" Finalement, je crois que je vais aussi prendre un sandwich" // FREE

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Lewis par contre, franchement débarqué de ses voyages dans la terre entière n'avait pas été prévenu du niveau culinaire du self de Berkeley, et, même s'il avait été habitué à manger uniquement des pommes des jours durant parfois, en arrivant devant les plats remplit du menu du jour de la cantine, il se prit à vouloir repartir en pleine nature. Car évidemment, quand on est vadrouilleur comme l'est Lewis, on est aussi écolo, et le poulet cuit qu'il voyait en face de lui là n'avait surement pas été élevé dans une basse-cour, et nourri aux grains naturels. Non. Il avait plutôt une tête de poulet sans pattes élevé dans des minuscules cages serré contre ses congénères sans plumes devenus aveugle à cause de la mort-au-rat avec laquelle on les nourrissait. Lewis ouvrit de grands yeux en découvrant les carottes supposées accompagner la viande, et capitula en découvrant le dessert au gout fraise chimique. Il abandonna son plateau sur une table et chercha desespérément des yeux quelqu'un qui éventuellement avait apporté de la bonne bouffe faite maison. Et au lieu de quelqu'un, ce fut quelque chose qui attira son attention: la sandwicherie. Il pria pour que ce ne soit pas des sandwich caotchouteux remplits avec de la viande humaine, et se plaça dans la queue. De toute manière, il avait un trou de trois heures pour manger, et faire la queue deux fois trois quart d'heure pour finalement se décourager devant des bouts de carton devait surement être bénéfique. Mouais.

Au bout d'un quart d'heure, l'estomac de Lewis commença un véritable solo assez embarassant; heureusement, le début de ses prouesses musicales coincida avec l'ennui profond d'Auxane. Lewis posa la main sur son estomac qui étrangement se calma, un peu comme un chat qu'on caresse, et leva le nez vers la chevelure de la demoiselle devant lui. Elle sentait bon. Une odeur d'ambre qui était familière à Lewis. Il resta là à l'écouter, la main toujours posée sur son ventre, un demi sourire aux lèvres, les yeux rivés à terre, pour s'occuper. Décidemment, il faisait ce qu'il pouvait pour passer le temps. De loin, il essaya vainement de voir la tête qu'avaient les sandwiches, ayant remarqué des éclairs rouges et verts qu'il supposait être des pommes; évidemment, il n'en savait rien et n'en aurait la confirmation que quand il arriverait au comptoir: à force d'avoir lu en cachette dans son lit la nuit, petit, il était devenu myope comme une taupe, et refusait catégoriquement de porter des lunettes sans vraiment savoir pourquoi. Il plissa les paupières, sans cesser d'écouter le murmure apaisant qu'émettait Auxane, en se sentant légèrement étrange, à l'écouter, comme ça, sans la connaitre ni même lui parler.

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Lewis eut un léger sursaut quand la jeune femme devant lui se retourna pour lui parler. D'abord parce qu'à force de rester comme ça, penché à écouter sa chansonnette le regard dans le vide, il s'était laissé partir dans d'autres contrées de son esprit, ensuite parce qu'elle était particulièrement jolie. Sans la trouver horrible de dos (il est dur de juger la beauté de quelqu'un en le voyant habillé et de dos), il l'avait pensée banale, chatain clair, habits simples - bref, normal pour être dans le self d'une université, il n'avait pas pensé découvrir ce joli visage de renard, ces yeux verts très vif, cette mélancolie cachée au fond. Donc, sans vraiment écouter ce qu'elle lui avait dit - un truc passionnant à propos de la bouffe de la cantine - il se mit à sourire bêtement. Une fois qu'il eut compris qu'éventuellement, il pouvait cesser de ressembler au Ken de Barbie et réagir de façon humaine, il hocha la tête, et récupera un sourire un peu plus civilisé. Il passa la main dans ses cheveux, et croisa les jambes (oui, debout, c'est possible). Il se prit à être plutôt content d'être myope et non astigmate. Puis il se tourna vers l'énorme plaque chauffante du self sur lequel se cotoyaient des endives cuites et trempées, du poulet qui n'avait probablement jamais vu le soleil, des oeufs aux couleurs douteuses, puis se retourna vers Auxane. Oui, pas de doute, ils étaient là pour la même raison.

'Affirmatif. Moi qui pensait que cette université était bourrée de fric...Je m'attendait à avoir du caviar, et tout...M'enfin. Une pomme, c'est très bien aussi. Je m'appelle Lewis, et j'ai faim.'

Il se rendit compte de l'absurdité de sa dernière phrase de présentation après l'avoir dite. Ca lui avait semblé logique de dire ça dans la continuité pour justifier les solos de gémissement de son ventre qui devenaient de plus en plus régulier, mais c'est vrai qu'après coup, se présenter à une fille superbe en disant j'ai faim semblait un peu déplacé. Puis il se rappela qu'il était de toute façon déplacé et que comme ça ça lui annoncerait la couleur et se retint de tendre la main. L'imbécile de devant et sa blondasse avancèrent de trois centimètres dans la queue, comme si ça faisait véritablement avancer les choses, et il gloussa comme un adolescent prépubère. Lewis se demanda cinq secondes ce qu'il foutait là, puis, pour se consoler, fit un charmant sourire d'enfant qui attend son quatre heures à Auxane.

'Cap ou pas cap d'aller embrasser cet imbécile fini, franchement...'

Dit-il en pensant à voix haute, sans vraiment s'adresser à Auxane. Les cap ou pas cap, c'est marrant quand on s'ennuie, mais bon, pour un premier et en plus avec une personne qu'on connait pas c'est vraiment...Répugnable, gore, hardcore, et d'autres mots aux consonances sympathique.

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