J’étais tranquillement en train de relire quelques pages de cours. Il fallait que je me mettre sérieusement à les apprendre. Je ne me faisais pas trop de soucis, je les saurais pour les examens. Mais si je devais travailler au dernier moment, je ne pourrais plus sortir et cela ne me plaisait pas. Je n’étais pas un Oméga pour rien, j’avais besoin de mes sorties pour m’éclater un peu.
J’avais passé une journée très tranquille. En fait, hormis les deux heures où j’étais sorti courir, puis boire un Starbucks en rentrant à pied, j’étais resté ici. Je savais que ma chambre devait être un peu en bazar. Mon bureau était invisible sous la pile de papiers empilés un peu au hasard dessus. Quand j’allais me remettre à mon devoir, j’allais d’abord devoir chercher toutes mes feuilles de brouillon qui étaient susceptibles d’avoir disparu au milieu de mon courrier et de tout le reste. Cela me donnait une de ces flemmes. C’était la raison pour laquelle je lisais, vautré sur mon lit, une tasse de café à portée de main.
Mes pensées avaient quelque peu dérivé des cours de droit alors que mon portable avait vibré dans ma poche. C’était Elzbieta. Encore. Je ne savais plus où j’en étais avec elle et on avait prévu de se faire une sortie plus tard dans la semaine. Mais je n’avais aucune idée de si cela pouvait aller plus loin. Je ne savais pas si j’étais prêt à lâcher prise encore une fois. J’avais déjà vécu deux ruptures douloureuses qui m’avaient vacciné à tout jamais, le pensais-je, des histoires d’amour. Mais il y avait cette jeune femme qui était pétillante et qui me faisait rire. On s’entendait tellement bien qu’on passait nos journées à échanger des SMS. Mais ce problème n’était pas important. Je ferais un choix le jour où j’aurais à le faire.
Je fus sorti de mes pensées par un bruit sourd. Quelqu’un venait de toquer à ma porte. Je me redressais et me levais. Je posais mes feuilles de cours sur le bazar de mon bureau avant d’aller ouvrir. Et lorsque la porte s’effaça de mon champ de vision, j’eu la merveilleuse surprise de découvrir Maëlle devant moi. J’eu un sourire. J’étais tellement content de la revoir. Je ne savais pas qu’elle était revenue en ville. Mais depuis quand ? Elle avait certes dit qu’elle le ferait quand j’étais allée la voir en août mais je ne savais pas que c’était chose faite.
« Maëlle ! Ca va. Et toi ?? »
Elle entrait dans ma chambre. « Non. Tu ne me déranges jamais, tu le sais bien. Excuse-moi pour ce bazar, mais je n’attendais pas de visite. J’aurais rangé sinon. »
Elle guetta autour d’elle si elle apercevait une autre personne que moi. Mais il n’y avait personne. Elle me connaissait bien. J’étais du genre à ramener des filles ici, assez régulièrement. D’ailleurs, une de mes amies avait fait une crise de jalousie. Mais elle aussi avait disparu de ma vie. Maëlle n’était pas comme ça. Elle savait bien comment je fonctionnais. Et pour elle, j’aurais viré de ma chambre la plus sexy des partenaires. J’étais toujours présent pour ma meilleure amie. Même si je n’avais pas toujours assuré avec elle.
« Je suis content que tu sois de nouveau à San Francisco ! Cela fait longtemps que tu es revenue ? » demandais-je avant de m’avancer vers elle pour la prendre dans mes bras et ainsi exprimer ma joie de la revoir.
Elle s’installa sur mon lit et commença à m’expliquer que James avait disparu et qu’elle se trouvait dans l’impossibilité de lui annoncer sa grossesse. Je trouvais cela dommage qu’il ne soit pas là pour Maëlle alors qu’elle avait besoin de lui. Mais d’un autre côté, cela faisait quelque temps que je me demandais si la flamme du départ était toujours vivante entre elle et son milliardaire de petit ami. Je n’avais posé aucune question à ce sujet. Si Maëlle avait voulu m’en parler, elle l’aurait fait, elle savait que j’étais là pour elle. Mais j’en voulais à James d’avoir abandonné Maëlle après l’avoir mise dans cette situation… « Je suis toujours resté correct avec lui parce que tu l’avais choisi et qu’il semblait te rendre heureuse. Mais te laisser comme cela, ce n’est pas vraiment un comportement digne d’un homme… » C’était la seule chose que je pouvais dire sans devenir méchant avec son –désormais- ex petit ami.
Après qu’elle ait baissé puis relevé la tête, je me rendis compte qu’elle avait changé depuis la dernière fois. Elle était beaucoup plus sûre d’elle. Cela faisait plaisir à voir. Elle m’invita à m’installer sur mon lit et je pris place juste à côté d’elle.
