Les cours, ça n’a franchement, jamais été ma tasse de thé. Cela fait bien des années que je récolte les mauvaises notes et que mes moyennes ne dépassent jamais le « D » voire le « C » quand j’ai un peu plus de chance. Enfin, vous allez probablement me dire que la chance n’a rien avoir là-dedans et c’est vrai, je m’en rends bien compte. Le travail que je fournis n’est pas suffisant, alors, si ma moyenne n’a jamais été excellente, je ne peux m’en prendre qu’à moi. Il y a plus d’une année maintenant, j’étais en tournée mondiale pour promouvoir mon dernier film. Je m’éclatais à signer des autographes à toutes ces personnes en admiration devant moi. J’étais là, à gagner un max de blé rien que pour entrer dans un centre commercial et signer une vingtaine d’autographes, ma vie était bel et bien différente d’aujourd’hui. Je ne peux cependant pas dire qu’elle ne me plait pas, au contraire. La vie d’acteur renommé mondialement est quelque chose de fabuleux, j’ai d’ailleurs toujours rêvé d’augmenté ma popularité à l’échelle mondiale, but que j’ai atteint avec succès. Désormais, je suis redevenu l’étudiant que j’étais il y a plusieurs années, c’est un mode de vie complètement différent mais pas plus mal non plus. Certes, on voit souvent les bons côtés que porte la vie d’une star, mais croyez-moi, il y a aussi de nombreux désavantages dont vous n’avez la connaissance. Je n’ai pas complètement lâché les strass et les paillettes. Désormais, je suis devenu mannequin pour une très grande marque : Hemerson.

D’ailleurs, je venais de sortir de mon cours de biologie et je devais traverser le parc du campus pour me retrouver au parking. Je venais de terminer ma journée de cours et rien que d’y penser, cela me faisait plaisir. Il m’arrive parfois de me demander pourquoi est-ce que j’ai repris les cours, et c’est là que je me souviens que si je veux parvenir à mon autre rêve : devenir le plus grand chirurgien plastique de la Californie, il faut bien que j’obtienne mon diplôme. Je sais, ce n’est pas avec mon « D » que je vais l’obtenir mais quand ce sera le moment, je mettrai tous les moyens en œuvre pour y arriver. Je ne suis pas une flemme, malgré ce qu’on peut penser en me voyant pour la première fois. Je suis une personne déterminée et quand je veux quelque chose, peut importe quoi, je l’obtiens toujours, quel qu’en soit le prix à payer.
Tout en marchant sur l’herbe fraîchement coupée du parc, je remarquai une grande affiche de publicité juste devant moi. Cela me fit sourire puisque j’apparaissais dessus en gros plan. On y voyait la partie haute de mon corps et juste à côté, il y avait Heavynne, ma partenaire dans ce monde de la mode, et fille de la fondatrice de la marque Hemerson par la même occasion. Je me regardai, histoire de vérifier si l’impression de l’affiche avait été autant appliquée et minutieusement contrôlée comme nous, mannequin nous le sommes, puis, je regardai Heavynne. Elle était toujours autant magnifique et ce sourire me faisait craquer, comme il l’avait fait dès le premier instant où je l’avais rencontré, bien que je l’aie d’abord prise pour une autre…

J’étais totalement perdu dans mes pensés, quelques bouquins à la main, j’arrivais bientôt à ma voiture, une belle Pontiac noire des années seventies. Mon chauffeur avait insisté pour passer me prendre à la fin des cours mais j’avais refusé, préférant à la place lui donner son jour de congé et pouvoir reprendre un peu le volant. Ça faisait un moment que je n’avais pas eu l’occasion de conduire ma sublime voiture. Voiture que j’ai du racheter à un prix exorbitant puisqu’on m’a volé la mienne il y a quelques mois et que, par la même occasion, on a totalement détruit. Autant dire qu’à l’appréhension de cette nouvelle, j’aurais pu commettre l’irréparable sur ces personnes qui ont osé s’en prendre de la sorte à une voiture de collection aussi fabuleuse. Enfin bref, le sujet n’est pas là. J’avais donc l’esprit occupé et c’est sûrement à cause de cela que je ne vis pas cette jeune fille sortir des arbres et se diriger vers moi, me rentrant dedans. Je rattrapai la jeune blonde par la bras afin d’éviter qu’elle ne tombe puisque le choc lui avait fait perdre son équilibre. Je la relâchai immédiatement après avoir constaté qu’elle tenait sur ses deux jambes puis j’ajoutai :

▬ « Désolé mais c’est plutôt toi qui devrais faire attention. On s’attend pas vraiment à ce que quelqu’un, de plus une fille fragile sorte d’un buisson ! »

Je ne voulais pas dire ça d’une façon méchante ou méprisante c’est pourquoi j’utilisai un ton sympathique et plutôt ironique. En effet, il ne m’est encore jamais arrivé de croiser le chemin de qui que ce soit par ici. D’accord, derrière ses buissons ce cache un petit banc en bois, banc que j’ai déjà eu l’occasion de teste pour autre chose que pour m’assoir, si vous voyez ce que je veux dire… bref ! Mise à part ça, c’était elle la fautive dans l’histoire !

