu'elle ne parlait pas de Maël, ça irait pour moi, mais mon petit doigt me disait que cela n'allait pas se passer comme cela.

Très bonne idée. Par contre, ne compte pas sur moi pour trouver un sujet de conversation à moins que tu veuilles tout savoir sur mes derniers cours …

Je rigolais et attendais que la jeune femme engage la conversation. Elle semblait dans ses pensées et cela me rassurait, elle devait être aussi rêveuse que moi. Je m'amusais souvent à imaginer tel ou tel événement, comme le fait que je rencontrerai l'homme de ma vie dans quelques minutes tout simplement parce qu'il allait me rentrer dedans et ramasser mes livres, ou comme le fait que je décroche une super bourse pour aller étudier en Europe. Je ne manquais pas d'imagination de ce côté là. Finalement, Lou se mit à parler et me demanda ce que je lui trouvais. Inutile de dire son nom pour savoir de qui elle parlait, et je me retenais de soupirer. N'avait-elle que ça en tête ? Ce n'était pas qu'elle m'énervait, mais un petit peu, si ! S'énerver était un grand mot pour moi puisque je n'étais pas capable d'une telle chose, mais cela m'agaçait légèrement. Elle m'énonça quelques unes de ses qualités et déclara qu'il n'était qu'un démon, ou en tout cas que se dégageait de lui une aura démoniaque, et me répéta qu'il n'était pas fait pour moi. Surement qu'elle avait raison car depuis le temps, si nous étions faits l'un pour l'autre, il m'aurait abordée …

Écoute, ce n'est pas que je n'aime pas discuter avec toi, mais si c'est pour parler de ça, tu peux te relever et .. enfin .. partir. Je n'ai pas envie de me disputer avec toi, dieu m'en préserve, mais je ne vois pas tellement ce que tu lui trouves de si méchant ! Bien sûr tu le connais bien mieux que moi mais .. Pourquoi ne pas lui donner une chance de se repentir ? Tu le met à la sentence de mort sans retour possible, tandis que je lui offre une liberté surveillée. Si jamais relation s'établit entre nous, je te jure que je ne vais pas m'y jeter corps et âme et que je vais oublier tout ce que tu m'as dit à son sujet … Mais je ne vais pas m'éloigner de lui si tu me le demandes. Après tout, même si j'ai confiance en toi, peut-être que ton avis est lui même embrouillé par les sentiments que tu éprouvais pour lui et qui t'ont fait mal lors de votre rupture.

Je lui adressais un doux sourire. J'avais fait un petit discours et j'étais plutôt fière de moi, car ce n'était pas souvent que j'arrivais à m'exprimer aussi clairement pour une personne.

Je suis contente néanmoins que tu aies tellement d'intérêt en ma personne que tu trouves utile de me protéger contre une menace fantôme ..