« Ben y a trop rien à raconter. Quand je suis revenu ici après t’avoir vu, les cours étaient sur le point de commencer. Et depuis je suis retourné à ma vie d’étudiant Oméga. Je vais en cours, je travaille et je sors beaucoup. Je projette l’idée de partir dans un pays étranger pour noël, avec Bony, pour fuir le traditionnel repas familial dans la demeure familiale de mon géniteur au Texas. »
Je me tournais vers elle et souris à l’entente de sa question. « Non, tu me connais. Je cours après toutes les filles ou plutôt l’inverse d’ailleurs. Avec ma gueule d’ange, elles sont ravies de capter une seconde de mon attention alors pourquoi j’en choisirais une seule ? » C’était ma philosophie de vie depuis un certain temps d’ailleurs. « Cependant… » Mais je me trouvais stupide d’évoquer Elz alors je laissais ma phrase en suspens. « Non, oublie, c’est pas important

Spoiler:

Quand je me rendis compte que l’histoire d’amour entre James et ma meilleure amie était sans doute finie, je ne savais pas trop comment réagir. Je n’avais jamais vraiment apprécié James. Enfin, si, au départ, j’avais bien voulu l’accepter et être gentil avec lui. Il ne m’avait rien fait. Mais la façon dont il avait traité ma meilleure amie me l’avait rendu plutôt désagréable. Et je n’avais plus rien fait pour nous nous entendions. J’avais cessé de faire des efforts. Et ce n’était sans doute pas juste pour lui. Mais par son comportement, tant avec Maëlle qu’avec moi, je ne pouvais pas l’apprécier. Cela dit, je n’avais jamais exposé mes vrais sentiments à son égard à la texane, je ne voulais pas briser son histoire ou la blesser. Maintenant qu’il n’était plus là, je ne savais trop quoi faire. Au moins, son influence ne se ferait plus sentir sur ma meilleure amie. Elle ne vivrait plus dans ce château sinistre. Elle serait au milieu de la ville, entourée de vie. Et je serais là pour elle. Je voulais qu’elle soit heureuse. Mais j’étais triste pour elle qu’elle n’ait pas trouvé un vrai prince charmant alors même qu’elle vivait dans un château. Je voulais qu’elle vive une belle histoire et cela n’avait pas été le cas avec James. Certes, elle l’avait aimé et ils avaient eu de bons moments.
Quand Maëlle demanda des nouvelles de Bony, je souris. Je pensais à la dernière fois que j’avais passé un long moment avec elle. Cette fameuse fois où on avait fait un tas de bêtise dans un hôpital. Elle était vraiment en forme cette nuit-là. Il en fallait bien une sur nous deux. Après tout, la morphine m’avait fait un drôle d’effet. J’étais devenu idiot… « Tu sais, elle va bien. Elle fait son petit bonhomme de chemin, traumatise tout le monde. On a fait une drôle de bêtise tous les deux la dernière fois. Je n’en suis pas fier ceci dit. Mais j’étais shooté à la morphine alors je ne suis pas responsable de nos actes. »
Je pensais à ce pauvre petit vieux. J’espérais sincèrement qu’il n’avait pas fini à la morgue. Bony n’avait rien trouvé de mieux que de lui placer une étiquette autour de l’orteil, comme pour les morts, alors qu’il était bien vivant. On avait aussi dévalisé les cuisines de l’hôpital. Elle m’avait trainé, en fauteuil roulant, dans tout l’hôpital.
« Mais ce n’est pas dangereux pour toi de prendre l’avions pour retourner au Texas ? » Comme elle était enceinte, je m’inquiétais un peu. Mais j’étais soulagé qu’elle ne passe pas les fêtes de noël seul. Et puis, elle verrait son père. Je savais que lorsqu’elle était en Californie, il lui manquait.
Elle parla d’une meute de louves affamées pour expliquer ma situation de célibataire endurci. « Je n’apprécie pas vraiment l’image mais c’est l’idée. Tu n’imagines pas le nombre de filles qui sont prêtes à se jeter à mes pieds. Parfois elles me sautent dessus alors que je n’ai rien demandé du tout. Mais je trouve cela amusant. Et je veux en profiter au maximum, plutôt que de me fixer définitivement. »
En parlant de filles se jetant sur moi, je ne pus que me rappeler la façon dont j’avais fait la connaissance d’Elzbieta. Elle m’avait sauté dessus, littéralement, pour m’embrasser. Elle n’avait gardé aucun souvenir de ce moment. Et on était devenus amis par la suite. Maintenant, je ne savais pas vraiment ce qu’on était.
« D’accord, d’accord. Je suis démasqué. L’année dernière j’ai rencontré une fille en soirée, elle m’a embrassé. Mais elle ne s’en souvient pas. Je l’ai recroisée plus tard et elle était en Grèce avec moi cet été. Je ne sais pas trop. Je l’apprécie beaucoup et je ne veux pas tout gâcher en tentant une histoire d’amour avec elle. Mais je t’avoue que ça me tourne en tête depuis quelques semaines. On doit se voir la semaine prochaine, petite sortie au restaurant. Je me demande ce qui va en sortir. Tu me connais, je suis un flippé de l’engagement. Mais en même temps, vu comment se sont terminées mes histoires sérieuses… Je ne veux pas placer mes espoirs dans une fille, si c’est pour qu’elle fuie ensuite à la première occasion. »
C’était la première fois que j’évoquais mes sentiments avec Maëlle. J’avais en général plutôt tendance à les oublier. Enfin, à les laisser loin de mes pensées. J’espérais qu’elle comprendrait ce que je pouvais ressentir. D’un autre côté, elle me connaissait par cœur, donc c’était probablement qu’elle comprenne. Je me demandais ce qui m’était passé par la tête pour parler de cela.