La réplique que je venais de lui faire, n’allait, pour moi, pas dans un sens méchant. Du moins c’était ce que je me forçais de penser parce qu’au fond, j’ai oublié que cette jeune femme ne me connait pas. N’importe lequel de mes amis proches aurait compris que l’insertion de ces quelques mots « fille fragile » n’était en fait pas un motif pour blesser qui que ce soit, c’était d’ailleurs tout le contraire. Je cherchais plutôt à plaisanter et à faire un peu d’humour mais ça, évidemment, elle ne pouvait le comprendre. De plus, lorsque je fais une blague, il est autant difficile pour mes amis que pour mes proches de différencier mes propos. Sont-ils faits pour rigoler ou blesser ? C’est vrai que j’ai tendance à dire les choses spontanément, même ce que je ne pense pas du tout. D’ordinaire, j’arrive toujours à trouver une certaine astuce pour amener les gens à comprendre que je suis en train de plaisanter, mais là, ça n’avait pas été le cas, alors, normal qu’elle s’emporte, j’en aurais probablement fait de même, c’est d’ailleurs sûr et certains.
Alors que la jeune femme venait de me traiter d’idiot comme les autres, je voulu me justifier mais elle ne m’en laissa malheureusement pas l’opportunité. Je n’eus le temps d’articuler que quelques mots avant qu’elle se reprenne et s’excuse, plus au moins. Disons à sa façon. Elle prétexta de la fatigue, et franchement, je n’y fis pas plus attention. Elle s’était excusée, c’était ce qui comptait, bien que je suis plutôt le genre de garçon rancunier sur certains points, je décidai de ne plus y prêter attention. Après tout, j’étais d’une part responsable vu que je l’avais traité de fille fragile.

▬ « Je ne connais pas d’autres grands mannequins à l’université donc j’imagine que c’est bien moi oui. D’accord, je n’y manquerai pas, sauf si tu me fais penser au contraire. » rigolais-je.

J’ai toujours eu du mal à vouvoyer les gens et là, c’était carrément impossible. D’ailleurs, je me demandais pourquoi est-ce qu’elle me vouvoyait. Elle devait forcément savoir que j’ai le même âge qu’elle ou quelques années de plus, je n’en sais rien. Mais en tout cas, une chose est certaine, c’est qu’elle a déjà du entendre parler de moi puisqu’elle m’a reconnu. Enfin, reconnaître est un grand mot. Elle savait cependant que je suis un mannequin, je ne sais pas si c’est mon visage qui lui rappelle quelque chose ou parce qu’on lui a, un jour, montré qui j’étais en réalité.

▬ « Enchanté de faire ta connaissance Elena. Je suis Thomas Johansten. J’ai tourné dans deux films et maintenant je suis mannequin, l’égérie de la marque Hemerson. »

J’avais cette étrange impression d’avoir déjà eu l’occasion de voir son visage quelque part mais je n’arrivais pas à me remettre cette tête. C’est alors qu’elle m’annonça que elle aussi, faisait partit de ce monde de strass et de paillettes. Je pensais être le seul mannequin à Berkeley, avec Heavynne bien entendu, et bien je m’étais trompé. Je reconnu alors instantanément son visage. Je l’avais vu dans un magasine de mode où certains vêtements d’Hemerson avaient aussi été incorporés. Il y avait entre autre cette photo que j’avais fait avec Heavynne, devant le lac de Berkeley. J’étais assis sur un rocher, des lunettes de soleil sur le nez et Heavynne, juste au dessus de moi, passant sa main sur mon torse. Un cliché que beaucoup de magasines ont apprécié et nous ont acheté pour différents articles. Je suis d’ailleurs très fier de cette photo même si ce n’est pas moi qui l’ai prise.
Je pensais échanger encore quelques mots avec la jeune femme mais celle-ci ne sembla pas du même avis. Elle s’excusa une nouvelle fois puis repris son chemin. Elle fit quelques pas avant de s’arrêter net et repartir en arrière. Apparemment, elle se dirigeait à nouveau vers les buissons d’où elle était sortit auparavant. Je la regardai se glisser entre ceux-ci jusqu’à ne plus l’apercevoir. Par contre, j’entendis sa petite question quelques instants plus tard qui montrait clairement qu’elle avait quelques difficultés. Je me rapprochai alors de l’endroit quand je la vis, les cheveux coincés dans le branchage. Je ne pus m’empêcher de rigoler.

▬ « Tu as besoin d’aide peut-être ? Tu sais que si j'étais un idiot comme les autres, je te laisserais probablement là, toute seule ? » souris-je.

Je n’attendis pas réellement une réponse de sa part, je pense qu’elle ne serait de toute manière pas prête à avouer avoir besoin d’un coup de main, surtout venant de ma part, après ce que je lui avais dit précédemment. Je me penchai légèrement, déposant mon sac sur le sol puis je lui tirai délicatement les cheveux des branchages sans pour autant lui faire mal, ou du moins, j’essayai.

▬ « On peut pas dire que tu sois très douée ! » rigolais-je.