Oups… Quand je me rendis compte que Maëlle n’avait pas été mise au courant de mon rapide passage à l’hôpital, je m’en voulu de l’avoir mentionné. Si elle l’avait su, cela aurait été qu’une piqure de rappel et cela n’aurait pas porté à confusion. Mais c’était vrai que mon passage aux urgences correspondait aussi au moment où elle était retournée au Texas. Et puis, on s’était disputés. « Oui hospitalisé. » Je me sentais mal de ne pas l’avoir prévenu. « C’était vraiment une histoire idiote Maëlle. Trois fois rien d’accord ? Juste une entorse et une espèce de commotion cérébrale qui n’en était pas vraiment une au final. »
Bon, si j’étais allé à l’hôpital initialement c’était en me disant qu’elle serait probablement là-bas et qu’elle pourrait m’aider. Mais elle ne l’avait pas été. Sinon elle m’aurait empêchée de délirer sur la messagerie de Bony, la conduisant à se pointer dans un lieu qu’elle détestait par-dessus tout. « C’était rien d’accord ? J’ai voulu faire le boyscout, encore, et je me suis peut-être battu avec un gars ou deux… » pas la peine de lui dire que c’était en fait un gang qui nous avait encerclé, moi et une amie. « J’étais en train d’aider une association à distribuer des paniers repas aux défavorisés. Et j’ai aperçu une connaissance donc on s’est éclipsé tous les deux. Et on s’est fait embêter. J’ai voulu la défendre et voilà… J’ai pas voulu aller à l’hôpital tout de suite. Mais j’ai fini par m’y rendre parce que j’avais vraiment mal à la tête et les idées qui commençaient à s’embrouiller. » Et la morphine n’avait pas vraiment aidé à les éclaircir. « Maëlle, c’était tellement rien que j’ai pris l’avion trois jours plus tard pour aller en Grèce. Ce n’est pas la peine de t’inquiéter. C’est du passé maintenant. Je ne te l’ai pas dit parce que tu avais d’autres choses à penser. » Et puis, j’étais un grand garçon. Et je savais désormais que prendre de la morphine n’était pas une bonne idée. Et encore moins quand j’appelais ensuite ma grande sœur. Elle avait profité de mon état pour me faire faire des bêtises.
Maëlle m’écouta aussi parler de mes déboires sentimentaux. Nous n’avions pas le même point de vue et sa vision des choses était rafraichissante. Je ne pouvais pas vraiment parler de cela avec Bony. C’était bien connu qu’elle ne s’attachait pas aux garçons –sauf moi – mais elle avait perdu son mari de façon tragique quand elle était plus jeune et cela l’avait marquée. Et moi, j’avais été trop blessé. Maëlle était plutôt romantique. Elle voyait le bonheur plutôt que le risque que tout parte en vrille à la seconde où j’abandonnerais ma retenue avec Elzbieta. Je ne savais pas si je pouvais être heureux avec elle. Et j’avais peur de me retrouver seul une fois encore. Pour certaines choses, j’avais plutôt tendance à foncer comme un dingue. Mais en amour, je n’étais jamais sûr de moi.
« Tu sais bien que c’est plus compliqué que cela. Après avoir perdu Cameron, je me suis promis de ne plus m’attacher autant à quelqu’un pour ne pas ressentir à nouveau la douleur de la perte. Tu sais comme j’ai eu du mal à me remettre de cela. Si je saute le pas avec elle, que je m’attache et qu’ensuite elle part ? » Mais dans le fond, je me disais qu’elle avait peut-être raison. Simplement, je n’aimais pas mettre mon avenir dans les mains de quelqu’un d’autre. Cela voulait dire que je ne maitrisais pas vraiment pas vie. Si Elz me prenait mon cœur et qu’ensuite elle le brisait, je ne savais pas comment j’allais remonter la pente. Oui, je voyais peut-être le pire de partout. Mais j’avais vécu le pire plusieurs fois déjà et je ne voulais pas que cela m’arrive à nouveau. Et songer à mon jumeau n’aidait pas vraiment. Mais j’imaginais assez bien le conseil qu’il m’aurait donné. Je le connaissais par cœur. Il m’aurait dit de foncer. Qu’on n’avait qu’une seule vie et qu’il fallait en profiter.
« Je ne sais pas ce qu’elle en pe.. » Et je m’arrêtais à ce moment. Muet. Maëlle avait toujours su doser ses effets. « Tu veux que je sois le parrain de ton bébé ? » Je n’en revenais pas. J’avais le même sourire que lorsque j’avais cinq ans et que c’était Noël. Pour ce bébé j’étais prêt à retourner au Texas avec sa maman. Pourtant, j’évitais cet Etat du pays plus que n’importe quel autre.